RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
ARRÊT DU 10 Octobre 2013
(n° ,4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/11627
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Octobre 2011 par le Conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 08/11992
APPELANTE
Madame [G] [N]
[Adresse 1]
comparant en personne, assistée de Me Isabelle ROY-MAHIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0527
INTIMEE
SOCIETE GENERAL DE TRANSPORT LIQUIDE (SGTL)
[Adresse 2]
représentée par Me Nicolas LE QUINTREC, avocat au barreau de PARIS, toque : R035
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juillet 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président
Madame Evelyne GIL, Conseillère
Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère
Qui en ont délibéré
Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'appel régulièrement interjeté par Madame [G] [N] à l'encontre d'un jugement prononcé le 24 octobre 2011 par le conseil de prud'hommes de PARIS ayant statué dans le litige qui l'oppose à la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE sur ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail.
Vu le jugement déféré qui a débouté Madame [G] [N] de toutes ses demandes.
Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :
Madame [G] [N], appelante, poursuit l'infirmation du jugement déféré et sollicite la condamnation de la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE au paiement des sommes suivantes :
- 90 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 7 300 € à titre de dommages-intérêts pour violation de l'ordre des licenciements,
- 3 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle demande en outre qu'il soit fait application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail.
La S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE, intimée, demande la confirmation du jugement, subsidiairement, la réduction à de plus justes proportions des dommages et intérêts qui seraient alloués à la salariée, et requiert une indemnité de 3 588 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
CELA ÉTANT EXPOSÉ
Par contrat écrit à durée indéterminée en date du 8 février 1993, Madame [G] [N] a été engagée par la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE en qualité d'assistante de direction moyennant une rémunération mensuelle fixée en dernier lieu à la somme de 3 954 €.
Le 21 mars 2008, la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE convoquait Madame [G] [N] pour le 2 avril 2008 à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique. Par lettre du 4 avril 2008 l'employeur informait Madame [G] [N] par écrit des éléments conduisant à envisager son licenciement.
Madame [G] [N] a accepté la convention de reclassement personnalisé le 16 avril 2008, ce dont la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE a pris acte le 22 avril 2008.
Madame [G] [N] a saisi le conseil de prud'hommes le 10 octobre 2008.
SUR CE
Sur la qualification de la rupture.
La lettre exposant les motifs économiques du licenciement envisagé n'évoque pas des résultats déficitaires de l'entreprise mais la nécessité de la réorganiser pour sauvegarder sa compétitivité et sa pérennité face à un environnement concurrentiel de plus en plus contraignant et à une évolution inéluctable de son marché.
La S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE ne fournit aucune donnée de fait pertinente permettant d'apprécier l'évolution du contexte concurrentiel dans lequel elle a évolué jusqu'à l'époque du licenciement de sorte que ce motif ne peut utilement justifier la mesure litigieuse.
De même il n'est produit par la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE aucun élément déterminant relatif à l'évolution du marché dans lequel s'inscrit son activité, le transport de liquides par wagons de chemin de fer.
La seule circonstance concrète invoquée est la perte d'un marché programmé en mars/avril 2008. Cette perte, qui ne porte que sur environ 20 % du chiffre d'affaire de la société, ne peut par elle-même justifier un licenciement pour motif économique. Au demeurant il apparaît que la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE en a eu connaissance (lors d'un entretien du 15 janvier 2008) après avoir décidé et mené à bien les mesures de cession de son atelier de réparation (contrat signé le 3 janvier 2008) et de mise sous mandat de gestion de son parc de wagons (contrat signé le 6 janvier 2008) au titre desquelles elle fait valoir que la totalité des fonctions de Madame [G] [N] a disparu ou est amenée à disparaître. Il s'avère que ces mesures de réorganisation ne répondent pas à une nécessité économique au sens de l'article L. 1233-2 du code du travail mais résultent plutôt d'un choix de gestion et d'une orientation de l'activité prise librement par le dirigeant.
Au vu de ces éléments, il convient de constater que la rupture du contrat de travail de Madame [G] [N] emporte les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Sur le montant des dommages-intérêts.
Au vu des pièces justificatives produites et des dispositions de l'article L. 1235-3 alinéa 2 du code du travail, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de son ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif de celle-ci, il convient de fixer les dommages-intérêts devant revenir à Madame [G] [N] en réparation du préjudice subi du fait du licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 60 000 €.
Sur l'ordre des licenciements.
Le non respect de l'ordre des licenciements dénoncé par Madame [G] [N],
à le supposer avéré, ne lui aurait pas occasionné un préjudice autre que celui subi du fait de la perte de l'emploi, déjà indemnisé par ailleurs.
Sur l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail.
Les conditions d'application de l'article L. 1235-4 du code du travail ne se rencontrent pas en l'espèce, la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE ayant un effectif inférieur à 11 salariés au moment du licenciement.
Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens.
Succombant au principal, la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.
La somme qui doit être mise à la charge de la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE au titre des frais non compris dans les dépens exposés par Madame [G] [N] peut être équitablement fixée à 2 000 €.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Infirme le jugement déféré.
Déclare la rupture du contrat de travail de Madame [G] [N] dépourvue de cause réelle et sérieuse.
Condamne la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE à payer à Madame [G] [N] la somme de 60 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Déboute Madame [G] [N] de sa demande de dommages-intérêts pour non respect de l'ordre des licenciements.
Condamne la S.A. SOCIETE GENERALE DE TRANSPORT LIQUIDE aux dépens et à payer à Madame [G] [N] la somme de 2 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,