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05/09/2013 | FRANCE | N°13/08324

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 05 septembre 2013, 13/08324


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 9



ARRÊT DU 05 SEPTEMBRE 2013



(n° , pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 13/08324





Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Mars 2013 - Tribunal de Commerce de CRETEIL - 1ère chambre - RG n° 2012F00578





APPELANT :



Monsieur [W] [H]

né le [Date naissance 1] 1951 à [LocalitÃ

© 2] (Portugal)

de nationalité portugaise

demeurant [Adresse 2]

[Localité 1]



représenté par : Maître Anne-Marie MAUPAS OUDINOT (avocat au barreau de PARIS, toque : B0653)

assisté de : Maître Hervé ...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRÊT DU 05 SEPTEMBRE 2013

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/08324

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Mars 2013 - Tribunal de Commerce de CRETEIL - 1ère chambre - RG n° 2012F00578

APPELANT :

Monsieur [W] [H]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 2] (Portugal)

de nationalité portugaise

demeurant [Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par : Maître Anne-Marie MAUPAS OUDINOT (avocat au barreau de PARIS, toque : B0653)

assisté de : Maître Hervé NIOX-CHATEAU (avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC 48)

APPELANTE :

SARL COMPAGNIE INDUSTRIELLE DE BATIMENT ET DE TRAVAUX PUBLICS - CIBTP

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 1]

prise en la personne de son gérant ou tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par : Maître Anne-Marie MAUPAS OUDINOT (avocat au barreau de PARIS, toque : B0653)

assistée de : Maître Hervé NIOX-CHATEAU (avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC 48)

INTIMEE :

Madame [S] [O]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par : Maître Jacques BELLICHACH (avocat au barreau de PARIS, toque : G0334)

assistée par : Maître Déborah ITTAH (avocat au barreau du VAL DE MARNE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Juin 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président de chambre

Madame Michèle PICARD, Conseillère

Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François FRANCHI dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER

ARRET :

- contradictoire,

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur François FRANCHI, Président et par Madame Violaine PERRET, Greffière présente lors du prononcé.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :

Monsieur [H] et Madame [O] actuellement en procédure, de divorce, étaient associés de la société CIBTP, SARL au capital de 350 K€, celle-ci détenant 9500 parts et celui-là 200, deux autres associés détenant 10 000 parts.

Madame, gérante de droit jusqu'à sa démission lors de l'assemblée générale du 30 juin 2008, disait n'avoir été qu'une gérante de paille, le véritable maître de la société étant Monsieur, devenu gérant à sa suite.

Elle déposait une requête en divorce pour faute en date du 19 février 2009.

Mme [O] revendiquait à l'encontre de la société CIBTP et de son mari les dividendes qui lui revenaient au titre des distributions de 2002 et 2005 et que M. [H] aurait encaissée.

Par exploit on date du 2 novembre 2009, Madame a assigné en référé la société CIBTP

devant le Président du Tribunal de commerce de Créteil aux fins de voir designer un expert-comptable avec mission notamment de procéder à la vérification du versement des dividendes opérée à l'issue des assemblées générales du 27Juin 2002 et du 3 octobre 2005.

Par ordonnance du 25 novembre 2009, Monsieur [Y] [Q] a été désigné avec mission de se faire communiquer l'ensemble des documents sociaux et comptables relatifs à la période 2001/2009 et de procéder à la vérification du versement des dividendes opérés à l'issue des assemblées générale concernées.

Le rapport a été déposé le 31 octobre et constate que :

- la société CIBTP n'a pas communiqué les comptes bénéficiaires des virements opérés au titre de la distribution des dividendes (ordres e mouvement - relevés bancaires).

- la société CIBTP n'a pas justifié l'origine du virement de 38K€ résultant d'un trop versé sur les dividendes 2002,

- [W] [H] a perçu un excédent de versement de dividendes de 513 425.50€ au titre des dividendes 2002,

- la société CIBTP n'a pas justifié avoir versé à Madame les dividendes dus.

Par acte d'huissier en date du 6 juillet 2012, elle a, sur autorisation d'assigner à bref délai du 5 juillet, fait délivrer une assignation à Monsieur [W] [H] demandant au tribunal de constater que celui-ci a détourné la somme de 1 001 889.19€ au titre des dividendes votés par les assemblées générales des 22 juin 2002 et 3 octobre 2005, ne lui a pas reversé la somme de 696 087.50€ lui revenant et de le condamner à lui restituer cette somme, outre 50 000€ à titre de dommages intérêts pour le préjudice moral subi, 15000€ pour le préjudice financier, avec le bénéfice de l'exécution provisoire, la somme de 5000€ puis de 8000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Monsieur [H] et la société CIBTP ne contestant pas que cette dernière a versé les dividendes distribués au premier, ont demandé au premier juge de constater que :

- ils n'ont pas été personnellement attrait à la procédure de référé et aux opérations d'expertise ordonnée le 25 novembre 2009 rendant le rapport établi inopposable,

- la date d'effet du divorce à intervenir étant celle de l'ONC du 15 juin 2009, il avait le droit de recevoir pour le compte de la communauté les dividendes au titre des parts sociales, biens communs des époux.

- étant mariés sous le régime légal, les dividendes sont des actifs communs comme les parts sociales, ce qui rend irrecevable Madame [O] à solliciter durant la durée de cette communauté sa condamnation et l'oblige, après, à saisir le juge de la liquidation du régime matrimonial pour établir l'existence d'une faute de gestion.

Il ajoute que sa femme et lui ont acquis un important patrimoine immobilier commun au Portugal, pour lequel Mme [O] n'a rien réglé et qui a été payé au moyen des distributions de dividendes de CIBTP et que le notaire instrumentaire a déposé son rapport en octobre 2011 après le dépôt du rapport [Q] et un autre demandé le 15 novembre 2012 pour poursuivre la liquidation du régime matrimonial et donc faire le compte entre les parties.

Madame [O] rétorquaient que :

- lorsque les parts sont détenues dans une société fermée, seul l'époux associé peut exercer les prérogatives attachées à la détention des parts dont le droit aux dividendes,

- à partir de la décision de répartition, chaque associé est créancier à titre personnel du dividende voté.

Le divorce a été prononcé par un jugement du JAF de CRETEIL en date du 15 novembre 2012, signifié à Madame [O] le 6 décembre 2013, (Pièce 4 bis) dont elle a interjeté appel.

Considérant que l'importance de l'intuitu personae dans les SARL implique que la qualité d'associé est reconnue à titre personnel à l'époux, marié sous le régime de la communauté, et que chacun des époux exerce ainsi seul les prérogatives qui découlent de cette qualité, le premier juge condamnait par décision en date du 25 mars 2013, la société CIBTP à payer à Madame [O] la somme de 896 087.50€ et se déclarait incompétent pour traiter de la demande formulée à l'encontre de Monsieur [H] à ce titre, le condamnant au titre du préjudice financier pour avoir encaissé les dividendes revenant à son épouse, déboutant Madame de sa demande au titre du préjudice moral.

Le tribunal n'ordonnait pas l'exécution provisoire, déboutait les parties de leur demande d'article 700 du code de procédure civile et laissait la charge des dépens à chacune des parties.

La société CIBTP et Monsieur [H] ont interjeté appel de la

décision du Tribunal de commerce par déclaration d'appel en date du 24 avril 2013.

*

Le 25 avril 2013 Madame [S] [O] a procédé sur la base du jugement de première instance à deux saisies conservatoires, respectivement sur le compte bancaire de la société CIBTP et sur celui de Monsieur [H], lesquelles se sont avérées fructueuses puisque le compte de la société CIBTP présentait un solde créditeur de 1.7243/19,86 euros et le compte de Monsieur [H] un solde de 20.186,68 euros. (pièces 9 à 12).

Par requête en date du 25 avril 2013, les appelants ont sollicité l'autorisation d'assigner

l'intimée à jour fixe devant la Cour d'appel, au motif que les comptes de l'entreprise se trouvaient bloqués à la suite de deux saisies conservatoires pratiquées le 9 avril 2013 par son épouse en exécution du jugement.

Monsieur [H] a été autorisé à assigner l'intimée à jour fixe,

L'audience était fixée au 12 juin 2013.

Nonobstant le caractère limitatif de l'autorisation d'assigner à jour fixe consentie à Monsieur [H] exclusivement, la société CIBTP a assigné également Madame [S] [O].

*

La société CIBTP Compagnie Industrielle de Bâtiment et de travaux Publics et Monsieur [W] [H], par conclusions du 11 juin 2013, sollicite la réformation du jugement en soutenant plusieurs moyens :

1 - in limine litis, sa mise hors de cause dès lors que le rapport [Q] lui est inopposable puisqu'il n'a pas été attrait à la procédure de référé, que l'ordonnance ne lui a pas été déclarée commune et qu'il n'a pas participé aux opérations d'expertise.

2- la prescription de l'action à l'égard de la société CIBTP au visa de l'article 2224 du code civil puisque gérante de la société, Mme [O] a eu connaissance de ses droits à distribution lors des assemblées générales.

3- subsidiairement, l'irrecevabilité de Mme [O] à actionner pour son compte personnel la société CIBTP,

4- l'impossibilité de condamner la société CIBTP à verser une deuxième fois les sommes en jeu dès lors que la communauté [O] a perçu par son intermédiaire les dividendes en cause,

5 - l'impossibilité de le condamner alors qu'il est marié à Mmes [O] sous le régime de la communauté à verser à sa femme des dividendes communs distribués pendant la vie commune.

Il demande par ailleurs à la cour de la déclarer irrecevables en toutes ses demandes et de la condamner à verser à chacun, la société et lui-même, la somme de 3000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.

*

Par conclusions du 11 juin 2013, Madame [S] [O]

considérait que :

- la société CIBTP était, en droit, débitrice de premier rang du versement des dividendes à 1'égard des associés et notamment d'elle-même.

- il appartiendra ensuite à la société CIBTP de payer une deuxième fois les dividendes puis se retourner contre Monsieur [H] puisqu'il est établi qu'il a détourné la quote-part lui revenant.

- le Tribunal de commerce a fait une mauvaise appréciation des faits de la cause concernant

Monsieur [H] dès lors que celui-ci ayant détourné les dividendes lui revenant, sa condamnation solidaire doit être prononcée avec la société CIBTP, notamment pour permettre à celle-ci de se retourner après paiement contre lui.

- il appartenait à la société CIBTP de saisir le juge de l'exécution du péril résultant pour elle de la saisie pratiquée et elle ne l'a pas fait car les comptes annuels 2012 montre un chiffre d'affaires de plus de 6.6 milliards €, une rentabilité de 5.6%, une trésorerie de 1.9 millions € et un résultat net de 208 912.19€ (pièce17).

Il est demandé à la Cour de :

- confirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Créteil en date du 25 mars 2013, sauf en ce qu'il a débouté Madame [S] [O] de ses demandes de condamnation à l'encontre de Monsieur [H], et l'infirmer sur ce point,

- déclarer Madame [S] [O] recevable en son action,

- condamner la société CIBTP au paiement de la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif au caractère tardif et déloyal de la prescription soulevée pour la première fois en cause d'appel et ce d'autant qu'une mesure d'instruction a été ordonnée dès 2009,

- rappeler que la société CIBTP, en sa qualité de débitrice de premier rang des dividendes dus aux associés en fonction de leurs parts dans son capital, ne s'est pas libérée des sommes dues à Mme [S] [O] en les versant à M. [H] qui n'y avait pas droit, et ce d'autant que le nombre des parts détenues par ce dernier correspondait à seulement 1 % du capital social,

- constater que Monsieur [H] a ainsi détourné la somme de

1.001.889,19 euros au titre des dividendes votés par les assemblées générales de la société CIBTP du 22 juin 2002 et du 3 octobre 2005, pour lesquels il ne justifiait d'aucun droit,

- constater que Madame [S] [O] n'a pas été réglée des dividendes qui lui sont dus au titre desdites assemblées générales du 22 juin 2002 et du 3 octobre 2005 pour un montant total de 896.087,50 euros,

- constater que la SARL CIBTP reste encore à ce jour débitrice des dividendes envers Mme [S] [O] et qu'elle est dans une situation financière prospère lui permettant de les lui payer sans aucune difficulté, à preuve les liquidités importantes dont elle dispose en permanence sur un seul de ses comptes bancaires (1,8 millions d'euros), qui ont permis à la saisie conservatoire opérée à l'initiative du créancier de prospérer dans une mesure peu courante, l'intégralité des sommes dues ayant été couverte par la saisie pratiquée,

- condamner par voie de conséquence la société CIBTP et Monsieur [H] à payer in solidum à Madame [S] [O] la somme de 896.087,50 euros, avec les intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2012, date de l'assignation,

- condamner Monsieur [H] à payer à Madame [S] [O]

ANJOS [O] la somme de 50.000 euros à titre de dommages et

intérêts en réparation de son préjudice moral,

- condamner Monsieur [H] à payer à Madame [S] [O]

ANJOS [O] la somme de 15.000 euros en réparation de son préjudice financier,

- débouter Monsieur [H] et la SARL CIBTP de l'intégralité de leurs demandes,

- condamner in solidum Monsieur [H] et la SARL CIBTP

à payer à Madame [S] [O] la somme de 10.000

euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [H] aux entiers dépens de première

instance et d'appel, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire et des honoraires de l'expert.

Sur la prescription :

Madame [S] [O] soutient que la fin de non recevoir soulevée par la société CIBTP devra être écartée car :

1 - la société CIBTP n'a soulevé aucune exception d'irrecevabilité tirée de la prescription en première instance et soulève le moyen pour la première fois devant la Cour,

2 - par son mutisme sur la question de la prescription, la société CIBTP a laissé se dérouler une expertise, de surcroît dans des conditions difficiles et une instance devant le Tribunal de commerce qui a conduit à sa condamnation. Or, la jurisprudence sanctionne le fait de se contredire au détriment d'autrui.

3 - l'article 2224 du Code civil, issu de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 publiée au Journal Officiel le 18 juin 2008, est entré en vigueur le 19 juin 2008 (article 1'' du Code civil) et si elle a limité le délai de prescription à 5 ans, il était alors de 30 ans et si l'on devait appliquer la prescription commerciale fixée, antérieurement à dix ans, le délai pour agir expirait le 30 septembre 2012 alors que l'assignation est intervenue le 6 juillet 2012.

4 - le point de départ de la prescription ne peut pas être constitué par l'assemblée du 27 juin 2002, car ce n'est pas celle-ci qui a validé le détournement par Monsieur [H]. Les dividendes ont été versés à celui-ci aux dates suivantes (pièce 3) :

350.000 euros le 15 septembre 2003,

450.000 euros le 19 septembre 2003,

93.000 euros le 14 novembre 2003.

5 - l'article 2241 du Code civil prévoit que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription et le délai pour agir qui expirait donc soit le 19 juin 2013, soit a minima le 30 septembre 2012, a de toutes façons été interrompu par l'assignation en référé du 2 novembre 2009 qui a eu pour effet de faire courir un nouveau délai de cinq ans expirant le 2 novembre 2014.

6 - force est de constater que 1'action de Madame [S] [O] a bien été engagée dans le délai de cinq ans prévu par la loi du 17 juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2008 pour le dividende 2005.

Sur l'opposabilité du rapport d'expertise :

La procédure de référé avait pour but de savoir à qui les dividendes 2002 et 2005 avaient été versés par la société CIBTP dont elle était à ce stade seule débitrice incontestable. C'était 1'expert qui avait indiqué dans la première partie de son rapport (généralités) qu'à la fin des opérations d'expertise, et après relances, la société CIBTP, elle-même avait déposé à son bureau les documents réclamés, par l'intermédiaire de son gérant, ce qui atteste que ce dernier, Monsieur [H] était parfaitement informé des demandes de l'expert et qu'il a de fait participé au déroulement de l'expertise.

Sur les règles du régime matrimonial :

Madame [S] [O] considère que Monsieur [W] [H] confond les règles qui régissent le sort du gain d'un époux, après qu'il ait perçu, avec celles qui doivent sanctionner le gain dont l'un des époux a été privé par la faute de l'autre qui 1'a perçu à sa place en fraude de ses droits. Il doit en effet être bien entendu que c'est uniquement quand il y a « gain» qu'on peut traiter ce dernier comme tel en le qualifiant, après sa perception par qui de droit, comme un acquêt de communauté. En 1'absence du moindre gain reçu par Mme [S] [O],

M. [W] [H] ne peut se prévaloir du régime juridique applicable aux gains lorsqu'ils existent, ce qui n'est pas le cas des dividendes dont Mme

[S] [O] a été privée.

Sur la société CIBTP :

Madame [S] [O] soutient que :

- en l'absence de tout paiement de la part de la société entre ses mains pour les dividendes qui étaient attachés aux parts qu'elle seule détenait, celle-ci doit être contrainte de payer une seconde fois les dividendes et l'indu versé être réclamé par la société qui a payé deux fois, à l'associé qui a reçu un paiement auquel il n'avait pas droit.

- la liquidation du régime matrimonial n'a pas à être évoquée car cette question n'a pas lieu d'être dès lors que c'est uniquement en sa qualité d'associée que Madame [O] invoque un droit personnel sur les dividendes votés aux termes des assemblées générales de 2002 et 2005 et qui devaient lui revenir sans que M. [H] puisse à quelque titre que ce soit prétendre avoir un droit propre l'autorisant à les lui subtiliser.

Sur le détournement commis par Monsieur [H] :

Si celui-ci prétend que les fonds provenant des dividendes litigieux auraient servi à acquérir des appartements pour une valeur totale de plus de 1,3 millions et auraient de la sorte bénéficié à la communauté, Madame [O] observe que le seul appartement acquis par M. [H] postérieurement à la distribution des dividendes est le duplex de LEIRA acheté en 2006 pour 300.000 euros. (pièce 14).

Et cette acquisition est de toutes façons bien insuffisantes pour l'imputer à due concurrence sur les dividendes à percevoir en l'absence de toute justification des revenus de M. [H].

Sur la gérance de la société CIBTP :

Madame [O] soutient que Monsieur [H] disposait d'une délégation de signature et de tous les moyens de paiement, ce qui lui avait permis de se verser l'intégralité des dividendes alors qu'il n'y avait pas droit, compte tenu de sa participation minime dans le capital de la société, limitée à 200 parts sur 20.000 soit 1 % seulement du capital de la société.

Sur les dommages intérêts :

Les procédures longues et coûteuses pour Madame [O]

ont crée pour elle un préjudice moral que Monsieur [H] doit

réparer, d'autant qu'elle justifie également par de nombreux certificats médicaux versés aux débats de l'état de détresse physique et morale dans lequel elle se trouve depuis plusieurs années. (pièces 7 et 7 bis).

La somme de 50.000 euros de dommages intérêts doit réparer son préjudice moral.

La somme de 15 000 euros doit réparer son préjudice financier et notamment couvrir les frais d'expertise supportés par elle afin d'établir les détournements de dividendes opérés, ainsi que les honoraires d'avocats de l'instance en référé.

Sur la solidarité entre la société CIBTP et Monsieur [H] :

L'entier dommage étant imputable à Monsieur [H], il doit selon Madame [O] être condamné in solidum avec la société CIBTP, débitrice de premier rang des dividendes dus aux associés, à lui payer la somme de 896.087,50 euros.

Sur les frais irrépétibles :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame [O] les frais inéquitables qu'elle a été contrainte d'exposer pour faire valoir ses droits et qu'il y a lieu d'évaluer à la somme de l0.000 euros.

*

SUR CE,

Il est constant comme le souligne les premiers juges que :

- la société CIBTP a mis en distribution pour les exercices 2002 et 2005 des dividendes dont une part revenait à Mme [O] en tant qu'associée, sa part étant encaissée par Monsieur [H] à hauteur de 696 087.50€

- Madame [O] était gérante de la société CIBTP au moment de la décision de répartition de dividendes de 2001 et 2005 et elle n'établit à aucun moment n'avoir été qu'une gérante prête-nom, étant relevé que Mme [O], au soutien de sa demande d'expertise, exposait qu'elle était elle-même gérante de la société jusqu'en 2008, (soit à peine plus d'un an avant l'introduction du référé), c'est-à-dire non

seulement au moment de la décision de distribution des dividendes mais aussi du versement aux associés par la société CIBTP des sommes en cause.

- le Notaire instrumentaire désigné, après investigation de la situation de chacun des époux (dont les comptes y compris au Portugal ont été évoqués), a dans son rapport reconnu une équivalence des situations des époux : (Pièce 3 Page 35).

« Au vu du projet de liquidation, il n'apparaît pas de déséquilibre dans le patrimoine des

époux '' et aucun des époux ne prétend à l'acquisition de biens propres avant l'introduction de la procédure en divorce, et leurs droits dans le patrimoine commun est totalement égalitaire (Appartements, maison, parts sociales.)

- les parts sociales détenues par les époux dans le capital de la société CIBTP sont des biens communs pour avoir été acquises pendant la durée du mariage et avec des fonds communs.

- s'agissant de dividendes, il s'agit de fruits revenant à chacun des associés et non de fruits communs.

Cela dit,

Sur la prescription :

Même si Mme [O] a introduit son action au fond le 6 juillet 2012 et la prescription est passée à 5 ans au terme de l'article 2224 nouveau du code civil, il y a lieu de relever que la prescription invoquée par une partie est une fin de non recevoir et elle devait être invoquée avant toute défense au fond, ce qui n'est pas le cas puisque la question est invoquée pour la première fois devant la cour.

Le moyen soutenu par les intimés sera considéré comme irrecevable.

Sur la créance de Madame [O] sur la société :

Mme [O] est irrecevable et en tous les cas mal fondée en sa demande de condamnation de la société CIBTP dès lors que celle-ci a versé les sommes dues et que Monsieur [H] est réputé légalement par les articles 1421 et 1401 du code civil avoir perçu pour le compte de la communauté les dividendes en cause.

Le moyen soutenu par l'appelante sera rejetée et le jugement infirmé.

Sur la créance de Madame [O] sur Monsieur [H] :

Les dividendes en cause ayant été perçu, ils sont devenus acquêts de communauté (article l401 du Code civil), susceptibles d'être administrés par un seul des époux en application de l'article 1421 du code civil qui dispose que chacun des époux a le pouvoir d'administrer seul les biens communs et d'en disposer, sauf à répondre des fautes qu'il aurait commises dans sa gestion et leur emploi est présumé avoir été fait dans l'intérêt de la communauté.

Il appartenait ainsi à Mme [O] de régler la question avec le juge du divorce et le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages intérêts de Mme [O] :

Non seulement la demande de dommages intérêts se trouve fondé sur la résistance de Monsieur [H] à lui verser le montant des dividendes lui revenant et elle succombe dans son action,

Non seulement, le notaire expert désigné par le JAF retient dans son rapport (Pièce 3 page 25) que les valeurs des appartements communs acquis au Portugal et rentrant en communauté sont respectivement d'un Dupleix à LEIRA : 370 000 € - d'un Appartement 3 pièces à FIGUEIA DA FOZ : 252 000 €- d'un Appartement 2 pièces à FIGUEIA DA FOZ : 242 000 € et d'un Local commercial à FIGUEIA DA FOZ : 515 000 €, soit au total de 1 379 000 € et il n'est pas contesté que Mme [O] n'a apporté aucune contribution à leur achat,

Mais ces fruits sont tombés en communauté et elle en partage le produit dans le cadre de la liquidation de cette communauté.

Elle sera ainsi déboutée de ses demandes à ce titre et le jugement infirmer. 

Sur les frais irrépétibles :

Il n'apparaît pas opportun de faire droit aux demandes à ce titre.

Sur les dépens :

Leur charge seront laissé à chacune des parties.

PAR CES MOTIFS :

REJETTE l'exception de prescription soulevée par Monsieur SIMOES FERREIRA MARQUES et la société CIBTP,

INFIRME le jugement,

DEBOUTE Mme [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et moyens,

REJETTE la demande de frais irrépétibles de Monsieur SIMOES FERREIRA MARQUES et la société CIBTP,

LAISSE leurs dépens à chacune des parties.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

V. PERRET F. FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 13/08324
Date de la décision : 05/09/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°13/08324 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-05;13.08324 ?
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