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11/12/2013 | FRANCE | N°10/10685

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 11 décembre 2013, 10/10685


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 11 Décembre 2013



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/10685



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 20 Octobre 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° 07/06790





APPELANT

Monsieur [I] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Slim BEN AC

HOUR, avocat au barreau de PARIS, C1077 substitué par Me Juliette BOURGEOIS, avocate au barreau de PARIS





INTIMÉE

S.A.R.L. REGICOM

[Adresse 3]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 11 Décembre 2013

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/10685

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 20 Octobre 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° 07/06790

APPELANT

Monsieur [I] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Slim BEN ACHOUR, avocat au barreau de PARIS, C1077 substitué par Me Juliette BOURGEOIS, avocate au barreau de PARIS

INTIMÉE

S.A.R.L. REGICOM

[Adresse 3]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Isabelle d'AUBENTON CARAFA, avocate au barreau de PARIS, G0421 substitué par Me Pauline PONGE, avocate au barreau de PARIS, G0421

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Octobre 2013, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Christine ROSTAND, présidente

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Monsieur Jacques BOUDY, conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIÈRE : Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Christine ROSTAND, présidente et par Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par contrat de travail en date du 25 septembre 2006, M. [I] [Z] a été embauché par la SAS Regicom en qualité de directeur commercial.

Cette embauche était réalisée dans le cadre de la mise en place d'une nouvelle structure commerciale, dénommée « Top Impact », qui donnerait lieu à la création d'une nouvelle société.

Le contrat indiquait que les relations contractuelles avaient pris effet, antérieurement, c'est-à-dire à compter du 10 juillet 2006 et qu'il existait une période d'essai d'une durée de trois mois.

Ces relations contractuelles étaient soumises à la convention collective de la publicité française.

La période d'essai a fait l'objet d'un renouvellement à compter du 9 octobre 2006.

Le 8 novembre 2006, la SAS Regicom a décidé de mettre fin au contrat de travail.

Considérant notamment que la période d'essai au cours de laquelle l'employeur avait rompu les relations contractuelles ne lui était pas opposable, que la rupture devait donc s'analyser en un licenciement sans cause réelle ni sérieuse et qu'il lui était dû diverses sommes, M. [I] [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris.

Par jugement en date du 20 octobre 2010, celui-ci a condamné la SAS Regicom à lui payer la somme de 18 677,86 € à titre de solde d'indemnité de non-concurrence et 1 867,78 € au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation.

Il a également alloué à M. [I] [Z] la somme de 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile et l'a débouté du surplus de ses demandes.

C'est dans ces conditions qu'il en a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception expédiée le 12 décembre 2010.

Devant la cour, M. [I] [Z] conclut à la condamnation de la SAS Regicom à lui verser les sommes suivantes :

- 50 649,99 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 5064,99 € au titre des congés payés afférents

- 100 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse

- 45 000 € à titre de rappel de primes sur objectifs et 4 500 € au titre des congés payés afférents, subsidiairement, 28 333 € et 2 833,33 €

- 16 883,33 € à titre de rappel de salaire pour la période du 12 juin au 10 juillet 2006 et 1 688,33 € au titre des congés payés afférents, subsidiairement 5 627,77 € à titre de rappel de salaire pour la période courue entre le 30 juin et le 10 juillet 2006, outre 562,77 € au titre des congés payés afférents

- 120 000 € au titre de l'indemnité de non-concurrence et 12 000 € au titre des congés payés afférents et subsidiairement, les sommes respectives de 9 454,36 € et 945,43 €

M. [I] [Z] demande également que soit ordonnée la délivrance d'une attestation destinée à Pôle Emploi rectifiée conformément aux indications du présent arrêt

Il demande encore la condamnation de la SAS Regicom à lui verser la somme de 3 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

De son côté, la SAS Regicom conclut :

- à la confirmation du jugement en ce qu'il a estimé que la rupture du contrat de travail était intervenue en période d'essai et, subsidiairement, à la limitation des dommages et intérêts à la somme de 33 604,64 €, correspondant à l'intégralité des salaires perçus pendant l'exécution du contrat

- au rejet des demandes formées contre elle à titre de rappel de primes et, subsidiairement, à la limitation du rappel de primes à la somme de 3748,75 €, outre 374,87 € au titre des congés payés afférents

Elle demande également qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle a déjà versé la somme de 18 677,80 € au titre de l'indemnité compensatrice de non-concurrence, outre la somme de 1 867,78 € au titre des congés payés afférents

Elle réclame enfin la condamnation de M. [I] [Z] à lui verser la somme de 1 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la rupture des relations contractuelles

Le contrat de travail, signé le 25 septembre 2006, avec effet au 10 juillet précédent, prévoyait le versement d'un salaire brut fixe mensuel de 6 850 €.

Il était également prévu une clause de non-concurrence d'une durée de 24 mois et le versement d'une indemnité à ce titre, d'un montant de 1 500 € pendant 12 mois et que le salarié percevrait une avance sur les primes d'objectifs, non récupérable, d'un montant de 1 667 € bruts, jusqu'au 30 juin 2007.

Par ailleurs, il était stipulé la clause suivante :

« Les trois premiers mois seront considérés comme période d'essai au cours de laquelle chacune des parties pourra mettre un terme à cette collaboration sans indemnité ni préavis. Cette période d'essai pourra être renouvelée une fois à la demande écrite du salarié. En cas d'absence pour maladie ou autre cause, l'essai sera prolongé d'autant. À l'issue de la période d'essai, le préavis dû par les parties, à l'exclusion de licenciement pour faute lourde ou grave, sera de : trois mois. ».

Pour considérer qu'il a fait l'objet en réalité d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, M. [I] [Z] fait valoir que c'est à l'occasion de la signature du contrat de travail le 25 septembre 2006, qu'il a découvert l'existence d'une clause prévoyant une période d'essai alors qu'il n'en avait jamais été question auparavant et que par la suite, il a été contraint par l'employeur de solliciter lui-même le renouvellement de cette période d'essai.

De son côté, la SAS Regicom fait valoir qu'il est parfaitement possible de stipuler dans le contrat de travail une période d'essai même après que les relations contractuelles aient déjà commencé à s'exécuter, dès lors que la durée déjà exécutée est déduite de la durée de la période d'essai.

Que M. [I] [Z] a signé le contrat de travail en parfaite connaissance de cause et ne peut donc prétendre avoir ignoré l'existence de la période d'essai.

S'agissant du renouvellement de cette période d'essai, la SAS Regicom expose que celle-ci est parfaitement conforme à l'article 53 de la convention collective de la publicité française ainsi rédigé :

« La période d'essai sera de trois mois pour les cadres.

Pendant la période d'essai, les parties peuvent résilier le contrat de travail, sans préavis ni indemnité. La période d'essai ne sera pas observée lors d'une réintégration.

À la fin de la période d'essai, l'engagement est définitif.

Toutefois, le salarié dont l'engagement ne se trouverait pas confirmé, à l'expiration de la période d'essai, pourrait, avec l'accord de son employeur, bénéficier d'une prolongation de cette période d'essai, pour une seule et même durée, à la condition qu'il en fasse lui-même la demande par écrit. ».

La SAS Regicom soutient qu'il ressort des pièces versées et en particulier, de différents échanges de courriers électroniques, que l'engagement de M. [I] [Z] n'étant pas confirmé à l'issue de la période initiale de trois mois, celui-ci a donc sollicité le renouvellement de sa période d'essai en lui remettant le 9 octobre 2006, un courrier manuscrit en ce sens, conformément à ce que prévoit la convention collective.

Que contrairement à ce qu'il affirme, il n'apparaît nullement qu'une contrainte quelconque ait été exercée à son égard.

L'existence d'une période d'essai doit nécessairement, comme l'ensemble des stipulations du contrat de travail, être convenue, d'un commun accord entre l'employeur et le salarié, préalablement à son exécution.

S'il est exact que d'une façon générale, la formalisation, au moyen d'un écrit, des dispositions contractuelles peut être postérieure au début des relations contractuelles, l'article L 1221-23 du code du travail dispose néanmoins que la période d'essai et la possibilité de les renouveler ne se présument pas et qu'elles sont expressément stipulées dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail.

Or, en l'espèce, l'employeur ne peut démontrer qu'une période d'essai avait bien été convenue avant que ne débute l'exécution du contrat de travail de sorte que l'indication d'une telle clause a posteriori était sans effet.

Au demeurant, à supposer que la période d'essai initiale ait été valablement convenue, il est établi par les pièces versées au dossier que son renouvellement a été imposé au salarié.

En effet, dans un message électronique en date du 6 octobre 2006, adressé au directeur général délégué, ayant pour objet le renouvellement de sa période d'essai, M. [I] [Z] lui indiquait : «(...) Te propose de discuter de cela calmement lundi car il ne sera pas trop tard étant arrivé le 10 juillet dans l'entreprise.

À titre d'info, nous n'avons jamais parlé de cela au préalable'

J'en ai parlé à [E] comme tu me l'as demandé et il n'est pas très chaud non plus et ce surtout compte tenu de notre implication, de la difficulté de notre job et des contraintes rencontrées auprès du réseau. Parlons-en lundi. Cordialement ».

Dans sa réponse, également par message électronique du même jour, le supérieur hiérarchique de M. [I] [Z] lui a indiqué : « on en parle lundi matin par tel, mais ce n'est pas négociable, c'est le deal de départ. Et je ne change pas les deals. ».

La convention collective sus-citée, sur laquelle s'appuie la SAS Regicom, prévoit seulement que le salarié peut prendre l'initiative de solliciter le renouvellement de la période d'essai lorsque l'employeur envisage de mettre fin aux relations contractuelles.

Autrement dit, il s'agit d'une possibilité qui est offerte au salarié de faire la preuve de ses compétences alors que l'employeur avait estimé que la période d'essai initiale n'était pas satisfaisante.

Il ne ressort aucunement des différentes pièces versées au dossier, et notamment des messages électroniques susvisés que l'on se trouvait dans cette hypothèse et que l'employeur avait fait connaître à M. [I] [Z] son intention de mettre fin aux relations contractuelles.

Il résulte en revanche clairement des messages électroniques échangés et rappelés plus haut, qu'alors que le contrat de travail ne prévoyait pas la possibilité pour l'employeur de proposer au salarié le renouvellement de sa période d'essai, celui-ci l'a contraint à le demander lui-même.

Cela est conforté par une attestation de M. [N], qui, le 2 juillet 2007, relatait :

« Fin octobre 2006, alors que nous partagions le même bureau à la régie nationale des titres de presse gratuite du groupe SPIR, M. [Z] a été sommé de demander lui-même le renouvellement de sa période d'essai, ce qu'il ne souhaitait pas faire.

M. [J], patron de la régie a mis une pression violente sur le sujet, le menaçant de le virer le jour même, ceci par mail, mais aussi en hurlant au téléphone.

Face à cette violente pression de dernière minute, M.[Z] n'a pas eu le choix et s'est exécuté...».

Il résulte donc de tout ceci que la rupture des relations contractuelles par l'employeur le 8 novembre 2006 ne pouvait obéir aux règles applicables en cours de période d'essai et devait nécessairement être soumise aux règles applicables en matière de licenciement.

Sur les primes sur objectifs

Il est constant que le contrat de travail prévoyait le versement d'une rémunération variable sous la forme de primes trimestrielles calculées selon un pourcentage du chiffre d'affaires réalisé.

Il était précisé que ces primes seraient versées, notamment, en octobre pour les résultats de juillet à septembre et en janvier pour les résultats d'octobre à décembre.

Il n'est pas contesté entre les parties que celles-ci avaient convenu d'un objectif à réaliser de 500 000 € de chiffre d'affaires pour le deuxième semestre de l'année 2006.

Faisant valoir qu'il avait atteint l'objectif fixé, M. [I] [Z] réclame le paiement d'une prime de 20 000 € au titre du troisième trimestre 2006, déduction faite des avances sur primes non récupérables de 1667 € par mois, et d'une prime de 25 000 € au titre du dernier trimestre de l'année.

Le contrat de travail prévoit d'une part, que les primes trimestrielles seraient « proratisées en cas d'absence dans le semestre considéré » et d'autre part, que dans l'éventualité du départ du salarié « pour quelque motif que ce soit (licenciement, démission et ce même pendant la période d'essai) les primes prévues au présent contrat cessent immédiatement (d')être dues et versées. ».

L'intimée en déduit que M. [I] [Z] ne saurait percevoir la prime du dernier trimestre 2006, qui n'était payable qu'au mois de janvier.

S'agissant de la prime du troisième trimestre 2006, payable en octobre, elle fait valoir que M. [I] [Z] n'avait pas atteint l'objectif qui lui était fixé, soit 250 000 € par trimestre ni même à hauteur de 60 % alors que les tableaux insérés dans le contrat de travail prévoyaient qu'il n'était dû aucune somme en dessous d'un seuil de 60 % de l'objectif.

Elle affirme aussi, que l'objectif ainsi fixé ne prenait pas en considération le chiffre d'affaires de la « régie Paris ».

À titre subsidiaire, elle fait observer que l'intéressé n'ayant débuté son travail que le 10 juillet 2006 et que s'étant trouvé en congé sans solde du 31 juillet au 19 août 2006, il conviendrait de procéder à un calcul au prorata temporis, ce qui représenterait 8 333 € dont il conviendrait de déduire les avances sur prime perçues pendant la période considérée.

Cependant, lorsqu'un un salaire variable est calculé en pourcentage d'un chiffre d'affaires réalisé par le salarié, le droit au paiement de celui-ci est définitivement acquis dès la réalisation de ce chiffre d'affaires qui en constitue le fait générateur, peu important que le paiement soit décalé dans le temps.

Il en résulte donc que l'employeur ne peut subordonner le paiement de ce droit à rémunération, définitivement acquis, à la présence du salarié à une date déterminée.

Pour les mêmes raisons, s'agissant d'un salaire, calculé uniquement en fonction du chiffre d'affaires réalisé individuellement par le salarié, l'employeur ne peut également décider que celui-ci ne sera versé qu'au prorata de sa présence.

Il est par ailleurs établi, au vu d'un document de présentation intitulé « comité client du 29 novembre 2006 » que le chiffre d'affaires réalisé à la fin du mois d'octobre 2006 était de 208 520 € et qu'il existait un chiffre d'affaires en attente de 352 466 €, de sorte qu'à la fin de l'année, était attendu un chiffre d'affaire global de 560 986 €.

La SAS Regicom ne conteste pas ces chiffres et ne démontre pas qu'il avait été prévu que le chiffre d'affaires que M. [I] [Z] devait réaliser, à hauteur de 500 000 €, devait s'entendre déduction faite du chiffre d'affaires réalisé par certaines entités telles que la « régie Paris ».

Par conséquent, il ne peut qu'être fait droit aux demandes de paiement formées par M. [I] [Z].

Sur les sommes dues en raison de la rupture du contrat de travail

Il résulte de ce qui précède que le salaire mensuel brut moyen de M. [I] [Z] devait comprendre le salaire brut fixe, soit 6 850 € et la prime sur objectifs, qui s'est élevée pendant toute la période considérée à 25 000 € par trimestre, soit 8 333,33 € par mois.

En revanche, ainsi que le fait observer à juste titre la SAS Regicom, il n'y a pas lieu d'inclure dans la définition de ce salaire mensuel brut moyen de référence la somme qui lui était versée à titre d'avance sur l'indemnité en contrepartie de la clause de non-concurrence.

En effet, cette somme, de nature purement indemnitaire, n'avait pas le caractère d'un salaire et de surcroît, elle n'était versée qu'à titre d'avance.

Le salaire moyen peut donc être fixé à la somme de 15 183,33 €.

Par conséquent, conformément à ce que prévoit l'article 2 du contrat de travail, M. [I] [Z] peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis d'un montant égal à trois mois de salaire, soit 45 549,99 €, outre la somme de 4 554,99 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférente.

En l'absence de toute motivation dans la lettre de rupture, qui vaut licenciement, celui-ci était nécessairement sans cause réelle ni sérieuse.

Par conséquent, M. [I] [Z] est fondé à réclamer une indemnité à ce titre, celle-ci ayant pour objet de réparer le préjudice subi.

M. [I] [Z] justifie que dans la mesure où la rupture, considérée par l'employeur comme une rupture durant la période d'essai, ne lui avait pas permis de bénéficier d'un préavis de trois mois, il ne s'est pas trouvé en mesure de justifier d'une période d'emploi minimale de 182 jours qui lui aurait permis de percevoir des allocations de chômage, de sorte qu'il a subi un manque à gagner important.

Il convient néanmoins de ne pas perdre de vue que, conformément à sa demande, une attestation destinée à Pôle Emploi sera rectifiée en ce sens.

M. [I] [Z] établit également qu'il s'est trouvé dans une situation financière particulièrement difficile, de sorte qu'il a dû emprunter à ses parents une somme de 80 000 € et que, pour les rembourser, il a été contraint de vendre un bien immobilier dont il était propriétaire.

Par ailleurs, s'il démontre avoir retrouvé un emploi de janvier 2010 à juin 2011, depuis le mois de décembre 2012, il ne percevait plus d'allocations de Pôle Emploi.

Compte tenu de ces éléments, il n'apparaît pas injustifié de lui accorder une indemnité d'un montant de 80 000 €.

Sur les rappels de salaire

M. [I] [Z] affirme qu'il a en réalité débuté l'exécution de son contrat de travail dès le 12 juin 2006, de sorte qu'il réclame le paiement d'un mois de salaire correspondant à la période courue entre cette date et celle à laquelle il a été officiellement embauché, le 10 juillet 2006.

Néanmoins, pour en justifier, il ne produit qu'un message électronique dont il résulte qu'il avait rencontré les membres du comité de direction de la société les 8 et 9 juin 2006, ce qui est insuffisant pour établir qu'il fournissait une prestation de travail au service de l'employeur.

En revanche, il ressort clairement d'un document relatif à une réunion qui s'est tenue le 28 juin 2006 qu'à cette date, M. [I] [Z] était, d'ores et déjà, présenté comme membre de l'équipe commerciale et marketing.

Cette circonstance laisse présumer qu'en effet, il avait déjà commencé à travailler pour l'employeur et ce dernier ne rapporte pas la preuve contraire.

Par conséquent, il y a lieu de faire droit à la demande subsidiaire de M. [I] [Z] tendant à voir verser un rappel de salaire pour la période courue entre le 30 juin 2006 et le 10 juillet 2006.

Il lui sera dû à ce titre, non pas la somme de 5 627,77 € mais celle de 5 061,10 €, outre les congés payés qui s'y rapportent.

Sur la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence

M. [I] [Z] fait valoir qu'alors qu'il était lié par une clause de non-concurrence d'une durée de 24 mois dont l'employeur ne l'avait pas délié, celui-ci ne lui a versé, à titre de contrepartie financière, que des avances de 1 500 € pendant quatre mois et s'est abstenu par la suite de tout versement.

Qu'au demeurant, le montant de cette contrepartie financière était dérisoire de sorte qu'il conviendrait de la fixer à 30 % de son salaire mensuel, soit 5000 € par mois.

Il considère que par conséquent, il devait percevoir, à raison de 24 mois de versement, la somme totale de 120 000 €.

À titre subsidiaire, il sollicite le versement d'une somme de 30 000 €, correspondant à 1 500 € pendant 20 mois dont il conviendrait de déduire les sommes déjà versées à la suite du jugement rendu par le conseil de prud'hommes.

Contrairement à ce qu'a estimé ce dernier, il n'y a pas lieu d'évaluer le montant de la contrepartie financière due par l'employeur à seulement 20 % du salaire fixe brut mais au montant prévu par le contrat, soit 1 500 € par mois.

Ce montant n'apparaît pas comme dérisoire et doit être retenu puisqu'en effet, il convient de le comparer non pas au salaire total susceptible d'être perçu par le salarié, en y intégrant la part variable de celui-ci, mais à son salaire fixe.

N'étant pas contesté que l'employeur n'a pas relevé le salarié de son obligation de non-concurrence et celle-ci ayant une durée de validité de 24 mois, il était dû, au total, la somme de 36 000 €.

Il convient d'en déduire la somme de 5 982,14 €, perçue par anticipation, en application du contrat de travail.

M. [I] [Z] peut donc prétendre au paiement de la somme totale de 30 017,86 €, sauf à déduire les sommes déjà versées par l'employeur en exécution du jugement rendu en première instance.

Il y sera ajouté les congés payés qui s'y rapportent.

Sur les intérêts au taux légal

En ce qui concerne l'indemnité compensatrice de préavis, les rappels de salaire et de primes sur objectifs, les contreparties financière à l'obligation de non-concurrence et les congés payés afférents, qui ne sont pas laissés à l'appréciation du juge, mais qui résultent de l'application de la loi ou de la convention collective, les intérêts des sommes accordées au salarié courent, conformément à l'article 1153 du code civil, au jour de la demande, c'est-à-dire à compter du 19 juin 2007, date de réception par la SAS Regicom de sa convocation devant le bureau de conciliation , qui vaut mise en demeure, et non de la date de la décision ayant déterminé leur montant.

Les autres sommes allouées à l'appelante étant de nature indemnitaire, les intérêts au taux légal ne courront qu'à compter du présent arrêt en application de l'article 1153-1 du Code civil.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Il n'apparaît pas inéquitable d'accorder à M. [I] [Z], qui a dû agir en justice pour faire valoir ses droits, une indemnité d'un montant de 3500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Paris en date du 20 octobre 2010 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la SAS Regicom à payer à M. [I] [Z] les sommes suivantes :

- 45 000 € à titre de rappel de primes sur objectif et 4500 € au titre des congés payés afférents

- 45 549,99 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 4554,99 € au titre des congés payés afférents

- 5 061,10 € à titre de rappel de salaire pour la période courue du 30 juin au 10 juillet 2006 et 506,11 € au titre des congés payés afférents

- 30 017,86 € à titre de contrepartie financière de la clause de non-concurrence et 3 001,79 € au titre des congés payés afférents, sauf à déduire les sommes déjà versées par l'employeur en exécution du jugement rendu en première instance

toutes ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du 19 juin 2007

- 80 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse

ORDONNE la délivrance d'une attestation destinée à Pôle Emploi précisant que la cause de rupture était un licenciement et une date de fin de contrat tenant compte d'un préavis de trois mois ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la SAS Regicom à payer à M. [I] [Z] la somme de 3 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 10/10685
Date de la décision : 11/12/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°10/10685 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-12-11;10.10685 ?
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