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04/07/2013 | FRANCE | N°11/10541

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 04 juillet 2013, 11/10541


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 04 Juillet 2013

(n° 12 , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/10541



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Septembre 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY - Section encadrement - RG n° 10/00582





APPELANTE

SASU SERARE (SOUS L'ENSEIGNE COURTEPAILLE)

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me So

phie LOITRON-THEZE, avocat au barreau de PARIS, toque : P213





INTIME

Monsieur [O] [R]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par Me Caroline PEUGNET, avocat au barreau d...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 04 Juillet 2013

(n° 12 , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/10541

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Septembre 2011 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY - Section encadrement - RG n° 10/00582

APPELANTE

SASU SERARE (SOUS L'ENSEIGNE COURTEPAILLE)

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Sophie LOITRON-THEZE, avocat au barreau de PARIS, toque : P213

INTIME

Monsieur [O] [R]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par Me Caroline PEUGNET, avocat au barreau de PARIS, toque : B0679

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 juin 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne MÉNARD, Conseillère , chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Renaud BLANQUART, Président

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Madame Anne MÉNARD, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : M. Franck TASSET, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Monsieur Renaud BLANQUART, Président et par M. Franck TASSET, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [R] a été initialement employé par la société CFI consulting en vertu d'un contrat en date du 26 juin 2007 à effet au 2 juillet 2007. Il a immédiatement été mis à disposition de la société SERARE exerçant sous l'enseigne COURTEPAILLE, en qualité d'ingénieur d'Etudes et Développement. Il a ensuite été engagé définitivement le 9 novembre 2007 en qualité d'Analyste Programmeur selon les termes d'un contrat à durée indéterminée en date du 12 novembre 2007 par la société SERARE elle-même. Sa rémunération brute était en dernier lieu de 3.956 euros.

La convention collective applicable à la relation de travail est celle des Hôtels, cafés, restaurants.

Dans la nuit du 7 au 8 février 2008'Monsieur [R] en tant que membre de l'équipe informatique, a eu en charge le déploiement d'un projet logiciel.

Par courriel du 25 août 2008 il a informé son employeur de ce qu'il avait découvert, dans le cadre d'une recherche qu'il avait dû mener, une insécurité informatique sur un serveur qui concernait la paye, courriel resté sans réponse.

Par lettre du 15 avril 2009, la société COURTEPAILLE a pris acte du souhait de Monsieur [R] de quitter l'entreprise et lui a demandé de formaliser sa démission.

Par lettre du 22 juin 2009 la société COURTEPAILLE lui a fait parvenir une note sur la rupture conventionnelle du contrat, prévoyant un entretien en vue de formaliser une rupture conventionnelle le 25 juin 2009. Le salarié a été placé en absence autorisée rémunérée.

Monsieur [R] a été convoqué par une lettre du 30 juin 2009 à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 9 juillet 2009, notifiant également une mise à pied à titre conservatoire.

Il a été licencié le 30 juillet 2009 pour faute grave.

Monsieur [R] a saisi le Conseil des Prud'hommes d'Evry le 19 avril 2011. Par jugement en date du 13 septembre 2011, ce conseil a :

- requalifié le licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse

- condamné la Société SERARE sous l'enseigne COURTEPAILLE à verser à Monsieur [R] les sommes suivantes':

1.918,73 euros au titre du rappel de salaire sur mise à pied.

191,18 euros au titre des congés payés afférents.

11.868 euros au titre de l'indemnité de préavis.

1.186,80 euros pour les congés payés afférents.

1'.725, 000 euros de l'indemnité légale de licenciement.

23.736, 00 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société SERARE a interjeté appel de cette décision le 14 octobre 2011.

Représentée par son Conseil, la société SERARE a, à l'audience du'11 juin 2013 développé oralement ses écritures, visées le jour même par le Greffier, aux termes desquelles, elle demande à la Cour de :

- d'infirmer la décision du Conseil de Prud'hommes,

- de constater que le licenciement repose sur une faute grave.

- de débouter Monsieur [R] de l'ensemble de ses demandes.

- A titre subsidiaire, de réduire le montant de l'indemnité légale de licenciement à 1318,66 euros, de réduire le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de constater que l'ancienneté de Monsieur [R] débute le 12 novembre 2007.

- en tout état de cause, de condamner Monsieur [R] à lui payer une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Elle soutient que monsieur [R] a commis une faute grave en créant une requête, c'est-à-dire un programme qui lui permettait d'avoir accès à l'ensemble des salaires du personnel de la société COURTEPAILLE dont on ne pouvait connaître l'utilisation qu'il pouvait ou qu'il aurait pu en faire.

Elle expose également que monsieur [R] n'avait aucune obligation professionnelle de créer cette requête pour prouver une quelconque faille de sécurité et partant qu'il a agi de sa seule initiative, sans en informer sa hiérarchie, alors même qu'il se disait surchargé de travail.

Représentée par son Conseil, Monsieur [R] a, à l'audience du'11 juin 2013 développé oralement ses écritures, visées le jour même par le Greffier, aux termes desquelles, il demande à la Cour de :

- confirmer le jugement entrepris.

- y ajoutant, porter le quantum de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 47.472 euros.

- ordonner la capitalisation des intérêts.

- condamner l'employeur à lui payer une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il fait valoir que les faits sont prescrits, l'employeur ayant été informé de la faille informatique dès le mois d'août 2008.

Il soutient, par ailleurs, que l'employeur ne pouvait ouvrir le fichier contenant la requête, qui était un fichier personnel, sans qu'il ait été dûment présent ou appelé; qu'en tout état de cause la requête litigieuse se trouvant dans un fichier personnel, aucun autre salarié n'y avait accès et qu'elle ne pouvait donc mettre en péril les données personnelles.

Il soutient que le licenciement intervenu est dépourvu de cause réelle et sérieuse, compte tenu du caractère disproportionné de la sanction du licenciement eu égard à la nature des faits et leur caractère non démontré ; qu'il ne peut lui être fait être grief d'avoir violé les règles de confidentialité l'accès au serveur n'étant pas protégé et Monsieur [R] n'ayant diffusé aucune information confidentielle.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère aux dernières écritures des parties, visées par le greffier, et réitérées oralement à l'audience.

DISCUSSION

- Sur la date du début de la relation contractuelle

Monsieur [R] demande à ce qu'il lui soit fait application des dispositions de l'article L1251-38 du Code du travail, qui prévoit que 'lorsque l'entreprise utilisatrice embauche après une mission, un salarié mis à sa disposition par une entreprise de travail temporaire, la durée des mission accomplies au sein de cette entreprise au cours des trois mois précédents le recrutement est pris en compte pour le calcul de l'ancienneté du salarié.

Toutefois, Monsieur [R] ne verse pas aux débats son contrat de travail du 26 juin 2007, ni aucune pièce relative à cette première relation de travail, à l'exception de son certificat de travail avec la société CFI consulting.

En tout état de cause, il ressort des explications qu'il donne que la mise à disposition qu'il invoque ne s'est pas faite dans le cadre d'une entreprise de travail temporaire, de sorte que les dispositions visées ne sont pas applicables.

La Cour retient donc que la relation contractuelle entre Monsieur [R] et la société SERARE a débuté le 9 novembre 2007.

- Sur le licenciement

En vertu des dispositions de l'article L 1232-1 du Code du travail, tout licenciement motivé dans les conditions prévues par ce Code doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ; la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis ; l'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En vertu des dispositions de l'article L 1232-6 du Code du travail, la lettre de licenciement, notifiée par lettre recommandée avec avis de réception, comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur ; la motivation de cette lettre fixe les limites du litige.

En l'espèce, la lettre de licenciement est motivée de la manière suivante :

'Depuis plusieurs mois, les relations entretenues avec votre hiérarchie et de manière plus large avec les différentes parties prenantes de l'entreprise se sont considérablement dégradées, au point de voir la quasi-totalité des membres de l'équipe informatique refuser de continuer de travailler avec vous.

De nombreux courriers, entretiens, réunions, font état de divergences sur les périmètres d'intervention qui sont les vôtres et sur votre appréciation des décisions (ou absences de décisions) prises par votre hiérarchie.

C'est au point d'avoir convenu mutuellement de la nécessité pour vous de quitter l'entreprise. Après plusieurs contacts informels sur le sujet, une proposition de rupture conventionnelle a même été ébauchée avant d'avorter.

C'est dans ce contexte troublé que nous avons été amenés le 30 juin 2009 à vous signifier votre mise à pied conservatoire. Mise à pied conservatoire prononcée en raison des troubles qu'aurait pu causer votre présence dans l'entreprise et justifiée au regard des réponses apportées lors de l'entretien.

Lorsque je vous ai demandé si les litiges portant sur la définition de votre périmètre d'intervention provenaient du fait qu'à un quelconque moment votre hiérarchie vous avant demandé d'intervenir dans le domaine de la paye de la société, vous avez affirmé qu'il ne vous avait jamais été demandé d'intervention dans ce domaine.

Vous ayant alors interrogé sur la présence dans le Répertoire nommé EVSTRATEV, dans le dossier par défaut d'enregistrement des requêtes SQL 'Serveur Management Studio/Projects' d'un outil informatique élaboré par vos soins, à distance, hors des locaux de l'entreprise, le vendredi 3 avril 2009 (peu après 0h30), outil de requêtage nommé par vos soins 'pandanstagueule', et permettant d'accéder à tous les salaires, nominativement, du personnel de SERARE SAS Courtepaille, vous avez confirmé être l'auteur de cette requête, mais vous vous êtes montré surpris de mon étonnement.

Vous avez reconnu être l'auteur de cette requête, mais selon vous, cette dernière n'a jamais été destinée à connaître les salaires des collaborateurs de la société, Vous avez avancé, qu'à un moment donné, vous aviez alerté par voie de mail votre responsable hiérarchique et m'aviez même mis en copie, pour informer que vous aviez été surpris de voir que vous pouviez intervenir sur tous les serveurs de l'entreprise y compris celui de la paye. Ne voulant pas passer pour un menteur, vous aviez monté cette requête pour pouvoir apporter la preuve de vos dires, si on vous le demandait. Vous évoquez le manque évident de réactivité de Monsieur [J] et du reste de l'entreprise puisque cet avertissement n'a été suivi d'aucun effet.

Je vous ai indiqué que cette situation était connue et qu'au vu de la taille de l'équipe informatique nombre de vos collègues (comme par exemple Monsieur [D]) avaient cette capacité d'intervention.

Je vous ai alors demandé pourquoi n'avoir jamais parlé à personne de l'existence de cette requête. Vous m'avez indiqué que vous l'auriez fait si votre responsable Monsieur [J] s'était intéressé un tant soit peu à l'alerte que vous aviez remontée.

Plus surprenant encore, vous ayant personnellement informé oralement, par téléphone, le 29 juin après 20 heures de votre mise à pied à titre conservatoire, vous vous êtes présenté et ce contrairement à vos habitudes, très tôt le lendemain matin (peu avant 8 heures), en compagnie de Monsieur [D] et avez procédé à l'effacement de la dite requête 'pandanstagueule' de votre répertoire.

Vous avez indiqué que vous étiez venu sur le site très tôt pour ne pas déranger vos collègues et aviez 'fait de la place' dans vos fichiers afin de faciliter la prise de poste du futur occupant. La requête 'pandanstagueule' n'étant pas la seule à avoir été effacée par vos soins.

Je vous ai demandé si vous aviez référé à quiconque de la destruction de fichiers. Vous m'avez dit que non, que ces fichiers vous avaient servi dans le cadre de votre travail et que vous étiez largement en mesure de distinguer ce qui devait être effacé de ce qui ne le devait pas. Etant dans votre répertoire individuel, vous estimiez en être pleinement dépositaire.

Pour conclure vous évoquez votre désappointement de voir qu'une approche destinée à prévenir l'entreprise d'éventuels déboires se retourne contre vous au point de risquer un licenciement.

Les explications recueillies n'emportent pas notre conviction.

En élaborant, sans aucune demande, ni justification la requête nommée 'pandanstagueule', requête qui fait apparaître la recherche des données suivantes 'nom', 'prénom', 'salaire brut', 'salaire de base', vous ne pouviez ignorer que cette dernière permettrait de recueillir les salaires des collaborateurs de SERARE SAS.

En allant ainsi recueillir des informations personnelles sur le serveur de paye de la société, vous avez transgressé toutes les règles de confidentialité auxquelles sont soumis les cadres de l'entreprise, statut dont vous êtes détenteur.

En nommant cette requête d'un nom peu évocateur de son caractère professionnel, vous avez sciemment dissimulé son objet et tenté de cacher son existence.

De plus en venant précipitamment le lendemain de l'annonce de votre mise à pied à titre conservatoire, avant que les services postaux ne puissent vous avertir officiellement de la mesure, afin de détruire cette requête et d'autres fichiers sur lesquels vous aviez travaillé et pouvant servir aux travaux de l'entreprise et de vos collègues, vous avez commis des actes qui viennent aggraver la portée des faits. Ces fichiers se trouvaient dans des répertoires identifiés à votre nom dans des dossiers de travail nommés par défaut par les applicatifs utilisés mais en aucun cas classés ou nommés comme répertoires ou fichiers personnels au sens de la législation.

L'élaboration d'un outil vous permettant d'avoir accès à des données personnelles de paye, données confidentielles par nature, et dont il nous est impossible de connaître l'usage que vous en avez fait, la dissimulation de cette requête sous un vocable 'particulier' destiné à masquer son contenu, la destruction de fichiers contenant des données professionnelles utiles à l'entreprise (dont celui contenant la requête) sont autant de fautes, qui bien au-delà de la perte de confiance qui est la nôtre, ne peuvent permettre votre maintien dans l'entreprise'.

A titre liminaire, il convient de relever que les mauvaises relations que Monsieur [R] aurait entretenues avec ses collègues et sa hiérarchie ne sont évoquées, tant dans la lettre de licenciement que dans les conclusions, que comme des éléments de contexte. En tout état de cause, l'employeur verse aux débats sur ce point une attestation de Monsieur [J] qui fait état de relations très difficiles, mais qui n'en justifie que par une forme de désinvolture de Monsieur [R] dans son travail, et non par son attitude vis à vis de ses collègues, et une attestation de Monsieur [N] qui relate une altercation verbale qu'il a eue avec deux salariés dont Monsieur [R] le 19 juin 2009. Ces éléments, en l'absence de toute mise en garde préalable de l'intéressé, ne sont pas de nature à justifier un licenciement.

Le motif principal du licenciement est la création par le salarié d'une requête permettant d'avoir accès sur simple interrogation aux données relatives à la paie.

Il convient de relever que rien n'indique que l'employeur aurait eu connaissance de la requête créée par Monsieur [R] avant le mois de juin 2008, le courriel par lequel le salarié l'a informé de l'existence d'une faille informatique en août 2008 n'étant pas de nature à faire courir le délai de prescription.

Par ailleurs, ni le nom du fichier 'pandantagueule', ni le fait qu'il se trouvait dans un dossier nommé 'Evstratev' n'indiquait qu'il s'agissait de documents personnels, de sorte que l'employeur pouvait y avoir accès dès lors qu'ils se trouvaient sur l'ordinateur professionnel mis à la disposition du salarié.

Sur le fond, force est de constater, et l'employeur l'indique lui même dans ses conclusions et dans la lettre de licenciement, que le fichier paie faisait partie de ceux auxquels Monsieur [R] pouvait avoir accès dans le cadre de ses fonctions, de sorte que les données auxquelles il était susceptible d'accéder au moyen de la requête qu'il avait créée n'étaient pas confidentielles à son égard.

Le fait, dans ces conditions, d'avoir créé un logiciel permettant d'extraire facilement ces informations de leur base de données ne constitue pas un manquement à son obligation de confidentialité, et il ne s'est nullement introduit dans le système pour accéder à des données qui lui auraient été interdites.

Par ailleurs, la requête ainsi créée ne permettait pas d'accéder aux données relatives à la paie depuis un ordinateur extérieur à la société. Par ailleurs, cette requête qui était dans un dossier sur le poste de Monsieur [R] n'était pas accessible à tous les salariés, dès lors qu'il était nécessaire de connaître ses Codes d'accès.

Enfin, il n'est ni prouvé, ni même allégué que Monsieur [R] ait jamais utilisé sa requête pour diffuser les informations auxquelles il avait accès à des tiers, à l'intérieur ou à l'extérieur de l'entreprise. Dans le cas contraire l'examen de son poste par un informaticien, qui a été mis en oeuvre par l'employeur afin de retrouver la requête effacée, aurait sans nul doute permis de constater que certains documents avaient été copiés ou exportés.

Dans ces conditions, le fait d'avoir mis en place cette requête, dont le salarié précise qu'elle était destinée à démontrer que le système n'était pas suffisamment protégé, ne constitue pas un fait fautif.

Par ailleurs, l'employeur reproche à Monsieur [R] d'avoir détruit, juste avant la notification de sa mise à pied, des fichiers qui se trouvaient sur son poste. Le salarié soutient qu'il a voulu 'faire de la place' pour son successeur. Le fait de supprimer des fichiers devenus inutiles ou des fichiers personnels de son poste de travail lorsqu'on le quitte est une pratique habituelle, et l'employeur, qui a eu accès à l'ensemble des fichiers détruits lors de l'intervention d'un technicien précisément missionné pour retrouver ces fichiers, n'en cite pas un seul qui aurait pu être utile à l'entreprise et qui aurait été détruit.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Les sommes allouées au titre de la mise à pied conservatoire et du préavis ne font pas l'objet de contestations, et seront confirmées.

Compte tenu de l'ancienneté retenue, le montant de l'indemnité de licenciement sera à 1.318,66 euros.

Monsieur [R] avait 19 mois d'ancienneté à la date de son licenciement, et il était âgé de 37 ans. Il justifie avoir été indemnité par Pôle Emploi jusqu'au mois d'octobre 2010.

Compte tenu de ces éléments, le jugement sera confirmé en ce qu'il lui a alloué de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 23.736 euros.

*

L'équité ne commande pas de faire application en cause d'appel des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement, sauf sur le quantum de l'indemnité de licenciement,

Statuant à nouveau sur ce seul point, condamne la société SERARE à payer à Monsieur [R] une somme de 1.318,66 euros de ce chef.

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [R] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ,

Condamne Monsieur [R] aux dépens d'appel.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 11/10541
Date de la décision : 04/07/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°11/10541 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-07-04;11.10541 ?
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