RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
ARRÊT DU 14 Novembre 2013 après prorogation
(n°3, 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/11962
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Mai 2011 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 10/08842
APPELANTE
Madame [Q] [Z] épouse [I]
[Adresse 2]
comparante en personne, assistée de Me Michèle ARNAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : A0177
INTIMEES
SELARL [BK] venant aux droits de la SCP [BW]
[Adresse 1]
représentée par Me Olivier GADY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0372
SELARL [BK] venant aux droits de Maître [XT] [WN]
[Adresse 1]
représentée par Me François LAGUERRE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 35
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Septembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Evelyne GIL, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président
Madame Evelyne GIL, Conseillère
Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère
Qui en ont délibéré
Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'appel formé par [Q] [Z] veuve [I] contre un jugement du conseil de prud'hommes de PARIS en date du 17 mai 2011 ayant statué sur le litige qui l'oppose à ses anciens employeurs, la SCP d'avocats [BW] et Associés et
Me Sylvie TOPALOFF, avocat ;
Vu le jugement déféré ayant débouté [Q] [I] de l'ensemble de ses demandes et l'ayant condamnée aux dépens ;
Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :
[Q] [I], appelante, poursuit :
- la constatation de la dissimulation de son emploi,
- sa classification au statut cadre, niveau 2, 4ème échelon, coefficient 480,
- la fixation de son salaire brut à la somme de 4 848 € par mois,
- la constatation du harcèlement moral et de la discrimination liée à la maladie dont elle a été victime,
- la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, à la date du
15 février 2011,
- subsidiairement, la nullité du licenciement notifié le 9 février 2011, ou la constatation de l'absence de cause réelle et sérieuse le justifiant,
- la condamnation solidaire de la SELARL [BK] venant aux droits de la SCP [BW] et Associés et de Mme [XT] [WN] à lui payer les sommes de :
- 29'088 € sur le fondement de l'article L. 8223-1 du Code du travail,
- 100'687 € à titre de rappel de salaire pour la période de janvier 2006 à décembre 2010, subsidiairement, 46'277 €,
- 10'068 € au titre des congés payés afférents, subsidiairement, 4 627 €,
avec remise des bulletins de paie correspondants, sous astreinte journalière de 500 €,
- 30'000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte des droits à retraite,
- 30'000 € à titre de dommages et intérêts pour la perte de chance résultant des absences de visite médicale d'embauche, de visites annuelles et de visites de reprise,
- 100'000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait du harcèlement, de la discrimination et du sous-classement,
- 40'000 € pour atteinte à sa personne,
- 519,36 € à titre d'heures de travail supplémentaires,
- 14'544 € au titre du préavis,
- 1 454 € au titre des congés payés afférents,
- 805,20 € au titre du droit individuel à la formation,
- 3 376 € à titre de complément d'indemnité de licenciement,
- 116'352 € à titre de dommages et intérêts,
- 4 848 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,
avec intérêts de droit à compter de la convocation devant le bureau de conciliation,
- 6'000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des dépens de l'instance ;
La SELARL [BK] venant aux droits de la SCP d'avocats [BW] et Associés, intimée, conclut à la confirmation du jugement entrepris ;
La SELARL [BK] venant aux droits de madame [XT] [WN], intimée, conclut :
- au rejet des débats des pièces numérotées 122, 123, 124 et 126 produites par [Q] [I],
- à la confirmation du jugement déféré,
- au débouté de l'appelante de l'ensemble de ses demandes.
FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SCP d'avocats [BW] et Associés et Me [XT] [WN] exerçaient leur activité d'avocat dans des locaux communs situés à [Adresse 3], où ils travaillaient ensemble sur les dossiers des victimes de l'amiante.
Ils appliquaient la convention collective nationale de travail régissant les rapports entre les avocats et leur personnel.
Suivant contrat de travail à durée indéterminée signé le 9 décembre 2002, ils ont tous deux engagé [Q] [I], à compter de cette date, en qualité de juriste, moyennant un salaire mensuel net de 2 515 €, pour un horaire de travail hebdomadaire de 35 heures.
Puis, par contrat de travail à durée indéterminée conclu le 1er février 2003, Me [XT] [WN] a embauché [Q] [I], à compter de cette date, en qualité de juriste, moyennant une rémunération mensuelle nette de 1 830 € pour 35 heures de travail par semaine.
Selon contrat de travail à durée indéterminée signé le 1er mars 2003, la SCP [BW] et Associés représentée par son gérant, Me [E] [BW], a engagé [Q] [I], à compter de cette date, en qualité de juriste, moyennant une rémunération mensuelle nette de 1 830 € pour 35 heures de travail hebdomadaire.
La salariée a été placée en arrêt de travail pour cause de maladie du 18 janvier au 30 juin 2005, puis, après une période de travail à mi-temps thérapeutique du 1er juillet au 31 août 2005, à nouveau du 1er septembre au 31 décembre 2005.
Par la suite, elle a subi un arrêt maladie du 12 décembre 2007 au 13 mars 2008 et a été de nouveau arrêtée à partir du 14 septembre 2009, sans interruption jusqu'à l'avis d'inaptitude à tous les postes de l'entreprise établi par le médecin du travail, le 14 décembre 2010.
À la fin de l'année 2008, [Q] [I] a sollicité le bénéfice du statut cadre qui ne lui a pas été accordé par son employeur.
Elle a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS, le 1er juillet 2010, de ses demandes en résiliation judiciaire du contrat de travail, paiement des indemnités de rupture et paiement d'un rappel de salaire, d'une indemnité pour travail dissimulé et de dommages et intérêts pour la perte de droits à la retraite.
Par lettre recommandée avec avis de réception 25 janvier 2011, elle a été convoquée à se présenter le 3 février 2011 à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement.
Le 9 février 2011, la SCP [BW] et Associés lui a notifié son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
La SCP d'avocats [BW] et Associés et Me [XT] [WN] ont par la suite constitué la SELARL [BK] qui vient désormais à leurs droits respectifs.
Les parties ont développé à l'audience leurs moyens et présenté leurs demandes, tels que formulés dans leurs conclusions respectives.
SUR CE
- Sur la demande de rejet des pièces produites par l'appelante sous les numéros
122, 123, 124 et 126
Les pièces produites sous les numéros 122, 123 et 124 sont constituées de 3 courriels adressés par [N] [R] épouse [X], secrétaire d'avocats, à [Q] [I], les 2 décembre 2005 et 7 septembre 2009.
Aux termes d'une attestation établie le 26 avril 2011, [N] [X] se déclare stupéfaite d'apprendre que [Q] [I] s'est permise de produire ces courriels dans l'instance l'opposant à la société d'avocats dont elle est toujours la salariée.
S'agissant d'un échange de correspondance privée, les courriels émanant de [N] [X] seront retirés du dossier de l'appelante et rejetés des débats.
[G] [F], expéditrice du courriel du 19 juillet 2007 constituant la pièce numéro 126, n'ayant pas émis une semblable protestation, la pièce sera maintenue au dossier, étant observé qu'elle relate des faits s'appliquant au licenciement d'une salariée sans lien avec le présent litige.
- Sur la demande de classification de la salariée dans la catégorie des cadres
[Q] [Z] est titulaire du diplôme de docteur de l'université de [1] en droit qui lui a été délivré le 16 juillet 1999 ainsi que du certificat d'aptitude à la profession d'avocat obtenu le 14 décembre 2001.
Embauchée par la SCP [BW] et Associés et par Me [XT] [WN], elle n'a pas souhaité exercer les fonctions d'avocat. Après son engagement en qualité de juriste, elle a été chargée de rédiger des conclusions selon un canevas préétabli et de constituer des dossiers de plaidoirie pour les avocats. En 2004, elle a été affectée au service FIVA pour constituer, avec les autres juristes de ce service, les dossiers de demandes d'indemnisation ainsi que les dossiers de contestation des offres d'indemnisation.
Aucun des contrats de travail qui lui ont été consentis ne mentionne la classification de son emploi de juriste mais ses bulletins de paie font état d'un emploi de 'clerc' au coefficient 285. À partir du mois de janvier 2009, ses bulletins de paie retiennent l'emploi de 'juriste' au coefficient 300.
Dans une lettre du 15 mai 2009, elle a rappelé que lors des entretiens de décembre 2008, elle avait sollicité l'évolution de son statut, et a renouvelé sa demande.
Le 7 septembre 2009, Mes [WN], [BW] et [H] lui ont répondu par la négative aux motifs qu'elle n'avait pas acquis l'autonomie dans la gestion des dossiers que suppose la position de cadre et que la qualité de son travail ne justifiait pas cette position.
Le coefficient 300 dont bénéficiait [Q] [I] est attribué par la convention collective au salarié ' ayant à effectuer des missions de représentation et/ou des travaux d'analyses et de résolution de situations complexes, faisant appel à des connaissances pratiques et théoriques approfondies, sous la responsabilité d'un responsable hiérarchique,... capable de remplacer occasionnellement un Cadre pendant une absence de courte durée et de recevoir des clients '.
Le coefficient 480 revendiqué par l'appelante est quant à lui attribué au personnel qui
' dispose d'une technicité approfondie lui permettant d'exercer ses fonctions avec une large autonomie : il anime et dirige l'activité d'une ou plusieurs personnes, dans son domaine d'activité il engage l'entreprise dans le cadre d'une délégation limitée, et il est amené à décider de solutions adaptées et à les mettre en oeuvre '.
Au vu des instructions suivantes que lui donnait Me [K] [H], le 28 avril 2004, alors qu'elle avait déjà un an et demi d'ancienneté :
'- ajouter le bordereau de communication de pièces dans le dossier plaidoiries ;
- ajouter la saisine de la Caisse du 27 décembre 2001 dans le dossier de plaidoiries ;
- vérifier que les documents non numérotés figurant en cote 6 ont bien été communiqués (plans) ;
- faire faire une copie des décisions récentes de la Cour de Cassation ci-jointes ;
- ajouter toutes les pièces dont nous faisons état dans la partie complémentaire sur le rapport du CHSCT, etc...
- ajouter les arrêts du 28 février 2002 ;
- retirer la deuxième côte qui fait état de la décision ...'
Il apparaît que [Q] [I] ne disposait pas de la large autonomie d'un Cadre au sens de la convention collective et que, si elle a pu accueillir et former quelques stagiaires et employés débutants, elle ne justifie pas avoir animé et dirigé de façon permanente l'activité d'un ou plusieurs salariés du cabinet. Dans ces conditions, le conseil de prud'hommes a justement estimé qu'elle ne pouvait prétendre à la qualification de Cadre, ni à la fixation de son salaire brut mensuel à la somme de 4 848 €, ni à des dommages et intérêts pour la perte des droits à retraite correspondants.
- Sur l'exécution du contrat de travail
Sur la dissimulation d'emploi et la demande en paiement d'une indemnité pour emploi dissimulé (29'088 €)
Un premier contrat de travail a été signé par la SCP [BW] et Associés et
Me [XT] [WN], d'une part, et par [Q] [I], d'autre part, le 9 décembre 2002.
Les employeurs soutiennent que ce contrat n'a jamais été exécuté car il était destiné à permettre à l'appelante de justifier d'une situation professionnelle et de salaires pour obtenir l'attribution d'un logement.
Toutefois, il n'est pas contesté que l'appelante a effectué, d'octobre 2002 à janvier 2003, des travaux qui ont fait l'objet de factures d'honoraires payées pour octobre, novembre, décembre 2002 (1 143,37 € + 1 200 € + 2 400 €) par Me [XT] [WN], et pour janvier 2003 (2 400 €) par la SCP [BW] et Associés.
[Q] [I] qui a accepté le paiement de ses prestations sous forme d'honoraires n'a pas réclamé l'exécution du contrat de travail du 9 décembre 2002 et le paiement des salaires fixés par ce contrat. N'ayant été destinataire ni d'instructions, ni de notes de service, ni de bulletins de salaire, elle n'apporte pas la preuve qu'elle a effectué, parallèlement à ses prestations de service, un travail salarié sous la subordination de Me [XT] [WN] et de la SCP [BW] et Associés. L'intention de ceux-ci de dissimuler son emploi n'est en conséquence pas établie et le rejet de ce chef de demande par le conseil de prud'hommes doit être confirmé.
Sur la demande de remise sous astreinte des bulletins de salaire correspondant à l'emploi de juriste et sur la demande en paiement d'un rappel de salaire et de congés payés à ce titre (46'277 € + 4 627 €)
[Q] [I] fait valoir que pour la période considérée, de janvier 2006 à décembre 2010, ses bulletins de paie ont été établis en considération d'un emploi de clerc alors qu'elle avait été embauchée en qualité de juriste et que les salaires versés pour cet emploi étaient inférieurs aux minima conventionnels fixés pour la qualification de juriste.
Il sera fait droit à sa demande tendant à la remise de bulletins de salaire rectifiés, en ce sens qu'ils porteront la mention de son emploi de juriste, et ce, pour la période de janvier 2006 à décembre 2008, étant observé qu'à partir de janvier 2009, ils mentionnent son emploi de juriste conformément aux contrats de travail. La fixation d'une astreinte ne paraît pas, en l'état, nécessaire à l'exécution de cette décision.
La salariée n'a pas produit les éléments permettant de constater que les salaires qui lui ont été versés sont inférieurs aux minima conventionnels fixés pour l'emploi de juriste au coefficient 285, il n'y a donc pas lieu à rappel de salaire et de congés payés à ce titre.
Sur la demande en paiement des heures de travail supplémentaires effectuées en 2009 (519,36 €)
[Q] [I] soutient qu'elle travaillait très souvent au-delà des 35 heures hebdomadaires prévues par son contrat de travail et dresse un relevé précis des dépassements d'horaires qu'elle a effectués les 18 et 20 février, 10, 12 et 20 mars, 29 avril, 19 mai, 19 juin et 20 août 2009, totalisant 13 heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées.
En l'absence d'un système fiable et infalsifiable de contrôle des horaires d'arrivée et de départ des salariés, les éléments produits par l'appelante sont de nature à étayer sa réclamation et ne sont pas contredits par des éléments fournis par l'employeur, il sera en conséquence fait droit à ce chef de réclamation.
Sur la demande de dommages et intérêts pour l'absence d'organisation des visites obligatoires au médecin du travail (30'000 €)
[Q] [I] reproche à ses employeurs de s'être abstenus de la faire convoquer par la médecine du travail à l'occasion de son embauche, pour les visites annuelles et les visites de reprise obligatoires après arrêt maladie et fait valoir une perte de chance de bénéficier d'un aménagement de son temps de travail ou d'un avis d'aptitude dans des conditions de travail modifiées qui lui aurait permis d'éviter la grave dépression qu'elle a subie.
L'intéressée n'ignorait pas en sa qualité de juriste, et parce qu'elle l'a fait le 8 décembre 2010, qu'elle pouvait saisir elle-même le médecin du travail et obtenir sa convocation pour une visite médicale d'embauche, une visite annuelle ou une visite de reprise après arrêt maladie, après avoir demandé à son employeur d'effectuer les souscriptions nécessaires à sa démarche.
Le lien de cause à effet entre l'omission de l'employeur et la perte de chance invoquée n'étant pas démontré, ce chef de demande sera rejeté.
Sur l'application du principe d'égalité de traitement entre les juristes et sur la demande en paiement d'un rappel de salaire et de congés payés à ce titre
(100'687 € + 10'068 €)
L'appelante fait valoir qu'entre 2006 et 2010, elle a perçu une rémunération de 190'202€ alors que ses collègues juristes, [B] [W], [M] [Y] et [A] [U], ont reçu respectivement 289'852 €, 296'321 € et 284'316 €.
Elle ne saurait cependant revendiquer un salaire égal à celui de [A] [U] qui exerçait des fonctions de coordination de l'équipe du département FIVA et était ainsi son supérieur hiérarchique.
Elle ne peut davantage comparer sa situation professionnelle avec celle de [M] [Y] qui est devenue avocat en avril 2010, qui gérait de lourds dossiers tels que ceux des victimes des essais nucléaires français, des victimes de l'amiante, des victimes de l'attentat de KARACHI, des victimes de la fusillade du conseil municipal de [Localité 2] et qui était chargée de relation avec la presse et d'une fonction de représentation du cabinet auprès du médiateur de la république à l'occasion du projet de loi relatif à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires.
[B] [W] qui est également devenue avocat se déplaçait aux audiences pour assister Me [WN] à l'occasion de dossiers qui ne relevaient pas seulement du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Elle rencontrait de façon régulière des experts médicaux et représentait le cabinet au sein des assemblées générales des associations des victimes de l'amiante.
Il apparaît que les fonctions étendues attribuées à ses collègues juristes, leur mobilité et leur progression ne permettent pas la comparaison de leur situation avec celle de [Q] [I].
La décision de rejet de la demande de rappel de salaire et de congés payés prononcée par le conseil de prud'hommes sera en conséquence confirmée.
Sur le harcèlement moral et la discrimination pour raisons de santé
Pour illustrer le harcèlement moral et la discrimination dont elle se plaint, la salariée fait état de sa relégation dans un espace réduit, puis dans un bureau situé au quatrième étage, puis de sa privation de bureau de juillet 2005 à mars 2006, de sa mise à l'écart et de son isolement, du défaut de communication avec [XT] [WN] qui ne lui adressait plus la parole, de sa surcharge de travail, du refus d'aménagement de ses horaires de travail qui lui aurait permis notamment d'arriver le matin à 10 heures, de son affectation à temps plein aux dossiers du FIVA, le contentieux de la faute inexcusable lui ayant été retiré, de l'attribution de tâches administratives répétitives sous qualifiées, du remplacement du responsable du service par une salariée non juriste moins qualifiée qu'elle, du refus de lui attribuer le statut de cadre accompagné de propos insultants et blessants proférés par [XT] [WN] en présence de tous ses collègues, de la recherche de sa démission, du dénigrement dont elle a été l'objet, de la surveillance et du contrôle systématique de son travail révélant la recherche d'éventuelles erreurs, des reproches relatifs à ses arrêts de travail et des moqueries invoquant au cours de réunions sa maladie imaginaire.
À l'appui de ses doléances, elle produit les attestations de [S] [HS] et de [L] [HS] qui relatent que [Q] [I] a été progressivement privée de ses attributions, qu'elle pleurait chaque fois qu'elle sortait du bureau de [XT] [WN] qui par ailleurs, ne lui adressait pas la parole, qu'elle était privée de congé pour avoir en toute bonne foi bénéficié de congés payés auxquels elle n'avait pas droit en 2005.
Ces affirmations sont combattues par les témoignages d'autres salariés, tel celui de [O] [C] qui relate que, sans nouvelles de [Q] [I], [XT] [WN] avait fait part de ses inquiétudes et demandé si quelqu'un pouvait la rassurer sur son état de santé, et qui dément toute moquerie ou toute qualification haineuse de sa part.
[V] [D] explique pour sa part les raisons objectives de la privation de plusieurs salariés de case courrier comme de dictaphone, de l'attribution à la seule [J] [P] de l'accès à la modification des tableaux de contestation des offres du FIVA. Les photographies des bureaux successifs occupés par l'appelante ne permettent pas de retenir la volonté de mise à l'écart, d'isolement et d'humiliation dont elle se plaint.
Par ailleurs, aucun élément n'établit que la diminution des attributions qui lui étaient confiées a procédé d'agissements discriminatoires ou constitutifs de harcèlement moral mais paraît plutôt résulter de la considération par l'employeur de sa charge de travail qu'elle déclare très lourde et de son état de santé.
Le refus d'aménagement de ses horaires n'est pas justifié, alors même qu'elle a pu bénéficier pendant un certain temps d'une activité à mi-temps pour raisons thérapeutiques. De même, aucun document ne confirme le refus de Me [WN] de lui adresser la parole, les propos blessants et insultants qu'elle aurait tenus en présence de ses collègues, les moqueries relatives à sa maladie imaginaire, l'injonction qui lui aurait été donnée de différer à plusieurs reprises une intervention chirurgicale, ainsi que la surveillance spéciale de son travail en vue de la recherche de fautes professionnelles.
La cour ne peut que constater l'absence de faits établis de nature à faire présumer un harcèlement moral au préjudice de [Q] [I].
La preuve d'agissements répétés ayant eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité de la salariée, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son à venir professionnels, n'a pas été apportée.
De même que la discrimination à son encontre, en raison de ses problèmes de santé, n'a pas été démontrée, cette discrimination se trouvant contredite par la salariée elle-même, dans une lettre du 15 mai 2009 adressée à ses employeurs en ces termes :
' Chère [XT], Chère [T], Cher [E], Cher [K],
...............................................................................................................................................
Mes employeurs se sont comportés pendant ma maladie de façon bien plus qu'honorable, digne du Cabinet humain et généreux qu'ils dirigent, et je leur en suis infiniment et définitivement reconnaissante.'
La demande de dommages et intérêts pour harcèlement et discrimination sera en conséquence rejetée.
- Sur la rupture du contrat de travail et ses conséquences
Sur la résiliation judiciaire
Les manquements allégués à l'encontre des employeurs, la dissimulation d'emploi de la salariée, sa sous qualification, le harcèlement moral et la discrimination à son encontre, n'ayant pas été établis, il ne sera pas fait droit à cette demande.
Sur le licenciement et ses conséquences
Le licenciement de [Q] [I] lui a été notifié le 9 février 2011, au vu de l'avis d'inaptitude à tous postes dans l'entreprise émis par le médecin du travail, à l'issue d'une seule visite en raison du danger immédiat pour la santé de l'intéressée, après avoir interrogé par deux fois le médecin sur les possibilités de reclassement de la salariée, et après avoir proposé à celle-ci un aménagement de poste au sein du cabinet ou un reclassement au sein de son établissement de [Localité 1].
Ce licenciement est justifié par l'inaptitude de l'appelante à tous postes dans l'entreprise, par l'impossibilité de procéder à son reclassement au sein du cabinet parisien et par son défaut d'acceptation d'un reclassement au sein du cabinet de [Localité 1].
[Q] [I] n'est pas fondée à réclamer des indemnités compensatrices de préavis et de congés payés sur préavis dès lors que son état de santé ne lui permettait pas d'effectuer ce préavis.
Le licenciement étant justifié, il n'y a pas lieu à indemnité pour absence de cause réelle et sérieuse. Par ailleurs, le complément d'indemnité de licenciement n'est pas justifié et la régularité de la procédure de licenciement ne permet pas de faire droit à la demande de dommages et intérêts pour non-respect de cette procédure.
L'employeur a régulièrement informé [Q] [I], dans la lettre de licenciement, qu'elle bénéficiait d'un volume de 88 heures au titre du droit individuel à la formation qui pouvait se traduire par le versement d'une allocation pour financer, si elle en faisait la demande, une action de bilan de compétences, de validation des acquis de l'expérience ou de formation. Conformément aux dispositions des articles L. 6323-17 et suivants du Code du travail, à défaut d'une telle demande, l'employeur n'est pas tenu d'engager la somme correspondant au solde du nombre d'heures acquises et non utilisées, encore moins de la verser au salarié qui peut faire une demande d'exercice de ses droits à DIF acquis précédemment, soit à son nouvel employeur, soit, s'il est demandeur d'emploi, au PÔLE EMPLOI.
La demande de l'appelante tendant au paiement des heures acquises au titre du DIF (805,20 €) ne peut qu'être rejetée.
- Sur la demande de dommages et intérêts pour atteinte à la personne de la salariée (40'000 €)
[Q] [I] soutient que les documents produits par ses anciens employeurs, tirés de leur contexte et destinés à dénigrer sa compétence professionnelle alors qu'aucune insuffisance ne lui a jamais été reprochée lui ont causé préjudice en aggravant son état de santé et en compromettant sa guérison.
Cependant, les observations écrites qui lui ont été ponctuellement adressées ont été versées aux débats au soutien des moyens de défense de ses employeurs expliquant les raisons pour lesquelles ils n'avaient pu accéder à sa demande de promotion en qualité de Cadre.
S'agissant du simple exercice du droit de se défendre en justice, et non d'un abus, ce chef de demande doit être rejeté.
- Sur la charge des dépens et les demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du Ode de procédure civile
L'employeur, succombant partiellement à l'issue de l'appel, supportera les dépens de la procédure prud'homale.
Au vu des circonstances de la cause, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais non taxables qu'elles ont exposés chacune pour leur part à l'occasion de cette procédure.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté [Q] [I] de sa demande tendant à la remise de bulletins de paie rectifiés et l'a condamnée aux dépens ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Écarte des débats les pièces produites par [Q] [I] numérotées 122, 123 et 124 ;
Condamne la SELARL [BK] venant aux droits de la SCP d'avocats [BW] et Associés et aux droits de Me [XT] [WN] :
à remettre à [Q] [Z] veuve [I] des bulletins de salaire rectifiés portant la mention de son emploi de juriste pour la période de janvier 2006 à décembre 2008,
à lui payer la somme de 519,36 € au titre des heures de travail supplémentaires effectuées en 2009, avec intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2013, date de la demande;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne la SELARL [BK] aux dépens de première instance et d'appel.
Le Greffier,Le Président,