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21/11/2013 | FRANCE | N°10/10764

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 21 novembre 2013, 10/10764


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 21 NOVEMBRE 2013



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/10764



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Avril 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - 4ème chambre 2ème section- RG n° 07/13585





APPELANTE :



SOCIETE ALLIANZ IARD,

(nouvelle dénomination des ASSURANCES GENERALES DE

FRANCE IART SA)

ayant son siège [Adresse 3]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



représentée par : Me Domini...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 21 NOVEMBRE 2013

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/10764

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Avril 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - 4ème chambre 2ème section- RG n° 07/13585

APPELANTE :

SOCIETE ALLIANZ IARD,

(nouvelle dénomination des ASSURANCES GENERALES DE FRANCE IART SA)

ayant son siège [Adresse 3]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par : Me Dominique OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

assistée de : Me Marcel PORCHER, avocat au barreau de PARIS, toque : G0450 substituée par Me Béatrice MACHTOU, avocat au barreau de VAL D'OISE.

INTIME :

Monsieur [O] [S]

né le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 5]

de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par : Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

assistée de : Me Hervé ROBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : E1140

INTIME :

Monsieur [R] [Y]

né le [Date naissance 2] 1942 à [Localité 4]

de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par : Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

assisté de : Me Isabelle DE CRÉPY, avocat au barreau de PARIS, toque : E1736

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Octobre 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François FRANCHI, Président et Madame Michèle PICARD, Conseillère, magistrats chargés d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président de chambre

Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller,

Madame Michèle PICARD, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Michèle PICARD dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Madame Violaine PERRET

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François FRANCHI, président et par Madame Violaine PERRET, greffier présent lors du prononcé.

Monsieur [O] [S] exploitait en son nom personnel un bar tabac situé [Adresse 5] sous l'enseigne '[Adresse 4]'. Il a fait appel aux services du cabinet d'expertise comptable de Monsieur [R] [Y] et avait pour interlocutrice au sein de ce cabinet Madame [D] [Y], épouse [G], salariée du cabinet et soeur de Monsieur [Y].

Le tribunal correctionnel de Paris a condamné Madame [Y] par jugement du 4 octobre 2007pour des faits d'escroquerie et d'abus de confiance commis entre le 1er janvier 2001 et le 23 mars 2005. Il l'a condamnée à indemniser la partie civile, Monsieur [S], à hauteur de 77.232, 85 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel, 90.000 euros à titre de dommages et intérêts correspondant à la perte de revenus subis, 15.000 euros en réparation de son préjudice moral et 1.500 euros sur le fondement de l'article 475 du code de procédure pénale. Il a également condamné Madame [Y] à payer à Monsieur [Y] la somme de 39.238, 46 euros en réparation de son préjudice matériel

Monsieur [O] [S] a fait assigner le 21 septembre 2007 Monsieur [Y] et son assureur la compagnie ALLIANZ en paiement de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1147 du code civil.

Par jugement rendu le 15 avril 2010, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Paris a condamné Monsieur [R] [Y] et la compagnie ALLIANZ à payer à Monsieur [S] les sommes de 183.732, 85 euros à titre de dommages et intérêts et de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, a condamné la compagnie ALLIANZ à garantir Monsieur [Y] de ces condamnations dans les limites des plafonds et franchises définies à la police d'assurance et rejeté les autres demandes.

Le tribunal a considéré que Monsieur [Y] était responsable des dommages causés à Monsieur [O] [S] sur le fondement de l'article 1384 alinéa 5 du code civil, la responsabilité du commettant pour les fautes commises par son préposé, et non 1147 du code civil. Il a rejeté le moyen de la compagnie ALLIANZ qui faisait valoir que le comportement de Monsieur [Y] avait entraîné, par ses négligences, la disparition de l'aléa qui constitue l'essence du contrat d'assurance, cette négligence n'étant pas intentionnelle, et rejeté le moyen tiré de la déchéance de la garantie, aucune clause n'existant dans le contrat.

La société ALLIANZ IARD a interjeté appel de ce jugement le 19 mai 2010.

***

Dans ses dernières conclusions transmises par RPVA le 4 septembre 2013 elle demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris en ses dispositions faisant grief à la Compagnie ALLIANZ et statuant à nouveau,

-Dire que l'application du contrat d'assurance se trouve exclue par suite de l'absence d'aléa par application de l'article L 113-1 du Code des Assurances, la faute de Monsieur [Y] constituant une faute volontaire avec la connaissance et la conscience par l'assuré des conséquences inéluctables et préjudiciables de sa faute et par suite la volonté de créer le dommage tel qu'il est survenu.

-Subsidiairement, prononcer la déchéance de garantie pour déclaration tardive de sinistre faisant grief à la Compagnie ALLIANZ.

-Dire Monsieur [S] irrecevable en sa demande nouvelle dirigée contre la compagnie ALLIANZ par application de l'article 564 du Code de procédure civile,

-Condamner la partie qui succombera à payer à la Compagnie ALLIANZ la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de première instance et d'appel.

*

Dans ses dernières conclusions signifiées le 11 mars 2011 Monsieur [S] demande à la cour de :

-confirmer, le jugement rendu le 15 avril 2010 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS en ce qu'il a condamné in solidum Monsieur [Y] et sa Compagnie

d'assurance ALLIANZ à lui payer la somme de 183.730, 85 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance,

- faire application de l'article 1154 du code civil,

- condamner également la compagnie ALLIANZ IARD in solidum avec Monsieur [R] [Y] au paiement de toutes les condamnations qui seront prononcées,

- condamner in solidum Monsieur [R] [Y] et la compagnie ALLIANZ IARD à lui verser, outre la somme de 2.000 euros déjà mise à la charge de Monsieur [Y] par le premier juge, la somme complémentaire de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

-les condamner in solidum aux dépens.

*

Dans ses dernières conclusions signifiées le 24 février 2011 Monsieur [R] [Y] demande à la cour de réformer partiellement le jugement de débouter Monsieur [O] [S] de l'intégralité de ses demandes, de dire que la société ALLIANZ sera condamnée in solidum avec lui au paiement de toutes condamnations qui seraient prononcées au profit de Monsieur [S] et condamner la société ALLIANZ au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

SUR CE,

Sur la recevabilité de la demande de Monsieur [S] à l'égard de la compagnie d'assurance

Monsieur [S] demande pour la première fois en appel la condamnation in solidum de la compagnie ALLIANZ IARD avec Monsieur [Y]. Il explique qu'il ne connaissait pas les coordonnées de la compagnie d'assurance en première instance.

La compagnie ALLIANZ soutient que cette demande est irrecevable par application de l'article 564 du Code de procédure civile.

La cour constate que la compagnie d'assurances avait été mise dans la cause en première instance par Monsieur [Y] de sorte que la demande de condamnation in solidum en appel ne peut être considérée comme nouvelle mais comme une demande qui est la conséquence de celle présentée en première instance dès lors que la compagnie d'assurance a été condamnée à garantir Monsieur [Y].

Il convient en conséquence de rejeter ce moyen et d'admettre la demande de Monsieur [S] à l'encontre de la compagnie ALLIANZ.

Sur la disparition de l'aléa entraînant l'inexistence du contrat d'assurance

La compagnie ALLIANZ reproche au tribunal d'avoir fait une interprétation très restrictive des dispositions de l'article L113-1 du code des assurances. Elle fait valoir que Monsieur [Y] a été sciemment à l'origine du dommage. Selon elle, il a été informé dès 2002 d'une faute commise par sa soeur qui avait déposé sur son compte personnel un chèque en blanc signé par un client et il s'était alors borné à lui envoyer une lettre évoquant une faute lourde sans prendre aucune mesure pour se séparer d'elle ni exercer sur elle une quelconque surveillance. Il résulte par ailleurs des procès verbaux d'audition de Monsieur [Y] que ce dernier n'exerçait aucun contrôle sur sa soeur, qu'il savait que des clients lui confiaient des chèques en blanc, qu'il avait été contacté personnellement par l'avocat d'un commerçant (Monsieur [S]) qui l'avertissait d'un probable détournement de chèque, qu'en juillet 2002 le service des impôts l'avait informé qu'un chèque de TVA avait été détourné au profit de sa soeur et qu'il n'a rien fait pour remédier à cette situation. Ce faisant, Monsieur [Y] s'est rendu coupable d'une faute intentionnelle excluant tout aléa, ce qui conduirait à écarter la garantie de l'assureur.

Cependant, la cour relève qu'en l'espèce, les procès verbaux d'audition montrent que Monsieur [Y] n'a pris aucune mesure pour contrôler l'activité de sa soeur alors qu'il ne pouvait ignorer qu'elle avait commis des fautes professionnelles au préjudice de ses clients. Ils établissent que s'il n'a pas eu la volonté de provoquer le dommage et de causer un préjudice aux clients concernés, il n'a pas pu ne pas avoir conscience, à raison même de la nature des prestations assurées dans le cadre de son activité spécifique, du préjudice que causaient les actes de sa soeur, de même qu'il ne pouvait dès lors ignorer s'être placé dans une situation telle qu'elle ne pouvait que conduire inéluctablement aux dommages causés.

C'est donc à juste titre que le tribunal a considéré qu'en l'absence d'intention de commettre le dommage le moyen tiré de l'absence d'aléa soulevé par la compagnie d'assurances doit être écarté.

Sur la déchéance

La compagnie d'assurance soutient que Monsieur [Y] qui n'a pas déclaré le sinistre dans le délai d'un mois prévu au contrat est déchu des garanties du contrat.

La cour constate que les dispositions de la police d'assurance intitulées 'Dispositions diverses' précisent dans leur article 1 que ' le délai de déclaration du sinistre est porté de cinq jours à un mois à partir de la date à laquelle vous avez eu connaissance du sinistre'. Cette disposition n'est complétée par aucune autre disposition prévoyant une sanction au défaut de déclaration dans ces délais.

C'est donc à juste titre que le tribunal a rejeté ce moyen en considérant qu'il ne peut être opposé à l'assuré la déchéance de la garantie pour déclaration tardive du sinistre dés lors que celle ci ne fait l'objet d'aucune clause dans la police versée aux débats.

Sur la double indemnisation de Monsieur [S]

Monsieur [Y] soutient qu'il ne pourrait être condamné à indemniser Monsieur [S] puisque sa soeur a également été condamnée à l'indemniser et qu'ainsi Monsieur [S] pourrait recevoir deux fois la même indemnisation pour le même préjudice.

Le tribunal a relevé par des motifs pertinents que la responsabilité du commettant est indépendante de la responsabilité du préposé et a pour finalité essentielle de protéger les victimes contre l'insolvabilité du salarié, étant précisé qu'il n'est pas contesté qu'en l'espèce Madame [Y] n'a versé aucune indemnisation à Monsieur [S] et qu'il appartiendra à Monsieur [Y] de se retourner contre sa soeur le cas échéant.

Ce moyen sera en conséquence rejeté.

Sur l'appel incident de Monsieur [Y]

Monsieur [Y] fait valoir que Monsieur [S] n'est pas fondé à obtenir sa condamnation, les fautes qu'il a commises ayant été à l'origine de la constitution du dommage qu'il allègue. Il lui reproche d'avoir remis à Madame [Y] des chèques sans le nom du bénéficiaire permettant ainsi à cette dernière de commettre l'infraction à l'origine du préjudice allégué et de ne pas avoir respecté les échéances concordataires, ce qui l'a conduit à la liquidation de biens.

La cour considère d'une part que Monsieur [Y], dont la négligence grave dans le contrôle de ses employés a contribué fortement à la constitution du dommage ne peut reprocher à Monsieur [S] de lui avoir fait confiance et d'autre part que si le concordat n'a pas été respecté c'est en raison du détournement de sommes importantes destinées à payer les échéances par Madame [Y].

Sa demande sera donc rejetée.

Sur l'article 700 du Code de Procédure Civile

La compagnie ALLIANZ IARD sollicite la condamnation de la partie qui succombera au paiement de la somme de 5.000 euros à ce titre.

Monsieur [Y] sollicite la condamnation de la compagnie ALLIANZ IARD à lui payer la somme de 5.000 euros à ce titre.

Monsieur [S] sollicite la condamnation in solidum de Monsieur [Y] et de la compagnie ALLIANZ IARD au paiement de la somme de 3.000 euros à ce titre.

La compagnie ALLIANZ et Monsieur [Y] succombant à toutes leurs demandes dans la présente instance, leur demande sera rejetée.

En revanche, il parait équitable de condamner in solidum la compagnie ALLIANZ IARD et Monsieur [Y] à payer à Monsieur [S] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a condamné Monsieur [R] [Y] à payer à Monsieur [O] [S] les sommes de :

-183, 732, 85 euros à titre de dommages et intérêts,

-2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Et en ce qu'il a condamné la compagnie d'assurances ALLIANZ à garantir Monsieur [R] [Y] de ces condamnations dans la limite des plafonds et franchises définies à la police d'assurance,

Y ajoutant condamne in solidum la compagnie d'assurance ALLIANZ IARD au paiement de ces sommes,

Condamne in solidum la compagnie ALLIANZ IARD et Monsieur [R] [Y] à payer à Monsieur [O] [S] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne in solidum la compagnie ALLIANZ IARD et Monsieur [R] [Y] aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE, LE PRESIDENT,

V.PERRET F. FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 10/10764
Date de la décision : 21/11/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°10/10764 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-11-21;10.10764 ?
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