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29/05/2013 | FRANCE | N°11/13299

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 29 mai 2013, 11/13299


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 29 MAI 2013



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/13299



Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Juin 2011 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 08/0887





APPELANTE



La SCI [Adresse 3], prise en la personne de ses représentants légaux,

[Adresse 1]

[LocalitÃ

© 1]



La société SOVEPRO, prise en la personne de ses représentants légaux,

intervenante volontaire

[Adresse 2]

[Localité 1]



représentées par Me Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 29 MAI 2013

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/13299

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Juin 2011 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 08/0887

APPELANTE

La SCI [Adresse 3], prise en la personne de ses représentants légaux,

[Adresse 1]

[Localité 1]

La société SOVEPRO, prise en la personne de ses représentants légaux,

intervenante volontaire

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentées par Me Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : L0068, avocat postulanr

assistées de Me Bénédicte FLORY de la SCP PETAT FLORY, avocat au barreau de PARIS, toque : A0756, avocat plaidant

INTIMÉE

La SARL HOTEL DE PARIS, prise en la personne de ses représentants légaux,

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Mireille GARNIER de la SCP MIREILLE GARNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : J136, avocat postulant

assistée de Me Mansour OTHMANI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0095, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Février 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Odile BLUM, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a été préalablement entendue en son rapport.

Madame Odile BLUM a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Chantal BARTHOLIN, Présidente

Madame Odile BLUM, Conseillère

Madame Isabelle REGHI, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Alexia LUBRANO.

ARRÊT :

- contradictoire.

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Chantal BARTHOLIN, Présidente et par Mme Alexia LUBRANO, Greffière.

* * * * * * *

Par acte notarié du 3 septembre 1992, la s.c.i. [Adresse 3] a donné à bail commercial en renouvellement à la société Hôtel de Paris, pour une durée de neuf années à compter du 1er janvier 1989, des locaux situés [Adresse 3] - [Adresse 4], à l'angle de ces deux voies, à [Localité 2], à destination d'hôtel meublé.

Par acte extrajudiciaire du 28 mai 1999, la société Hôtel de Paris a demandé le renouvellement du bail ce que, par acte extrajudiciaire du 25 août 1999, le bailleur a refusé sans offre d'indemnité d'éviction.

Par jugement du 22 novembre 2001, le tribunal de grande instance de Créteil a, entre autres dispositions, déclaré valable un commandement de payer du 28 juillet 1999, dit que le refus de renouvellement n'est pas fondé sur un motif légitime, dit que la société Hôtel de Paris est donc en droit d'obtenir une indemnité d'éviction et désigné un expert sur le montant des indemnités d'éviction et d'occupation.

Sur appel de cette décision et renvoi après cassation d'un précédent arrêt, par arrêt du 7 février 2008, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement du 22 novembre 2011 sur les dispositions susvisées et le réformant pour le surplus, a condamné la société Hôtel de Paris à verser à la s.c.i. [Adresse 3] la somme de 448,83 € au titre de l'arriéré de loyers avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, accordé à la société Hôtel de Paris un délai d'un mois pour s'acquitter de ses obligations et suspendu les effets de la clause résolutoire.

Le rapport d'expertise judiciaire sur les indemnités d'éviction et d'occupation ayant été déposé le 23 mars 2004, l'affaire est revenue devant les premiers juges tant sur la fixation de ces indemnités que sur l'opposition à un nouveau commandement visant la clause résolutoire délivré à la locataire le 25 mai 2009.

Par jugement rendu le 27 juin 2011, le tribunal de grande instance de Créteil a :

- condamné la s.a.r.l. Hôtel de Paris à verser à la s.c.i. [Adresse 3] la somme de 2.644,04 € avec intérêts au taux légal à compter du 26 mai 2009,

- débouté la s.a.r.l. Hôtel de Paris de sa demande de délais,

- fixé l'indemnité d'éviction due par la s.c.i. [Adresse 3] à la s.a.r.l. Hôtel de Paris à la somme de 135.216,25 €,

- fixé le montant de l'indemnité d'occupation due par la s.a.r.l. Hôtel de Paris à compter du 25 août 1999 à la somme annuelle de 8.635 €,

- débouté la s.c.i. [Adresse 3] du surplus de ses demandes,

- débouté la s.a.r.l. Hôtel de Paris du surplus de ses demandes,

- ordonné l'exécution provisoire,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la s.c.i. [Adresse 3] aux dépens.

La s.c.i. [Adresse 3] a relevé appel de cette décision le 13 juillet 2011.

Par conclusions du 8 février 2012, la s.a.r.l. Sovepro est intervenue volontairement à l'instance aux côtés de la s.c.i. [Adresse 3].

Par leurs dernières conclusions du 11 février 2013, la s.c.i. [Adresse 3] et la société Sovepro demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Hôtel de Paris de sa demande de délais et fait courir le paiement de l'indemnité d'occupation à compter du 25 août 1999,

- l'infirmer pour le surplus,

- déclarer valable le commandement délivré le 25 mai 2009 et constater au 26 mai 2009 l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail ; subsidiairement prononcer la résiliation du bail aux torts et griefs de la société Hôtel de Paris,

- dire la société Hôtel de Paris déchue de son droit à indemnité d'éviction,

- ordonner son expulsion et celle des occupants de son chef, sous astreinte,

- condamner la société Hôtel de Paris à payer la somme de 8.477,16 € arrêtée au 8 novembre 2012, augmentée de toute somme postérieurement échue et demeurée impayée avec intérêts au taux légal à compter du 26 mai 2009,

- condamner la société Hôtel de Paris à payer une indemnité mensuelle d'occupation de 1.225 € en principal, taxes, charges et accessoires en sus, avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance, et ce à compter du 25 août 1999, et indexation sur l'indice Insee du coût de la construction à compter de la même date,

- à titre infiniment subsidiaire, fixer le montant de l'indemnité d'éviction à la somme globale de 44.000 € ; condamner la société Hôtel de Paris à payer une indemnité d'occupation de 1.225 € en principal, taxes, charges et accessoires en sus, avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance, et ce à compter du 25 août 1999, et indexation sur l'indice Insee du coût de la construction à compter de la même date,

- en toutes hypothèses, condamner la société Hôtel de Paris à payer à la s.c.i. [Adresse 3] la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts ; débouter la société Hôtel de Paris de toutes ses demandes ; la condamner à payer la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance qui comprendront les frais du commandement du 25 mai 2009 et ceux d'appel dont distraction en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La s.a.r.l. Hôtel de Paris, par ses dernières conclusions du 4 février 2013, demande à la cour de :

- constater qu'aucune des causes visées par le commandement du 25 mai 2009 n'est justifiée et confirmer le jugement rendu le 27 juin 2011 sauf à porter le montant de l'indemnité d'éviction à la somme de 206.000 €,

- débouter la société Sovepro et la s.c.i. [Adresse 3] de l'ensemble de leurs demandes et leur ordonner de produire, sous astreinte, les justificatifs de charges depuis l'exercice 2004 jusqu'à l'année 2008 inclus,

- subsidiairement, vu l'article 1244-1 du code civil, lui accorder six mois de délais de paiement ou deux mois de délais de régularisation des autres obligations de faire,

- condamner in solidum la société Sovepro et la s.c.i. [Adresse 3] à lui payer la somme de 6.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel dont distraction conformément à l'article 699 du même code.

SUR CE,

Considérant, à titre liminaire, qu'il sera pris acte de l'intervention volontaire de la société Sovepro en sa qualité d'usufruitière des locaux concernés suivant acte notarié du 25 janvier 2012 ;

Considérant qu'il sera rappelé par ailleurs que la société Hôtel de Paris ayant réglé dans le délai fixé la condamnation mise à sa charge par l'arrêt du 7 février 2008 au titre de l'arriéré locatif irrévocablement arrêté au 10 octobre 2007 à la somme de 448,83 €, la clause résolutoire n'a pas joué à la suite du commandement de payer du 28 juillet 1999 ;

Sur le commandement du 25 mai 2009 et la clause résolutoire :

Considérant que par l'acte extrajudiciaire du 25 mai 2009 visant la clause résolutoire, la bailleresse a sommé la société Hôtel de Paris :

- de procéder au règlement des loyers et charges arriérés pour un montant de 4 593,61 €, arrêtés au 6 mai 2009,

- de se conformer à ses obligations contractuelles en matière de ramonage en faisant appel au fumiste de la s.c.i. [Adresse 3] "dont les coordonnées ont été rappelées ci-dessus",

- de justifier du suivi de la réparation de la chaudière consécutivement à l'intervention du 6 octobre 2008,

- de procéder à la réparation de l'ensemble des canalisations fuyardes,

- de procéder aux travaux nécessaires à la mise en conformité des chambres donnant sur la [Adresse 3] aux normes de sécurité ;

Considérant que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le bail ayant été résilié à la suite de la demande de renouvellement et du refus de renouvellement signifié le 25 août 1999, la clause résolutoire visé au bail ne peut plus jouer ; qu'en effet, la société Hôtel de Paris s'étant vue reconnaître le bénéfice du droit à une indemnité d'éviction, son maintien dans les lieux jusqu'au paiement de cette indemnité s'opère, en vertu de l'article L 145-28 du code de commerce, aux conditions et clauses du contrat de bail expiré et le bailleur est en droit de poursuivre l'acquisition de la clause résolutoire ou la résiliation judiciaire y compris pour le non-paiement des indemnités d'occupation qui se sont substituées au loyer et sont payables selon les mêmes modalités ; que le moyen d'irrecevabilité soulevé par la société Hôtel de Paris n'est pas fondé ; qu'il sera relevé en outre que le commandement du 25 mai 2009 est intitulé "commandement visant la clause résolutoire" et non comme prétendu à tort par l'intimée "commandement de payer les loyers visant la clause résolutoire" ; que par ailleurs la société Hôtel de Paris ne demande pas la nullité du commandement sur le fondement de l'article L 145-17 du code de commerce ;

Considérant cela étant posé que la société Hôtel de Paris relève à juste titre que la créance locative prétendue à la date du commandement visant la clause résolutoire du 25 mai 2009, outre la somme de 1.225,12 € au titre de l'indemnité d'occupation s'étant substituée au loyer trimestriel, tient indûment compte d'une régularisation des charges 2007 pour 1.940,89 € et d'un acompte trimestriel sur charges de 510 €, considérablement augmenté par rapport à la provision trimestrielle pour charges antérieure de 48,78 € et hors de proportion avec les charges réellement dues dès lors qu'aucune clause expresse du bail ne met à la charge de la société locataire l'impôt foncier ; que la régularisation des charges 2007 n'est effectivement contractuellement justifiée qu'à hauteur de la somme de 501,18 € et non de 1.940,89 € ;

Qu'il sera dès ce stade relevé que la régularisation des charges 2008 n'est justifiée que pour la somme de 524,90 € et non 1.998,40 €, la régularisation des charges 2009 que pour la somme de 550,18 € et non 1563,51 € et la régularisation des charges 2010 que pour la somme de 560,16 € et non 1.620,85 € ;

Considérant qu'il importe peu que la société locataire n'ait pas jusqu'à présent contesté le poste de charges relatif à l'impôt foncier qui n'est pas mis expressément à sa charge par le contrat de bail et qu'elle n'a dès lors pas à supporter ; que les nombreuses décisions judiciaires précédemment intervenues entre les parties sont sans incidence sur ce point dont il n'a jamais été jusqu'à présent débattu ; que le fait que la gérante de la société Hôtel de Paris se soit déplacée pour prendre connaissance des justificatifs est en outre, ici, inopérant ; que la clause résolutoire n'a pu en conséquence jouer pour l'arriéré locatif injustifié ;

Considérant que pour ce qui est des canalisations prétendument fuyardes et des travaux nécessaires à la mise en conformité des chambres donnant sur la [Adresse 3] aux normes de sécurité, il importe de relever que la société bailleresse fait elle-même état d'injonctions administratives et qu'elle reste, en outre, tenue des conséquences de la vétusté des locaux et de leur conformité à leur destination ; qu'elle ne fait pas la preuve qui lui incombe de l'imputabilité des désordres, au jour de la délivrance du commandement, à un manquement de la société preneuse à son obligation d'entretien et plus généralement aux obligations découlant pour elle du contrat de bail ; que la clause résolutoire n'a pu non plus jouer à ce titre ;

Considérant enfin que le contrat de bail stipule à ses "charges et conditions" que le preneur s'oblige à faire ramoner, chaque fois qu'il sera nécessaire et au moins une fois l'an, les conduits de fumée et cheminées des lieux loués par le fumiste du propriétaire et d'en justifier à toute réquisition du propriétaire ;

Considérant que la société Hôtel de Paris établit avoir souscrit un contrat d'entretien de la chaudière auprès de l'entreprise Chauffexpress et de l'intervention régulière de celle-ci à ce titre ; qu'elle verse également aux débats les bons d'intervention de cette entreprise pour le ramonage annuel dernièrement effectué le 6 octobre 2008, le 28 septembre 2009, le 20 septembre 2010, le 19 septembre 2011 et le 1er octobre 2012 ; qu'il s'ensuit que la société bailleresse qui se saisit de la facture du 7 octobre 2008 communiquée par la société Hôtel de Paris et mentionnant "mise à l'arrêt de la chaudière remplacement de brûleur à faire - danger- devis à suivre - présence suie ...", ne démontre pas le manquement de la société Hôtel de Paris à son obligation d'entretien sur ce point ni dès lors de la réalité ou de la persistance du grief tenant précisément au suivi de la réparation de la chaudière ;

Considérant qu'il demeure que la société Hôtel de Paris ne s'est pas adressée au "fumiste du propriétaire" manquant ainsi à son obligation contractuelle ; que si par ses arrêts des 7 février 2008 et 15 juin 2011, cette cour a pu rejeter le même grief fait à la société preneuse, c'était en considération d'une autre période et d'autres circonstances ; que contrairement aux commandements délivrés en 1999 et 2002, concernés par ces décisions, le commandement du 25 mai 2009 a été précédé de la communication faite à plusieurs reprises à la société Hôtel de Paris par la société bailleresse du nom et des coordonnées de son fumiste auquel cependant la société preneuse a persisté à ne pas vouloir faire appel, contrevenant ainsi aux dispositions contractuelles ; que l'infraction étant constituée et la société Hôtel de Paris n'y ayant pas mis fin dans le délai d'un mois, force est de constater que la cause résolutoire a joué ; qu'il convient toutefois, au vu des décisions précédemment intervenues et sur la portée desquelles la société Hôtel de Paris a pu se méprendre, de l'ampleur et de l'ancienneté du litige entre les parties, de la situation de la débitrice de l'obligation se trouvant depuis près de 14 ans dans l'attente du paiement d'une indemnité d'éviction, de faire droit à sa demande de deux mois de délai et de suspendre le jeu de la clause résolutoire dans l'attente de l'intervention dans ledit délai, à la demande de la société Hôtel de Paris, du fumiste du bailleur dont le nom et les coordonnées lui sont connues ; que la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais joué si les délais sont respectés ;

Considérant qu'à défaut, le bail étant résilié au 26 juin 2009, la société Hôtel de Paris perdra son droit à indemnité d'éviction et corrélativement son droit au maintien dans les lieux, l'expulsion sera autorisée dans les termes du dispositif, sans qu'il y ait lieu au prononcé d'une astreinte et l'indemnité d'occupation, qui n'est pas l'indemnité d'occupation statutaire, fixée, au vu des éléments de la cause, à la somme de 1.000 € par mois, charges et taxes en sus, à compter du 26 juin 2009 ; que la demande des appelantes tendant à voir assortir cette indemnité d'occupation d'intérêts au taux légal et d'une indexation n'est pas fondée et sera rejetée ;

Considérant que la demande subsidiaire de résiliation judiciaire est ainsi sans objet ;

Sur l'arriéré locatif allégué et les dommages et intérêts réclamés :

Considérant que la s.c.i. [Adresse 3] et la société Sovepro soutiennent que la société Hôtel de Paris reste débitrice au 8 novembre 2012 d'un arriéré locatif de 8.477,16 € ce que la société Hôtel de Paris conteste ; que cette dernière demande qu'il soit fait injonction sous astreinte aux appelantes de produire les justificatifs de charges depuis l'exercice 2004 jusqu'à l'année 2008 inclus ;

Mais considérant que l'arriéré locatif a été irrévocablement arrêté à la somme de 448,83 € au 10 octobre 2007 ; que les appelantes prouvent pour le surplus que la gérante de la société Hôtel de Paris a pu consulter, notamment le 9 janvier 2009, l'ensemble des justificatifs des charges 2007 et 2008 ; que la demande de la société Hôtel de Paris tendant à la production desdits justificatifs n'est pas fondée et sera rejetée ;

Considérant que l'ensemble des décomptes produits par la s.c.i. [Adresse 3] et la société Sovepro mentionne, comme il a été dit précédemment, un montant de charges régularisées erroné puisque mettant à la charge de la société Hôtel de Paris un impôt foncier qui n'est pas à sa charge ainsi que des provisions sur charges qui sont dès lors excessives  ; que ces décomptes mentionnent également le montant d'indemnité d'occupation régulièrement augmenté ainsi que chaque trimestre des "frais divers" sur lesquels la s.c.i. [Adresse 3] et la société Sovepro ne s'expliquent pas dans leurs écritures ; que de tels décomptes ne sont pas de nature à établir la réalité de l'arriéré locatif allégué ; que les appelantes seront déboutées de leur demande en paiement à ce titre, le jugement étant infirmé sur la condamnation prononcée ;

Considérant que la s.c.i. [Adresse 3] demande également la condamnation de la société Hôtel de Paris à lui payer la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts en faisant valoir que non seulement la société Hôtel de Paris ne règle pas ses indemnités d'occupation et charges locatives, ce qu'en l'état elle ne prouve pas, mais encore qu'elle récupérera des locaux dans un état gravement dégradé ; mais considérant que la s.c.i. [Adresse 3] ne saurait valablement imputer à faute à la société Hôtel de Paris les conséquences du choix qu'elle a fait de tenter d'éviter, depuis 1999, le paiement d'une indemnité d'éviction à sa locataire évincée qui est maintenue dans les lieux dans l'attente du paiement de l'indemnité d'éviction ; que par ailleurs elle ne forme aucune demande au titre des réparations locatives ; qu'elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;

Sur l'indemnité d'éviction :

Considérant que la société Hôtel de Paris demande que l'indemnité d'éviction, à laquelle elle a droit si la clause résolutoire n'est pas réputée acquise, soit globalement fixée à la somme de 206.400 € dont 124.000 € au titre de la perte du fonds et 82.400 € au titre des indemnités accessoires (frais de remploi et trouble commercial) ; que les appelantes concluent à une indemnité d'éviction globale de 44.000 € dont 30.000 € pour l'indemnité principale ;

Considérant qu'en vertu de l'article L 145-14 du code de commerce, l'indemnité d'éviction due par le bailleur au locataire évincé est égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement, cette indemnité comprenant notamment la valeur marchande du fonds de commerce déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre ;

Considérant qu'en l'espèce, les locaux en cause sont situés à [Localité 2] dans la partie de la [Adresse 3] se trouvant dans le "vieux [Localité 2]", secteur animé, avec de nombreux commerces de proximité ; que ces locaux se composent pour l'essentiel du 1er étage et du 2ème étages sous combles d'un immeuble très ancien au gros oeuvre en état "très moyen" avec "ravalement à revoir" et dans la cour, d'un petit pavillon à simple rez-de-chaussée en état médiocre ; que la société Hôtel de Paris y exploite un "hôtel préfecture" de 16 chambres et deux studios pour deux personnes dans le premier immeuble et pour deux/trois personnes dans le pavillon ; que sa clientèle lui est envoyée par des associations d'aide au logement social, des associations d'aides à la réinsertion ou des assistances sociales ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que l'éviction entraînera la perte du fonds et que l'indemnité principale correspond à une indemnité de remplacement ; que l'expert judiciaire a retenu que cette indemnité correspond à la valeur du fonds de commerce calculé sur la moyenne des trois derniers chiffres d'affaires connus soit sur 53.672 € affecté d'un coefficient de 2,25 tenant compte de la situation et de l'état moyen des locaux ;

Considérant que la société Hôtel de Paris ne prétend pas que la valeur du droit au bail est supérieure à la valeur du fonds de commerce ; qu'elle se borne à faire valoir que ses données comptables n'ont pas subi d'importantes modifications depuis le dépôt du rapport d'expertise et que d'après les liasses fiscales des trois dernières années, les chiffres d'affaires et résultats n'ont pas varié, restant dans la fourchette de 53.000 à 54.000 € constatés par l'expert, que cependant les installations générales, agencements et aménagements divers ont subi des modifications notables en raison des travaux extrêmement important entrepris en 2006 et 2007 d'un montant global de 56.000 € ce qui est de nature à modifier l'indemnité principale qui doit être fixée à 124.000 € ;

Considérant que la s.c.i. [Adresse 3] et la société Sovepro se bornent à répliquer que la société Hôtel de Paris n'a toujours pas produit de bilans comptables qui soient d'une part conformes aux chiffres enregistrés sur Infogreffe d'autre part complets, qu'elle n'a pas davantage déposé ses comptes au greffe du tribunal de commerce pour les années 2008 et 2009 et que l'indemnité d'éviction doit en conséquence être ramenée à une valeur très inférieure à celle retenue par l'expert ; qu'elles indiquent par ailleurs que la société Hôtel de Paris qui fait état de travaux importants en 2006 n'établit ni leur nature ni leur incidence sur la valeur du fonds, que pour le surplus, le très mauvais état d'entretien des locaux imputable exclusivement à la locataire conduit à ramener le coefficient de 2,25 retenu par l'expert judiciaire à 1, l'indemnité principale devant en conséquence être fixée à la somme de 30.000 € ;

Considérant que la société Hôtel de Paris ne dément pas le fait qu'au vu des trois derniers comptes annuels qu'elle a déposés au greffe du tribunal de commerce son chiffre d'affaires moyen s'établit à la somme de 53.549 € ; qu'il n'y a pas lieu d'écarter cette donnée, ainsi que le demandent les appelantes, dès lors qu'elle est bien celle issue des comptes déposés et rejoint en outre le chiffre d'affaires moyen retenu par l'expert judiciaire ;

Considérant que la société Hôtel de Paris ne prouve pas les importants travaux qu'elle aurait réalisés dans les lieux en 2006 et 2007, les factures produites ne totalisant qu'un montant de près de 10.500 € et non de 56.000 € pour des travaux n'apparaissant être que des travaux de mise aux normes de sécurité ; que pour leur part, les appelantes ne justifient pas du bien fondé d'un coefficient de 1 qu'il conviendrait d'appliquer au lieu du coefficient de 2,25 retenu par l'expert judiciaire ; que l'indemnité principale sera en conséquence fixée à la somme arrondie de 120.500 € (53.549 € x 2.25) ;

Considérant que s'agissant des indemnités accessoires, la société Hôtel de Paris demande à ce que la somme de 12.231 € appréciée par l'expert judiciaire pour les frais de remploi soit portée à 12.400 € et que son trouble commercial soit indemnisé, en raison de l'incertitude dans laquelle elle s'est trouvée depuis la délivrance du congé puis des multiples procédures visant à la contraindre à quitter les lieux, à la somme de 70.000 € ;

Mais considérant que l'estimation à la somme de 12.231 €, non critiquée par les appelantes, des frais de remploi prend amplement la mesure des frais de remploi à exposer ;

que par ailleurs, la société Hôtel de Paris se prévaut vainement à ce stade des différentes étapes du litige l'opposant depuis près de 14 ans à son bailleur ; que le trouble commercial qui vise à réparer le préjudice subi par le locataire du fait de son déménagement et de sa réinstallation sera en l'espèce réparé, compte tenu des faibles résultats de la société Hôtel de Paris, par l'allocation d'une somme forfaitaire de 2.500 € ;

Considérant que l'indemnité d'éviction s'établit donc globalement, dans la limite des prétentions respectives des parties, à la somme de 135.231 € (120.500 € + 12.231 € +2.500 €) ;

Sur l'indemnité d'occupation :

Considérant que la société Hôtel de Paris ne critique pas le jugement en ce qu'adoptant l'estimation de l'expert judiciaire, il a fixé à la somme de 8.635 € par an l'indemnité d'occupation statutaire qu'elle doit à compter du 25 août 1999 ;

Considérant que faisant état tant de la valeur locative du bien loué que de "l'attitude inqualifiable de la locataire", la s.c.i. [Adresse 3] et la société Sovepro demandent la condamnation de la société Hôtel de Paris au paiement d'une indemnité d'occupation de 1.225 € par mois soit 14.700 € par an en principal, taxes, charges et accessoires en sus, avec intérêts au taux légal à compter du 25 août 1999 et indexation annuelle sur l'indice Insee du coût de la construction ;

Mais considérant qu'aux termes de l'article L 145-28 du code de commerce, l'indemnité d'occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous éléments d'appréciation ; qu'elle correspond à la valeur locative de renouvellement, et non de marché, dans des conditions exclusives de tout plafonnement ;

Considérant que la s.c.i. [Adresse 3] et la société Sovepro ne font aucune démonstration de l'absence de pertinence de l'estimation de l'expert qui retenant, au vu des documents qui lui ont été produits, une recette théorique annuelle de 66.631 € après déduction de la TVA à 5,5 %, un taux d'occupation de 80 % et un pourcentage sur recettes de 18 %, a exactement apprécié la valeur locative de renouvellement à la somme arrondie de 9.595 € ; que l'abattement de précarité de 10 % qui n'est pas critiqué par la société Hôtel de Paris est amplement justifié ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a fixé à la somme arrondie de 8.635 € l'indemnité d'occupation annuelle due, taxes et charges en sus, par la société Hôtel de Paris à compter du 25 août 1999 ;

Considérant qu'en raison de la suspension des effets de la clause résolutoire ainsi que, si elle est réputée ne jamais avoir joué, de l'existence de dettes réciproque tant au titre de l'indemnité d'éviction que de l'indemnité d'occupation, il n'y a pas lieu de condamner la société Hôtel de Paris au paiement de l'indemnité d'occupation ni à assortir cette indemnité d'occupation statutaire d'intérêts au taux légal ; que par ailleurs, aucun texte législatif ou réglementaire ne commande d'assortir l'indemnité d'occupation d'une indexation injustifiée en l'espèce, la longueur de la procédure étant pour l'essentiel imputable à la s.c.i. [Adresse 3] ;

Considérant que la s.c.i. [Adresse 3] qui succombe partiellement sur son recours sera condamnée aux dépens d'appel le jugement étant confirmé sur le sort des dépens de première instance ; que vu l'article 700 du code de procédure civile, les demandes à ce titre seront rejetées ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la s.a.r.l. Hôtel de Paris à verser à la s.c.i. [Adresse 3] la somme de 2.644,04 € avec intérêts au taux légal à compter du 26 mai 2009, débouté la s.c.i. [Adresse 3] de sa demande tendant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire, débouté la s.a.r.l. Hôtel de Paris de sa demande de délais ainsi que sur le montant de l'indemnité d'éviction ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Dit valable et partiellement fondé sur le commandement visant la clause résolutoire du 25 mai 2009 ;

Accorde à la société Hôtel de Paris un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt pour remplir son obligation de faire ramoner les conduits de fumée et cheminées des lieux loués par le fumiste du propriétaire ce dont il devra ensuite lui justifier ;

Suspend en conséquence le jeu de la clause résolutoire et dit que la clause résolutoire sera réputée n'avoir jamais joué si le délai est respecté ;

Dit qu'à défaut, la résiliation sera réputée acquise et la société Hôtel de Paris déchue de son droit à indemnité d'éviction ; dans cette hypothèse, autorise, passé un nouveau délai de deux mois, l'expulsion de la société Hôtel de Paris et de tous occupants de son chef avec, si besoin, l'assistance de la force publique et d'un serrurier, des locaux situés [Adresse 3] - [Adresse 4] ainsi que et la séquestration dans les formes légales du mobilier qui serait trouvé dans les lieux ; fixe l'indemnité d'occupation de droit commun due à compter du 26 juin 2009 par la société Hôtel de Paris à la somme de 1.000 € par mois, taxes et charges en sus ;

Déboute la s.c.i. [Adresse 3] de sa demande tendant à la condamnation de la société Hôtel de Paris à lui payer la somme de 8.477,16 € au titre de l'arriéré locatif arrêté au 8 novembre 2012 ainsi que de sa demande de dommages et intérêts ;

Dans l'hypothèse où la clause résolutoire sera censée ne jamais avoir joué, fixe à la somme de 135.231 € le montant global de l'indemnité d'éviction ;

Confirme le jugement sur le surplus ;

Déboute les parties de toutes autres demandes ;

Condamne la s.c.i. [Adresse 3] et la société Sovepro aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 11/13299
Date de la décision : 29/05/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°11/13299 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-29;11.13299 ?
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