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12/06/2013 | FRANCE | N°12/02768

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 12 juin 2013, 12/02768


COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 12 JUIN 2013 (no 201, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 02768
Décision déférée à la Cour : jugement du 31 janvier 2012- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 09/ 12251

APPELANTE

Madame Romilda Franca X... Divorcée Y...... 75002 PARIS

représentée et assistée de Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD et THOMAS-AVOCATS (avocat au barreau de PARIS, toque : B1055) et de la SCP COURTOIS et FINKELSTEIN (Me Nathalie FINKELSTEIN) (avocats au barreau de PARIS, toque :

P526)

INTIMÉE

Madame Valérie Y... épouse Z... ... 78125 EMANCE

représentée et assistée de...

COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 12 JUIN 2013 (no 201, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 02768
Décision déférée à la Cour : jugement du 31 janvier 2012- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 09/ 12251

APPELANTE

Madame Romilda Franca X... Divorcée Y...... 75002 PARIS

représentée et assistée de Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD et THOMAS-AVOCATS (avocat au barreau de PARIS, toque : B1055) et de la SCP COURTOIS et FINKELSTEIN (Me Nathalie FINKELSTEIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : P526)

INTIMÉE

Madame Valérie Y... épouse Z... ... 78125 EMANCE

représentée et assistée de Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER-BEQUET-MOISAN (avocat au barreau de PARIS, toque : L0050) et de Me Jérôme DUPRE (SELARL DUPRE SEROR et Associés, avocats au barreau de HAUTS DE SEINE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 avril 2013, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Jacques BICHARD, Président Madame Marguerite-Marie MARION, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN
ARRET :- contradictoire-rendu publiquement par Monsieur Jacques BICHARD, président-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Monsieur Jacques BICHARD, président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Les consorts Y...- X... étaient détenteurs de la société à caractère familial exploitant à Paris de 1986 à 1991 une boutique de prêt à porter et d'accessoires, la SA De Golf Montaigne Elysée, dont le capital social, composé de 1650 actions, était réparti entre eux de la façon suivante :- M. Jacques Y... : 674 actions-Mme Romilda Y... née X... : 688 actions-Mme Valérie Y..., épouse Z... : 139 actions-Mlle Géraldine Y... : 138 actions-les consorts X... : 11 actions.

Aux termes d'un protocole en date du 5 novembre 1991, M. Jacques Y... et Mme Romilda Y... " agissant tant en leur nom personnel qu'en celui des autres actionnaires pour lesquels il se portent fort.. " ont cédé l'ensemble du capital social de ladite société De Golf Montaigne Elysée à la société Mugler Triumvirat.
Par quittance en date du 3 février 1992, les époux Y... ont accusé réception du règlement entre leurs mains par la société Mugler Triumvirat de la somme de 38 875 000 Frs, le document indiquant " étant précisé que nous prenons la responsabilité de la répartition de la somme ci-dessus entre les actionnaires ayants-droit " et comportant en annexe la répartition entre les actionnaires, soit pour Mme Valérie Y... une somme à lui revenir de 3 632 954, 04 Frs.
Dès lors que M. Jacques Y... avait exécuté son obligation vis à vis de sa soeur Géraldine dès le 14 septembre 1992 par le transfert de propriété de 51 " Valunions " représentant une somme de 3 597 937, 29 frs (548 501, 99 €), par une lettre recommandée avec accusé de réception du 28 juin 2007, MmeValérie Z..., née Y..., s'est adressée à sa mère pour lui rappeler ses précédentes demandes et évoquer " mon patrimoine issu des ventes de parts sociales des sociétés " Saint Honoré Expansion " et " De Golf Montaigne Elysée " dont tu t'es réservé arbitrairement, depuis de nombreuses années, la gestion, alors même que ma soeur, Géraldine, en dispose à sa guise depuis longtemps déjà. " en indiquant notamment : " Sur ta demande je t'ai signé des procurations pour la gestion des sommes d'argent correspondant aux ventes des actions à mon nom des sociétés " Saint Honoré Expansion " et De Golf Montaigne Elysée ". Elles devaient faire l'objet de placements financiers à l'Union Industrielle de Crédit. Depuis de nombreuses années, plus aucune information ne m'a été donnée. (...) En bref, je souhaite : * connaître le montant des sommes m'appartenant et dont tu as encore la gestion (principal et intérêts), sachant toutefois que j'ai effectivement reçu, en partie, (le décompte ne m'ayant jamais été donné) les sommes me revenant pour la vente des actions de la société Saint Honoré Expansion, alors que je n'ai toujours rien reçu de la vente de la société De Golf Montaigne (sauf l'équivalent de l'impôt sur les plus values que j'ai payé). "

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 20 novembre 2007, Mme Romilda Y... se déclarait choquée du propos et du courrier.
C'est dans ces circonstances que Mme Valérie Z..., faisant valoir que M. Jacques Y... avait effectivement procédé le 14 septembre 1992 au virement au profit de sa soeur Géraldine de la somme correspondant à la valeur de ses actions, mais que Mme Y..., sa mère, ne lui avait pas reversé sa part, contrairement à ses engagements, a mis cette dernière en demeure par courrier recommandé du 28 janvier 2008 de lui verser sa part en principal de 553 840, 27 €, augmentée des intérêts légaux à compter du 3 février 1992 capitalisés, soit une somme totale de 1 736 759, 80 €, puis l'a assignée le 7 mai 2008 devant le tribunal de commerce de Paris lequel s'est déclaré incompétent le 1er Juillet 2009 au profit du tribunal de grande instance de Paris.
Par jugement en date du 31 janvier 2012 le tribunal a :- rejeté l'exception d'irrecevabilité des demandes,- condamné Mme Romilda Franca Y... à verser à Mme Valérie Z... la somme de 553 840, 27 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2007,- ordonné la capitalisation des intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2007,- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision,- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,- condamné Mme Romilda Franca Y... aux dépens qui seront augmentés de la somme de 3500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Mme Valérie Z....

CELA ETANT EXPOSE, la COUR :
Vu l'appel interjeté le 13 février 2012 par Mme Romilda Franca X... divorcée Y...,
Vu les conclusions déposées le 21 mars 2013 par l'appelante qui demande de :- réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions, statuant à nouveau,- dire que Mme Romilda Y... a versé à sa fille Mme Valérie Z... entre Juillet 1992 et janvier 1993 une somme de 3 632 199, 26 francs soit 553 725, 21 € au titre du prix de cession des 139 actions d'un montant de 3 632 954, 40 frs appartenant à Mme Valérie Z... au sein de la société Golf Montaigne Elysées et à tout le moins que ce paiement éteint par compensation, en vertu des articles 1289 et suivants du code civil toute créance qui serait dûe à Mme Valérie Z..., en tout état de cause,- dire que Mme Romilda Y... n'avait aucune obligation légale à ce règlement qui n'a été réalisé qu'en vertu d'une obligation morale de mère, Mme Z... ne rapportant pas la preuve ni même un commencement de preuve d'un contrat de dépôt, d'une obligation née d'un mandat ou encore d'une obligation solidaire de sa mère à son égard,- dire que Mme Romilda Y... a rapporté la preuve de l'existence de relations familiales et financières continues pendant plus de 15 ans entre les parties et que l'impossibilité morale de se constituer un écrit alléguée par Mme Z... n'est pas caractérisée,- dire irrecevables pour défaut d'intérêt à agir et en tout état de cause mal fondées les demandes présentées par Mme Valérie Z... à l'encontre de sa mère et l'en débouter, à titre reconventionnel, au visa des dispositions de l'article 1376 du code civil,- condamner Mme Valérie Z... à payer à Mme Romilda Y... la somme de 553 725, 21 € versée à tort entre ses mains entre Juillet 1992 et janvier 1993, à titre subsidiaire, si la cour estime fondée la demande de Mme Z... au titre de la cession de ses actions Golf Montaigne Elysées, dire que : * l'impôt sur la plus value de 560 946 Frs soit 85 515, 67 € devra minorer le montant de la créance, * la part de Mme Valérie Z... sur l'acompte payé à son père qui s'est seul engagé à le répartir aux autres actionnaires soit 358 030, 64 Frs soit 54 581, 42 €, devra minorer la créance, * en tout état de cause Mme Romilda Y... ne pouvait être tenue de régler plus de la moitié du solde de la valeur des actions en l'absence d'engagement solidaire avec son ex mari à l'égard de Mme Valérie Z... soit la somme de 206 871, 59 €, débouter Mme Z... de toutes ses demandes et à titre reconventionnel, au visa de l'article 1376 du code civil, la condamner à lui payer la somme de 346 911, 16 € (553 725, 21 €-206 871, 59) en restitution du trop perçu par Mme Valérie Z... entre juillet 1992 et janvier 1993,- condamner Mme Valérie Z... à titre reconventionnel à lui payer la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,- condamner Mme Z..., au visa de l'article 700 du code de procédure civile, à lui payer la somme de 25000 €, ainsi qu'à payer tous les dépens,

Vu les conclusions déposées le 29 mars 2013 par Mme Valérie Z... qui demande de :- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,- condamner Mme Romilda Y... à lui payer la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- condamner Mme Romilda Y... aux entiers dépens.

SUR CE :
Considérant qu'il sera renvoyé à l'exposé complet des faits de l'espèce dans le jugement déféré, auquel la cour se réfère expressément :
Considérant que l'appelante fait en premier lieu valoir qu'elle est désormais en mesure, pour la première fois, d'apporter les preuves qu'elle a récemment réunies, démontrant que sa fille Mme Valérie Z... a, contrairement à ce qu'elle prétend, reçu 20 ans auparavant, entre le 15 juillet 1992 et le 13 janvier 1993, la somme totale de 3 632 199, 26 frs soit 553 725, 21 €, soit l'équivalent de la totalité du prix de cession des actions qu'elle détenait au sein de la Sa Golf Montaigne Elysée, et a donc été payée de ce qu'elle réclame ; qu'ainsi le jugement qui l'a condamnée au paiement de la somme de 553 840, 27 € outre intérêts doit être réformé ;
Qu'en second lieu, l'appelante conteste l'obligation solidaire mise à sa charge, et plus particulièrement le jugement retenant que Mme Valérie Z... peut demander " comme bon lui semble " la restitution de sa quote-part du prix de cession des actions de la Sa Golf Montaigne Elysée à sa mère, seule ;
Que subsidiairement, elle soutient que seule la moitié du prix de cession des actions, diminuée de la valeur de l'impôt sur les plus values déjà reçu par Valérie Z..., confirmé par celle-ci, et diminuée de sa quote-part de l'acompte reçu par M. Jacques Y... peut être mis à sa charge, l'autre portion étant due par M. Jacques Y... ;
Sur l'obligation à restitution incombant à Mme Y... :
Considérant que, ce que les premiers juges ont pertinemment relevé et que l'intimée souligne, il existe une contradiction dans l'argumentation de Mme Y... qui ne semble pas avoir contesté en son temps qu'elle était tenue à restitution puisqu'elle entend précisément démontrer qu'elle a déjà payé à sa fille le prix de cession des actions que cette dernière lui réclame, tout en soutenant néanmoins ensuite dans ses écritures qu'elle n'était pas redevable du paiement de ces fonds dont elle demande en conséquence, au visa de l'article 1376 du code civil la restitution ; qu'ainsi il y a lieu d'examiner d'abord l'existence d'une obligation à paiement ;
Considérant que par des motifs que la cour approuve le jugement s'est fondé sur l'analyse des divers éléments de fait et circonstances pour retenir qu'il était démontré que Mme Z... était fondée à demander à sa mère la restitution de sa quote-part du prix de cession ;
Qu'en effet, les termes du protocole montrent que Mme Y... avait reçu mandat de Mme Z... d'y souscrire pour son compte et que le prix de cession a été versé sur le compte des époux Y... en leur qualité de mandataire du prix de cession, que les termes employés dans la quittance du 3 février 1992 et sus-rappelés confirment très explicitement que les époux Y..., dont Mme Romilda Y..., s'étaient engagés à répartir les fonds de la cession entre les autres actionnaires ; que l'appelante ne saurait notamment invoquer, alors que M. Jacques Y... n'est pas partie à la présente instance et qu'elle ne l'y a pas appelé, qu'il n'existe pas de document entre les époux Y... précisant qui, des deux époux, doit assurer la répartition, voire soutenir que cette obligation ne reposait que sur M. Jacques Y..., dont Mme Romilda Y... a divorcé en 2005 ;
Que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action de Mme Valérie Z... à l'encontre de sa mère, dès lors que la fille était au surplus dans l'impossibilité morale de se constituer une preuve par écrit ;
Sur le règlement invoqué par Mme Y... :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 1315 du code civil qu'il incombe à celui qui se prétend libéré d'une obligation de justifier du paiement qui produit l'extinction de son obligation ; que la charge de la preuve repose donc sur Mme Y... ;
Considérant que l'appelante expose que le principal établissement de crédit, l'Union Industrielle de Crédit (UIC), dans lequel les membres de la famille Y... déposaient leur argent a fermé en 1998 et que de nombreux documents comptables sont restés en possession de M. Jacques Y..., qui les a remis à Mme Valérie Z... peu de temps après, la privant en revanche de tout accès aux documents nécessaires à sa défense mais qu'elle peut désormais, grâce au désarchivage laborieux de l'expert comptable M. Pierre A... et au recoupement avec les copies des microfilms de l'UIC, apporter la preuve qu'elle a versé sur le compte titres de sa fille Valérie, puis sur son compte de dépôt, entre Juillet 1992 et janvier 1993, la somme de 3 632 199, 26 Frs soit 553 725, 17 €, soit exactement la somme que sa fille prétend, 16 ans plus tard, ne pas avoir reçue, étant précisé qu'aucun de ces versements n'est une donation puisque les premières donations au profit de ses filles n'auront lieu qu'en 1994 ;

Qu'elle observe qu'à ce jour, Valérie Z... n'a fait aucune démarche auprès du service des Impôts pour les informer qu'elle n'aurait pas reçu le capital qu'elle a pourtant déclaré en 1991, ce qu'elle ne peut évidemment pas faire puisqu'elle a bien reçu l'équivalent de la cession de ses actions et en particulier, ce que l'intimée ne conteste pas, le montant de l'impôt sur les plus values de la vente de ses actions Golf Montaigne Elysées soit la somme de 560 946 Frs ou 85 515, 67 € en 1992 (pièce 13-2) ;
Que l'appelante s'appuie donc sur les relevés des comptes de Mme Z..., ses déclarations fiscales et les attestations établies par M. Pierre A..., expert comptable, pour établir que ladite somme de 3 632 199 frs ne pouvait constituer une donation mais l'équivalent du produit de la cession des parts de Mme Z... dans la Sa Golf Montaigne Elysée ; qu'elle s'appuie également sur les dires de Géraldine Y... attestant que sa soeur n'a pu que recevoir les sommes en question pour expliquer son patrimoine, d'autant que pendant 16 ans, elle n'a jamais entendu sa soeur évoquer le sujet ni accepté de s'en expliquer avec elle ; (pièce 15 et pièces 17-6 et 17-7) ;

Qu'elle fait référence à un premier versement effectué en juillet 1992 d'un montant de 2 444 199, 26 frs (les 34 Valunions et les 4 FCT transférées au profit de Mme Z...) s'appuyant sur la pièce 22 et d'autre part à un second versement le 13 janvier 1993 d'un montant de 1 188 000 frs effectué par deux virements (pièce No 23) ; qu'elle observe pour ces derniers, que Mme Z... en confirme la réalité ;
Qu'elle explique, s'appuyant sur les pièces 22-1 à 22-9 qu'elle a versé sur le compte-titres No 720 361 de sa fille les 34 Sicav Valunions et 4 FCT d'une valeur totale de 2 444 199, 26 Frs que Mme Z... a revendu ces titres, précisant les dates des 7 ventes intervenues entre le 16 juillet 1992 et le 15 décembre 1992 ainsi que les montants obtenus, une dernière vente intervenant le 7 janvier 1993 ; qu'ainsi, en cédant ces titres, Mme Z... a réalisé sur la seule année 1992, une plus-value de 138 051 frs qu'elle a déclarée à l'administration fiscale en 1992 en sus de son revenu global de 94 380 Frs (Pièce 22-10 à 22-12) ; que ses dires sont d'ailleurs confirmés par la pièce adverse 28 ;
Qu'elle fait encore valoir que les opérations patrimoniales réalisées par sa fille dans la période concomitante à la cession des actions de la SA Golf Montaigne Elysée, ne s'expliquent que par ces paiements, puisque, bien qu'au chômage, et même en fin de droits, ce qui ressort de sa procédure de divorce en 1994, elle a :- acquis un appartement à Rambouillet pour 880 000 frs et diverses parcelles à Emancé (Yvelines),- engagé en 1993 des travaux de construction de plusieurs bâtiments,- acheté des chevaux et pourvu à leur garde et entretien,- créé une société en 1994, la SCEA Elevage des Garins, en y associant sa mère et en libérant, à elle seule, 1900 000 frs pour le capital de celle-ci ;

Que ce n'est seulement qu'entre 1994 et 1998, qu'elle a fait des donations à chacune de ses filles, pour un montant total de 2 902 511 frs chacune, qu'ainsi l'intimée n'est pas fondée à présenter, comme elle l'a fait dans ses écritures du 9 juillet 2012, les versements comme des donations ; que dans ses dernières écritures, ce qui montre qu'elle est très embarrassée, Mme Z... nie d'abord le transfert de Sicav pour 2 444 199, 26 Frs du compte de sa mère sur son compte titres en juillet 1992, puis l'admettant finalement, en invente une cause et pour convaincre, s'acharne sur l'expert comptable M. A..., tant ses attestations confirment les pièces bancaires et fiscales communiquées ; que pour les deux virements de janvier 1993 de 1 188 000 frs, Mme Z... les confirme tout en continuant à en solliciter un deuxième règlement ;
Considérant que Mme Valérie Z..., intimée, conteste la signification des pièces comptables versées par l'appelante et affirme que les 34 Valunions et les 4 FCT figurant sur le relevé de compte de Mme Z... à la date du 15 juillet 1992 ne correspondent pas à des fonds qui auraient été transférés par Mme Y... au profit de Mme Z... ; que détentrice d'un compte courant dans les livres de l'UIC, si les titres provenaient d'un autre compte, ils auraient été enregistrés sous l'intitulé " Achat " ou " Vente " selon le type d'opération ; que dès lors si les 34 Valunions et les 4 FCT que l'appelante affirme avoir transférés à sa fille l'avaient été véritablement, l'écriture aurait dû apparaître avec la mention " Vente " sur le compte de Mme Y... et " Achat " sur le compte de Mme Z... ce qui n'est pas le cas ;

Que s'agissant de son patrimoine, elle a acquis et revendu divers biens immobiliers à Vincennes, achats en 1985, 1987 et 1989 et reventes en 1989 et 1991, ce qui a suffi à financer les opérations patrimoniales évoquées par l'appelante pour crédibiliser ses dires ;
Que l'attestation de M. A..., dont elle considère que la teneur a été dictée par sa cliente, Mme Y..., et les pièces opportunément retrouvées dans le cadre de l'appel, ne sauraient, selon l'intimée convaincre ; que ce comptable a rédigé la déclaration des profits sur les cessions de valeurs mobilières de Mme Z... pour l'année 1992 (pièce 22-10) sur la base des seules informations transmises par Mme Y..., vérifiant l'avis d'imposition de cette dernière mais pas la sincérité des éléments transmis, Mme Z... n'ayant pas signé ladite déclaration ;
Que par ailleurs, la pièce 22 montre que le cumul des 34 Valunions et des 4 FCT totalise d'après les calculs de Mme Y... la somme de 2 444 199, 26 frs soit, à quelques milliers de francs prêt, la valeur de la vente du pavillon que Mme Z... possédait à Vincennes et qu'elle a vendu au même moment, ce qui est une curieuse coïncidence, dès lors que ces opérations imposables devaient être mentionnées dans la déclaration des revenus 1992 de Mme Z... et que justement, M. A..., le comptable de Mme Y... s'en est chargé, ce qu'il indique dans son attestation (pièce No 26-1 et 2) ;
Qu'en admettant même la réalité du versement allégué par sa mère, l'intimée l'explique par l'existence d'une autre dette, celle au 31 décembre 1991 de 2 384 400 frs des époux Y... en sa faveur laquelle disparaît ensuite de leur déclaration ISF ; que dans son attestation l'expert affirme que " Plus aucune dette n'apparaît après cette déclaration ISF 1992 dans le patrimoine des époux Y... " c'est à dire que cette dette a été payée par les époux Y... au cours de l'année 1992 alors pourtant que cette même déclaration ISF, renseignée par M. A... laisse apparaître la mention : " Action de la SA Golf Montaigne Elysées-prix de cession non encore encaissé-31 097 722 " tandis que la fausseté de l'attestation de l'expert est manifeste puisqu'il demeurait au 1er Janvier 1993, dans le patrimoine des époux Y... une dette à l'égard de Mme Z... d'un montant de 1 188 000 frs ; qu'elle conclut enfin que si le paiement de 2 444 199, 26 frs s'impute sur le prix de cession des actions de la société De Golf Montaigne Elysée, alors c'est la dette de 2 384 400 frs des époux Y... à son profit qui n'a pas été honorée ; qu'ainsi elle est créancière ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites aux débats par l'appelante, en particulier les pièces Nos 22-1 et 22-2, confirmées par la pièce 28 qui est en revanche produite par Mme Valérie Z..., que les explications comptables de Mme Romilda Y... reposent sur des documents très précis ; qu'elles sont encore justifiées par les pièces concordantes Nos 22-3 à 22-9 ainsi que par les pièces Nos 22-10 à 22-12 ; qu'elles sont confortées par les termes de l'attestation très complète et très précise de M. A..., régulière au regard des dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ;
Qu'en revanche, Mme Z..., qui ne produit ni ses propres relevés de comptes ni toutes ses déclarations fiscales, ne s'explique à aucun moment sur la cause notamment des deux virements bancaires en sa faveur du 13 janvier 1993 de 681 000 frs et 507 000 frs et n'apporte pas davantage d'explication d'ensemble et cohérente de nature à étayer ses dénégations ; que certes elle invoque des points comptables mais qui ne sont pas adéquats comme par exemple le fait que le 12 juin 1992, lorsque les époux Jacques Y... ont déclaré leur impôt sur la fortune, ils ont fait état, sur l'annexe 4, au passif, d'une dette sur gestion de patrimoine concernant leur fille Valérie pour un montant de 2 384 400 frs ; que cette dette, dont on comprend à la lecture de l'attestation de M. A... qu'elle se rattache à la vente des actions d'une autre société La SA Montaigne Expansion, ne saurait être confondue avec celle qui est à l'origine du présent litige dont la cause est précise ; qu'en effet, Mme Z... a toujours expliqué depuis l'introduction de la procédure, mais au sujet très précisément du prix de cession des actions de la société De Golf Montaigne Elysée, qu'elle a payé l'impôt tout en laissant les fonds entre les mains de sa mère à charge pour cette dernière de les gérer et de les lui restituer ; que de même l'intimée, à supposer pertinentes ses explications sur les causes de son patrimoine immobilier préalablement constitué à Vincennes dont le revente a permis ses acquisitions ultérieures, ne saurait prétendre apporter une démonstration mathématique convaincante en relevant une prétendue coïncidence de montant entre l'objet du litige et la valeur, à quelques milliers de francs près, de la vente d'un pavillon à Vincennes ; que surtout elle met unilatéralement en cause l'attestation de M. Pierre A..., alors que ce dernier, en pièce No 26-1, qui certifie avoir personnellement constaté divers faits, fait notamment un lien entre les relevés de l'UIC-ci-dessus analysés, les notes de contrôle qu'il avait rédigées le 26 février 1993 analysant les mouvements sur les portefeuilles UIC de Mme (Romilda) Franca Y... et de Mme Valérie Z... pendant l'année 1992 et les déclarations fiscales ;
Considérant dès lors que l'appelante apporte suffisamment la preuve de son paiement et que le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions portant condamnation ;
Sur la demande de dommages et intérêts de Mme Romilda Y... :
Considérant que l'appelante invoque le caractère abusif de la procédure intentée à son encontre, démontrant la volonté de nuire, la mauvaise foi et le manque de loyauté de Mme Valérie Z... ;
Considérant toutefois que la gestion familiale complexe révélée par la procédure ne permet pas d'imputer à Mme Valérie Z... d'autre grief que celui d'avoir longtemps négligé le suivi de ses affaires puis d'avoir engagé très tardivement la présente instance ; que ce chef de demande sera en conséquence rejeté ;
Considérant que l'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'appelante dans les termes du dispositif ci-après.
Considérant que les entiers dépens seront supportés par Mme Valérie Z....
PAR CES MOTIFS :
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté l'exception d'irrecevabilité des demandes,
Statuant à nouveau,
Déboute Mme Valérie Z..., née Y..., de ses demandes à l'encontre de Mme Romilda Y... née X...,
Déboute Mme Romilda Y... née X... de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Y ajoutant,
Condamne Mme Valérie Z..., née Y..., à payer à Mme Romilda Y..., née X..., la somme de 10 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme Valérie Z..., née Y..., aux entiers dépens, dont ceux d'appel seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 12/02768
Date de la décision : 12/06/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2013-06-12;12.02768 ?
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