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26/09/2013 | FRANCE | N°11/10437

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 26 septembre 2013, 11/10437


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2013



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/10437



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 mai 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS 1ère CHAMBRE - RG n° 2009037707





APPELANTES



SAS EURO POWER TECHNOLOGY, société en redressement judiciaire

Ayant son siège social<

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[Adresse 2]

[Adresse 2]



S.A. SOFFIMAT

Ayant son siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentées et assistées par Me Michael SICAKYUZ, avocat au barreau de PARIS, toque: D061...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2013

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/10437

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 mai 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS 1ère CHAMBRE - RG n° 2009037707

APPELANTES

SAS EURO POWER TECHNOLOGY, société en redressement judiciaire

Ayant son siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

S.A. SOFFIMAT

Ayant son siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentées et assistées par Me Michael SICAKYUZ, avocat au barreau de PARIS, toque: D0611

INTIMÉES

S.A.S. BIO EVOLUTION, pris en la personne de son représentant légal domicilié audit siège

Ayant son siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

S.A.R.L. FINANCE ORPHEA, pris en la personne de son représentant légal

Ayant son siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentées par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assistée par Me CHAUVEAU Isabelle de la SCP SIRAT-GILLI, avocat au barreau de PARIS, toque : P 176

PARTIES INTERVENANTES

Me [T] es qualité d'administrateur judiciaire de la SAS EURO POWER TECHNOLOGY

Demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]

SELAFA MJA prise en la personne de Me [L] [X] es qualité de mandataire judiciaire de la société EURO POWER TECHNOLOGY

Demeruant [Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentées par Me Michael SICAKYUZ, avocat au barreau de PARIS, toque : D0611

SCP [I] [P] [Z] prise en la personne de Maître [C] [Z] es qualité d'administrateur judiciaire de la société FINANCE ORPHEA

Demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]

SCP [M] [V] prise en la personne de Maître [F] [M] es qualité de mandataire liquidateur de la société FINANCE ORPHEA

Demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentées par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assistées de Me Isabelle CHAUVEAU de la SCP SIRAT-GILLI, avocat au barreau de PARIS, toque : P 176

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 juin 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente

Madame Patricia POMONTI, Conseillère

Madame Valérie MICHEL- AMSELLEM, Conseillère chargée d'instruire l'affaire

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. Gérald BRICONGNE

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY, Greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS ET PROCEDURE

La société Finance Orphéa est spécialisée dans la conception et la diffusion de produits d'investissements et propose ses compétences dans le financement bancaire et le montage d'ingénierie fiscale et financière.

Les sociétés Soffimat et Euro Power Technology, qui sont indépendantes l'une de l'autre, mais ont les mêmes dirigeants, sont spécialisées dans la mise en place de centrales de production d'énergie électrique selon différents procédés, dont le biogaz de décharge.

Le 30 janvier 2007, les sociétés Finance Orphéa et Soffimat ont signé un protocole d'accord général portant sur la recherche d'investisseurs et la vente des turbines devant être utilisées dans des centres d'enfouissement techniques (décharges de déchets ménagers) auprès d'investisseurs privés.

Ce protocole d'accord était accompagné d'un mandat de vente exclusif conclu, le 31 janvier 2007, au bénéfice de la société Finance Orphéa. Ce mandat portait sur la commercialisation des turbines équipant les plate-formes de production d'électricité que la société Soffimat projetait d'installer, ou déjà installées, sur 10 sites d'enfouissement techniques définis dans une annexe 2.

Le mandat de vente a ensuite été complété par deux avenants conclus par les sociétés Finance Orphéa et Soffimat, ainsi que par un avenant intitulé « Avenant n°2 au mandat de vente signé le 31/01/2007 » ; ce dernier est conclu entre la société Bio-Valorisation « département biogaz de la société Europower Technology » et la société Finance Orphéa.

Le mécanisme de l'opération complète était le suivant : la société Finance Orphéa devait commercialiser et vendre à des investisseurs privés les turbines sélectionnées et acquises par la société Soffimat et ces investisseurs devaient, par l'intermédiaire de la société Finance Orphéa donner les turbines en location à la société Euro Power Technology, pour les exploiter et vendre l'électricité produite ; les loyers payés aux investisseurs représentaient des produits financiers à haut rendement.

Un désaccord est né entre les sociétés Finance Orphéa et Soffimat, sur le succès ou non d'une « phase préalable » de trois mois, prévue dans le protocole d'accord et rappelée dans le mandat de vente, dont dépendaient la poursuite des relations commerciales entre les deux parties et, par conséquent, l'application de la clause d'exclusivité.

Par actes des 5 et 7 avril 2009, la société Finance Orphéa a fait assigner la société Soffimat en paiement, puis, par acte du 7 avril 2009, elle a fait assigner la société Euro Power Technology ; elle a aussi fait assigner la société Bio évolution en intervention forcée.

Par jugement du 17 mai 2011, le tribunal de commerce de Paris a :

- joint les deux instances enrôlées sous les numéros 2009037707 et 2009038606,

- condamné in solidum les sociétés Soffimat et Euro Power Technology à payer à la SARL Finance Orphéa la somme de 551 919,32 euros majorée des intérêts de retard au taux légal, à compter de la mise en demeure du 16 septembre 2008, avec capitalisation des intérêts, dans les conditions de l'article 1154 du Code civil,

- débouté la SARL Finance Orphéa de sa demande de désignation d'un expert,

- constaté qu'aucune demande n'est dirigée contre la SA Bio Evolution,

- condamné in solidum les sociétés Soffimat et Euro Power Technology à payer la somme de 10 000 euros à la SARL Finance Orphéa au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné la SARL Finance Orphéa à payer la somme de 3 000 euros à la SA Bio Evolution au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, déboutant pour le surplus,

débouté les parties de toute demande autre, plus ample ou contraire.

Vu l'appel interjeté le 31 mai 2011 par les sociétés Soffimat et Euro Power Technology,

Vu les dernières conclusions en date du 15 mai 2013, par lesquelles les sociétés Soffimat et Euro Power Technology, Maître [T] en qualité d'administrateur judiciaire et Maître [X] en qualité de mandataire judiciaire de la société Euro Power Technologie, intervenants volontaires demandent à la Cour de :

- recevoir les concluantes en leur appel, les dire bien fondées,

- recevoir Maître [T] es-qualité et Maître [X], ès-qualités, en leur intervention volontaire, les dire bien fondés,

- réformer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Finance Orphéa à payer à Bio-évolution une indemnité au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et en ce qu'il a débouté Finance Orphéa de sa demande d'expertise,

- l'infirmer pour le surplus ;

- mettre hors de cause la société Euro Power Technology,

- débouter la société Finance Orphéa de toutes ses demandes, fins et conclusions, au titre de commissions ou dommages et intérêts comme étant irrecevables et mal fondées,

- débouter Bio-évolution de toutes ses demandes dirigées contre Soffimat & Euro Power Technology,

- condamner ladite société à payer à Soffimat et à Euro Power Technology chacune la somme de 20.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- inscrire au passif de la société Finance Orphéa toutes sommes auxquelles la Cour la condamnera ;

Les sociétés Soffimat et Euro Power Technology exposent que la mise en cause de la société Euro Power Technology est abusive et mal fondée, puisque celle-ci n'a aucun lien contractuel avec la société Orphéa concernant la vente de turbines, et que sa responsabilité contractuelle ne saurait être engagée.

Elles soutiennent que la mise en 'uvre du mandat initial du 31 janvier 2007 dépendait du succès de la phase préalable qui prévoyait que la société Finance Orphéa devait faire signer des contrats de réservation ou de vente de 70 microturbines. Cette condition suspensive n'ayant pas été réalisée, la société Soffimat n'avait pas à exécuter les obligations découlant du mandat initial et ne peut, en conséquence, être tenue au paiement de commissions sur la vente de turbines. Elles ajoutent qu'en tout état de cause, le mandat portait sur la vente de turbines et que la société Finance Orphéa ne peut demander de commissions pour la vente de centrales.

Les appelantes concluent enfin au rejet de la demande d'expertise formulée par la société Orphéa, qui ne serait fondée ni en droit, ni en fait.

Vu les dernières conclusions du 16 mai 2013 de la société Finance Orphéa et les conclusions d'intervention volontaire, signifiées le même jour, de la société [I], [P] et [Z], en qualité d'administrateur judiciaire et de la société [M], [V] en qualité de mandataire judiciaire de la société Finance Orphéa, qui demandent à la Cour de :

- dire ce que de droit sur la recevabilité de l'appel principal en la forme,

- le déclarer injustifié,

- en débouter Soffimat et Euro Power Technology,

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle les a condamnées in solidum à payer à Finance Orphéa une somme de 551.919,32 euros majorée des intérêts au taux légal depuis la mise en demeure du 16 septembre 2008 avec capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil, outre 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Et recevant Finance Orphéa en son appel incident,

- dire et juger que les agissements de Soffimat et d'Euro Power Technology ont causé à Finance Orphéa un grave préjudice matériel, notamment par la perte des commissions sur les ventes réalisées à son insu durant la période de viduité du contrat de mandat, et pour en déterminer le montant,

- désigner tel expert qu'il plaira avec pour mission de ;

- se faire remettre la comptabilité des sites, objet du mandat exclusif de vente de Finance Orphéa,

- déterminer le nombre de ventes réalisées durant son mandat, c'est-à-dire jusqu'au 5 septembre 2008,

- calculer le montant des commissions dont Finance Orphéa a été frustrée,

- de ses opérations, dresser rapport pour être statué sur ce que de droit par le Tribunal,

- condamner in solidum Soffimat et Euro Power Technology à payer à Finance Orphéa une somme de 10.000 euros

La société Finance Orphéa fait valoir qu'à l'issue de la période d'essai stipulée dans le protocole d'accord du 30 janvier 2007, la société Soffimat n'a dénoncé ni ce protocole, ni le mandat de vente. Elle soutient qu'en conséquence, la société Soffimat ne saurait se prévaloir d'une quelconque caducité dont l'automatisme n'est prévu ni par le protocole, ni par le contrat de vente.

Elle soutient que la société Soffimat a manifesté son intention de poursuivre les relations contractuelles avec elle, au moins jusqu'au 5 septembre 2008, date à laquelle elle lui a fait connaître qu'elle lui interdisait de commercialiser ses produits à l'avenir. Elle oppose que le succès de la phase préalable ne constituait pas une condition suspensive.

La société Finance Orphéa demande donc confirmation du jugement en ce qu'il a constaté que les factures étaient justifiées et en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés Soffimat et Euro Power Technology à les payer.

La société Finance Orphéa soutient, de plus, que c'est à tort que les premiers juges ont refusé de faire droit à sa demande d'expertise, puisqu'il est acquis qu'avant le 5 septembre 2008, date à laquelle la société Soffimat a dénoncé le protocole et le mandat, elle avait vendu deux centrales et que deux autres s'apprêtaient à l'être au mépris de ses droits, sans qu'elle ait les moyens de démontrer la perte qu'elle a subie en ne percevant pas les commissions qui lui étaient dues sur ces ventes.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la caducité du protocole d'accord et du mandat

Le protocole d'accord conclu entre les parties, le 30 janvier 2007, prévoyait que la société Finance Orphéa s'était rapprochée de la société Soffimat « (') afin d'organiser la vente des centrales de production d'électricité fonctionnant au biogaz de décharge auprès d'une clientèle d'investisseurs privés » et que les parties convenaient que la société Finance Orphéa était « responsable du montage, de l'ingenierie fiscale et financière du projet ainsi que de sa vente à des investisseurs privés ». Il précisait en son article 2 que « Les parties conviennent que la poursuite de leurs relations commerciales et contractuelles est conditionnée par la réussite d'une phase préalable devant permettre de tester la faisabilité et le succès de cette opération.

Etant précisé que, en cas d'échec de cette phase préalable, il sera mis fin définitivement à toute convention et à toute obligation réciproque respective de la part de chacune des parties (').

Cette phase préalable qui durera 3 mois est destinée à permettre à la société Finance Orphéa d'établir qu'elle est à même de pouvoir signer des contrats de réservation et/ou de vente permettant de financer au minimum 70 microturbines destinées aux centrales de Biogaz pour un montant de 6 000 000 € HT

A cette fin la société Finance Orphéa fera souscrire par les investisseurs recherchés des contrats de réservation, lesquels devront être assortis d'un dépôt de garantie de 1 000 € sur un compte séquestre (...) ».

Le mandat de vente, conclu entre les sociétés Soffimat et Finance Orphéa le lendemain, soit le 31 janvier 2007, énonçait à l'article 1 que « le mandant (la société Soffimat) confie en exclusivité au mandataire (la société Finance Orphéa) la commercialisation des turbines équipant les plateformes de production d'électricité qu'il projette d'installer ou qui sont déjà installées dans des centres d'enfouissement techniques (CET)  ». Il était précisé à l'article 10 que « Le présent contrat deviendra définitif au terme d'une phase de 3 mois définie dans le protocole d'accord signé conjointement avec le présent mandat. Au terme de cette période, il est conclu pour le temps nécessaire à l'exécution de cette mission avec une première tranche irrévocable de 12 mois à compter de la signature. A l'issue de cette première période, l'une ou l'autre des parties pourra dénoncer le présent mandat par lettre recommandée avec accusé de réception motivée, en respectant un préavis de trois mois ».

Il convient de relever que les termes du protocole rappelés ci-dessus ne prévoyaient pas que la société Finance Orphéa devait « vendre » 70 microturbines dans les trois mois de la phase initiale, comme le soutiennent les sociétés Soffimat et Euro Power Technology, mais seulement qu'elle devait établir qu'elle était « à même de pouvoir signer des contrats de réservation et/ou de vente permettant de financer au minimum 70 microturbines destinées aux centrales de Biogaz pour un montant de 6 000 000 € HT ».

Or, il résulte du tableau intitulé « suivi des ventes BIO Valorisation » et des copies des contrats de réservation C30 et contrats de réservation C65, ainsi que des chèques de garantie de ces réservations que la société Finance Orphéa avait, au 30 avril 2007, soit trois mois après la signature du mandat, fait conclure les réservations de 49 turbines et que le chiffre de 70 était atteint le 4 juin suivant. La société Soffimat ne saurait à cet égard soutenir que la société Finance Orphéa aurait dû produire 70 contrats de réservation ou de vente de turbines, puisque le contrat vise seulement « des contrats permettant le financement de 70 microturbines (...) », ces termes exprimant clairement qu'un seul contrat pouvait concerner plusieurs turbines.

De plus, le comportement de la société Soffimat, à l'issue de l'échéance des trois mois suivant la signature du protocole d'accord, démontre qu'elle a estimé que la société Finance Orphéa avait réalisé avec succès la phase préalable bien que l'objectif de 70 n'ait pas été totalement atteint.

En effet, d'une part, elle n'a pas cessé ses relations avec la société Finance Orphéa, ce qui aurait été le cas si elle avait estimé que leurs relations contractuelles étaient devenues caduques, d'autre part, loin d'agir comme si elle n'était plus liée par les conventions, elle a conclu avec la société Soffimat un avenant au mandat de vente du 31 janvier 2007, le 18 juin 2007, lequel donne au mandataire la mission d'organiser la signature des contrats de location suivant un modèle annexé et se réfère expressément aux « conditions de loyers définis dans le mandat de vente et son avenant signés avec la société Soffimat le 31 janvier 2007 », ce qui démontre qu'elle considérait que celui-ci était devenu définitif à l'issue de la phase préalable. En outre, elle a laissé la société Finance Orphéa continuer à rechercher des investisseurs privés jusqu'à la lettre du 29 novembre 2007, par laquelle elle a soutenu que les accords étaient caducs. Enfin, elle ne conteste pas avoir continué à verser à la société Finance Orphéa les commissions afférentes aux transactions apportées par elle.

Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les sociétés Soffimat et Euro Power Technology ne peuvent à juste titre prétendre que le protocole d'accord et le mandat de vente des 30 et 31 janvier 2007 étaient devenus caducs.

Sur la date de la rupture du mandat

En l'absence de caducité des engagements, la rupture du mandat devait respecter les dispositions de son article 10, aux termes duquel il était conclu pour une durée « irrévocable de 12 mois à compter de la signature. A l'issue de cette première période, l'une ou l'autre des parties pourra dénoncer le présent mandat par lettre recommandée avec accusé de réception motivée, en respectant un préavis de trois mois ».

Ainsi que le soutient la société Finance Orphéa aucune dénonciation n'étant intervenue à l'issue de la période d'un an suivant le 31 janvier 2007, le mandat de vente s'est poursuivi jusqu'à la lettre du 5 septembre 2008, par laquelle la société Soffimat a fait interdiction à la société Finance Orphéa de continuer à commercialiser ses produits, interdiction que celle-ci a respectée. C'est donc le 5 septembre 2008 que l'exclusivité de vente pour le compte de la société Soffimat dont bénéficiait la société Finance Orphéa, a pris fin.

Sur les sommes dont la société Finance Orphéa demande paiement

La société Finance Orphéa fait valoir qu'elle a appris au mois d'août 2008, que la société Soffimat avait vendu les 4 juin et 16 juillet précédents à la société Bio Evolution deux sites, objet du mandat exclusif de vente, dont elle était titulaire, ce qui correspond à 26 turbines.

La société Soffimat soutient que le mandat confié à la société Finance Orphéa ne portait que sur la vente des microturbines et non sur des sites entiers et qu'en conséquence, elle ne saurait revendiquer le paiement de commissions concernant des ventes de sites. Elle fait, par ailleurs, valoir que l'intimée ne peut non plus prétendre percevoir des commissions sur des ventes qui auraient été conclues par la société Europower Technologie, avec laquelle elle n'avait conclu aucun mandat, et que de surcroît, les ventes ont été conclues par l'intermédiaire de la société Natixis et non de la société Finance Orphéa.

Cependant, le protocole d'accord du 30 janvier 2007 énonce que la société Finance Orphéa s'est rapprochée de la société Soffimat « (') afin d'organiser la vente des centrales de production d'électricité fonctionnant au biogaz de décharge auprès d'une clientèle d'investisseurs privés ». L'article 1 du mandat de vente qui énonce l'objet du mandat comme étant « la commercialisation des turbines équipant les plateformes de production d'électricité que [la société Sofimat] projette d'installer ou qui sont déjà installées dans des centres d'enfouissement techniques (CET) » précise que « La commercialisation des équipements de ces sites de production peut être réalisée sous la forme d'un équipement entier pour un site ou par turbine (...) ». Par ailleurs, l'article 8 de ce contrat précise que « Le mandant s'engage à confier l'ensemble de la commercialisation des sites de production d'électricité qu'il installera (ou qui sont déjà installés) dans les centres d'enfouissement techniques avec lesquels il a conclu des accords d'exploitation de leur biogaz de décharge » et que « Le mandant s'interdit de commercialiser directement ou indirectement les sites faisant l'objet des présentes, s'engageant à diriger vers le mandataire toutes les demandes qui lui seront adressées personnellement ».

Il résulte de ces dispositions que l'exclusivité portait sur la vente de turbines installées ou à installer sur les sites concernés, ces turbines pouvant être commercialisées individuellement, ou groupées.

Le mandat de vente du 31 janvier 2007 citait en annexe 2, les centres d'enfouissement techniques de [Localité 2] et de [Localité 1] parmi ceux dont la commercialisation des turbines (13 à [Localité 2], 16 à [Localité 1]) relevaient de l'exclusivité conclue au bénéfice de la société Finance Orphéa. Il n'est pas contesté par la société Soffimat que ces deux centres ont été cédés avant le 5 septembre 2008, date de la rupture du mandat. La cession étant intervenue en violation des droits à commission de la société Finance Orphéa, c'est à juste titre que le tribunal a condamné la société Soffimat à lui payer la somme de 299 000 euros au titre cette commission, sans qu'importe le fait que la cession ait été réalisée non par la société Soffimat, mais par la société Europower Technologie.

Le principe et le montant des deux autres factures (72 597,20 euros et 180 322,12 euros) sont justifiés par la société Finance Orphéa et ne sont pas critiqués par la société Soffimat, le jugement sera donc confirmé sur le montant total de 551 919,32 euros de la condamnation qu'il a prononcé au bénéfice de la société Finance Orphéa.

Il n'est pas non plus contesté que la société Europower Technologie a elle même cédé à la société Bio Evolution les centres d'enfouissement techniques de [Localité 2] et de [Localité 1], alors même qu'elle ne dément pas avoir connu l'exclusivité dont bénéficiait la société Finance Orphéa sur ces deux centres. Il convient dans ces circonstances de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné cette société solidairement avec la société Soffimat à payer à la société Finance Orphéa la somme de 551 919,32 euros ainsi que 10.000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Sur la demande d'expertise

Si le rapport de gestion de la société Bio Evolution, daté du 30 juin 2008, précise que la société « a vocation à acquérir les sites de la société [Localité 4] et de [Localité 3] » qui sont cités dans l'annexe 2 du contrat de mandant du 31 janvier 2007, rien ne permet objectivement de penser que cette acquisition a bien été effectuée avant le 5 septembre 2008, date de rupture du contrat reconnue par la société Finance Orphéa. Celle-ci, n'apporte de surcroît aucun autre élément permettant de considérer que la société Soffimat aurait procédé à d'autres cessions en fraude des droits de la société Finance Orphéa que celles précédemment relevées.

Par conséquent, en l'absence d'éléments nouveaux, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande d'expertise de la société Finance Orphéa.

Sur les frais irrépétibles

Considérant que la société Finance Orphéa a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge , il y a lieu de condamner la société Soffimat à lui verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

CONDAMNE la société Soffimat à verser à la société Finance Orphéa la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties ;

CONDAMNE la société Soffimat aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente

E.DAMAREY C.PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 11/10437
Date de la décision : 26/09/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°11/10437 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-26;11.10437 ?
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