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26/09/2013 | FRANCE | N°09/22361

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 26 septembre 2013, 09/22361


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2013



(n° , 10 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 09/22361





Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Septembre 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/05919







APPELANTS



Madame [V] [L] épouse [Y]

[Adresse 5]

[Adresse 5

]

[Localité 1]



Représentant : la SCP GALLAND - VIGNES (Me Marie-Catherine VIGNES), avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assistée de : Me Joseph SAVELLI, avocat au barreau d'AJACCIO et de Me Camille GUIDICEL...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2013

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/22361

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Septembre 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/05919

APPELANTS

Madame [V] [L] épouse [Y]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentant : la SCP GALLAND - VIGNES (Me Marie-Catherine VIGNES), avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assistée de : Me Joseph SAVELLI, avocat au barreau d'AJACCIO et de Me Camille GUIDICELLI, avocat au barreau de Marseille

Monsieur [M] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentant : la SCP GALLAND - VIGNES (Me Marie-Catherine VIGNES), avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assisté de : Me Joseph SAVELLI, avocat au barreau d'AJACCIO et de Me Camille GUIDICELLI, avocat au barreau de Marseille

INTIMÉES

SA ASSURANCES DU CREDIT MUTUEL VIE - ACM VIE SA, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me Belgin PELIT-JUMEL (avocat au barreau de PARIS, toque : L0056)

Assistée de : Me Carole BAUMERT, plaidant pour le cabinet Orion Avocats et consorts, avocat au barreau de Strasbourg

SA BANQUE CIC EST, venant aux droits du CREDIT INDUSTRIEL d'ALSACE ET DE LORRAINE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentant : la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU-JUMEL (Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU), avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Assistée de : la SCP LEVY & KAHN (Me Gérard ALEXANDRE), avocat au barreau de STRASBOURG

SA CM-CIC GESTION, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentant : la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU-JUMEL (Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU), avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Assistée de: Me Michel RASLE de la SELARL CARBONNIER LAMAZE RASLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0298

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Juin 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente

Madame Caroline FÈVRE, Conseillère

Madame Muriel GONAND, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : M. Sébastien PARESY

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par Madame Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.

Par jugement rendu le 29 septembre 2009, le tribunal de grande instance de Paris a:

- débouté les consorts [Y] de toutes leurs demandes tendant à la nullité et à la résolution de l'accord transactionnel en date du 7 avril 2003,

- déclaré les consorts [Y] irrecevables en toutes leurs demandes tendant à mettre en cause la responsabilité des parties en défense sur la gestion du FCP LUCKY pour la période antérieure au 7 avril 2003 et en conséquence rejeté les réclamations présentées à ce titre,

- rejeté toutes autres demandes et conclusions,

- condamné solidairement les consorts [Y] à payer à chacune des parties suivantes, soit à la société CM-CIC GESTION, à la banque CIC-EST et à la société ACM VIE la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné solidairement les consorts [Y] aux dépens.

Par déclaration remise au greffe de la Cour le 3 novembre 2009, les consorts [Y] ont interjeté appel de ce jugement.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 1er juin 2013, les consorts [Y] demandent à la Cour:

- d'infirmer le jugement et statuant à nouveau,

- de prononcer la résolution du protocole ou subsidiairement de dire le protocole nul et de nul effet,

- de dire que les sociétés défenderesses ont outrepassé le mandat de gestion confié en prenant des risques que la gestion équilibrée choisie par le client, excluait,

- de dire qu'elles ont violé leur obligation de conseil, en ne permettant pas à leur client d'assurer sans aucun risque le paiement de l'impôt sur plus values devant être payé à brève échéance,

- de dire qu'elles ont violé leur obligation de prudence, en consacrant plus de 10% de la valeur du portefeuille à un même titre et plus de 40% du capital du fonds aux lignes représentant plus de 5% du capital du fonds,

- de condamner solidairement les sociétés défenderesses à leur payer la somme de 4.811.000 euros, sauf à parfaire,

- de dire qu'ils se chargeront de la répartition de cette somme entre eux,

- de dire qu'ils sont dégagés de toute dette en ce qui concerne l'emprunt accordé pour le paiement de la plus value,

- en toute hypothèse:

- de condamner solidairement les sociétés intimées à leur payer à chacun la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens,

- d'ordonner la publication de la décision dans un quotidien national et dans un quotidien local à la charge des intimées, dans la limite de 5.000 euros pour chacune d'entre elle.

Dans ses dernières écritures signifiées le 10 mai 2013, la société ACM VIE demande à la Cour:

- de débouter les consorts [Y] de leurs demandes,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de dire qu'il y a une fin de non recevoir liée à l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction,

- de débouter les consorts [Y] de leurs demandes en ce qu'elles tendent à la résolution ou à la nullité de la transaction,

- de débouter en conséquence les consorts [Y] de leurs demandes de dommages et intérêts à son encontre,

- à titre infiniment subsidiaire:

- de réserver ses droits à conclure plus amplement au fond si par extraordinaire la nullité ou la résolution de la transaction était prononcée,

- en tout état de cause:

- de condamner in solidum les consorts [Y] à payer la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens.

Dans ses dernières écritures signifiées le 2 mai 2013, le CIC EST demande à la Cour:

- à titre principal:

- de déclarer les consorts [Y] irrecevables et mal fondés en leur appel,

- de débouter les consorts [Y] de leurs demandes,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de condamner solidairement les consorts [Y] à payer la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens.

- subsidiairement:

- de dire que l'action exercée à l'encontre de la banque en vue du prononcé de la résolution de la transaction est irrecevable et mal fondée,

- de dire qu'il n'a commis aucune faute ni à fortiori aucune faute grave susceptible de justifier le prononcé de la résolution, alors qu'au surplus les fautes évoquées à son encontre n'ont pas créé de préjudice, eu égard au résultat de la gestion postérieure à la signature de la transaction,

- en tout état de cause de rejeter les demandes des consorts [Y] tendant au prononcé de la nullité de la transaction,

- de dire n'y avoir lieu à dommages et intérêts au profit des consorts [Y],

- au cas où la nullité ou la résolution seraient prononcées:

- de dire qu'il y a lieu de tenir compte des sommes perçues par les consorts [Y] en exécution de la transaction, soit 4.321.000 euros, plus le remboursement des pertes payées par la banque soit 400.605,89 euros en principal,

- de condamner solidairement les consorts [Y] à payer la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens.

Dans ses dernières écritures signifiées le 31 mai 2013, la société CM-CIC GESTION demande à la Cour:

- in limine litis:

- de dire que l'autorité de la chose jugée est attachée au protocole transactionnel du 7 avril 2003,

- de débouter les consorts [Y] de leurs demandes,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- à titre subsidiaire, si par impossible la Cour estimait la demande en rétractation valable et/ou déclarait nul le protocole:

- de dire que les consorts [Y] ne rapportent pas la preuve d'une faute de la banque, d'un préjudice et d'un lien de causalité,

- de rejeter la demande en paiement,

- en toute hypothèse:

- de condamner solidairement les consorts [Y] à payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens.

SUR CE

Considérant que les consorts [Y], qui étaient actionnaires de la société exploitant le casino de [Localité 4], ont vendu, au cours de l'année 2000, leur participation moyennant la somme de 9 millions d'euros;

Considérant que le 26 juin 2000, à effet du 30 juin 2000, ils ont adhéré chacun à deux contrats d'assurance-vie HEREDIA SELECTION VALEUR, souscrits par le CIC auprès de la SOCAPI, aux droits de laquelle vient la société d'assurances ACM VIE, et ils ont versé chacun des primes brutes de 1.524.500 euros et 3.049.000 euros, les contrats étant libellés en unités de compte, composés de parts du FCP PATRIMONIAL LUCKY, le gestionnaire du fonds étant la société CM-CIC GESTION et le dépositaire le CIC EST;

Considérant qu'entre le mois de février 2001 et le mois de décembre 2002, l'actif, qui était à l'origine de 9.105.516,19 euros, a fortement diminué et qu'il était de 2.455.337 euros au 27 décembre 2002;

Considérant par ailleurs, qu'au titre de la plus value sur la cession, le Trésor Public a réclamé la somme de 1.448.300 euros à Monsieur [Y] et la somme de 1.570.200 euros à Madame [Y] en septembre 2001; que ces derniers ont obtenu la mise en place d'un échéancier avec trois versements, le premier de 3.000.000 francs le 15 septembre 2001 et les suivants de 3.653.589 francs les 15 janvier et 15 juin 2002; que le 12 novembre 2001, le CIC EST leur a consenti une autorisation de découvert de 10.300.000 francs, pour régler les impôts, d'une durée d'un an, reconduite par acte du 4 juillet 2002;

Considérant que c'est dans ce contexte qu'un protocole d'accord a été signé le 7 avril 2003 entre les consorts [Y] et le CIAL, (CIC EST), agissant en son nom et pour le compte de SOCAPI, la CICAM et EST GESTION (CM-CIC GESTION), prévoyant la constitution d'un compte géré, intitulé LUCKY BIS, alimenté intégralement par des fonds propres du CIC EST à hauteur de 6.300.000 euros, la gestion devant être de profil 'équilibré', les deux tiers des revenus générés par ce compte devant être reversés trimestriellement aux consorts [Y] à titre d'indemnité transactionnelle, le tiers restant à la banque, qui devait assumer à 100% le risque de performance négative et reconstituer à due concurrence sur ses ressources propres, le volume des avoirs en gestion, si au termes de deux trimestres de report, la perte n'avait pas été couverte par les produits financiers; que cette gestion devait être maintenue jusqu'au 31 mars 2007, sauf à ce que les avoirs des consorts [Y] constitués par le fonds LUCKY et les profits générés par le fonds LUCKY BIS atteignent avant cette date la somme de 7.300.000 euros et qu'à défaut la gestion devait être reconduite jusqu'au 31 mars 2011;

Considérant que par actes d'huissier en date des 21 et 25 mars 2008, les consorts [Y] ont fait assigner la société ACM VIE, la société CM-CIC GESTION et le banque CIC-EST, anciennement dénommé CREDIT INDUSTRIEL D'ALSACE LORRAINE (CIAL) devant le Tribunal de Grande Instance de Paris qui a rendu la décision déférée;

Considérant que les consorts [Y] demandent à titre principal la résolution du protocole; qu'ils soutiennent que l'exposition en actions du compte LUCKY BIS était insuffisante et non conforme aux dispositions du protocole prévoyant une gestion équilibrée, que depuis janvier 2008 l'exposition a été constamment inférieure à 30%, que la banque ne justifie pas avoir reconstitué ses avoirs alors qu'entre novembre 2007 et le 31 mars 2009, la valeur du fonds était inférieure à 6.300.000 euros; qu'ils prétendent également que le protocole n'a pas rempli son objectif, à savoir la reconstitution d'une situation active et passive ressortant d'une gestion équilibrée dès l'origine, que la banque était tenue à tout le moins d'une obligation de moyen renforcée et qu'il lui appartient de justifier des moyens mis en oeuvre, ce qu'elle ne fait pas; qu'ils estiment que l'inexécution des obligations, même partielle, justifie la résolution en raison de sa gravité et qu'il est indifférent que le protocole ait été exécuté antérieurement conformément à ses prévisions; qu'ils sollicitent à titre subsidiaire la nullité du protocole en invoquant la contrainte économique au motif qu'ils ne disposaient pas des avoirs suffisants pour rembourser le découvert venant à échéance en octobre 2003, consenti pour payer l'impôt sur la plus value; qu'ils ajoutent que l'indemnité transactionnelle est aléatoire, soumise aux aléas des marchés financiers, indéfinie quant à son quantum et que les concessions sont disproportionnées; qu'ils affirment en outre que les intimées ont outrepassé les termes du mandat confié, puisque la gestion équilibrée signifiait une exposition en actions de 50% et que la quasi totalité des fonds a été investie en actions, qu'elles ont violé leur obligation de conseil, en ne leur conseillant pas de réserver les fonds nécessaires au paiement de l'impôt sur la plus value, ainsi que leur obligation de prudence en méconnaissant les règles visant à limiter les risques au sein du capital du fonds; qu'enfin, sur le préjudice, ils estiment que la gestion équilibrée aurait conduit à une valeur de 11,5 millions d'euros au 30 novembre 2009, qu'ils ont été contraints de payer des intérêts de l'ordre de 650.000 euros et qu'après compensation avec les sommes perçues, leur préjudice est de 4.811.000 euros;

Considérant qu'en réponse, la société CM-CIC GESTION fait valoir que la gestion prudente du fonds au cours de l'exercice 2008 ne constitue pas un manquement suffisamment grave pour justifier la résolution du protocole; qu'elle indique que les autorisations de découvert résultent d'un choix stratégique des consorts [Y] et que le protocole n'a été signé, ni dans un contexte de contrainte économique, ni sous la pression de la banque, mais qu'il est l'aboutissement de négociations conduites sur plusieurs mois par les consorts [Y], conseillés par un professionnel du droit; qu'elle ajoute que les consorts [Y] ont accepté de renoncer à toute action en contrepartie des nombreuses concessions des établissements financiers; qu'elle mentionne que l'action en responsabilité est irrecevable, les consorts [Y] ne pouvant invoquer une faute de la banque dans le cadre de la gestion du FCP LUCKY compte tenu de la signature du protocole d'accord qui a mis fin à toute contestation en application de l'article 2052 du Code civil;

Considérant que le CIC EST rappelle que les consorts [Y] n'ont pas contesté l'exécution de la transaction, pendant tout la période où elle s'est réalisée et que le compte LUCKY BIS a été géré dans leur intérêt; que sur la demande de nullité, il mentionne que les consorts [Y] disposaient des fonds nécessaires pour payer l'impôt sur la plus value lorsqu'il est devenu exigible et qu'ils ont préféré emprunter et maintenir les fonds placés, que le protocole contient des concessions réciproques et qu'il n'est pas aléatoire; qu'il conteste toute responsabilité en précisant qu'il n'était pas gestionnaire des comptes avant la transaction, mais seulement dépositaire du FCP;

Considérant que la société ACM VIE expose que le 4 octobre 2012, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi des consorts [Y] contre l'arrêt de la cour d'appel de Colmar qui, infirmant le jugement du Tribunal de Grande Instance de Strasbourg, a débouté les consorts [Y] de leur demande de voir constater l'anéantissement des contrats d'assurance vie suite à l'exercice de la faculté de renonciation; qu'elle souligne que l'exposition moindre avait pour but de préserver les intérêts des consorts [Y], qu'elle s'est révélée bénéfique notamment en 2008 et que le gain manqué en 2009 est insuffisant pour justifier une résolution; qu'elle soutient qu'il n'y avait pas d'obligation de résultat sur la reconstitution active ou passive ressortant d'une gestion équilibrée dès l'origine; qu'elle allègue que les consorts [Y] ne rapportent pas la preuve de pressions, qu'il existe bien des concessions réciproques des parties, le juge n'ayant pas à évaluer l'importance de ces concessions et qu'enfin ces concessions sont réelles et non soumises à un aléa;

- sur la demande de résolution du protocole d'accord:

Considérant qu'aux termes du protocole d'accord signé le 7 avril 2003, il est prévu les dispositions suivantes, concernant les avoirs gérés:

- la constitution d'un compte géré intitulé LUCKY BIS, alimenté intégralement par des fonds propres du CIC EST à hauteur de 6.300.000 euros,

- un type de gestion 'équilibrée', l'investissement en actions pouvant atteindre jusqu'à 70% de la valeur totale du portefeuille, sans pouvoir être inférieur à 30% de cette valeur,

- un versement trimestriel, correspondant aux deux tiers des revenus générés par ce compte, aux consorts [Y] à titre d'indemnité transactionnelle, le tiers restant à la banque,

- le maintien de cette gestion jusqu'au 31 mars 2007, à moins que la valeur du fonds LUCKY cumulé avec les profits générés par le fonds LUCKY BIS n'ait atteint entre temps la somme de 7.300.000 euros et à défaut la reconduction des modalités jusqu'au 31 mars 2011,

- la banque devant également assumer à 100% le risque de performance négative et si au terme des deux trimestres de report, la perte n'avait pas été couverte par les produits financiers, il lui appartenait de reconstituer à due concurrence sur ses ressources propres, le volume des avoirs en gestion;

Considérant que les consorts [Y] soutiennent que le fonds LUCKY BIS n'a pas été géré conformément aux dispositions du protocole;

Considérant qu'ils font valoir que depuis janvier 2008, l'exposition en actions a été constamment inférieure à 30% et qu'une gestion moins prudente n'aurait pas été à leur préjudice puisqu'ils n'encouraient aucun risque de perte;

Considérant qu'il n'est pas contesté par les consorts [Y] qu'à compter de l'ouverture du fonds LUCKY BIS en juin 2003 et jusqu'en septembre 2007, l'exposition du fonds en actions a été conforme à la disposition du protocole prévoyant une gestion équilibrée;

Considérant qu'il ressort des pièces produites qu'à compter de la fin de l'année 2007 la gestion du fonds a été orientée dans le sens d'une moindre exposition en actions, tout en restant supérieure à 30% et que cette exposition a été inférieure à 30% à compter du 30 juin 2008 et jusqu'au 31 décembre 2009, avant de repasser au dessus de la limite de 30% au début de l'année 2010;

Considérant qu'il est établi que l'exposition en actions moindre s'est révélée bénéfique pour le fonds LUCKY BIS en 2008, puisque ce fonds a connu une sous performance limitée à -4,46%, alors que le fonds LUCKY a eu une sous performance de -14,91%;

Considérant que cette stratégie de prudence, manifestement dictée par la crise boursière qui a commencé à cette période, a permis, en 2008, de préserver les intérêts des consorts [Y]; qu'il peut seulement être relevé un éventuel gain manqué pour l'année 2009 concernant le fonds LUCKY BIS, dont la performance est de 4,47%, alors que celle du fonds LUCKY est de 15,74%;

Considérant que cette inexécution ne peut être considérée comme un manquement suffisamment grave pour justifier à elle seule la résolution du protocole d'accord;

Considérant que les consorts [Y] allèguent aussi qu'ils n'encourraient aucun risque de perte, qu'une gestion moins prudente n'était pas préjudiciable pour eux et que la banque n'a pas reconstitué ses avoirs entre novembre 2007 et le 31 mars 2009, alors que la valeur du fonds était inférieure à 6.300.000 euros;

Considérant qu'aux termes du protocole, le versement trimestriel, correspondant à la différence entre la valeur acquise en fin de trimestre et la somme de 6,3M d'euros, était réparti pour 2/3 au profit des consorts [Y] et de 1/3 au profit de la banque, que la performance négative constatée à la fin d'un trimestre était reportable sur les résultats positifs des deux trimestres suivants et que si au terme des deux trimestres de report, la perte n'était pas couverte par les produits financiers, la banque devait reconstituer à due concurrence sur ses ressources propres le volume des avoirs en gestion, pour permettre de retrouver un actif géré de 6,3 millions d'euros;

Considérant que les consorts [Y] ne peuvent soutenir qu'une gestion moins prudente ne pouvait leur causer aucun risque, puisque la perte éventuelle s'imputait sur les bénéfices des deux trimestres suivants et qu'ils en subissaient donc les conséquences;

Considérant par ailleurs que les consorts [Y] ne justifient pas que la banque n'a pas rempli son obligation de maintenir la somme de 6.300.000 euros, dans les conditions fixées par le protocole et rappelées ci-dessus;

Considérant que les consorts [Y] prétendent également que le protocole n'a pas rempli son objectif, à savoir la reconstitution d'une situation active et passive ressortant d'une gestion équilibrée dès l'origine et que la banque n'a pas mis en oeuvre les moyens nécessaires;

Considérant que dans le protocole, au paragraphe 'exposé des motifs', il est indiqué que les parties conviennent de mettre en oeuvre un ensemble de moyens, afin de rétablir progressivement une situation patrimoniale, active ou passive qui eût été celle résultant d'une gestion équilibrée, dans le contexte boursier allant de juin 2000 à la date du protocole, l'objectif étant de permettre aux consorts [Y] de retrouver une situation patrimoniale assainie;

Considérant que l'objectif ainsi mentionné dans l'exposé des motifs ne constitue pas l'une des modalités fixées dans le protocole et qu'il n'existe donc pas, dans le protocole, d'obligation de résultat sur le rétablissement de la situation patrimoniale des consorts [Y];

Considérant que les consorts [Y] ont reçu les relevés de compte du fonds LUCKY BIS et qu'ils ne peuvent contester l'existence de ce fonds;

Considérant que, de l'ouverture du fonds LUCKY BIS et jusqu'à sa clôture le 31 mars 2011, les consorts [Y] ont perçu la somme totale de 2.539.549,28 euros au titre des produits financiers générés par la gestion de ce compte;

Considérant que les consorts [Y] n'ont pas critiqué la gestion du fonds LUCKY et qu'il ressort des tableaux versés aux débats que l'évolution du fonds LUCKY BIS, depuis 2003, a permis un rendement plus favorable que celui du fonds LUCKY;

Considérant en conséquence que la seule inexécution avérée, relative à l'obligation d'exposition en actions pendant quelques mois, ne constitue pas un manquement suffisamment grave pour justifier la résolution du protocole;

Considérant que les consorts [Y] doivent dès lors être déboutés de cette demande;

- sur la demande de nullité du protocole:

Considérant que les consorts [Y] invoquent la contrainte économique au motif qu'ils ne disposaient pas des avoirs suffisants pour rembourser le découvert venant à échéance en octobre 2003, consenti pour payer l'impôt sur la plus value;

Considérant que lors de la mise en place des contrats d'assurance-vie, les consorts [Y] avaient connaissance de l'imminence de l'exigibilité de l'imposition sur les plus values et qu'il ressort d'une lettre du CIC EST que la banque leur avait conseillé de placer une partie des fonds dans un actif à capital garanti;

Considérant que les consorts [Y], qui disposaient des fonds nécessaires au paiement de cet impôt de plus de 3.000.000 euros, ont fait le choix de solliciter une autorisation de découvert de la banque en novembre 2001, pour régler l'impôt, préférant conserver la totalité des sommes investies sur les contrats d'assurance vie;

Considérant que les seuls avis d'imposition des consorts [Y] pour l'année 2001 ne permettent pas d'établir qu'ils ne disposaient d'aucun autre bien, mobilier ou immobilier, d'autant qu'il est indiqué sur la déclaration de Madame [Y] et de son époux, notaire, qu'ils percevaient des revenus fonciers; que les consorts [Y] ne démontrent pas qu'ils étaient dans une situation de faiblesse les obligeant à signer le protocole d'accord;

Considérant que les consorts [Y] ne rapportent pas non plus la preuve de pressions exercées par la banque à leur encontre, alors qu'il n'est pas contesté que des négociations ont eu lieu préalablement à la signature de ce protocole et que notamment dans une lettre du 17 mars 2003, le CIC EST mentionne un projet de protocole à adresser au conseil des consorts [Y];

Considérant que les consorts [Y] ne justifient donc d'aucune contrainte économique susceptible d'entraîner la nullité du protocole;

Considérant que les consorts [Y] se prévalent également de l'absence de concessions réciproques dans le protocole;

Considérant qu'ils avaient transmis à la banque un projet d'assignation le 3 mars 2003, à l'encontre de la compagnie d'assurance et de la banque, dans lequel ils demandaient l'annulation des contrats d'assurance vie sur le fondement de l'erreur ou du dol;

Considérant qu'il ressort du protocole, qu'en contrepartie de la renonciation des consorts [Y] à toute action, la banque s'est engagée à mettre en place un 'dispositif concernant les avoirs gérés', dans les conditions précédemment mentionnées, étant rappelé que les consorts [Y] bénéficiaient ainsi des deux tiers des produits provenant de la gestion dans le compte LUCKY BIS, constitué par les fonds propres de la banque pour la somme de 6.3000.000 euros et que la banque était tenue de reconstituer le capital de départ en cas de performance négative pendant une période maximale de huit ans; qu'en outre, par un 'dispositif applicable au découvert', et en parallèle à la mise en place du fonds LUCKY BIS, la banque a accepté de reporter l'échéance des concours à court terme, ayant permis le paiement de l'imposition sur les plus values, au 31 mars 2007, susceptible de report dans les mêmes conditions que la durée du fonds LUCKY BIS et de faire bénéficier les clients d'une rétrocession de 50% des intérêts;

Considérant qu'il existait ainsi manifestement de réelles concessions faites par la banque dans le protocole;

Considérant par ailleurs que les consorts [Y] prétendent que l'indemnité transactionnelle est aléatoire et soumise aux aléas des marchés financiers;

Considérant cependant que l'indemnité résultant des produits du fonds LUCKY BIS ne constitue qu'un des éléments des concessions consenties par la banque, que la création de ce fonds et les conditions de son fonctionnement n'étaient pas aléatoires et que l'absence de garantie sur les montants des produits de ce fonds ne permet pas de considérer que l'indemnité transactionnelle est purement aléatoire;

Considérant en conséquence que les consorts [Y] ne démontrent pas que les concessions réciproques des parties présentaient un caractère manifestement disproportionné et qu'ils doivent être déboutés de leur demande de nullité du protocole d'accord;

- sur la responsabilité de la banque:

Considérant que les consorts [Y] soutiennent que la banque a outrepassé son mandat et qu'elle a violé ses obligations de conseil et de prudence;

Considérant qu'en raison de l'autorité de chose jugée attachée au protocole d'accord du 7 avril 2003, les consorts [Y] sont irrecevables à rechercher la responsabilité de la banque pour sa gestion antérieure au 7 avril 2003;

Considérant que les consorts [Y] sollicitent la publication de la décision dans des journaux, mais qu'en raison du rejet de toutes leurs prétentions, il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande;

Considérant que le jugement doit dans ces conditions être confirmé en toutes ses dispositions;

Considérant que les consorts [Y], qui succombent, supporteront leurs frais irrépétibles et les dépens d'appel;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés les frais non compris dans les dépens, exposés en appel et qu'il convient de condamner solidairement les consorts [Y] à leur payer à chacun la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Condamne solidairement les consorts [Y] à payer à chacune des parties intimées, soit au CIC EST, à la société CM-CIC GESTION et à la société ACM VIE la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Déboute les parties de toutes autres demandes.

Condamne solidairement les consorts [Y] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 09/22361
Date de la décision : 26/09/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°09/22361 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-26;09.22361 ?
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