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03/10/2013 | FRANCE | N°11/21958

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 03 octobre 2013, 11/21958


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 03 OCTOBRE 2013



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/21958



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Septembre 2011 -Tribunal de Grande Instance de Paris - 5ème chambre 2ème Section - RG n° 09/02588





APPELANT :



Monsieur [K] [S]

né [Date naissance 2] 1933 à [LocalitÃ

© 4]

de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

[Localité 2]



représenté par : Me Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480
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Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 03 OCTOBRE 2013

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/21958

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Septembre 2011 -Tribunal de Grande Instance de Paris - 5ème chambre 2ème Section - RG n° 09/02588

APPELANT :

Monsieur [K] [S]

né [Date naissance 2] 1933 à [Localité 4]

de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par : Me Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

assisté de : Me Christian CHARRIÈRE-BOURNAZEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1357

APPELANTE :

SCI DU LOT 43

ayant son siège [Adresse 2]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par : Me Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

assistée de : Me Christian CHARRIÈRE-BOURNAZEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1357

INTIMEE :

Mademoiselle [C] [H]

née le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 3] (Espagne)

de nationalité espagnole

demeurant [Adresse 3],

[Adresse 3]

[Localité 1] - ESPAGNE

représentée par : Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, à la Cour, toque : K0111

assistée de : Me Pierre FOURNOL, avocat au barreau de PARIS, toque n° c2095

INTIMEE :

SCI DU LOT 43

ayant son siège [Adresse 2]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par : Me Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

assistée de : Me Christian CHARRIÈRE-BOURNAZEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1357

INTERVENANT VOLONTAIRE :

Monsieur [E] [S]

né le [Date naissance 3] 1976 à [Localité 6]

de nationalité française

demeurant [Adresse 2]

[Localité 2]

agissant tant en son nom personnel qu'en tant que gérant de la SCI du lot 43

représenté par : Me Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

assisté de : Me Christian CHARRIÈRE-BOURNAZEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1357

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 Septembre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président de chambre

Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller

Madame Michèle PICARD, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Michèle PICARD dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Madame Violaine PERRET

MINISTERE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRET :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François FRANCHI, président et par Madame Violaine PERRET, greffier présent lors du prononcé.

Le 26 février 2004, M. [E] [S] et Mme [H], qui entretenaient une relation, ont constitué la SCI DU LOT 43 au capital social divisé en 100 parts de un euro, chacun étant associé à hauteur de la moitié du capital.

M. [E] [S] a été désigné gérant de cette SCI.

Conformément à son objet social, la SCI a acquis un appartement T4 ainsi qu'une place de parking et une cave constituant le lot 43 de la copropriété sis au [Adresse 2], achat financé en partie grâce aux sommes fournies par M.[K] [S], le père de M. [E] [S], et également, selon les dires de Mme [H], par la SCI AG 30 SAINT DENIS, société constituée également par Mme [H] et M. [E] [S].

Mme [H] et M. [E] [S] ont vécu ensemble dans cet immeuble puis se sont séparés en août 2008.

Le 30 octobre 2008, Mme [H] a envoyé une lettre recommandée avec avis de réception à M. [S] lui faisant part de son souhait de céder l'intégralité de ses parts sociales.

Le 18 novembre 2008, par lettre recommandée avec avis de réception, elle a demandé, sur le fondement de l'article 1855 du code civil, la communication d'une copie de la comptabilité et des bilans de la SCI et questionné M. [E] [S] sur l'existence d'un bail entre lui et la SCI.

Puis, par acte en date du 21 janvier 2009, Mme [H] a assigné la SCI DU LOT 43 devant le Tribunal de grande instance de Paris afin que soit prononcé son retrait de la société pour justes motifs et que soit désigné un expert afin essentiellement que soit déterminée la valeur des parts qu'elle détient dans la SCI.

Par conclusions en date du 13 novembre 2009, M. [K] [S] est intervenu volontairement à l'instance.

Par jugement prononcé le 8 septembre 2011 le Tribunal a déclaré irrecevable l'intervention volontaire de M. [K] [S] dès lors que sa demande tendant notamment à la reconnaissance de l'existence d'une créance à son profit à l'égard de la SCI ne se rattache pas par un lien suffisant au litige puisqu'il n'est pas associé et que le litige porte sur le devenir des parts sociales détenues par un associé et non sur les dettes sociales, prononcé le retrait de Mme [C] [H] de la SCI DU LOT 43 pour justes motifs, désigné en qualité d'expert [X] [D] afin d'évaluer l'immeuble et de déterminer ainsi la valeur des droits sociaux de Mme [H], a fixé à 2000 euros le montant de la provision à faire valoir sur la rémunération de l'expert que devra être consignée par Mme [H] et condamné la SCI DU LOT 43 à payer à Mme [H] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le tout avec exécution provisoire.

M. [K] [S] et la SCI DU LOT 43 ont formé appel le 8 décembre 2011.

Monsieur [E] [S] est intervenu volontairement à l'instance.

Dans leurs dernières conclusions télé-transmises le 8 avril 2013, [K] et [E] [S] et la SCI DU LOT 43 demandent à la cour de :

- dire M. [K] [S] et la SCI du Lot 43 recevables et bien fondés en leur appel ;

- dire M. [E] [S] recevable et bien fondé en son intervention volontaire,

- débouter l'intimée de l'intégralité de ses demandes reconventionnelles,

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- déclarer nul et de nul effet le contrat de société conclu entre M. [E] [S], né le [Date naissance 4] 1976 à [Localité 5], et Mme [C] [H], née le [Date naissance 5] 1976 à [Localité 3] (Espagne), contrat censé créer la Société Civile Immobilière du Lot 43,

- ordonner que soit substitué à la conservation des hypothèques de Paris le nom de M. [E] [S], demeurant [Adresse 4] et [Adresse 1], au nom de la SCI du Lot 43 comme propriétaire de l'ensemble immobilier situé à [Adresse 4] et [Adresse 1], ensemble immobilier cadastré : section BY, numéro [Cadastre 1], lieudit [Adresse 4] et [Adresse 1], pour une superficie de dix huit ares soixante treize centiares (00ha 18a 73ca), les biens désignés étant le lot numéro quarante-trois : Bâtiment unique, escalier numéro deux (2), un appartement « D » situé au septième étage, porte gauche, comprenant : entrée, dégagement, salle de séjour avec balcon, quatre chambres dont une avec lavabo, cuisine, salle de bains, W.C., penderie, rangement, séchoir et les 30/10.000èmes des parties communes générales, le lot numéro cent quarante et un : Bâtiment unique, escalier numéros un (1), deux (2) et quatre (4), une cave individuelle numéro quarante-trois (43), située au premier sous-sol et les 2/10.000èmes des parties communes générales,

- débouter Mme [C] [H] de toutes ses demandes, fins et conclusions comme irrecevables et mal fondées,

A titre subsidiaire,

- constater le retrait de la SCI du Lot 43 de l'associée [C] [H],

-dire et juger qu'elle ne saurait prétendre à aucun dédommagement d'aucune sorte, ni au titre des apports qu'elle n'a pas versés, ni au titre de la plus-value sur un bien dont elle n'a assumé ni l'acquisition ni l'entretien,

- la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause,

- dire la SCI du lot 43 et MM. [K] et [E] [S] recevables et bien fondés en leurs demandes ;

- condamner Mme [C] [H] à leur payer à chacun la somme d'un euro de dommages et intérêts pour procédure abusive et la somme de 15.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner en outre aux entiers dépens dont la SCP Bolling-Durand-Lallement, avocats au barreau de Paris, sera autorisée à poursuivre le recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Mme [H] a conclu le 25 octobre 2012 et elle demande à la cour de :

- déclarer M. [K] [S] et la SCI DU LOT 43 mal fondés en leur appel et les en débouter,

- déclarer M. [E] [S] mal fondé et irrecevable en son intervention volontaire

principale,

- prononcer la suppression des écrits outrageants et diffamatoires contenus dans les conclusions des consorts [S] et de la SCI DU LOT 43 signifiées en date du 22 octobre 2012

- condamner solidairement M. [K] [S], M. [E] [S] et la SCI DU LOT 43 à payer à Mme [H] la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice moral souffert suite aux affirmations calomnieuses et diffamatoires,

- ordonner la publication du jugement pendant sept jours consécutifs dans un journal régional et permettre à Mme [H] de procéder à cette publication, et ce, aux frais exclusifs de M. [K] [S], M. [E] [S] et la SCI DU LOT 43,

- confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a mis à sa charge les frais d'expertise

- condamner la SCI DU LOT 43 à payer l'intégralité des frais d'expertise et à lui rembourser les sommes déjà avancées par elle,

- débouter M. [K] [S], M. [E] [S] et la SCI DU LOT 43 de toutes leurs fins et prétentions,

- condamner solidairement M. [K] [S], M. [E] [S] et la SCI DU LOT 43 à lui payer la somme de 5000 euros au titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE,

Sur l'intervention volontaire de [E] [S]

M. [E] [S], qui n'était pas intervenu en première instance, demande à titre principal la nullité de la société, Mme [C] [H] étant une associée fictive.

A titre subsidiaire il demande à la cour de constater la gratuité du retrait.

Il soutient avoir un intérêt à agir puisqu'il prétend être le seul propriétaire du bien.

Mme [C] [H] fait valoir que M. [E] [S] n'apporte pas la preuve de la donation des sommes d'argent que lui auraient consenties ses parents et qu'il aurait avancé en compte courant pour l'acquisition du bien immobilier, il ne précise pas quelle serait sa qualité pour déposséder la SCI de la totalité de ses actifs à son seul profit, il ne démontre pas le lien qui rattacherait la présente procédure à son argumentation sur sa qualité de bénéficiaire d'une donation entre vifs.

Elle demande donc le rejet de l'intervention de [E] [S], qui, de plus n'était pas partie en première instance et qui ne peut soumettre un litige nouveau étranger à la cause.

Aux termes de dispositions de l'article 554 du Code de procédure civile 'Peuvent intervenir en appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.'

En l'espèce, la Cour constate qu'en première instance seule la société et Madame [C] [H] étaient parties, Monsieur [E] [S] n'étant intervenu qu'en sa qualité de gérant de la SCI et non en sa qualité de co-associé.

Il n'est pas contestable qu'en cette qualité, il détient 50% des parts sociales, il a un intérêt légitime dans la procédure dés lors que la demande a pour objectif principal, du fait du retrait, le partage de l'actif de la société entre lui et [C] [H] .

Il convient en conséquence de déclarer son intervention recevable.

Sur l'appel de [K] [S]

Monsieur [K] [S], père de Monsieur [E] [S], fait valoir qu'en sa qualité de créancier de la société, ayant versé à son fils la totalité des sommes ayant permis l'acquisition du bien immobilier par la SCI, il a intérêt à intervenir au soutien des prétentions de son fils qui s'oppose au partage des actifs de la société.

Mme [C] [H] soutient, pour ce qui concerne M. [K] [S], qu'il n'apporte pas la preuve de donation au profit de son fils [E], qu'il n'y a pas de lien entre la donation indirecte dont se prévaut [K] [S] et le présent contentieux et enfin que, si [E] [S] est irrecevable, il est aussi irrecevable.

Aux termes des dispositions de l'article 330 du Code de procédure civile 'L'intervention est accessoire lorsqu'elle appuie les prétentions d'une partie. Elle est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie. (...)'

En l'espèce, la Cour estime que Monsieur [K] [S] a un intérêt certain, ayant financé l'acquisition par la SCI du bien immobilier et étant créancier de cette SCI, à soutenir l'action de son fils dans son opposition au partage des actifs.

Il convient en conséquence de déclarer recevable l'appel de Monsieur [K] [S].

Sur la demande de nullité

- Sur la recevabilité

Mme [C] [H] a fait valoir dans ses conclusions que M. [E] [S] qui n'était pas partie en première instance ne peut soumettre en appel un litige nouveau étranger à la cause.

Aux termes des dispositions de l'article 564 du code civil 'A peine d'irrecevabilité relevée d'office les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.'

La cour constate que le litige soumis aux premiers juges avait pour objet la demande de retrait d'une associée d'une société civile immobilière et que l'intervention volontaire de M. [K] [S] avait été rejetée par le tribunal au motif que sa demande de reconnaissance d'une créance ne se rattachait pas par un lien suffisant au litige.

La SCI avait soulevé l'absence d'apport de quelque somme de [K] [S] à la société.

Quant à Monsieur [E] [S] il n'était pas partie à la procédure.

L'objet de la demande principale devant la cour d'appel, la nullité d'un contrat de société a pour but de faire échec à la demande de retrait et ne peut donc s'analyser en une prétention nouvelle au regard du litige soumis aux premiers juges.

Il convient en conséquence de déclarer cette demande recevable.

- Sur la nullité de la SCI

Les consorts [S] soulèvent la nullité de la société au motif que Mme [C] [H] n'a jamais déboursé le moindre centime pour la société, ni pour acquérir les parts sociales ni pour les dépenses de la société.

La constitution d'apports forme une des conditions essentielles du contrat de société .

En l'absence d'apport la société est nulle, l'apport étant un des élément de l'affectio societatis.

Ils soutiennent également que [C] [H] aurait admis l'absence de contrat de société dans une lettre adressée à l'administration fiscale le 21 juin 2007 et dans laquelle elle expose être hébergée chez son ami [E] [S], avouant ainsi être un prête nom dans la SCI.

Mme [C] [H] fait valoir qu'en première instance [K] [S] soutenait être créancier de la société et que devant la Cour d'appel il soutient qu'il est donataire, qu'il n'y a pas de preuve de la donation mais plutôt d'un prêt.

Si donation il y a, elle est frauduleuse et il ne peut s'en prévaloir car 'Fraus omnia corrumpit'.

L'affectio societatis existe puisqu'elle a bien libéré le capital social (100 euros) en versant 50 euros au gérant en numéraire et il n'y a aucun document comptable qui ferait ressortir au passif du bilan une dette envers la société.

Enfin la lettre destinée à l'administration fiscale est mal rédigée car elle n'est pas de langue maternelle française mais de fait elle vivait bien avec Monsieur [S], ils ont bien créé une société et le paiement au notaire du bien immobilier a été fait au moyen d'un prêt accordé par Monsieur [K] [S].

La Cour observe en premier lieu que Mme [C] [H] n'établit pas avoir libéré sa part du capital de la société mais l'absence de libération du capital dans les délais se résout éventuellement en dommages et intérêts et n'est pas une cause d'annulation de la société.

En second lieu, si un financement de l'acquisition du bien immobilier pour lequel la SCI a été constituée a été réalisé par un emprunt de la SCI auprès des parents de Monsieur [E] [S], il ne peut être soutenu que l'absence de participation de Mme [C] [H] à cette acquisition serait constitutif d'un défaut d'affectio societatis.

L'apport de fonds dans une société n'est qu'un élément d'appréciation de l'existence de l'affectio societatis, l'apport pouvant consister, comme c'est le cas en l'espèce, en un emprunt de la société auprès d'un tiers, la société devenant alors débitrice de cet emprunt.

L'affectio societatis consiste, indépendamment des apports financiers des associés, en la volonté de collaborer activement sur un pied d'égalité à la réalisation d'un projet commun.

S'agissant d'une société civile immobilière dont l'unique objet était l'acquisition d'un bien immobilier destiné à l'habitation des associés, il ne fait aucun doute que Monsieur [S] et Mme [C] [H] avaient bien, au moment de la constitution de cette société, la volonté de créer cette société afin de cohabiter dans ce bien.

La Cour note au surplus que si l'unique motivation des consorts [S] était d'échapper aux droits de mutation sur les donations entre vifs il aurait suffit d'attribuer à Mme [C] [H] 1% des parts sociales et non 50%.

Quant au courrier de Mme [C] [H] à l'administration fiscale, il n'en ressort pas clairement une absence d'affectio societatis mais uniquement le fait que M. [E] [S] a bénéficié d'un prêt de son père.

Mme [C] [H] ajoute dans ce même courrier que la déclaration de revenus 2005 de M. [S] mentionne sa participation dans la SCI et elle reconnaît 'être taxable des revenus fonciers si [E] [S] ne les payait pas libératoirement pour (son) compte' (sic).

Il convient en conséquence de rejeter la demande de nullité de la SCI DU LOT 43.

Sur le retrait de l'associée

Les consorts [S] soutiennent que, subsidiairement, si on ne peut prononcer la nullité de la société il faut constater le retrait à titre gratuit de Mme [C] [H] puisqu'elle n'a jamais rien payé.

Mme [C] [H] fait valoir qu'elle a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux au jour de la décision de retrait.

Le contrat de société n'étant pas nul et le droit de retrait de Mme [C] [H] n'étant pas contesté, il convient de faire application des dispositions de l'article 1869 du code civil et de considérer que ce retrait est causé par de justes motifs puisque les deux associés ne s'entendent plus et que le bien immobilier pour l'acquisition duquel la SCI avait été créée était destiné à les héberger.

Il convient en conséquence de confirmer la décision attaquée en ce qu'elle a prononcé le retrait de Mme [C] [H] de la société.

La Cour observe que Mme [C] [H] , de par son retrait, a droit en vertu des dispositions susvisées de l'article 1869 du code civil au remboursement de la valeur de ses droits sociaux.

Il appartiendra aux parties de procéder à l'évaluation de ces droits sociaux selon le rapport d'expertise ordonné par le tribunal.

Il convient en conséquence de rejeter la demande des consorts [S].

Sur les frais d'expertise

Mme [C] [H] fait valoir que les frais d'expertise devraient être intégralement supportés par la SCI et demande en conséquence le remboursement de ceux- ci.

La Cour, qui confirme le jugement entrepris sur le retrait de Mme [C] [H] , fera doit à cette demande et condamnera la SCI DU LOT 43 à lui rembourser les frais d'expertise qu'elle a avancé.

Sur le caractère diffamatoire des conclusions des consorts [S] et de la SCI

Mme [C] [H] fait valoir que les propos de Messieurs [E] et [K] [S] sont diffamatoires en ce qu'ils écrivent avoir été 'victimes d'escroquerie et d'abus de confiance par l'associée fictive...'

Les consorts [S] ont retiré ces propos de leurs écritures et estiment qu'en tout état de cause ces propos n'ont pas excédé les droits de la défense.

Il ne sera pas répondu sur ce point dès lors que les propos rapportés figurant dans des conclusions reposent sur des règles spécifiques et qu'il appartient à celui qui s'en plaint d'agir selon les dispositions et délais de la loi de 1881 sur la presse.

Elle sera en conséquence déboutée de ses demandes à ce titre.

Sur les dommages et intérêts

Mme [C] [H] demande le paiement de la somme de 5.000 euros pour procédure abusive.

L'exercice d'une action en justice de même que la défense à une telle action constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l'octroi de dommages-intérêts que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol; en l'espèce, un tel comportement de la part des appelants n'est pas suffisamment caractérisé ; la demande de [C] [H] est donc rejetée.

Sur l'application de l'article 700 du Code de procédure civile

Mme [C] [H] sollicite le paiement de la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles et il convient de ramener la demande à de plus justes proportions et de condamner [K] et [E] [S] à lui verser la somme de 2.000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Reçoit l'intervention volontaire de [E] [S] en cause d'appel,

Déclare recevable M. [K] [S],

Sur la nullité de la SCI DU LOT 43 :

Dit que la demande en nullité de la société SCI DU LOT 43 est recevable mais mal fondée,

Déboute la SCI DU LOT 43, [K] et [E] [S] de l'intégralité de leurs demandes à ce titre,

Sur le retrait d'associée :

Confirme le jugement rendu le 8 septembre 2011 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a prononcé le retrait de Mme [C] [H],

Sur les frais d'expertise:

Infirme le jugement rendu sur ce point.

Dit que les frais d'expertise seront à la charge de la SCI DU LOT 43, laquelle est condamnée d'ores et déjà à rembourser à Madame [H] les frais d'expertises antérieurement avancés par ses soins,

Sur la diffamation et la procédure abusive :

Déboute Mme [C] [H] de ses demandes au titre des propos diffamatoires et au titre de l'abus de procédure,

Y ajoutant,

Condamne [K] et [E] [S] à payer à [C] [H] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

Dit que les dépens seront supportés par la SCI DU LOT 43 et Messieurs [K] et [E] [S].

LA GREFFIERE, LE PRESIDENT,

V.PERRET F. FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 11/21958
Date de la décision : 03/10/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°11/21958 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-10-03;11.21958 ?
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