La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/11/2013 | FRANCE | N°11/07522

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 13 novembre 2013, 11/07522


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 13 NOVEMBRE 2013



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/07522



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Mars 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/15827







APPELANTE





SAS NEWSTONE agissant poursuites et diligences de son Président et/ou tous


représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par : Me François TEYTAUD (avocat au barreau de PARIS, toque : J125)

Assistée de : Me Aurélie TR...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 13 NOVEMBRE 2013

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/07522

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Mars 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/15827

APPELANTE

SAS NEWSTONE agissant poursuites et diligences de son Président et/ou tous

représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par : Me François TEYTAUD (avocat au barreau de PARIS, toque : J125)

Assistée de : Me Aurélie TRASSY-PAILLOGUES substituant Me Pierre POPESCO et Me Jonathan MATTOUT du Cabinet HERBERT SMITH FREEHILLS avocats au barreau de PARIS toque : J 025

INTIMEES

SAS QUADRI [R] ARCHITECTURE anciennement dénommée 'AGENCE [R] ARCHITECTURE ET ASSOCIES' prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par : la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES (Me Véronique DE LA TAILLE) (avocats au barreau de PARIS, toque : K0148)

Assistée de : Me Thomas BEAL substituant Me Gaëlle DADEZ avocat au barreau de PARIS toque : P0217

SARL ATELIER [P] [D] prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par : Me Sylvie CHARDIN (avocat au barreau de PARIS, toque : L0079)

Assistée de : Me Jean-Michel CATALA plaidant pour l'AARPI CATALA (avocat au barreau de PARIS, toque : P0571)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Mai 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Président de chambre

Madame Marie-José THEVENOT, Conseillère

Madame Dominique BEAUSSIER, Conseillère

qui en ont délibéré

Rapport oral fait par Madame Dominique BEAUSSIER, conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Elisabeth VERBEKE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-José THEVENOT, Magistrat signant aux lieu et place du Président empêché et par Guillaume MARESCHAL, Greffier.

*******

Par acte notarié du 31 janvier 2006, les SCI Anypome et Bado Soulou ont consenti à la société Europa Heron une promesse de vente de terrains à construire à Saint-Denis (93) pour un prix de 15.200.000F valable jusqu'au 2 mai 2007.

La promesse était consentie sous conditions suspensives à peine de caducité, d'une part du dépôt d'une demande de permis de construire au plus tard le 31 juillet 2006, d'autre part de la signature par le bénéficiaire d'une promesse de vente portant sur des terrains contigus appartenant à Réseau Ferré de France contenant constitution de cour commune avant le 31 juillet 2006.

Dans le cadre de cette opération immobilière la société NEWSTONE, promoteur immobilier autorisé par les SCI bénéficiaires de la promesse de déposer le permis de construire, a chargé l'Agence d'Architecture [R] conjointement avec la société Atelier [P] [D] d'une mission de maîtrise d'oeuvre de conception et d'exécution dans le cadre d'un groupement d'architectes dont l'agence [R] était le mandataire.

Le groupement a établi un dossier de demande de permis de construire provisoire qui a été déposé le 28 juillet 2006.

Le 1er septembre 2006, l'agence DI [R] a adressé à la société NEWSTONE une facture pour un montant de 137.498,50€ TTC qui a été réglée à la demande de la société NEWSTONE par la société EUROPA REAL ESTATE II.

En novembre 2006, le groupement de maîtrise d'oeuvre a été informé par les propriétaires des terrains que la promesse de vente consentie à la société Auropa Heron était caduque depuis le 31 juillet 2006 ; Toutefois la société NEWSTONE a communiqué, le 6 décembre 2006, à l'Agence [R] une copie de ladite promesse faisant état du délai de réalisation de la vente jusqu'au 2 mai 2007.

Le 16 novembre 2006, la société NEWSTONE a envoyé pour signature au groupement un contrat de maîtrise d'oeuvre ; Ce projet n'a pas été retourné signé.

Le 20 décembre 2006 le groupement a remis à la société NEWSTONE un dossier de demande de permis de construire portant sur le projet définitif ainsi qu'une note n°2 d'honoraires correspondant à la totalité des phases 'esquisse préliminaire', 'APS' et 'dépôt permis de construire et permis de démolir' pour un montant de 263.600€ TTC.

Par courrier du 4 janvier 2007, le groupement a adressé à nouveau à la société NEWSTONE sa note d'honoraires n°2 et a interrogé la société NEWSTONE sur la caducité de la promesse.

Par courrier du 17 janvier 2007, la société NEWSTONE a démenti la caducité de la promesse et a demandé au groupement de poursuivre sa mission.

Par courrier du 13 mars 2007, les propriétaires des terrains ont confirmé la caducité de la promesse de vente depuis le 31 juillet 2006, la signature de la promesse de vente entre RFF et Europa Heron n'étant pas intervenue dans le délai convenu.

Par courrier du 16 mars 2007, la société Europa Heron a réclamé au groupement le remboursement des honoraires perçus et l'indemnisation de son préjudice à hauteur de 100.000€ pour rupture de l'engagement des maîtres d'oeuvre, en invoquant un manquement du groupement à ses obligations de loyauté pour avoir travaillé sur projet concurrent au sien.

Par courrier du 22 mars 2007, le groupement a notifié à la société NEWSTONE la résiliation de son contrat de maîtrise d'oeuvre et sollicité le règlement des factures impayées.

Par courrier reçu le 18 avril 2007, la société EUROPA CAPITAL a donné acte au groupement de la rupture unilatérale et fautive du contrat de maîtrise d'oeuvre.

Par arrêté du 14 mai 2007, la mairie de [Localité 1] a refusé de délivrer le permis de construire au motif que 'le projet était déficitaire de 9 places de stationnement pour la partie bureaux / commerce et que 3 de ces places présentent une longueur ingérieure à 5m et 13 une largeur inférieure à 2,50m'.

A défaut de paiement de la facture n°2, l'Agence d'Architecture [R] et la société Atelier [P] [D] ont assigné la société NEWSTONE et la société Europa Heron.

Par jugement du 1er mars 2011, le tribunal de grande instance de Paris a, après avoir retenu l'absence de faute justifiant une résiliation au tort de l'une ou l'autre partie, prononcé la résiliation du contrat de maîtrise d'oeuvre au 22 mars 2007, condamné la société NEWSTONE à payer aux maîtres d'oeuvre la somme de 263.600€ avec intérêts au taux légal à compter du 4 janvier 2007 au titre du solde leurs honoraires, débouté la société Atelier [P] [D] de ses demandes à l'encontre de la société Europa Heron, débouté les parties de leurs demandes de dommages et intérêts, condamné la société NEWSTONE à payer aux maîtres d'oeuvre 6.000€ au titre de leurs frais irrépétibles.

La société NEWSTONE a relevé appel de cette décision et par conclusions du 24 mai 2013, elle demande à la cour de l'infirmer, et de :

- dire que le contrat de maîtrise d''uvre générale communiqué le 19 novembre 2006 par NEWSTONE à l'Agence [R] régit les relations entre l'Agence [R] et l'Atelier [P] [D] d'une part, et NEWSTONE d'autre part,

- dire que le Groupement constitué par l'Agence [R] et l'Atelier [P] [D] s'est rendu coupable d'inexécution fautive du contrat de maîtrise d''uvre générale le liant à NEWSTONE,

En conséquence,

- condamner le Groupement à rembourser la somme de 305.778,22 € (soit 263.600,19€

avec intérêts au taux légal à compter du 4 janvier 2007 plus 12.000€ au titre des frais irrépétibles) payée par elle au Groupement en application du jugement entrepris avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision à intervenir,

- prononcer la résolution du contrat de maîtrise d''uvre générale aux torts exclusifs du

Groupement,

- condamner solidairement l'Agence [R] et l'Atelier [P] [D] à lui

payer la somme de 164.448,21 euros avec intérêts au taux légal à compter du jour de son paiement, à charge pour NEWSTONE de restituer ladite somme à la personne qui s'en était initialement acquittée, ainsi que la somme de 2.084.846,34 euros au titre du préjudice subi,

A titre subsidiaire,

- à défaut de faute retenue à l'encontre du groupement, limiter le montant des honoraires à payer à la somme de 44.001,50 € HT compte tenu du règlement opéré à hauteur de 137.498,50€ HT,

En tout état de cause,

- condamner l'Agence [R] et l'Atelier [P] [D] à lui payer la somme de 40.000 euros chacun en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions du 17 mai 2013, la société QUADRI [R] ARCHITECTURE anciennement dénommée Agence [R], forme appel incident et sollicite le prononcé de la résiliation du contrat de maîtrise d''uvre conclu entre le Groupement et la société NEWSTONE aux torts exclusifs de cette dernière, et la condamnation de celle-ci à lui verser la somme de 50.000€ à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et abus de droit d'ester en justice, outre 25.000€ au titre de ses frais irrépétibles.

Par conclusions du 21 mai 2013, la société Atelier [P] [D] forme appel incident et sollicite la confirmation du jugement entrepris sauf en ce qu'il n'a pas retenu le manquement de la société NEWSTONE dans ses obligations contractuelles et n'a pas prononcé la résiliation du contrat aux torts exclusifs de celle-ci ;

En conséquence, elle demande à la cour de prononcer la résiliation du contrat de maîtrise d''uvre aux torts exclusifs de la société NEWSTONE, et de condamner celle-ci à lui verser la somme de 25.000€ à titre de dommages et intérêts en raison de son comportement fautif, outre 15.000€ au titre de ses frais irrépétibles.

SUR CE

Sur les relations existant entre les parties

Les parties conviennent de l'existence d'une relation contractuelle entre la société NEWSTONE d'une part, et le groupement de maîtrise d'autre part constitué de l'Agence [R] et l'Atelier [P] [D] et dont l'Agence [R] était le mandataire.

Toutefois, elles sont en désaccord sur l'opposabilité des clauses du contrat de maîtrise d'oeuvre communiqué par la société NEWSTONE pour signature le 16 novembre 2006 au groupement qui ne l'a pas retourné signé.

La société NEWSTONE soutient que malgré l'absence de signature, il a été accepté par le groupement qui en a entrepris l'exécution et s'est fondé sur celui-ci pour l'établissement de la facture dont elle réclame paiement.

Les maîtres d'oeuvre opposent qu'ils ont commencé à travailler sur le projet bien antérieurement à la proposition de contrat du 16 novembre 2006 et qu'ils ne l'ont pas signé en raison d'un désaccord sur l'assiette du montant des travaux.

Il est constant que le défaut de signature d'un contrat n'exclut pas son acceptation tacite dés lors qu'il s'accompagne d'une exécution conforme.

En l'espèce, si la proposition de contrat établie le 11 juillet 2006 par l'Agence [R] tablait sur une estimation de travaux à hauteur de 35.140.000€ HT, force est de constater que la facture litigieuse du 20 décembre 2006 est quant à elle calculée, sans aucune réserve, sur la base d'un estimatif de travaux de 33.000.000€ HT tel que mentionné dans la proposition de contrat du 16 novembre 2006, les pourcentages affectés aux différentes missions correspondant également audit contrat avec déduction du trop versé au titre des esquisses.

Le groupement ne verse aucun élément établissant que, postérieurement à cette proposition de la société NEWSTONE qui faisait suite à une précédente proposition de septembre 2006, il aurait discuté le montant estimatif des travaux servant de base à sa rémunération, dont il prétend qu'il constituerait le point de désaccord.

En conséquence il sera retenu que le contrat proposé le 16 novembre 2006 par la société NEWSTONE a été tacitement accepté par le groupement.

Sur la résiliation du contrat

S'agissant d'un contrat à exécution successive et en partie exécuté puisque le groupement a remis à la société NEWSTONE le dossier de demande de permis de construire, il ne peut faire l'objet de résolution, seule la résiliation étant susceptible d'être prononcée.

Il résulte de leurs écritures que les parties se rejettent la responsabilité de la résiliation du contrat chacune reprochant à l'autre son manque de loyauté dans l'exécution de leurs obligations réciproques ; C'est ainsi que le groupement reproche à la société NEWSTONE de l'avoir tenue dans l'ignorance de la caducité de la promesse de vente, allant jusqu'à lui envoyer une copie de la promesse de vente tronquée pour lui faire croire que la promesse de vente était toujours valable, et que la société NEWSTONE reproche au groupement d'avoir, à partir de début novembre 2006, travaillé sur le projet concurrent de GECINA au mépris de ses obligations à son égard.

Il est constant que les parties à un contrat doivent exécuter leurs obligations avec loyauté à l'égard de leur co-contractant et ne pas lui cacher des éléments susceptibles de compromettre sa bonne et entière exécution.

- sur la faute de la société NEWSTONE

Il est acquis que la promesse de vente du 31 janvier 2006 comportait une condition suspensive de signature par son bénéficiaire, avant le 31 juillet 2006 à peine de caducité, d'une promesse de vente portant sur des parcelles appartenant à Réseau Ferré de France ; Cette condition ne s'étant pas réalisée, la promesse est donc devenue caduque le 31 juillet 2006.

S'il résulte des échanges de courrier que la société EUROPE HERON a tenté d'obtenir une prolongation du délai, les SCI propriétaires l'ont cependant informée par courrier du 23 octobre 2006 que les discussions ne pourraient aboutir, sa proposition étant très largement inférieure à celle de certains de ses concurrents.

La société NEWSTONE qui était en possession de la promesse de vente et qui était évidemment intéressée à sa validité puisqu'elle conditionnait la réalisation du projet qu'elle était chargée d'exécuter, ne pouvait ignorer cette situation et ne rapporte pas la preuve que, ainsi qu'elle le prétend des pourparlers se seraient poursuivis au-delà d'octobre 2006.

Toutefois, il est établi qu'elle a sciemment maintenu le groupement dans l'ignorance de la caducité de la promesse de vente : Elle leur a adressé le 6 décembre 2006 une copie de la promesse de vente dans lequel ne figurait pas le dernier paragraphe de la page mentionnant que la condition suspensive était caduque de plein droit à défaut de signature avant le 31 juillet 2006 ; Par ailleurs, elle a assuré au groupement, dans son courrier du 17 janvier 2007 en réponse à l'interrogation de celui-ci, que la promesse de vente n'était pas caduque et lui a demandé de poursuivre sa mission.

La responsabilité de la société NEWSTONE dans la résiliation du contrat ne saurait être rejetée au seul motif retenu par le tribunal que l'obligation de la société NEWSTONE résidait uniquement dans le paiement des honoraires et que la validité du titre de propriété était sans incidence sur le contrat de maîtrise d'oeuvre ; En effet, outre que le comportement de la société NEWSTONE constituait en sa qualité de maître d'ouvrage une violation de la plus élémentaire obligation de loyauté, il est constant que la caducité de la promesse de vente était de nature à rendre impossible toute réalisation effective du projet de construction et par là à obérer une partie importante des honoraires à venir du groupement.

En conséquence, la faute de la société NEWSTONE et ses conséquences justifient la résiliation du contrat.

- sur la faute du groupement

Il sera relevé au préalable que le refus de délivrance du permis de construire notifié le 14 mai 2007 ne peut en aucun cas avoir justifié la résiliation en mars 2007 du contrat de maîtrise d'oeuvre celle-ci lui étant antérieure.

Le groupement conteste avoir accepté toute participation au projet GECINA / KAUFMAN avant la résiliation du contrat.

Toutefois, outre que le groupement ne s'explique pas sur sa présence à une réunion du 21 novembre 2006 en mairie avec les représentant des SCI et de KAUFMAN (courrier des SCI du 21 novembre 2006), il sera relevé que dans son courrier du 22 novembre 2006 à GECINA, madame [E] indiquait lui transmettre 'un dossier des architectes J. [D] et [N] [R] qui a fait l'objet d'un pré-dépôt de permis de construire par le promoteur NEWSTONE'.

Mais surtout dans son courrier LRAR du 4 janvier 2007, alors que le groupement était toujours dans un lien contractuel avec la société NEWSTONE, l'Atelier [P] [D] écrivait à la SCI BADO SOULOU :

'Vous nous avisez, également, de vos nouveaux liens contractuels avec les sociétés GECINA et KAUFMAN & BROAD.

Vous nous informez, par là même, que ces dernières souhaitent nous confier, ainsi qu'à M. [R], une mission d'architecte, ce dont nous vous remercions et nous réjouissons par avance.

Comme vous le savez, les contacts pris, dans le cadre des premières études, se sont révélés fructueux, ce qui incite, bien évidemment, à les poursuivre dans le nouveau contexte.

Vous nous obligeriez donc, en insistant auprès des sociétés GECINA et KAUFMAN & BROAD, afin que nous définissions au plus vite la nature de nos relations et qu'elles nous fassent parvenir, ainsi qu'à M. [R], un projet de contrat définissant les termes et les modalités de notre intervention'.

L'ensemble des ces éléments et principalement les termes de ce courrier établissent sans aucune équivoque que, non seulement des contacts ont été pris dès novembre 2006, mais encore que le groupement a commencé à réaliser en 2006 des études pour le compte des concurrents de la société NEWSTONE et qu'il était d'accord pour passer 'au plus vite' un contrat avec eux.

Ces faits sont constitutifs d'un manquement des maîtres d'oeuvre à leur devoir de loyauté envers le maître d'ouvrage, justifiant la résiliation du contrat de maîtrise d'oeuvre.

En conséquence la résiliation du contrat sera prononcée aux torts réciproques de la société NEWSTONE d'une part, de l'Agence [R] et l'Atelier [P] [D] d'autre part, chacun étant tenu d'indemniser le préjudice subi par leur co-contratant en lien direct causal avec cette résiliation.

Sur les préjudices

- sur le préjudice de la société NEWSTONE

En premier lieu la société NEWSTONE sollicite le remboursement de la somme de 164.448,21€ correspondant à la première facture du groupement ; Cependant, elle est irrecevable en sa demande sur le principe que 'nul ne plaide par procureur' dés lors que le paiement de cette somme a été réalisé par une société tierce la société EUROPA REAL ESTATE.

Par ailleurs, la société NEWSTONE fait valoir que du fait des manquements graves du groupement, elle a subi un préjudice à la fois économique (nombreux frais engagés, manque à gagner considérable), professionnel (crédibilité entachée auprès de la mairie) et moral (atteinte à la confiance et à la réputation) ; Elle soutient à cet effet que si les architectes ne s'étaient pas mis au service du projet concurrent et s'ils avaient remis un dossier de construire complet et de qualité, elle aurait obtenu in fine une nouvelle promesse de vente eu égard aux négociations qui étaient toujours en cours.

Toutefois il sera relevé que la société NEWSTONE a pris le risque de faire poursuivre des études et d'engager des frais dont elle ne pouvait que savoir qu'ils ne pourraient aboutir sur la réalisation de l'opération immobilière.

Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, le préjudice allégué est sans lien de causalité avec le manquement contractuel du groupement et la résiliation du contrat de maîtrise d'oeuvre puisque l'échec du projet résulte de la caducité de la promesse de vente et du refus des vendeurs de consentir une nouvelle promesse, étant relevé qu'il n'est démontré, ainsi que suggéré, aucune collusion entre les propriétaires, GECINA et le groupement qui aurait entraîné la caducité.

Enfin, à supposer que son image et sa crédibilité soit entachée auprès de la commune de [Localité 1], la société NEWSTONE ne peut que s'en prendre à elle-même dès lors qu'elle a maintenu une demande de permis de construire et entamé un recours gracieux contre le refus alors que la société EUROPE HERON ne disposait plus d'un titre valable pour ce faire.

En conséquence, elle sera déboutée de l'ensemble de ses demandes.

- sur les demandes du groupement

Le groupement demande à être réglé de sa facture n°2 du 20 décembre 2006 de 263.600,19€ correspondant au solde sur APS et à 100% du dépôt PC et PD déduction faite d'un trop versé sur les esquisses préliminaires.

La société NEWSTONE s'y oppose en vertu de l'exception d'inexécution au motif que le permis de construire a été refusé par la faute du groupement.

Toutefois, le refus de la mairie est motivé par une irrégularité des places de parking ; Outre que la société NEWSTONE contestait elle-même, dans le cadre de son recours gracieux le bien-fondé de ce refus, force est de relever d'une part que le suivi de la demande de permis après remise du dossier par le groupement a été effectué par la société NEWSTONE, d'autre part que la cause du refus aurait été régularisable par une demande de permis modificatif si toutefois les conditions attachées au titre de propriété du terrain avaient été remplies, ce qui n'était de toute façon pas le cas.

En conséquence le seul refus du permis de construire, au surplus non définitif, ne justifie pas la perte des honoraires compte tenu du travail réalisé.

La société NEWSTONE fait par ailleurs valoir qu'une somme de 31.200€ a déjà été réglée au titre des frais du 'PC provisoire' dans le cadre de la première facture ; Cependant, la mention 'hors contrat' attribuée à ces frais dans la facture du 1er septembre 2006 n'a pas été contestée par la société NEWSTONE qui s'est contentée dans son mail du 9 octobre 2006 de rediriger les facturations vers la société EUROPA REAL ESTATE.

La société NEWSTONE fait par ailleurs valoir le 4ème paragraphe de l'article 13.4 du contrat qui édicte 'Dans l'hypothèse où le MAITRE D'OUVRAGE n'obtiendrait pas de manière définitive le Permis de Construire et le Permis de démolir, seuls les honoraires dus au titre du dépôt des permis de Construire seraient dus', pour opposer que seuls les 10% correspondant au 'dépôt PC et PD' sont dus.

Cependant, il se déduit des termes dudit article que celui-ci exclut le paiement des honoraires des phases postérieures qui auraient été réalisées, mais ne concerne d'évidence pas les phases antérieures 'esquisse préliminaire' et APS qui ont été utiles au dépôt du permis de construire.

Enfin, la société NEWSTONE soutient que la totalité des tâches visées par la facture n'a pas été effectuée ; Elle invoque à cet effet des manquements aux articles 3.1, 3.1.1, 3.1.2, 3.1.3 et 3.1.5 du contrat de maîtrise d'oeuvre.

Il est constant que le contrat du 16 novembre 2006 faisant la loi des parties, les prestations prévues auxdits articles devaient être exécutées.

Outre que la société NEWSTONE n'a jamais contesté leur exécution avant la présente procédure, il sera relevé que le groupement justifie de leur réalisation par les pièces versées au dossier, à l'exception des perspectives du hall et du restaurant d'entreprise et dont la cour chiffre le montant d'honoraires à déduire de la facture à la somme de 20.000€ TTC.

En conséquence, la société NEWSTONE est redevable envers le groupement de la somme de 243.600€ TTC qu'elle devra réglée à son mandataire, la société QUADRI [R] ARCHITECTURE anciennement dénommée Agence [R], avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 janvier 2007.

L'Atelier [P] [D] demande par ailleurs la somme de 25.000€ à titre de dommages et intérêts 'en réparation du préjudice subi par une telle attitude' sans autre précision ; Elle sera déboutée de sa demande à défaut de justifier d'un préjudice distinct du retard de paiement de la facture qui est suffisamment indemnisée par l'allocation des intérêts moratoires.

La société QUADRI [R] ARCHITECTURE réclame la somme de 50.000€ à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et abus du droit d'ester en justice ; Toutefois, elle ne démontre pas que le défaut de paiement et le présente recours auraient procédé d'un abus de droit dés lors que sa propre faute a été retenue ; Elle sera donc déboutée de sa demande.

Au regard des fautes respectives, l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit que les relations contractuelles entre la société NEWSTONE et le groupement constitué par l'Agence [R] et l'Atelier [P] [D] sont régies par le contrat du 16 novembre 2006,

Prononce la résiliation du contrat aux torts respectifs de la la société NEWSTONE d'une part et l'Agence [R] et l'Atelier [P] [D] d'autre part,

Déboute la société NEWSTONE de ses demandes indemnitaires,

Condamne la société NEWSTONE à payer à la société QUADRI [R] ARCHITECTURE anciennement dénommée Agence [R] la somme de 243.600€ TTC avec intérêts au taux légal à compter du 4 janvier 2007 au titre du solde des honoraires du groupement,

Déboute la société QUADRI [R] ARCHITECTURE et l'Atelier [P] [D] de leurs demandes de dommages et intérêts,

Dit ne pas y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société NEWSTONE aux dépens qui seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Magistrat signant aux lieu et place du Président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 11/07522
Date de la décision : 13/11/2013

Références :

Cour d'appel de Paris G5, arrêt n°11/07522 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-11-13;11.07522 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award