Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 2
ARRET DU 27 JUIN 2013
(n° 455, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/17414
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Septembre 2012 -Président du TGI de PARIS - RG n° 12/56568
APPELANTE
SCS BANQUE DELUBAC & CIE
[Adresse 1]
[Localité 1]
Assistée de Me Muriel PINKSTER de la SCP CABINET BISSIER (avocat au barreau de PARIS, toque : R481)
Représentée par Me Thierry BISSIER (avocat au barreau de PARIS, toque : B0481)
INTIMEES
SDC du [Adresse 2]
dont le siège social est [Adresse 2],
représenté par son Syndic le Cabinet DALLEMAGNE à [Localité 3].
Chez le Cabinet DALLEMAGNE
[Adresse 3]
[Localité 3]
Représentée et Assistée de Me Valérie CESSART (avocat au barreau de PARIS, toque : E0101)
SCP [H] [R]
es qualité de liquidatrice de la liquidation judiciaire des sociétés GROUPE CHAPUIS ET ASSOCIES et CABINET CONVENTION LECOURBE
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Pascal GOURDAIN (avocat au barreau de PARIS, toque : D1205)
Assistée de Me Richard TORRENTE (avocat au barreau de PARIS, toque : E1576)
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 30 Mai 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Evelyne LOUYS, Présidente de chambre
Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseillère
Mme Maryse LESAULT, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Sonia DAIRAIN
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Evelyne LOUYS, président et par Mme Sonia DAIRAIN, greffier.
FAITS CONSTANTS':
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] (le syndicat des copropriétaires) a eu pour syndic la SA Cabinet Convention Lecourbe, lequel a donné son fonds de commerce en location-gérance à la société Groupe Chapuis & Associés.
Par jugement du 5 décembre 2005, la société Groupe Chapuis & Associés et la société Cabinet Convention Lecourbe ont fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire sous patrimoines distincts, et la SCP [H] [R] a été désignée, en la personne de Maître [R], en qualité de liquidateur judiciaire des deux sociétés.
La société Cabinet Convention Lecourbe a ouvert dans les livres de la SCS Banque DELUBAC ET COMPAGNIE (DELUBAC) un compte n° 00022114406 et des sous-comptes pour chacune des copropriétés dont elle assurait la gestion. Elle était titulaire d'une garantie financière consentie par la société SOCAF. Cette dernière a informé la banque DELUBAC par courrier du 29 avril 2005 de ce qu'elle mettait un terme à sa garantie.
La société Cabinet Convention Lecourbe a ouvert au profit du syndicat des copropriétaires le sous-compte n° 0022251063 sous la garantie de la société SOCAF.
Le 14 décembre 2005, ce sous-compte présentait un solde créditeur d'un montant de 1'287, 25 euros.
La société Groupe Chapuis & Associés était, de même, titulaire d'un compte à la banque DELUBAC sous le n°00221110772. Un sous-compte a été ouvert au nom du syndicat des copropriétaires sous le n° 000222511860.
Le 14 décembre 2005, la somme de 16'050, 64 euros figurait au crédit de ce compte.
Le syndicat des copropriétaires a entendu obtenir la restitution des soldes créditeurs des deux sous-comptes précités, outre d'une somme de 1'172, 27 euros correspondant à des règlements fournisseurs bloqués, soit au total, d'une somme de 18'510, 16 euros.
Par acte du 17 juillet 2012, il a assigné la BANQUE DELUBAC ET COMPAGNIE et la SCP [H]-[R], prise en la qualité de mandataire liquidateur de la liquidation judiciaire de la société Cabinet Convention Lecourbe, aux fins de la voir condamner à titre provisionnel à lui payer les sommes au titre des fonds détenus par elle sur les sous-comptes ouverts par la société Cabinet Convention Lecourbe n° 0022251063 et par la société Groupe Chapuis & Associés n° 000222511860.
Par ordonnance contradictoire du 13 septembre 2012, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a':
- donné acte à la Banque DELUBAC de ce qu'elle s'engageait à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 18'510, 16 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 décembre 2011 sur 18'273, 62 euros et du 17 juillet 2012 pour le surplus,
- en tant que de besoin, l'a condamnée à titre provisionnel à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 18'510, 16 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 29 décembre 2011 sur 18'273, 62 euros et du 17 juillet 2012 pour le surplus,
- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
- condamné la Banque DELUBAC à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 2'000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté toutes les autres demandes,
- condamné la Banque DELUBAC aux dépens.
La Banque DELUBAC a interjeté appel de cette décision le 28 septembre 2012.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 mai 2013.
PRETENTIONS ET MOYENS DE LA BANQUE DELUBAC':
Par dernières conclusions du 14 mai2013, auxquelles il convient de se reporter, la Banque DELUBAC demande à la Cour':
- de déclarer son appel limité recevable et bien fondé,
- de constater qu'elle ne s'est pas opposée au déblocage de la somme de 18'510, 16 euros au profit du syndicat des copropriétaires,
- de constater l'absence d'instruction transmise à elle par la SCP [H] [R] en qualité de liquidateur judiciaire,
- d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle l'a condamnée au versement d'intérêts de retard ainsi qu'à une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens,
- à défaut, de condamner la SCP [H] [R] ès qualités à la garantir de toute condamnation prononcée au profit du syndicat des copropriétaires,
- de débouter le syndicat des copropriétaires et la SCP [H] [R] ès qualités de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- de condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SCP [H] [R] ès qualités à lui payer une somme de 2'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la SCP [H] [R] ès qualités aux entiers dépens.
PRETENTIONS ET MOYENS DU SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES':
Par dernières conclusions du 29 avril 2013, auxquelles il convient de se reporter, le syndicat des copropriétaires demande à la Cour':
- de déclarer la Banque DELUBAC irrecevable en son appel,
- à titre subsidiaire de la déclarer mal fondée,
- en tout état de cause, de la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné la Banque DELUBAC au paiement des sommes suivantes': 18'510, 16 euros en principal, à titre provisionnel, 2'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, et ordonné la capitalisation,
- de l'infirmer pour le surplus,
- et statuant à nouveau, de condamner la Banque DELUBAC au paiement de la somme en principal avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 30 novembre 2007, et à défaut de celles des 12 février 2010, et au paiement de la somme de 3'500 euros à titre de dommages et intérêts,
- de condamner la Banque DELUBAC au paiement de la somme de 2'000 euros pour procédure abusive au regard de la demande formée par la Banque DELUBAC à son encontre et de 3'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens,
- de lui accorder le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
PRETENTIONS ET MOYENS DE LA SCP [H] [R], ès qualités':
Par dernières conclusions du 8 janvier 2013, auxquelles il convient de se reporter, la SCP [H] [R], en qualité de liquidatrice à la liquidation judiciaire de la société Cabinet Convention Lecourbe et de la société Groupe Chapuis & Associés, demande à la Cour':
- de confirmer l'ordonnance entreprise s'agissant des demandes formées à son encontre,
- pour le surplus, de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice concernant la recevabilité et le bien-fondé de l'appel interjeté par la Banque DELUBAC,
- de débouter, en revanche, la Banque DELUBAC de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre,
- de condamner la Banque DELUBAC à lui payer une somme de 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de la condamner aux entiers dépens,
- de lui accorder le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR,
Sur la recevabilité de l'appel':
Considérant qu'il ne saurait être déduit de l'exécution volontaire et sans réserve par l'appelante d'une ordonnance de référé, exécutoire de plein droit, son acquiescement et sa renonciation implicite à interjeter appel';
Que ledit appel est recevable';
Sur le bien-fondé':
Considérant que selon l'article 1153 du code civil':
«'Dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement.
Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.
Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer, ou d'un autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit.
Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.'»';
Considérant que l'appel de la Banque DELUBAC est limité à la condamnation de cette dernière au paiement de l'intérêt légal, d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, la banque soutenant ne pas s'être opposée au paiement au syndicat des copropriétaires de la somme de 18'510, 16 euros qui lui était due, mais avoir été empêchée de procéder à ce paiement en raison de l'absence d'instructions de la part de la SCP [H] [R], en qualité de liquidatrice à la liquidation judiciaire de la société Cabinet Convention Lecourbe et de la société Groupe Chapuis & Associés'; '
Considérant que le premier juge a fixé le point de départ des intérêts au taux légal portant sur la somme de 18'510, 16 euros à compter du 29 décembre 2011, qui correspond à la mise en demeure du syndicat des copropriétaires, à la Banque DELUBAC, faisant suite à la lettre de la banque du 16 février 2010 à l'administrateur de biens du syndicat, l'invitant à solliciter une instruction de transfert des fonds de la SCP [H] [R], «'conformément aux termes de l'article L. 641-9 du code de commerce'»'; que le 5 décembre 2011, la SCP [H] [R], ès qualités, a répondu audit administrateur que «'dès lors que les fonds mandants ne font pas partie de l'actif de la liquidation judiciaire, je n'ai pas à donner quelque accord que ce soit pour la récupération par les syndicats de copropriétaires concernés des fonds déposés en leur nom à la banque DELUBAC. Vous pouvez donc réclamer directement à cet établissement bancaire la libération des fonds'»';
Considérant, cependant, que le syndicat des copropriétaires entend faire remonter à une date antérieure, 30 novembre 2007, ou à défaut, 12 février 2010, le point de départ des intérêts au taux légal';
Que la mise en demeure du 29 décembre 2011 rappelle les termes de la mise en demeure du 30 novembre 2007 et de celle du 12 février 2010';
Que dès le 30 novembre 2007, le syndicat des copropriétaires rappelait que, dans le cadre d'une instance similaire, opposant la même banque, dans les mêmes circonstances, à un autre syndicat des copropriétaires, du [Adresse 5], ayant donné lieu à une ordonnance de référé du 8 novembre 2007, et qu'aux termes de cette ordonnance, «'la SCP [H] [R] mandataire liquidateur de la société Convention Lecourbe a indiqué clairement à l'audience que les fonds détenus par la banque DELUBAC ne faisaient pas partie de la liquidation et qu'elle ne s'opposait pas à leur restitution au syndicat des copropriétaires'», le syndicat de l'immeuble du [Adresse 2] connaissant la même situation';
Que cette décision a été confirmée par arrêt de la cour d'appel de Paris du 30 mai 2008, relevant que le mandataire liquidateur de la société Cabinet Convention Lecourbe, qui demande la confirmation de l'ordonnance entreprise, ne revendiquait aucun droit sur les fonds détenus par la banque, au nom et pour le compte de la procédure collective';
Que le pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté par arrêt de la Troisième chambre civile de la Cour de cassation le 23 septembre 2009, rappelant une nouvelle fois la position du mandataire liquidateur, et validant l'arrêt de la cour d'appel ayant décidé que rien ne s'opposait à la remise des fonds figurant sur le sous compte distinct ouvert au nom du syndicat dans les livres de la banque ;
Que ces décisions étaient rappelées par le syndicat des copropriétaires dans la mise en demeure adressée à la banque le 12 février 2010';
Considérant que si, à l'appui du pourvoi qu'elle avait formé contre l'arrêt du 30 mai 2008, la Banque DELUBAC faisait notamment valoir «'que les fonds déposés sur les sous-comptes d'un administrateur de biens placé en liquidation judiciaire font partie de la liquidation et ne peuvent par conséquent être remis aux copropriétés'», le rejet du pourvoi induisait clairement l'obligation pour la Banque de restituer les fonds litigieux aux syndicats des copropriétaires concernés, dont celui du [Adresse 2], sans avoir à solliciter un nouvel accord du mandataire liquidateur';
Que dès lors, mise en demeure le 12 février 2010, soit postérieurement à l'arrêt de la Cour de cassation du 23 septembre 2009, la banque devait s'exécuter, sa réticence prétendument justifier par le défaut d'instructions du mandataire ne pouvant s'analyser que comme dilatoire';
Que sa demande, formée devant la présente Cour, tendant à être dispensée des intérêts au taux légal, de même que ses demandes subséquentes, seront rejetées';
Que sera, en revanche, accueillie, la demande du syndicat des copropriétaires tendant à voir fixer le point de départ des intérêts au taux légal à compter du 12 février 2010';
Considérant que le syndicat des copropriétaires ne démontrant pas le préjudice spécifique que lui aurait occasionné la réticence fautive de la banque, il sera débouté de ses demandes de dommages et intérêts, formées tant en première instance, l'ordonnance devant être confirmée sur ce point, qu'en cause d'appel';
PAR CES MOTIFS
DÉCLARE l'appel recevable,
CONFIRME l'ordonnance entreprise, sauf sur le point de départ des intérêts au taux légal,
Statuant à nouveau sur ce point,
FIXE au 12 juillet 2010 le point de départ des intérêts au taux légal sur la somme de 18'273, 62 euros et au 17 juillet 2012 sur le surplus,
Y ajoutant,
REJETTE toutes les autres demandes,
CONDAMNE la SCS BANQUE DELUBAC & CIE à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] la somme de 3'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la SCS BANQUE DELUBAC & CIE à payer à la SCP [H] [R], en qualité de liquidatrice de la liquidation judiciaire de la société Cabinet Convention Lecourbe et de la société Groupe Chapuis & Associés la somme de 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la SCS BANQUE DELUBAC & CIE aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER,
LE PRÉSIDENT,