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16/10/2013 | FRANCE | N°11/11846

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 16 octobre 2013, 11/11846


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 16 Octobre 2013



(n° , 6 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/11846



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 Octobre 2011 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU - section commerce - RG n° 10/00312





APPELANT

Monsieur [F] [X]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Françoise

MARGO, avocate au barreau de PARIS, C.961





INTIMÉE

S.A. AVIS CAR AWAY

[Adresse 2]

[Localité 2]

en présence du représentant légal de la société

représentée par Me Nadia COUTANT, avocat...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 16 Octobre 2013

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/11846

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 12 Octobre 2011 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU - section commerce - RG n° 10/00312

APPELANT

Monsieur [F] [X]

[Adresse 1]

[Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Françoise MARGO, avocate au barreau de PARIS, C.961

INTIMÉE

S.A. AVIS CAR AWAY

[Adresse 2]

[Localité 2]

en présence du représentant légal de la société

représentée par Me Nadia COUTANT, avocate au barreau de PARIS, E0288

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Septembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Christine ROSTAND, présidente, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Christine ROSTAND, présidente

Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller

Monsieur Jacques BOUDY, conseiller

GREFFIÈRE : Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Christine ROSTAND, présidente et par Madame Corinne de SAINTE MARÉVILLE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement rendu le 12 octobre 2011 par le conseil de prud'hommes de Longjumeau qui a pris acte du versement de la somme de 2529,75 € à M. [F] [X] à titre de reliquat de l'indemnité de licenciement, condamné la SA Car Away à lui verser la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'ordre des licenciements ainsi que la somme de 1000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, débouté Monsieur [X] du surplus de ses demandes et mis les dépens à la charge de la société Car Away ;

Vu l'appel interjeté par M. [X] le 22 novembre 2011 ;

Vu les conclusions visées par le greffier à l'audience du 9 septembre 2013 et reprises oralement par M. [X] qui demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Car Away pour non-respect de l'ordre des licenciements, de l'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau, de condamner la société Car Away à lui payer les sommes suivantes :

- 15 199,85 € au titre des salaires dus sur les cinq années précédant son licenciement

- 1499,98 € au titre du solde de l'indemnité de licenciement

- 30 000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de l'ordre des licenciements

- 47 615,94 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

ordonné la remise de bulletins de paie conformes sur les cinq dernières années précédant le licenciement ainsi que l'attestation ASSEDIC conforme, le tout sous astreinte de 100 € par jour de retard

et de condamner la société Car Away en tous les dépens ;

Vu les écritures de la société Car Away visées par le greffier et reprises oralement à l'audience demandant à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à verser la somme de 5000 € pour non-respect de l'ordre des licenciements, de le confirmer pour le surplus, de débouter M. [X] de ses demandes et condamner celui-ci à lui verser la somme de 2000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS

M. [X] a été engagé selon contrat écrit à durée indéterminée en date du 9 février 1995 à effet du 6 février précédent par la société Car Away en qualité de préposé à l'entretien de véhicules, au niveau 1, 1er échelon, coefficient 140, de la convention collective de l'automobile.

Affecté à l'établissement de Rueil Malmaison de 1995 à 2007, M. [X] a été muté à compter de 2007 à l'établissement de [Localité 6]. La moyenne mensuelle des trois deriers mois de salaire sélève à 2 252,77 euros, pour un salaire de base de 1337 euros.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 8 décembre 2009, il a été convoqué à un entretien préalable à une mesure de licenciement pour motif économique, entretien qui s'est tenu le 18 décembre 2009. Il a été licencié le 12 janvier 2010 par lettre remise en main propre après avoir accepté la convention de reclassement personnalisé.

Sur la classification de M. [X] et le rappel de salaire correspondant

M. [X] conteste la classification figurant sur ses bulletins de paye, qui est celle correspondant à l'emploi qu'il occupait lors de son embauche en février 1995, soit 15 ans avant son licenciement, et qui n'a pas été modifiée depuis, alors qu'aux termes de la lettre de licenciement, l'employeur reconnaît qu'il occupait le poste de responsable d'atelier. Il demande donc à la cour de dire qu'il occupait ce poste, correspondant à l'échelon 12 de la grille de classification de la convention collective applicable et de condamner en conséquence la société Car Away à lui verser un rappel de salaire sur une période de cinq ans, soit du mois de janvier 2005 au mois de janvier 2010, la somme de 15 199,85 euros.

Au soutien de sa prétention, l'appelant verse aux débats un courrier de l'inspection du travail daté du 13 octobre 2010, adressé à l'employeur après un contrôle de l'établissement et indiquant que l'écheon 1 mentionné sur la fiche de paye ne correspond pas au contenu principal de la qualification d'opérateur préparation de véhicules.

La société Car Away, pour s'opposer à la demande de requalification de l'emploi, fait valoir que le salarié a toujours occupé un poste sans qualification, effectuant des tâches simples, et qu' il ne peut revendiquer l'échelon 12 qui ne correspond pas à sa situation et à ses compétences.

Elle verse à l'appui de sa contestation une fiche de poste datée du 30 mai 2007 qui précise que la mission du salarié est l'entretien et la mise en location des véhicules, que ses fonctions sont les suivantes : préparation des véhicules, entretien de ceux-ci en retour de location, préparation à la vente des véhicules d'occasion et entretien des locaux, et nécessitent à la fois des compétences manuelles notamment en petite mécanique et des qualités, en particulier dans la gestion d'équipe.

La société Car Away, dans la lettre de licenciement, énonce que M. [X] occupait depuis le 1er avril 2007 le poste de responsable d'atelier au sein de l'agence de [Localité 11] et la fiche de poste dressée à l'occasion de cette nouvelle affectation ne contredit pas cette situation puisqu'elle fait état de la gestion d'une équipe. Par ailleurs, l'inspection du travail a relevé l'incohérence de la classification attribuée au salarié au regard des fonctions occupées, anomalie évidente au surplus compte tenu de son ancienneté dans l'entreprise.

Dans ces conditions, l'attribution de l'échelon 12 de la classification «employé» de la convention collective de l'automobile, lequel est l'échelon de référence du professionnel expert dans sa technique, qui organise son travail sous sa responsabilité, est justifiée en ce qui concerne M. [X] à qui, en l'espèce, a été confiée une extension d'activité à compter du 1er avril 2007.

Sur la base des calculs mensuels non contestés effectués par le salarié, la société Car Away doit donc verser à M. [X] à titre de rappel de salaire la somme de 11 768,59 €.

Elle devra remettre à M. [X] des bulletins de salaire rectifiés mentionnant à compter du 1er avril 2007, l'échelon 12 et la qualification de responsable d'atelier.

Cette classification entraîne une revalorisation de l'indemnité de licenciement. La société Car Away ne contestant pas le mode de calcul retenu par le salarié, reste devoir à ce titre la somme de 1499,98 € après déduction de la somme de 2 529,75 € versée le jour de l'audience du bureau de jugement.

Sur le licenciement

Aux termes de l'article L.1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

La lettre de licenciement est ainsi rédigée :

«' Depuis trois ans, la société Car Away enregistre une baisse de son chiffre d'affaires, ainsi qu'un résultat déficitaire. Le dernier exercice comptable 2008/2009 sera encore plus déficitaire : ce résultat déficitaire ne cesse de se dégrader puisque les comptes prévisionnels au 30 septembre 2009 prévoient un déficit de plus de 700 000 €, alors qu'il était de plus de 100 000 € pour l'exercice 2007/2008.

Dans ce contexte, l'agence de [Localité 6], au sein de laquelle vous exercez vos fonctions, est celle, parmi les agences Car Away, qui connaît les plus graves difficultés économiques.

En effet, cet établissement enregistre une baisse de son chiffre d'affaires ainsi qu'un résultat déficitaire qui ne cesse de s'aggraver ; les comptes au 30 septembre 2009, pour l'agence de [Localité 6] prévoient un résultat déficitaire de 121 000 €, qui représente à lui seul plus de 15 % du résultat déficitaire de la société pour une contribution à hauteur de 10 % du chiffre d'affaires global.

Ce déficit s'est aggravé puisqu'il était de 28 000 € pour l'exercice 2007/2008.

Cette situation nous a donc amenés à envisager une nécessaire réorganisation de l'entreprise, à savoir après la fermeture de l'agence de [Localité 8], la fermeture de l'agence de [Localité 6], dont les charges ne sont pas adaptées à son volume d'activité.

La fermeture de cet établissement est nécessaire à la recherche de l'équilibre des comptes et indispensable à la survie de l'entreprise dans un contexte concurrentiel de plus en plus difficile.

La fermeture de cet établissement a pour conséquence la suppression de votre poste.".

Les éléments produits aux débats par l'employeur établissent le caractère réel et sérieux des difficultés économiques invoquées qui ne sont d'ailleurs pas contestées par le salarié.

Cependant, selon l'article L.1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure. 

M. [X] fait valoir cependant que l'employeur n'a pas cherché à le replacer dans l'une ou l'autre de ses succursales, soit ses établissements d'[Localité 4], [Localité 5], [Localité 7], [Localité 9], [Localité 3], [Localité 10], [Localité 12].

La société Car Away affirme qu'elle ne disposait d'aucun poste à pourvoir dans son entreprise, susceptible d'être proposé à M. [X]. Elle justifie s'être adressée à différentes sociétés ayant la même activité qu'elle pour rechercher un reclassement mais ne démontre pas avoir effectué des recherches au sein de ses autres établissements, notamment ceux de [Localité 9] et de Rueil Malmaison, la seule production du livre d'entrée et de sortie du personnel de ce dernier ne suffisant pas à démontrer l'impossibilité du reclassement de l'intéressé.

Or, le licenciement économique d'un salarié ne peut intervenir que si le reclassement de l'intéressé dans l'entreprise ou dans le groupe dont elle relève est impossible, et la société Car Away à qui il appartient de justifier qu'elle a recherché toutes les possibilités de reclassement existantes ou qu'un reclassement était impossible, ne démontre pas s'être acquittée de son obligation et ce manquement privant le licenciement de cause réelle et sérieuse, ouvre droit au profit du salarié au paiement de dommages-intérêts.

Aux termes de l'article L.1235-3 du code du travail, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise de plus de 10 salariés, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [X], de son âge, de son ancienneté de près de 15 années, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L.1235-3 du code du travail, une somme de 30 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Lorsque le licenciement d'un salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse, celui-ci ne peut cumuler des indemnités pour perte injustifiée de son emploi et pour inobservation de l'ordre des licenciements. M. [X] sera en conséquence débouté de la demande indemnitaire formée à ce titre.

La société Car Away sera condamnée aux entiers dépens et versera à M. [X] la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

INFIRME le jugement sauf en ce qu'il a condamné la société Car Away aux dépens et à verser 1 000 € à M. [X] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau et ajoutant,

CONDAMNE la société Car Away à verser à M. [F] [X] les sommes suivantes :

- 11 768,59 € à titre de rappel de salaires sur la période du 1er avril 2007 au 12 janvier 2010

- 1 499,98 € à titre de rappel sur l'indemnité de licenciement

- 30 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

ORDONNE à la société Car Away de remettre à M. [F] [X] des bulletins de paie et une attestation Pôle emploi conformes à la présente décision,

DÉBOUTE M. [X] de ses autres demandes,

CONDAMNE la société Car Away à verser à M. [F] [X] la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la société Car Away aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 11/11846
Date de la décision : 16/10/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°11/11846 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-10-16;11.11846 ?
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