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03/12/2013 | FRANCE | N°12/00043

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 03 décembre 2013, 12/00043


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 03 Décembre 2013

(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/00043



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Novembre 2011 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS- RG n° 09/09132



APPELANTE



Madame [P] [F]

[Adresse 5]

[Localité 1]

comparante en personne



INTIMEES
>

SNC CARTIER INTERNATIONAL

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Véronique PETIT GUILLOTEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : R249 substitué par Me Louis GAYON, avocat au barreau de PARIS, t...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 03 Décembre 2013

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/00043

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Novembre 2011 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de PARIS- RG n° 09/09132

APPELANTE

Madame [P] [F]

[Adresse 5]

[Localité 1]

comparante en personne

INTIMEES

SNC CARTIER INTERNATIONAL

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Véronique PETIT GUILLOTEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : R249 substitué par Me Louis GAYON, avocat au barreau de PARIS, toque : R249

RICHEMONT LUXURY GROUP LTD

[Adresse 2]

[Adresse 8]

[Localité 3]

représentée par Me Véronique PETIT GUILLOTEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : R249 substitué par Me Louis GAYON, avocat au barreau de PARIS, toque : R249

REINET INVESTMENTS S.C.A.

[Adresse 4]

[Localité 4]

représentée par Me Véronique PETIT GUILLOTEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : R249 substitué par Me Louis GAYON, avocat au barreau de PARIS, toque : R249

COMPAGNIE FINANCIERE RICHEMONT S.A.

[Adresse 6]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Véronique PETIT GUILLOTEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : R249 substitué par Me Louis GAYON, avocat au barreau de PARIS, toque : R249

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Octobre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente

Monsieur Jean-Louis CLEVA, Président

Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mlle Sandrine CAYRE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

La cour est saisie de l'appel interjeté par Mme [F] du jugement du Conseil de Prud'hommes de Paris section Encadrement chambre 4 du 3 novembre 2011 qui l'a déboutée de ses demandes formées contre [V] [A] et les autres parties actuellement intimées.

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

Selon lettre d'engagement du 22 décembre 1987 de la société Cartier International Gie, sise à [Localité 5], il a été proposé à Mme [F] le poste d'assistante marketing sous le bénéfice de la convention collective de la bijouterie joaillerie orfèvrerie selon une rémunération annuelle de 175 000 F sur 13 mois;

Mme [F] a ensuite été employée à la société Lmc International Spa à Milan devenue Richemont Italia Spa, sur une période travaillée au profit de cette entité de septembre 1992 à mai 1995 selon elle et du 1er janvier 1993 au 31 mars 1995 selon les sociétés intimées ;

Elle est revenue à effet au 1er avril 1995 dans la société Cartier International Gie à [Localité 5] au dernier poste de directeur conseil et projets ;

Selon lettre du 1er avril 1998 il a été offert à Mme [F] par la société Lancel Sogedi le poste de directeur de marketing communication et développement, avec reprise d'ancienneté du Groupe Cartier au 2 février 1988 et sans période d'essai.

Elle a signé le 4 avril 2000 une transaction avec la société Lancel Sogedi évoquant une lettre de licenciement en date du 4 mars 2000, prévoyant outre le paiement des indemnités de licenciement, préavis, congés payés et prime d'assiduité déjà versées au titre de son solde de tout compte, le règlement d'une somme de 925 000F brute et 851 000 F nette, à titre d'indemnité transactionnelle de rupture;

Elle a saisi le 31 mars 2005 le conseil des prud'hommes de demandes ayant donné lieu à des litiges sur la compétence tranchés par jugement du conseil des prud'hommes de [Localité 5] du 1er avril 2008, infirmé partiellement par arrêts de cette cour des 26 mars 2009 et rectificatif du 26 novembre 2009, et frappés de cassation partielle par arrêts de la cour de cassation du 2 février 2011 et rectificatifs des 2, et 23 mars 2011 ;

Le désistement d'appel de Mme [F] à l'égard de la société Sogedi Lancel constaté par ordonnance du 15 mai 2012 dans cette instance a été déclaré de plein effet par arrêt de déféré de cette chambre de la cour du 24 septembre 2013;

Mme [F] demande d'infirmer le jugement, de dire que les sociétés intimées ne peuvent se prévaloir de la transaction et de l'une quelconque de ses dispositions, de résilier le contrat de travail avec Cartier International, de la dire coupable de travail illégal par marchandage et travail dissimulé et de la condamner à payer les sommes de :

242 200 € de rappels de salaires du 8 juin 2000 au 1er février 2002 et 24 200 € de congés payés afférents,

36 330 € de préavis et 3 630 € de congés payés afférents

47 200 € d'indemnité conventionnelle 'bjo'

150 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

39 800 € pour retraite capitalisation

72 660 € d'indemnité de 6 mois,

avec intérêt légal à dater de la saisine et remise des documents conformes,

de lui allouer à l'encontre conjointement des sociétés Richemont Luxury Groupe Ltd, Compagnie Financière Richemont sa et Cartier International Snc, relativement à la perte des options allouées en 1995 et 1997, la somme de 700 000 € ou d'ordonner une expertise,

d'ordonner la remise de certificats de 30 000 actions [D] nouvelles ou de lui allouer subsidiairement une indemnité résultant de l'impossibilité d'exercer les options allouées en 1999 d'un montant à convertir en euros de la différence entre le cours de l'action Compagnie Financière Richemont à la date de l'arrêt de la cour et le prix d'exercice de '24.25 € X 30 000" dans le dispositif des conclusions et '24.25FS' selon les motifs des conclusions, soit environ 1.4 millions d'€, à la charge in solidum des sociétés Richemont Luxury Groupe Ltd, Compagnie Financière Richemont, Reinet Investments Sca et Cartier International Snc,

outre 500 € de frais irrépétibles à l'égard de chaque société ;

Les sociétés,

[R] International Snc anciennement Gie, sise à [Localité 5],

Compagnie Financière Richemont Sa sise à [Adresse 7],

Richemont Luxury Group Ltd, anciennement Vendome Luxury Group sa, sise à Jersey,

Reinet Investments Sca, anciennement Richemont Sa, sise à Luxembourg, demandent de confirmer le jugement, de dire les demandes prescrites, irrecevables ou mal fondées et de les rejeter et de condamner Mme [F] à payer la somme de 1 500 € pour frais irrépétibles.

SUR CE

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience ;

Les arguments et pièces communiquées par Mme [F] pendant le délibéré non demandés par la Cour seront écartés des débats ;

Sur les demandes de Mme [F] relatives aux pièces produites par les sociétés intimées

Mme [F] demande aux société intimées la production des originaux de l'option d'action (du 28 juin 1999) portant une signature qui lui est attribuée et qu'elle dénie, ainsi que le prétendu solde de tout compte de Cartier International portant une mention 'suite bonus' et sa signature également déniée oralement, qui n'apparaissent pas sur les exemplaires qu'elle détient en original et qui ne sont pas signés ;

Elle demande d'écarter des débats les pièces 20 et 21 consistant en des courriels émanant de salariés sous sujétion des sociétés et ne constituant pas des attestations ou témoignages ;

Les parties intimées déclarent ne communiquer aucune autre pièce que celles déjà communiquées en première instance ;

Les signatures attribuées par les sociétés intimées à Mme [F] sur le document d'octroi d'option du 28 juin 1999 et sur le reçu de solde de tout compte du 8 juillet 1998, même produits en photocopie par la société et sans qu'il soit nécessaire d'exiger la production en original, reproduisent la graphie habituelle de Mme [F] pour les dates qu'elle a portées respectivement les '05.07.99" et '08.07.98" et sa signature soulignée, avec une mine épaisse, selon sa manière habituelle et originale employée dans les autres écrits versés dans la procédure et annotés ou datés de sa main ;

Le fait que Mme [F] n'a pas porté de signature sur les originaux conservés par devers elle n'est pas déterminant et n'empêche pas qu'elle a signé les deux copies retournées à la société et produites aux débats ;

Il sera donc admis que Mme [F] a signé le reçu pour solde de tout compte du 8 juillet 1998 ainsi que la notification d'option du 28 juin 1999 ;

Les courriels de salariés de [D], même s'ils ne constituent pas des attestations au sens de l'article 202 du code civil, sont admissibles en preuve et n'ont pas à être écartés des débats ;

Les pièces des parties intimées telles que communiquées en première instance sont recevables dans la procédure d'appel ;

Mme [F] sera donc déboutée en ses demandes en rejet de pièces et en production de pièces ;

Sur l'effet de la transaction signée avec Lancel Sogedi à l'égard des sociétés intimées ;

Dans la transaction du 4 avril 2000 signée par Mme [F] et M. [O], directeur général de la société Lancel Sogedi, elle s'est déclarée entièrement remplie de ses droits actuels et futurs vis à vis de la société Lancel Sogedi et ou de toute société du Groupe auquel elle appartient du fait tant de l'exécution de son contrat de travail que du licenciement, à quelque titre et pour quelle cause que ce soit, avec renonciation d'intenter à l'encontre de toutes sociétés du Groupe toute action relative à la relation du contrat de travail ;

La transaction vise le contrat de travail conclu entre ces deux parties selon engagement du 1er avril 1998 et une lettre de licenciement du 4 mars 2000 contestée par la salariée ;

Dans la note d'information du 20 janvier 1998 de M. [M], président directeur général de [V] Sogedi, annonçant plusieurs nominations dont celle de Mme [F] au 1er avril 1998, il est fait état du Groupe Lancel France et International;

A défaut de dénomination de Groupe dans la transaction, il n'est pas établi que le Groupe visé est le Groupe général [D] dont dépendent toutes les sociétés mises en cause ;

Au surplus, la transaction n'ayant visé que le contrat de travail du 1er avril 1998, elle n'est pas opposable à Mme [F] pour des demandes afférentes à sa relation de travail initiée antérieurement avec la société Cartier International Gie et maintenant Snc, en rappels de salaires, travail dissimulé, licenciement sans cause réelle et sérieuse, même si l'indemnité de licenciement de 110516 F versée sur le dernier bulletin de salaire du 31 mars 2000 délivré par Lancel Sogedi est équivalente à deux mois de salaire de base de 55 000 F versé par cette société et est relative à une ancienneté remontant à février 1988 ;

De même cette transaction est sans effet sur les pertes de facultés d'option d'achat d'actions et ne peuvent être exclues par une formulation générale alors que ces options ne sont pas citées dans la transaction, qu'elles ont été offertes par d'autres sociétés et alors qu'aucune option n'est liée à l'emploi chez Lancel Sogedi puisque que celles de 1995 et 1997 sont antérieures à l'engagement dans cette société et que la dernière option de 1999 fait référence à la société Cartier International ;

Sur la prescription

Il n'y a pas de prescription acquise, s'agissant de demandes en résiliation judiciaire de contrat de travail et en travail dissimulé et dommages-intérêts pour perte d'action soumises à l'époque de la saisine du conseil en mai 2005 à la prescription trentenaire ;

Les parties intimées ne sont donc pas fondées dans leurs exceptions en irrecevabilité ;

Sur les demandes contre la société Cartier International Snc

- en indemnité pour travail dissimulé

Mme [F] invoque à partir du 9 octobre 1997, un travail illégal selon marchandage, pour la mise à disposition, en sus de ses fonctions de directeur conseil et projets auprès du Vice-président de Cartier International, de fonctions au profit de [V] Sodegi et des filiales du Groupe Lancel, en voie d'acquisition par le Groupe Richemont, à l'origine d'une surcharge importante de travail ;

Elle produit sa fiche de poste à sa reprise d'emploi chez Cartier International au 1er avril 1995 comme adjointe à la vice-présidence énumérant de nombreuses tâches ;

Elle produit deux témoignages de Mme [L], son assistante à l'époque chez Cartier International, selon laquelle à partir d'octobre 1997, elles ont connu une surcharge de travail très importante liée au cumul des différentes activités se traduisant par des plages de travail hors normes, de nombreux nocturnes jusqu'à 2/3H du matin, Mme [F] s'attaquant à son travail à 18H après avoir enchaîné des rendez-vous et des déplacements à la fois pour [R] et [V], avec une forte augmentation de ses voyages en France et à l'étranger, notamment au Japon pour [V] en décembre 1997, et le témoignage de M [G], chargé de création chez Lancel Sogedi, selon lequel lors de la prise de contrôle de [V] par le Groupe Richemont, elle partageait ses fonctions entre les sociétés Cartier et Lancel, ce qui l'obligeait à travailler très tard le soir dans le bureau qu'ils partageaient ;

Elle produit une note manuscrite du 16 octobre 1997 de Cartier International demandant à [E] [B] d'emmener Mme [F] dans la visite des fournisseurs de [V] en France, Italie, Espagne, des comptes rendus faits par elle à l'en-tête de [V] de réunions tenues les 25 février et 10 mars 1998 portant sur le développement commercial national et international de [V] avec tâches confiées à Mme [F] dont notamment le travail préparatoire 'nouveau concept';

Elle invoque subsidiairement un travail dissimulé par continuation de ses fonctions au profit de Cartier International au-delà de son engagement et de sa rémunération par Lancel Sogedi à compter du 1er avril 1998 ;

Elle invoque un travail dissimulé pour la mise à disposition par Cartier International Gie en sus de ses fonctions, au profit de Lmc International Spa à Milan, à partir de septembre 1992 pour deux postes à plein temps ;

S'il n'est pas avéré de marchandage pour le travail effectué par Mme [F] par mise à disposition de manière non lucrative entre elles par Cartier International auprès de sociétés soeurs au moment de mutation de poste, il est par contre établi que Mme [F], notamment pendant l'automne 1997 et le printemps 1998, a fourni selon les demandes qui lui étaient faites, un travail considérable pour les entités [R] et [V] retracé dans les tâches effectuées, les demandes de voyage en Europe et au Japon et les témoignages de collègues émanant des deux sociétés, avec travail très tardif, au-delà des 169H rémunérées, avec travail effectif et partagé dans des bureaux dans les deux sociétés Cartier International et Lancel Sogedi, ressortant de travail dissimulé de la part de Cartier International du fait de l'intention d'y recourir au regard de l'importance avérée de dépassement hebdomadaire de travail sur cette période de 6 mois, étant observé que le défaut de demande d'heures supplémentaires en tout état de cause afférente à une période antérieure de 5 ans à la saisine du conseil n'est pas de nature à empêcher l'examen de la présente demande ;

Il sera alloué la somme de 42 534 € pour indemnité de travail dissimulé représentant 6 mois de salaire ci-après déterminé ;

- en rappel de salaire et résolution du contrat de travail

Mme [F] invoque un travail continué pour Cartier International Gie au-delà de l'engagement par Lancel Sogedi à compter du 1er avril 1998, notamment par sa participation au salon international de la Haute Horlogerie à Genève du 17 au 24 avril 1998, avec note de remerciement du 24 avril 1998 de M. [J], directeur financier de Cartier International produite, une demande de compte rendu d'entretien demandé par M. [U] de [R] International par télécopie du 2 décembre 1998 ;

Elle a conservé par devers elle sans les signer, les deux exemplaires originaux du courrier de Cartier International Gie du 14 avril 1998 stipulant son engagement par Lancel et la fin de son contrat avec Cartier International à effet au 1er avril 1998 avec délivrance de solde de tout compte, reprise d'ancienneté au cas de réembauche au sein d'une société du Groupe et lui demandant d'en retourner un exemplaire avec son accord et sa signature ;

Elle produit une remise par Cartier International entre les mains de son assistante Solène des carte grise et assurance du véhicule clio au nom de [V] [A] destiné à Mme [F], la lettre du 19 mai 1998 du directeur général de Cartier International lui annonçant au regard des excellents résultats du Groupe, un bonus exceptionnel de 52 000 F brut à verser avec son nouveau solde de tout compte du 31 mars 1998 ;

La société produit un bulletin de salaire du mois de mars 1998, et la photocopie d'un chèque en date du 25 mars 1998 équivalent au salaire net, contestés par Mme [F] qui dénie tout solde de tout compte y afférent et n'établissant pas selon elle de paiement;

Mme [F] n'a pas donné de consentement exprès pour mettre fin au contrat de travail auprès de Cartier International fin mars 1998 : En effet, elle n'a pas donné suite à la proposition de Cartier International du 14 avril 1998 de donner son accord par écrit pour une terminaison de son travail au 31 mars 1998 coïncidant avec son engagement par Lancel Sogedi au 1er avril 1998 avec reprise d'ancienneté;

Même si la société Cartier International oppose un paiement de toutes les sommes dues au 31 mars 2008 dont le solde de congés payés acquis, le 13ème mois, prime de fin d'année réglé selon chèque de 249 705.25 F du 25 mars 1998 correspondant à la somme nette du bulletin de salaire, sans marque d'endossement, ce paiement opposé est antérieur à la demande d'accord de fin de contrat qui n'a pas été donné par la salariée ;

Le reçu de solde de tout compte du 8 juillet 1998 reconnu contresigné par Mme [F] relatif au paiement d'une somme de 43 731.85 F correspondant selon la société Cartier International à l'annonce du 19 mai 1998 d'un bonus exceptionnel d'un montant brut de 52 000 F ne vaut pas acceptation de fin de contrat de travail mais reçu des sommes alors dues au moment du départ de Mme [F] chez Lancel Sogedi ;

Mme [F] n'ayant pas donné son accord nécessaire pour la rupture de son contrat de travail avec la société Cartier International, et alors que son engagement par la société Lancel Sogedi ne rentre pas dans un cas légal de transfert, est bien fondée, dans la limite de ses demandes, à demander un rappel de salaire, à l'issue de la fin du préavis indemnisé par Lancel Sogedi, soit le 8 juin 2000 jusqu'au 1er février 2002, date de son engagement de réembauche dans une autre société et alors qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes le 31 mars 2005, dans le délai de prescription quinquennale afférent aux créances salariales, le contrat non rompu étant toujours en cours ;

Elle est de même fondée à faire prononcer la résiliation judiciaire de son contrat pour manquements de l'employeur à ses obligations à défaut de reprise après la fin de son travail chez Lancel Sogedi ;

Mme [F] était payée selon un salaire de base de 42 000 F sur 13 mois, outre 1000 F d'avantage en nature de voiture, soit un salaire de base moyen de 46 500 F, soit 7089 €, étant observé que les primes exceptionnelles versées en sus selon un montant aléatoire chaque année ne sont pas contractuelles et sans preuve de caractère général, constant et fixe;

Dans ces conditions, le rappel de salaire sera fixé, pour la période du 8 juin 2000 au 1er février 2002 à 130 909 € sans avoir lieu à congés payés afférents considérés comme pris à l'intérieur de la période de rappel ;

Il sera alloué une somme de 21 267 € pour préavis de 3 mois outre les congés payés afférents ;

Il sera alloué une indemnité conventionnelle de licenciement de 23 628 € ;

Il sera alloué la somme de 50 000 € de dommages-intérêts pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse, appropriée au préjudice subi et comprenant l'indemnisation de la perte de l'avantage de retraite capitalisée figurant sur les bulletins de salaire produits à partir d'octobre 1997;

Sur les demandes conjointes contre les sociétés Richemont Luxury Group Ltd, Compagnie Financière Richemont sa et Cartier International Snc relativement à la perte d'option sur actions

Mme [F] a été bénéficiaire d'octroi d'option d'actions du 12 octobre 1995 émis par la société Vendome Luxury Group Sa et Vendome Luxury Group Plc, portant sur 10 000 actions Vendome Luxury Group exerçables pour 3 333 actions entre septembre 1998 et septembre 2001, pour 3 333 actions entre septembre 1999 et septembre 2002, pour 3 334 actions entre septembre 2000 et septembre 2003 au prix de 42.70 FF,

du 1er octobre 1997, émis par les mêmes sociétés, portant sur 10 000 actions Vendome Luxury Group exerçables pour 3 333 actions entre juin 2000 et juin 2003, pour 3 333 actions entre juin 2001 et juin 2004, pour 3 334 actions entre juin 2002 et juin 2005 au prix de 44.38 FF ;

Le 25 mars 1998 les actions de Vendome Luxury Group ont fait l'objet de retrait de cotation en bourse ensuite du rachat de cette société par Richemont ;

Les sociétés intimées ne justifient pas que l'octroi d'option du 28 juin 1999 ci-après cité remplace les deux plans devenus caducs le 25 mars 1998, ce qui n'est pas signifié dans cet acte ;

Elles ne peuvent opposer utilement que Mme [F] n'est plus salariée ensuite de son licenciement le 4 mars 2000 par Lancel Sogedi alors que la cour retient qu'elle est restée salariée de la société Cartier International ;

En tout état de cause, la caducité des options d'actions de 1995 et 1997 a nécessairement causé un préjudice à Mme [F] qui a été privée du fait des sociétés émettrices d'une faculté d'achat d'actions qui aurait dû s'ouvrir à compter de septembre 1998 alors que le plan de juin 1999 retarde cette faculté en juillet 2002 ;

Il sera alloué, sans avoir besoin d'expertise, la somme de 40 000 € de dommages-intérêts appropriée au préjudice subi à la perte de chance résultant de la caducité des offres au regard des aléas sur la conservation d'une relation de travail jusqu'à la dernière période de validité en juin 2005 et de l'évolution modeste des cours entre 1995 et 1997;

Sur les demandes in solidum contre les sociétés Richemont Luxury Group Ltd, Compagnie Financière Richemont, Reinet Investments Sca et Cartier International Snc

Mme [F] est bénéficiaire d'un octroi d'option du 28 juin 1999 émanant de Vendome Luxury Group Sa Luxembourg portant sur 300 actions [D] exerçables pour 100 actions entre juillet 2002 et juin 2009, pour 100 actions entre juillet 2003 et juin 2009, pour 100 actions entre juillet 2004 et juin 2009 au prix de '2,425 F suisses'. Cette lettre précise qu'elle sera envoyée en copie à Cartier International Gie avec annonce d'envoi à la bénéficiaire du plan et obligations et prévoit un accusé réception à signer par la bénéficiaire avec acceptation des règles du plan d'option [D] de 1999.

Mme [F] revendique le bénéfice d'option sur 30 000 actions en fonction de la multiplication du nombre d'action par 100 du fait de la division (ou 'split') par 100 de la valeur nominale intervenue en novembre 2001 et dénie l'opposabilité des clauses du plan qui ne lui a pas été envoyé et fait valoir qu'elle a vainement demandé la délivrance des certificats y afférents;

Elle produit un communiqué de presse du 6 novembre 2001 relatif à la compagnie Financière Richemont Sa édité par elle le 19 octobre 2013, selon lequel les actions [D] négociées à la bourse suisse vont être divisées dans un ratio de 100 pour un, à effet du 12 novembre 2001, soit un prix actuel de 3 300FS qui deviendra 33 FS environ ;

Mme [F] justifie avoir demandé, par lettres envoyées à la Compagnie Financière Richemont Sa à Genève et Richemont Sa Luxembourg dans le cours de la présente procédure, le 8 mai 2006 la délivrance des certificats des stocks options Richemont 1999 selon split par 100, avec rappel de ses demandes relatives aux stock options le18 août 2008 ;

Elle produit un document émanant de Richemont.com édité par elle le 12 août 2013 retraçant l'évolution de l'action de la compagnie Financière Richemont sa, citant un prix de 15.39 FS au 16 novembre 2001, évoluant sous 20FS sur les années 2004/2006, entre 20 et 40 FS jusqu'à 2010, et montant à 94.35 FS le 12 août 2013 ;

La société Cartier International étant condamnée avec effet de licenciement sans cause réelle et sérieuse selon une résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée par le présent arrêt de la cour et les sociétés intimées n'ayant pas donné suite aux demandes de Mme [F] de délivrance de certificat d'option faites pendant le cours de la procédure et à l'intérieur du délai de validité, ne sont pas fondées à opposer une caducité d'option non exercée pendant le cours de validité et encore dans les 30 jours de la rupture du contrat de travail spécifié dans les règles du régime d'options d'achat d'actions 1999 ;

Il n'y a pas lieu à remise de certificat d'option après expiration des délais d'option en juin 2009 ;

Il sera alloué la somme de 200 000 € de dommages-intérêts appropriée au préjudice subi du fait de la perte de chance d'achat et de revente d'actions au regard des aléas sur la conservation d'une relation de travail pendant la période de validité jusqu'en juin 2009 et des dates possibles d'achat et de revente d'actions en fonction de cours d'actions très variables sur les nombreuses années écoulées;

Les dommages-intérêts portent intérêt légal à dater du présent arrêt qui en fixe le montant ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement et statuant à nouveau :

Ecarte des débats les arguments et pièces envoyées en délibéré par Mme [F]  ;

Déboute Mme [F] en ses demandes en rejet de pièces et en production de pièces ;

Prononce la résiliation du contrat de travail liant Mme [F] et la société Cartier International Snc anciennement Gie avec effet de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Cartier International Snc à payer à Mme [F] les sommes de :

130 909 € de rappel de salaire du 8 juin 2000 au 1er février 2002, congés payés afférents compris,

21 267 € de préavis et 2 126.70 € de congés payés afférents

23 628 € d'indemnité conventionnelle de licenciement

avec intérêt légal à dater de l'accusé réception de la convocation de la société devant le bureau de conciliation valant mise en demeure

50 000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

et 42 534 € d'indemnité de 6 mois de travail dissimulé

avec intérêt légal à dater de l'arrêt de la cour,

et ordonne la remise des documents conformes ;

Condamne conjointement les sociétés Richemont Luxury Group Ltd, Compagnie Financière Richemont sa et Cartier International Snc à payer à Mme [F] la somme de 40 000 € de dommages-intérêts pour la perte des options allouées en 1995 et 1997,

Condamne in solidum les sociétés Richemont Luxury Group Ltd, Compagnie Financière Richemont, Reinet Investments Sca et Cartier International Snc, à payer la somme de 200 000 € de dommages-intérêts pour la perte des options allouées en 1999 ;

Condamne chaque société intimée à payer à Mme [F] la somme de 500 € de frais irrépétibles ;

Rejette les autres demandes ;

Condamne les sociétés intimées aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 12/00043
Date de la décision : 03/12/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°12/00043 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-12-03;12.00043 ?
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