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03/12/2013 | FRANCE | N°10/08731

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 03 décembre 2013, 10/08731


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 03 Décembre 2013

(n° 1 , 10 pages)



Numéros d'inscription au répertoire général : S 10/08731

S 11/00702



Décisions déférées à la Cour :

jugement rendu le 09 Septembre 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL section encadrement RG n° 08/02724

jugement rendu le 23 novembre 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL section

encadrement RG n° 10/01790





APPELANTE

SA SOCIÉTÉ DE COMMERCIALISATION ET DE GESTION IMMOBILIÈRES NOM COMMERCIAL TRANSACT CENTURY 21

[Adresse 2]

[A...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 03 Décembre 2013

(n° 1 , 10 pages)

Numéros d'inscription au répertoire général : S 10/08731

S 11/00702

Décisions déférées à la Cour :

jugement rendu le 09 Septembre 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL section encadrement RG n° 08/02724

jugement rendu le 23 novembre 2010 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL section encadrement RG n° 10/01790

APPELANTE

SA SOCIÉTÉ DE COMMERCIALISATION ET DE GESTION IMMOBILIÈRES NOM COMMERCIAL TRANSACT CENTURY 21

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Michael DAHAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0031

INTIME

Monsieur [Q] [O]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Françoise GUERY, avocat au barreau de PARIS, toque : D0055

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Octobre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Aleth TRAPET, conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Claudine PORCHER, présidente

Madame Marie-Aleth TRAPET, conseiller

Madame Catherine COSSON, conseiller

L'affaire a été mise en délibéré au 26 novembre 2013, prorogé au 3 décembre 2013.

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claudine PORCHER, présidente et par Monsieur Polycarpe GARCIA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [Q] [O] a été engagé par la société de commercialisation et de gestion immobilières, exerçant sous le nom commercial « TRANSACT CENTURY 21 », désormais dénommée « société TRANSACT IMMO », par contrat à durée indéterminée ayant pris effet le 5 novembre 1996, en qualité de négociateur débutant. Il a été promu responsable du service transaction le 1er mai 2002.

Monsieur [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil le 26 décembre 2008 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Par jugement du 9 septembre 2010, rectifié le 23 novembre 2010, le conseil de prud'hommes de Créteil, en sa section Encadrement, a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date du jugement, et condamné l'employeur à payer à Monsieur [O] les sommes suivantes :

- 38 002,10 € à titre de rappel de salaire sur le treizième mois,

- 3 800,21 € au titre des congés payés afférents,

- 47 102,64 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 25 513,93 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 23 551,32 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 2 355,13 € au titre des congés payés afférents,

- 7 850,44 € à titre de dommages ET intérêts pour non-réintégration dans ses fonctions,

outre 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

et ordonné la remise au salarié d'un bulletin de salaire, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle Emploi, Monsieur [O] étant débouté du surplus de ses demandes.

Cette décision a été frappée d'appel par la société TRANSACT IMMO qui conclut en demandant à la cour de dire que Monsieur [O] a rompu de son propre chef son contrat de travail, de sorte qu'il est démissionnaire et qu'il doit en conséquence à son employeur :

- une indemnité égale à trois mois de salaire, soit 15 846 € au titre du préavis,

- un remboursement de commission de 5 187,30 € pour l'immeuble qu'il a acquis à titre personnel,

- 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

et qu'il lui appartiendra de rembourser les sommes qui lui ont été réglées au titre de l'exécution provisoire de droit, à concurrence de 56 135,36 €.

Une somme de 4 000 € est également réclamée au titre des frais irrépétibles engagés devant la cour.

Monsieur [O] conclut pour sa part à la confirmation du jugement entrepris mais forme un appel incident sur le quantum des sommes allouées par les premiers juges.

Devant la cour, il réclame ainsi :

- une « indemnité pour non-réintégration dans les fonctions » d'un montant de 94 205,00 €

- une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 94 205,00 €

Monsieur [O] demande l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes de rappel de salaire liées au maintien du salaire durant les périodes de maladie. Il réclame :

- 4 135,99 € à titre de rappel au titre des maintiens de salaires pour les périodes 2004 à 2009

- 413,59 € au titre des congés payés afférents,

- 1 759,92 € à titre de rappel pour le maintien de salaire durant un arrêt du 23 janvier au 20 février 2007,

- 175,99 € au titre des congés payés afférents,

- 9 319,32 € au titre du maintien du salaire durant l'arrêt du 7 janvier 2009 au 7 avril 2009,

- 931,93 € au titre des congés payés afférents.

Monsieur [O] forme, par ailleurs, des demandes nouvelles. Il réclame :

- 13 419,69 € au titre du solde des congés payés acquis au 9 septembre 2010,

- 804,03 € brut correspondant à la commission due sur le dossier [F] / [K],

- 80,40 € au titre des congés payés afférents,

- 1 123,91 € brut à titre de commission de la vente [O],

- 112,39 € au titre des congés payés afférents.

- 7 761,32 € pour le rappel au titre des maintiens de salaires pour les périodes 2009 à 2010.

Monsieur [O] sollicite également la condamnation de la société SCGI TRANSACT CENTURY 21 à lui restituer cinq statuettes CENTURY France datées de 1998, 1999, 2001, 2004, 2006, sous astreinte de 500 € par jour de retard.

Enfin, Monsieur [O] réclame 5 000 € au titre des frais irrépétibles et la condamnation de l'employeur aux dépens.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées lors de l'audience des débats.

SUR QUOI, LA COUR,

Sur les demandes de rappel de salaire

Monsieur [O] sollicite un rappel de salaire au titre du treizième mois prévu par l'article 38 de la convention collective nationale de l'immobilier, ainsi qu'au titre du maintien des salaires liés aux arrêts de maladie, par application de l'article 24 de cette convention collective dont il n'est pas contesté qu'elle est applicable en l'espèce.

* Le paiement d'un treizième mois

Monsieur [O] fait valoir que, par lettre recommandée du 11 septembre 2008, il a demandé confirmation à son employeur de ce que les minimaux conventionnels avaient été bien respectés à son égard, émettant notamment une réserve en ce qui concerne le maintien de salaires pendant les périodes de congés maladie ainsi que le doublement du calcul du treizième mois de la rémunération, et qu'insatisfait de la réponse apportée par la société TRANSACT IMMO le 7 octobre 2008, il a décidé d'interroger officiellement la Fédération nationale de l'immobilier - FNAIM -, l'employeur ayant lui-même, par lettre du 20 octobre 2008, interrogé cet organisme sur les conditions d'interprétation de l'article n° 37-2 RT de l'avenant du 12 octobre 2007 de la convention collective nationale de l'immobilier.

Monsieur [O] soutient que l'interprétation de la fédération qui lui est favorable est confortée par celle de deux syndicats différents dont il produit les réponses, lesquels estiment que le treizième mois ne pourrait être payé par fractionnement. Cette situation interdirait à l'employeur de soutenir sérieusement que Monsieur [O] aurait obtenu « les grâces de trois organismes différents », alors qu'il lui reproche d'avoir pris l'initiative d'intervenir auprès de la FNAIM sous en-tête de la société afin de connaître les conditions et l'interprétation de l'article 37-1 de l'avenant du 2 octobre 2007. Il conclut à la confirmation du jugement sur ce point.

La société TRANSACT IMMO s'étonne que Monsieur [O] ait attendu le 20 octobre 2008, après douze années de relations salariales sans difficulté, pour engager une polémique sur le règlement de la prime de treizième mois. Elle souligne que la réponse apportée par la FNAIM à la question posée n'était pas satisfaisante en ce qu'elle contenait une affirmation en contradiction avec le texte même de la convention collective.

La société TRANSACT IMMO reproche aux premiers juges d'avoir, en raison d'une lecture tronquée du contrat de travail de Monsieur [O], interprété faussement le texte conventionnel en cause, retenant l'interprétation du salariée partagée par la FNAIM dans ses courriers des 6 novembre et 4 décembre 2008, ainsi que par la CFE-CGC et la CGT dans leurs courriers respectifs des 8 et 12 avril 2010. L'employeur demande à la cour de constater que les termes du contrat de travail permettaient d'inclure le treizième mois dans la rémunération, ce qui avait été réalisé au profit du salarié, de sorte qu'il devait être débouté de ce chef de demande, comme de l'incidence de cette condamnation sur l'appréciation de la demande de résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur.

Considérant qu'aux termes de l'article 38 de la convention collective nationale de l'immobilier, « les salariés à temps complet ou partiel perçoivent en fin d'année un supplément de salaire dit "treizième mois" égal à un mois de salaire global brut mensuel contractuel tel que défini à l'article 37.3.1. au prorata du temps de présence dans l'année et réglé sur la base du salaire de décembre. Toutefois, pour les salariés dont la rémunération est tout ou partie établie sur la base d'un barème de commissions convenu entre les parties, le contrat de travail doit fixer les modalités de règlement des commissions de telle façon que le salarié soit assuré de percevoir dans l'année civile 13 fois le salaire conventionnel qui lui est acquis lorsque le treizième mois est inclus dans la rémunération, ce calcul étant prorata selon le nombre de mois de présence pendant l'exercice considéré en cas d'entrée ou de sortie en cours d'année ou de suspension du contrat de travail » ;

Considérant que le paragraphe 4 du contrat de travail de Monsieur [O] est ainsi rédigé :

« 4 : "Rémunération" :

La rémunération de l'employé est fixée de la manière suivante : une rémunération fixe de 6 940,69 francs (brut mensuel sur la base de 169 heures par mois incluant le 13ème mois).

4.1. Commissions en sus :

Pour les ventes :

- 10 % brut du montant des commissions perçues par Transact SA et vendues par l'employé

- 10 % brut du montant des commissions perçues par Transact SA et rentrées par l'employé puis vendues par une tierce personne.

Pour les locations :

- 10 % brut du montant des commissions perçues par Transact SA et louées par l'employé

- 10 % brut du montant des commissions perçues par Transact SA et rentrées par l'employé puis louées par une tierce personne pour la part propriétaire

- 10 % brut du montant des commissions perçues par Transact SA et louées par l'employé pour la part locataire

- un minimum de 500 francs (76,22 €) brut est garanti si le montant de la commission totale de Transact SA est inférieur à 5 000 francs (762,25 €).

Pour les gestions :

Pour tous les contrats de nouvelles gestions, les honoraires seront de un trimestre d'honoraires perçus par Transact SA » ;

Considérant que les termes du contrat de travail permettent de répondre positivement aux deux questions dont la FNAIM avait bien précisé qu'elles induisaient la solution de la difficulté posée, à savoir : « M. [O] bénéficie t-il de commissions ' » et « le contrat de travail prévoyait-il que le 13ème mois est inclus dans la rémunération ' », avant de donner la réponse suivante : « Il apparaît que la clause d'inclusion du treizième mois n'est pas valablement libellée. Ne correspondant pas aux exigences posées par l'article 38 de la convention collective pour inclure le 13ème mois dans la rémunération globale, le 13ème mois ne saurait être considéré comme inclus. M. [O] doit donc bénéficier du doublement de son salaire réel de décembre : (fixe + commissions dues en décembre) x 2' » ;

Considérant que l'article 38 de la convention collective permet d'inclure le treizième mois sous réserve qu'il fixe les modalités du règlement des commissions ;

Considérant que l'examen du contrat de travail permet de constater que la rémunération de Monsieur [O] était partiellement établie sur la base d'un barème de commission convenu entre les parties, que le contrat de travail fixait les modalités de règlement des commissions de telle façon que le salarié soit assuré de percevoir dans l'année civile treize fois le salaire conventionnel qui lui est acquis lorsque le treizième mois est inclus dans la rémunération ;

Considérant que le treizième mois étant explicitement inclus dans la rémunération de Monsieur [O], depuis son engagement au service de la société, et la preuve étant rapportée par les pièces et les débats que le salaire de Monsieur [O] avait toujours dépassé le minimum conventionnel et ce jusqu'à la rupture de son contrat de travail (Monsieur [O] ayant bénéficié d'un revenu moyen mensuel de 5 282 € en 2009, soit un revenu annuel évalué à 63 384 € tandis que le minimum conventionnel n'était encore fixé qu'à 34 982 € pour l'année 2010), il y a lieu de rejeter la demande en paiement d'un rappel de salaire à ce titre, le jugement étant infirmé sur ce point ;

* Le rappel de salaire lié au maintien des salaires pendant les arrêts maladie

Monsieur [O] réclame le maintien de son salaire lors de ses arrêts de maladie, par application des dispositions de l'article 24.2 de la convention collective nationale de l'immobilier qui prévoit, « en cas d'indisponibilité dûment justifiée et sous réserve de prise en charge par la sécurité sociale », le maintien de la rémunération du salarié malade ou accidenté durant cent dix jours après huit ans de présence dans l'entreprise, la rémunération ayant pour assiette 90 % du salaire brut mensuel défini à l'article 37-3.1.

Monsieur [O] reproche aux premiers juges d'avoir rejeté cette demande, omettant ainsi de tirer toutes les conséquences de la condamnation au titre du treizième mois.

La société TRANSACT IMMO conteste ce chef de demande, indiquant avoir scrupuleusement respecté les dispositions conventionnelles, comme en feraient foi les tableaux établis par son expert-comptable ainsi que l'ensemble des fiches de paie et fiches individuelles détaillées du salarié, ces documents permettant de constater que depuis 2004 au moins le maintien du salaire à 90 % a bien été effectué et que la société TRANSACT IMMO a même parfois, par erreur, compensé le salaire à 100 % au lieu de 90 %.

Considérant qu'il est constant que les sommes réclamées par Monsieur [O] correspondent exclusivement à la prise en compte par le salarié, dans le calcul de la rémunération servant de base à la détermination des sommes dues au titre du maintien du salaire, d'un treizième mois hypothétique ;

Considérant que la cour ayant estimé que Monsieur [O] avait été rempli de ses droits s'agissant de la prime de treizième mois, elle ne peut que débouter le salarié de cette demande conséquente, confirmant en cela la décision entreprise ;

Considérant qu'il y a lieu également de débouter Monsieur [O] de sa demande relative au maintien du salaire pour la « période de 2009 à 2010 », les pièces du dossier permettant de constater que Monsieur [O] a été rempli de ses droits à cet égard ;

Sur les conditions de la reprise de son travail par Monsieur [O]

Monsieur [O] soutient qu'ayant été déclaré apte par le médecin du travail lors de la visite de reprise, l'employeur, après lui avoir imposé la prise de ses congés-payés « au compte goutte », jusqu'au 13 novembre 2009, date de reprise officielle de ses fonctions, pour le « miner moralement », l'aurait retrogradé et aurait apporté plusieurs modifications à son contrat de travail.

Le jour de la reprise de ses fonctions, soit le 12 novembre 2009, Monsieur [O] aurait appris, lors d'une réunion commerciale, en présence des autres salariés de la société, qu'il aurait été rétrogradé au poste de négociateur, qu'il n'aurait plus été autorisé à donner des instructions de quelque sorte au sein de l'agence, qu'il se serait vu retirer une partie de ses attributions techniques (à savoir les opérations de location confiées à une conseillère en location), cette situation entraînant une incidence sur sa rémunération en raison de son commissionnement sur le résultat des autres commerciaux. Enfin, la société TRANSACT IMMO aurait modifié sans préavis ses jours de congés, lui imposant de les prendre le jeudi et le dimanche et non plus le samedi et le dimanche.

Considérant que l'article L. 1226-8 du code du travail prévoit que, lorsqu'à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail définies à l'article L. 1226-7 relatif aux accidents du travail, le salarié est déclaré apte par le médecin du travail, il retrouve son emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente et que les conséquences de l'accident ou de la maladie professionnelle ne peuvent entraîner pour l'intéressé aucun retard de promotion ou d'avancement au sein de l'entreprise ;

Considérant que la déclaration d'aptitude par le médecin du travail au poste occupé avant la suspension du contrat de travail emporte, pour le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, le droit à réintégration dans cet emploi ; que ce n'est que dans le cas où cet emploi n'existe plus ou n'est plus vacant que la réintégration peut avoir lieu dans un emploi équivalent comportant, notamment, le même niveau de rémunération, la même qualification et les mêmes perspectives de carrière que l'emploi initial ;

Considérant que Monsieur [O] a été déclaré apte à son poste à la faveur d'une visite de reprise du 25 septembre 2009 ;

Considérant que, pour établir la preuve de la violation, par la société TRANSACT IMMO, de ces dispositions légales, Monsieur [O] verse aux débats la lettre qu'il a remise en mains propres, à l'issue de la réunion du 13 novembre 2009, à trois de ses collègues, Monsieur [A], Madame [L] et Madame [H], rédigée dans les termes suivants :

« ' lors de la réunion du 12 novembre 2009 (date de mon retour à l'agence), à laquelle nous avons été conviés par M. [P] [X] et M. [D] [X], en présence de Mme [L], de Mme [H], de M. [A], de M. [T] et de moi-même, ces messieurs nous ont priés de prendre note, entre autres directives, des changements suivants : M. [O] n'est plus manager, il devient simple conseiller ; M. [O] ne donne plus d'ordres, ni de consignes à qui que ce soit dans l'agence, M. [O] n'a plus aucunes prérogatives particulières ; M. [O] ne traite plus du tout, ni ne supervise la location ; M. [O] s'occupe exclusivement des ventes ; le jour de congé de M. [O] sera désormais le jeudi en lieu et place du samedi, il est le seul à se voir changer de jour de congé ; M. [O] occupera le bureau qui sera libre (en fonction des absences et des jours de congé des autres collaborateurs), à défaut, celui de la secrétaire, M. [O] travaillera soit à [Adresse 2] dans le centre commercial, soit à l'agence de la [Adresse 3], la direction nous le dira plus tard... » ;

Considérant que la lettre adressée à Madame [H] est signée de manière illisible et annotée par la mention : « remis en main propre le 13/11/09 » ; que la lettre adressée à Monsieur [A] est signée par l'intéressé et ainsi annotée : « conforme à ce que j'ai entendu - remis ce jour, en main propre le 13/11/09 » ; que Madame [L] a signé le document et indiqué : « remis en main propre ce jour 13/11/09 - conforme à ce que j'ai entendu » ;

Considérant que ces courriers, rédigés et signés par Monsieur [O], ne peuvent valoir attestation ;

Considérant que les attestations produites par les parties confirment, pour certaines les affirmations du salarié, les contredisent pour d'autres ; que les seules attestations de salariés confortant les déclarations de Monsieur [O] ont été rédigées par Madame [L] et par Monsieur [A], lesquels ont démissionné quelques semaines plus tard pour rejoindre Monsieur [O] au sein de l'agence immobilière CVI qu'il a créée, comme l'employeur en rapporte la preuve, le 29 novembre 2010, deux mois après le jugement faisant droit à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ;

Considérant qu'il résulte encore des pièces et des débats que, par courrier du 16 novembre 2009, la société TRANSACT IMMO a rappelé à Monsieur [O] qu'à la suite de la modification de ses jours de repos, il aurait dû être présent le samedi 14 novembre et se disait dans l'attente d'un justificatif de sa part ; que Monsieur [O] répondait le 19 novembre que la modification ne pouvait prendre effet que la semaine suivante ; que c'est par un autre courrier du même jour que Monsieur [O] invoquait les autres modifications alléguées ;

Considérant que la société TRANSACT IMMO contestait l'ensemble de ces modifications, à l'exception de celle des jours de repos, par une lettre du 2 décembre 2009, faisant part au salarié de ce que son attitude donnait à penser qu'il venait de prendre acte de la rupture de son contrat, l'invitant à lui préciser ses intentions par retour du courrier ;

Considérant que pour toute réponse, la société TRANSACT IMMO n'a reçu que des avis d'arrêts de travail et de prolongation jusqu'à l'audience prud'homale ; que Monsieur [O] n'est jamais revenu travailler à la société pour vérifier les garanties données par l'employeur du maintien de son emploi dans les conditions antérieures à sa longue absence ;

Considérant que seule est rapportée la preuve de la modification intervenue dans le changement d'un des deux jours de congé du salarié ; que cependant, à défaut de clause contractuelle excluant le travail du samedi, l'employeur, en demandant à Monsieur [O] de travailler le samedi, jour ouvrable, au lieu du jeudi, a fait usage de son pouvoir de direction ; qu'aucune modification du contrat de travail du salarié n'étant établie, Monsieur [O] ne conteste pas utilement les conditions de sa réintégration ; que sa demande d'indemnisation est rejetée, le jugement étant infirmé en ce qu'il a alloué au salarié des dommages et intérêts à hauteur de 7 850,44 € au seul motif que le conseil avait « la conviction » que les faits rapportés par Monsieur [O] étaient réels, alors même que la preuve des modifications alléguées n'était pas valablement rapportée ;

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail

Monsieur [O] demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société SCGI TRANSACT CENTURY à lui payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre une indemnité pour non-réintégration dans les fonctions, mais d'en augmenter le quantum. Il soutient que la cour « ne pourra que confirmer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux deux motifs suivants : non-paiement des salaires dus et non-respect des conditions de réintégration au sein de l'entreprise ensuite d'un accident du travail.

Monsieur [O] fonde ses prétentions sur les dispositions de l'article L. 1226-15 du code du travail ; que l'article L. 1226-15, alinéas 1 et 3, du code du travail, a vocation à s'appliquer lorsqu'un licenciement est prononcé en méconnaissance des dispositions relatives à la réintégration du salarié déclaré apte prévues par l'article L.1226-8 du même code ;

Considérant que lorsque l'initiative de la rupture du contrat de travail est prise par le salarié, elle ne peut produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse que si la résiliation judiciaire en est prononcée aux torts de l'employeur ;

Or, considérant que la cour a rejeté la demande de rappel de salaire formée par Monsieur [O] ; qu'à supposer même qu'ait pu être retenue l'interprétation que donnait le salarié des dispositions de la convention collective nationale de l'immobilier relatives à la prime de treizième mois, la condamnation au paiement d'un rappel de salaire n'aurait pu constituer un manquement grave de l'employeur à ses obligations, compte tenu de la difficulté d'interprétation de ce texte et du fait que la société TRANSACT IMMO avait saisi la fédération compétente de cette difficulté très rapidement après avoir reçu de Monsieur [O] la première lettre de réclamation ;

Considérant que la preuve d'un manquement de la société TRANSACT IMMO à son obligation de réintégration de Monsieur [O] à son poste après la reprise de son contrat de travail n'étant pas davantage rapportée, il y a lieu d'infirmer le jugement qui a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail liant les parties et de débouter Monsieur [O] de ses demandes d'indemnité de préavis, de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement est infirmé en ce qu'il a prononcé une condamnation de ces différents chefs ;

Sur la demande d'indemnité de congés payés

Monsieur [O] réclame une somme de 13 419,69 € au titre du solde des congés payés acquis au 9 septembre 2010.

Considérant que la société TRANSACT IMMO rapporte la preuve que le salarié a pris tous ses congés pour les périodes de juin 2007 à mai 2008 et de juin 2008 à mai 2009 ; que pour la période de juin 2009 à mai 2010, il a pris vingt-sept jours de congés, le solde de trois jours lui ayant été réglé en décembre 2010 ;

Considérant que Monsieur [O] est débouté de ce chef de demande ;

Sur la demande de paiement de commissions

Monsieur [O] sollicite le paiement d'une commission de 804,03 € dans un dossier [F] / [K], ainsi qu'une commission de 1 123,91 € à la suite d'une vente consentie à sa s'ur, Madame [O], outre les congés payés afférents.

Considérant que dans son courrier du 29 décembre 2010 à la société TRANSACT IMMO, Monsieur [O] écrit : « Vente [F]/[K] : il s'agit de la vente d'un bien que j'avais rentré en gestion locative au mois d'août, comme indiqué sur la grille du même mois, confirmé par le bulletin de salaire de ce mois d'août 2007 », avant d'invoquer « un droit de suite », précisant : « Il est logique que vous me régliez l'entrée de cette vente, même si je n'étais pas physiquement présent à l'agence lorsqu'elle a été conclue » ;

Considérant que la société TRANSACT IMMO produit le mandat de vente établissant que c'est Monsieur [T] qui avait apporté la vente de ce bien ; que c'est ce salarié qui a perçu la commission afférente, Monsieur [O] ayant préalablement perçu une commission pour un local à louer confié par le même propriétaire ; que sa demande n'est pas fondée ;

Considérant que, s'agissant de la commission réclamée sur la vente [O], le salarié reconnaissait lui-même, dans sa lettre du 29 décembre 2010, avoir perçu la commission qui lui était due, en indiquant précisément : « A propos de la vente [U] / [O], je dois vous préciser qu'il s'agit de Melle [C] [O]. D'une part, cette personne est majeure et capable, et il vous apparteint de vous adresser à elle ou à son notaire. D'autre part, vous m'avez réglé la commission afférente à cette vente en décembre 2009 » ; que Madame [O] n'a pourtant réglé les honoraires de l'agence que par chèque du 16 mai 2012 produit aux débats ;

Considérant que Monsieur [O] est débouté de sa demande de paiement de commissions ;

Sur la demande de restitution de statuettes

Monsieur [O] sollicite enfin la condamnation de la société TRANSACT IMMO à lui restituer sous astreinte cinq statuettes CENTURY France datées de 1998, 1999, 2001, 2004, 2006.

Considérant que la production par le salarié de l'ordonnance de référé du 9 mars 2011 - disant n'y avoir lieu à référé - permet à la cour de constater que la société TRANSACT IMMO a restitué à Monsieur [O], lors de l'audience du 16 février 2011, cinq tableaux et deux statuettes qu'il avait laissées dans son bureau ;

Considérant que la preuve n'est pas rapportée par le salarié - qui n'a au demeurant été présent dans l'entreprise que cinq jours au cours de sa dernière année d'emploi - qu'il aurait laissé à l'entreprise les statuettes qui ne lui ont pas été restituées à l'audience de référé ; que sa demande n'est pas fondée ; qu'il y a lieu de l'en débouter ;

Sur les demandes de la société TRANSACT IMMO

* la demande de remboursement d'une commission indûment versée

La société TRANSACT IMMO réclame le remboursement, par Monsieur [O], d'une somme de 5 187,20 € correspondant à la commission versée au salarié à la suite d'une vente qu'il avait réalisée pour son propre compte.

Considérant que la société appelante produit le mandat établissant que le bien lui avait été confié à la vente par un autre cabinet immobilier ; qu'il est, par ailleurs, constant que Monsieur [O] a été l'acquéreur de ce bien à titre personnel ; qu'aucune commission ne lui était due dans ces conditions ; qu'il est fait droit à la demande de remboursement présentée par la société TRANSACT IMMO ;

* La demande de paiement d'un préavis de trois mois

La société TRANSACT IMMO soutient que, Monsieur [O] étant l'auteur de la rupture du contrat de travail, il reste redevable d'une indemnité de préavis de trois mois sur la moyenne de son salaire réel, soit 15 846 €.

Considérant que Monsieur [O] a tenu pour acquis la résiliation judiciaire prononcée par le conseil de prud'hommes à la date du 9 septembre 2010, alors pourtant que la décision des premiers juges, frappée d'appel, n'avait pas autorité de chose jugée ; que la situation procédurale ainsi créée, alors que Monsieur [O] s'est trouvé en rechute d'accident du travail et dans l'incapacité de reprendre son emploi, constitue cependant un empêchement légitime à l'exécution du préavis qu'au demeurant l'employeur ne l'a pas invité à effectuer ; que, dans ces conditions, la demande présentée à ce titre par la société TRANSACT IMMO est rejetée ;

* La demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

La société TRANSACT IMMO réclame à ce titre une somme de 5 000 €.

Considérant que les circonstances de la cause ne permettent pas de retenir à l'encontre de Monsieur [O] une faute de nature à faire dégénérer son droit à exercer un recours en procédure abusive ; que la société TRANSACT IMMO est déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;

* La demande de remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire

Considérant que la société TRANSACT IMMO demande, par ailleurs, que soit ordonnée la restitution des sommes qu'elle a versées en vertu du jugement assorti de l'exécution provisoire ;

Considérant cependant que le présent arrêt, infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et que les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution ; qu'il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande de la société TRANSACT IMMO ;

PAR CES MOTIFS

Dit qu'il y a lieu de joindre dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice les numéros RG 10/08731 et RG 11/00702 sous un seul et même numéro RG 10/08731,

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté Monsieur [Q] [O] de sa demande de rappel de salaire lié au maintien des salaires pendant les arrêts de maladie ;

STATUT A NOUVEAU ET AJOUTANT,

DEBOUTE Monsieur [Q] [O] de toutes ses demandes ;

CONDAMNE Monsieur [Q] [O] à payer à la société TRANSACT IMMO une somme de 5 187,30 € à titre de remboursement de commission ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [O] aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 10/08731
Date de la décision : 03/12/2013

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°10/08731 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-12-03;10.08731 ?
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