RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRÊT DU 10 Décembre 2013
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/00738
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Septembre 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire- de PARIS section encadrement RG n° 10/07257
APPELANTE
SAS SMAS TOURISME venant aux droits et obligations de la SAS LES MAISONS DE BIARRITZ VACANCES dite SNMDB
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Jacques DEBETZ, avocat au barreau de PARIS, toque : P0146
INTIME
Monsieur [Q] [T]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 2]
représenté par Me Michel REMBAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1319
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Octobre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente
Monsieur Jean-Louis CLEVA, Président
Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère
Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mlle Caroline CHAKELIAN, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Cour est saisie de l'appel interjeté par la SMAS TOURISME du jugement du Conseil des Prud'hommes de PARIS, section Encadrement - chambre 4, rendu le 12 Septembre 2011 qui a dit le licenciement de Monsieur [Q] [T] sans cause réelle et sérieuse et l'a condamnée à lui payer les sommes de :
41600 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
3400 € à titre de dommages intérêts pour absence de mention de la priorité de réembauchage
les intérêts de droit à compter du jugement
500 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile.
FAITS ET DEMANDES DES PARTIES
Monsieur [Q] [T] né en [Date naissance 1] 1957 a été engagé le 2 Juillet 2007 en contrat à durée indéterminée par la société LES MAISONS DE BIARRITZ « domaine de [Localité 2] » en qualité de directeur du domaine, statut cadre niveau 5-2 ; le contrat mentionne qu' il est soumis à la convention collective des cafés, hôtels, restaurants, que le salarié est responsable de l' exploitation du domaine, qu' une fiche de poste lui sera remise et que pour des raisons touchant à l' organisation et au bon fonctionnement de l' entreprise, le lieu de travail peut être transféré vers un autre site que l' employeur exploite en France ; la rémunération annuelle brute pour 218 jours était fixée à 36000 € et le salarié disposait d' un logement de fonction ; suivant avenant de même date, la rémunération annuelle a été portée à 38640 € ;
Suivant nouvel avenant du 27 janvier 2008, il a été convenu entre les parties que le salarié occupera en complément de son poste à compter du 1er Février 2008, le poste de directeur délégué de la région Sud Est, sans modification de statut et de niveau ; l' avenant précise que le salarié est responsable de l'exploitation du domaine de [Localité 2] et qu' il coordonne l' exploitation, l' activité et la rentabilité des sites du groupe situés dans le Sud Est de la France et qu' il rend compte au directeur général ;
Il est précisé au contrat que cette modification d' étendue du poste est soumise à une période d' essai de 6 mois à compter du 1er Février 2008, la rémunération globale brute est portée à 49920 € par an ;
La société LES MAISONS DE BIARRITZ a été mise en liquidation judiciaire le 30 décembre 2008 ;
La société SNMDB a repris le fonds de commerce de la société liquidée le 29 janvier 2009 ainsi que le personnel en application de l'article L 1224-1 du Code du Travail ;
Le 12 Mars 2010, Monsieur [Q] [T] a été avisé par courrier de la suppression de son poste de directeur de site de la résidence du Domaine de [Localité 2] pour motif économique et de la proposition de reclassement au poste de responsable de site de la résidence de « Ile Saint Marin » au [Localité 3] à compter du 19 avril 2010, niveau 4- échelon 2, statut agent de maîtrise pour un salaire horaire brut de 11.80 € moyennant 39h par semaine plus un logement de type T2 attenant à l' accueil ;
Le 8 avril 2010 Monsieur [Q] [T] a été convoqué à un entretien préalable en vue de son licenciement économique suite à son refus de la proposition de reclassement, la convocation précise que les documents de la CRP lui seront remis et que les motifs de la mesure envisagée lui seront exposés ;
Monsieur [Q] [T] a accepté une CRP le 5 Mai 2010 ; il n' y a pas eu de lettre de licenciement ;
Monsieur [Q] [T] a saisi le Conseil des Prud'hommes le 28 Mai 2010 pour contester le caractère économique de son licenciement ;
La SMAS TOURISME demande l' infirmation du jugement, de dire que le licenciement de Monsieur [Q] [T] repose sur une cause réelle et sérieuse et que l' obligation de reclassement a été respectée et en conséquence de rejeter l' intégralité des demandes de l'intimé ; subsidiairement, elle demande de limiter le montant des dommages intérêts alloués à la somme de 24960 €, de condamner Monsieur [Q] [T] à lui payer la somme de 1 € à titre de dommages intérêts et celle de 3000 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile et enfin d' ordonner la compensation.
Monsieur [Q] [T] demande la confirmation du jugement dans son principe mais l' infirmation pour le surplus et sollicite la condamnation de la SMAS TOURISME à lui payer avec intérêts légaux à compter de l' introduction de la demande les sommes de :
8772.22 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis plus congés payés afférents
100000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
15000 € à titre de dommages intérêts pour non respect de la priorité de réembauche
3600 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile.
SUR CE
Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience et soutenues oralement à la barre .
Il ressort des pièces versées aux débats que préalablement à sa convocation à entretien préalable en vue de son licenciement économique, le salarié a reçu la lettre du 12 Mars 2010 ;
Cette lettre fait état d' un entretien avec Monsieur [Q] [T] s' étant déroulé le 5 février 2010 au cours duquel a été évoquée l' éventuelle suppression de son poste pour motif économique, du rappel que « le groupe Lagrange a repris, suite à sa liquidation la société Maison de Biarritz fin janvier 2009 sous le nom Société nouvelle Maisons de Biarritz SNMDB » et son contrat de travail et que « les résultats enregistrés sur cette première année d' exploitation sont mauvais, les charges étant nettement supérieures aux recettes et cela malgré une attention toute particulière de SNMDB sur tous les postes de dépenses » ; la lettre faitencore état de ce que le poste du salarié et les tâches qui y sont liées sont également exécutées par le responsable régional ;
L' évocation en termes généraux des mauvais résultats sur la première année d' exploitation, sans qu' il soit justifié que l' employeur a notifié au salarié des éléments précis, vérifiables et concrets quant aux difficultés économiques rencontrées par la société avant de lui remettre la CRP n' est pas de nature à lui permettre d' avoir une appréciation sur le caractère sérieux du motif économique invoqué et par conséquent de se faire une opinion éclairée sur la décision à prendre et sur la réalité des difficultés économiques invoquées ;
En outre, la SMAS TOURISME ne justifie pas avoir recherché sérieusement à reclasser Monsieur [Q] [T], la lettre circulaire adressée à différentes sociétés du Groupe Lagrange ne correspondant pas à une présentation réelle du salarié puisqu' elle se contente de mentionner le poste qu' elle entend supprimer « directeur du site de [Localité 2] » et le statut de cadre de la fonction, sans aucune autre indication ;
C'est en conséquence à bon droit que le Conseil des Prud'hommes a retenu que le « licenciement économique » du demandeur présente manifestement un défaut de cause réelle et sérieuse faute de motivation régulière et suffisante notifiée au salarié ;
Il s' ensuit, au regard de l' ancienneté du salarié ( 3 ans), au montant de son denier salaire mensuel à retenir soit 4160 €, à son âge, au fait qu' il est justifié qu' il a retrouvé des emplois temporaires de vacataires et qu' il a essayé de créer une société, que la cour considère que la somme de 41600 € allouée par le Conseil des Prud'hommes en application de l' article L 1235-3 du Code du Travail est appropriée au préjudice réellement subi et qu' il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement de ce chef ;
L' acceptation de la CRP par le salarié ne le prive pas de la priorité de réembauche ; en l' espèce l' employeur n'a jamais notifié au salarié cette priorité de réembauche de sorte qu' il ne peut lui être fait grief de ne pas avoir porté à la connaissance de son employeur qu' il entendait en bénéficier, le fait qu' il ait été en rapport avec un avocat ainsi que soutenu pas l' employeur, est sans effet sur l' absence de respect de la procédure applicable par la SMAS TOURISME et il doit être retenu qu' elle a manqué à son obligation ;
L' extrait du registre unique du personnel communiqué ne fait pas état postérieurement au licenciement de Monsieur [Q] [T] et dans l' année qui a suivi d' embauche de personnel autrement qu' en CDD et sur des postes de jardinier, agent d' entretien, esthéticienne, maître chien qui n' auraient pas pu être proposés à Monsieur [Q] [T] comme ne ressortant pas à sa qualification ; le poste de responsable d' exploitation opérationnelle du domaine de [Localité 2] n' a pas donné lieu à une embauche de sorte qu' il n' aurait pas pu être proposé à Monsieur [Q] [T], il s' ensuit que seul le non respect de la procédure pour défaut de mention de la priorité de réembauche donne lieu à indemnisation comme causant nécessairement un préjudice au salarié ; la somme de 3400€ allouée à Monsieur [Q] [T] à titre d' indemnité par le premier juge est appropriée au préjudice ;
Le salarié a perçu de son employeur un mois de préavis et a été pris en charge dans le cadre de la CRP pour le surplus, il y a lieu en conséquence de rejeter sa demande d' indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents ;
En application de l'article L1235-4 du Code du Travail il y a lieu d'ordonner le remboursement par l'employeur, aux organismes intéressés, des indemnités de chômage payées au salarié suite à son licenciement dans la limite de six mois.
Le préjudice invoqué par l' employeur résultant de ce que Monsieur [Q] [T] se serait rendu sur son ancien lieu de travail quatre mois après avoir été licencié pour questionner le personnel qui aurait été perturbé pendant le temps de sa présence et dire qu' il avait engagé une procédure, n'est pas objectivement établi et la demande d' indemnisation doit être rejetée ;
Le bénéfice de l' article 700 du Code de Procédure civile sera alloué à Monsieur [Q] [T] à hauteur de 2500 € ;
La SMAS TOURISME conservera à sa charge les frais irrépétibles qu' elle a exposés.
En l' absence de condamnation prononcée au bénéfice de la SMAS TOURISME, la demande de compensation est sans objet.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement
Y ajoutant
Ordonne le remboursement par l'employeur, aux organismes intéressés, des indemnités de chômage payées au salarié suite à son licenciement dans la limite de six mois
Rejette les autres demandes .
Condamne la SMAS TOURISME aux dépens et à payer à Monsieur [Q] [T] la somme de 2500 € au titre des frais irrépétibles d' appel .
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT