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28/05/2013 | FRANCE | N°12/11548

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 28 mai 2013, 12/11548


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 28 Mai 2013

(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/11548



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2012 par Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire- de PARIS RG n° 09/02961





APPELANT



Monsieur [L] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Jean-charles MIRANDE, av

ocat au barreau de PARIS, toque : C2143





INTIMEE



SA NATIXIS

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Yasmine TARASEWICZ, avocat au barreau de PARIS, toque : J043 substitué par Me...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 28 Mai 2013

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/11548

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2012 par Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire- de PARIS RG n° 09/02961

APPELANT

Monsieur [L] [G]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Jean-charles MIRANDE, avocat au barreau de PARIS, toque : C2143

INTIMEE

SA NATIXIS

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Yasmine TARASEWICZ, avocat au barreau de PARIS, toque : J043 substitué par Me Cécile MARTIN

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 Avril 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente

Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère

Madame Dominique LEFEBVRE-LIGNEUL, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mlle Sandrine CAYRE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour est saisie de l'appel interjeté par M. [G] du jugement du Conseil de Prud'hommes de Paris section Encadrement chambre 4 du 28 juin 2012 qui l'a débouté de ses demandes.

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

M. [G] a été engagé le 16 août 1995 en qualité d'adjoint au responsable du marché actions par le Gie Betam dépendant de la Caisse des Dépôts et Consignations ;

Le 7 octobre 2002, il a été parallèlement engagé par la société Cdc Capital Markets North America en qualité de dirigeant avec avenant du 23 décembre 2003;

Il a été transféré en dernier lieu pour son engagement en France, le 1er janvier 2008, à la société Natixis, par regroupement des activités des Groupes Banque Populaire et Caisse d'Epargne ;

Il est responsable :

du département Eda (Equity Derivatives et Arbitrage) relatif aux opérations d'arbitrage et aux produits dérivés actions, depuis l'origine

du département Cmd (commodity Markets Division) chargé des produits dérivés sur matières premières depuis décembre 2006 ;

Il a été convoqué le 13 janvier 2009 à entretien préalable fixé au 26 janvier 2009 avec dispense d'activité et licencié le 26 février 2009 pour insuffisance professionnelle et de résultats avec dispense d'exécution du préavis de 3 mois ;

Il lui a été notifié par lettre recommandée du 19 octobre 2009 son licenciement par la société Natixis North America à effet d'une précédente lettre du 26 février 2009 ;

L'entreprise est soumise à la convention collective des banques ;

Par précédent jugement du 11 mai 2010 confirmé par arrêt du 28 avril 2011, le conseil des prud'hommes de Paris a été déclaré compétent pour statuer sur le litige;

M. [G] demande de réformer le jugement, de rejeter les demandes de la société Natixis et de la condamner à payer les sommes de :

16 025.38 € à titre de rappel de salaire pour la période du 1er janvier au 2 juin 2009 et 1 602.53 € de congés payés afférents

220 898.58 € de rappel d'indemnité légale de licenciement,

subsidiairement 550 000 € de rappel de salaire et 55 000 € de congés payés afférents selon engagement du 24 mai 2007,

4 000 000 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

872 203 € de rappel de salaire variable et 87 220 € de congés payés afférents

et 8 000 € pour frais irrépétibles.

La société Natixis demande de confirmer le jugement, subsidiairement de débouter M. [G] de ses demandes, de les limiter et de le condamner à payer la somme de 81 525.89 € et celle de 1 500 € pour frais irrépétibles.

SUR CE

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience ;

Sur l'assiette de la rémunération

M. [G] oppose l'autorité de la chose jugée par les jugement du 11 mai 2010 et arrêt du 28 avril 2011 sur la compétence retenue pour l'entier litige portant sur les rémunérations perçues en France et aux Etats-Unis par le biais de la société Natixis North America et invoque une rémunération sur l'année 2008 de 810 714 € versée par North America et 1 850 020 € à [Localité 3] déterminant une rémunération annuelle de 2 660 735 €, soit une moyenne mensuelle de 221 852€;

Il verse aux débats l'attestation de M. [X] directeur général d'Ixis corporate puis membre du comité exécutif jusqu'en 2007, selon lequel les contrats avec la société Natixis North America étaient destinés à permettre une rémunération aux Etats-Unis sans changement hiérarchique envers lui sur les activités américaines ;

Les précédentes décisions statuant sur la compétence ont jugé que le conseil des prud'hommes de Paris était compétent pour statuer sur toutes les réclamations de M. [G] relativement à sa rémunération française et américaine, sans se prononcer sur le bien-fondé de celles-ci sur lesquelles il convient de statuer au fond ;

M. [G] a signé, même s'il a commencé des activités sur le territoire américain auparavant, deux contrats de travail en langue anglaise les 7 octobre 2002 et 23 décembre 2003 avec Cdc Ixis Capital Markets devenue la société Natixis North America, filiale américaine, avec reporting à MM. [P] puis [D], avec délivrance de visa pour travailler aux Etats-Unis, avec rupture sur simple notification écrite, pour des fonctions à [Localité 2] de cadre dirigeant dans le département d'arbitrage actions puis de responsable du département dérivés actions et arbitrage actions, qui lui a servi des rémunérations avec immatriculation sociale dans ce pays et dont les relations ont été rompues par notification en octobre 2009 à effet du 26 février 2009 ;

Il produit un trombinoscope et un annuaire du comité des directeurs de la société Cdc Ixis Capital Markets North America dans lequel il figure avec ses fonctions pour l'année 2004;

M. [G] n'est pas fondé dans ses demandes tendant à faire prendre en considération dans le licenciement diligenté par la société Natixis en France, les revenus qu'il a perçus de cette société Natixis North America selon les conventions qu'il a acceptées pour des activités effectivement remplies aux Usa;

Les demandes en rappel d'indemnité de licenciement et de salaire fixe sur la période de janvier à juin 2009 au titre du contrat Natixis North America seront rejetées ;

La société Natixis demande le remboursement de la somme de 81 525.89€ trop versée sur l'indemnité de licenciement pour avoir retenu dans la base de calcul le bonus exceptionnel de 300 000 € versé en décembre 2008 déterminant une indemnité réellement due de 421 888.48 € au lieu de celle de 503 414.37 € versée ;

Il apparaît que la société Natixis verse régulièrement des bonus exceptionnels qui du fait de cette régularité doivent être inclus dans le salaire de référence pour le décompte de l'indemnité légale de licenciement;

Il n'y a pas lieu à restitution de ce chef ;

Sur la demande à titre subsidiaire de la somme de 550 000 € de bonus sur l'année 2007 payable au premier trimestre 2008

Par lettre du 24 mai 2007, il a été promis à M. [G] par le directeur des société Natixis et Ixis Cib, dans le cadre du rapprochement de ces sociétés, un bonus pour l'année 2007 définitif minimum de 1 750 000 € brut payable au premier trimestre 2008 selon les modalités en vigueur au sein de Natixis au moment de son versement à condition d'être présent et pas en cours de préavis ; il a perçu un bonus de 925 000 € sur le bulletin de salaire de mars 2008 de Natixis France et reconnaît avoir reçu en tout la somme de1 200 000 € à ce titre de Natixis France ;

La société Natixis oppose que le bonus promis s'entend pour les rémunérations versées par les sociétés française et américaine et que la somme de 1 272 016 $ payée par Natixis North America en février/ mars 2008 (équivalent à 778 354 € selon le salarié) couvre la promesse ;

Il résulte d'échanges de courriels échangés entre [M] [V] de Natixis France et M. [G] qu'elle lui demande le 29 février 2008 s'il est d'accord pour que l'on paye une partie de son bonus à [Localité 2] et qu'il lui a répondu par courriel du 3 mars 2008 qu'il était d'accord ;

Dans ces conditions, M. [G] n'est pas fondé en sa demande subsidiaire de paiement de solde qu'il a reçu selon son accord à [Localité 2] ;

Sur le licenciement

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige fait état :

- de la gestion catastrophique du dossier Axa d'augmentation du capital réservée à ses salariés ayant abouti à une perte de 50 millions d'€ sur une position de 500 millions d'€ avec retard d'information de son supérieur hiérarchique et intervention auprès du client Axa sur la suspension ou la restructuration de l'opération, sans prendre les mesures nécessaires lors de l'effondrement du cours Axa et en ignorant les informations données par Nexgen

- d'insuffisance professionnelle à l'origine de pertes considérables au quatrième trimestre, par la prise de positions trop élevées sans appréciation du risque, avec génération de profits inférieurs aux concurrents, même dans un contexte de marché difficile,

- de manque d'adaptation à la nouvelle conjoncture et à mettre en oeuvre les orientations stratégiques de la Banque qui doivent être contrôlées par sa hiérarchie, sans diminuer les risks, sans fermer l'activité Risk arbitrage à [Localité 3], sans fermer l'activité dérivés en Asie, en entretenant de très mauvaises relations avec le département Risk sans aucun dialogue ;

M. [G] invoque préalablement à l'examen de la lettre de licenciement, le défaut d'application de l'article 26 de la convention collective imposant avant d'engager la procédure de licenciement d'avoir considéré toute solution envisageable, notamment rechercher le moyen de confier au salarié un autre poste lorsque l'insuffisance résulte d'une mauvaise adaptation de l'intéressé à ses fonctions ;

Cependant, s'agissant d'un licenciement pour des fonctions très importantes exercées depuis plusieurs années, M. [G] était adapté à ses fonctions; la société justifie que l'activité Cmd était mineure par rapport à l'activité principale Eda et qu'elle était en période de suppression d'emploi ;

M. [G] invoque également des manquements à la procédure légale équivalant à un licenciement abusif au motif que son activité Cmd n'a fait l'objet d'aucune critique et a été rattachée à M. [P] dès le 4 janvier 2009 et de l'annonce de la nomination à l'activité Eda dès le 21 janvier 2009 de M. [J], nommé responsable de la ligne métiers actions ;

L'activité Cmd a été rattachée le 4 février 2009 à M. [P], après la tenue de l'entretien préalable de M. [G] et la nomination de M. [J] recouvre un domaine beaucoup plus étendu que celui du secteur Eda affecté à M. [G] dont le départ n'a pas été annoncé avant son licenciement et qui a été remplacé au poste Eda par M. [H] le 15 juin 2009 ;

Il n'est pas justifié de ces faits de licenciement sans cause réelle et sérieuse

Sur les griefs de la lettre de licenciement

La pièce 17 de la société se disant 'un extrait d'un courriel du 26 février 2009 de M. [K]' n'est pas probante comme ne portant aucune marque de son origine ;

De même la relation dans le compte-rendu d'entretien préalable fait par M. [C] assistant le salarié, des griefs exposés par M. [R], supérieur hiérarchique de M. [G] ayant conduit l'entretien pour la société, qui sont repris dans la lettre de licenciement, ne font pas preuve comme opposé par la société dans ses écritures, comme étant l'expression de la position de l'employeur ;

Le document émanant de la direction des risques du 30 octobre 2008 fait état de dépassements importants des limites de couvertures de risques par Eda; Eda avait commis d'autres dépassements en mai, juillet et août 2007 ;

Le compte-rendu d'incident de risque opérationnel de l'Esop Axa/Natixis déposé en interne à la direction des risques le 11 mai 2009 fait état du défaut de comité de banque sur cette opération pendant la période d'avril à juillet 2008, de la forte volatilité des cours entre octobre et novembre 2008, de l'effondrement du cours de l'action Axa, de la mise en place par Eda de couvertures fin avril 2008 ultérieurement complétée dans l'esprit de la note produite par le risk management début avril 2008, mais que le suivi des risques et le résultat de l'opération ne semblent pas avoir été réalisés en commun par Eda et Corporate Solution(ou nexgen) avec dégradation du résultat à compter de fin octobre, du refus de la direction Axa de re-striking de l'opération, avec une perte de 48 000 000 € au 16 décembre 2008, imputée à 25 000 000 € à la volatilité, et le reste à 5 autres facteurs, à ce à hauteur des stress-tests réalisés par la direction des risques en avril au cas de crise financière ;

Sur la même opération, une note du 28 novembre 2008 d'Eda, Risk management fait état d'un dépassement des limites de risque et de l'impossibilité de trouver une couverture adaptée au risque avec insuffisance de couverture; celle du 16 décembre 2008 relate que la gestion Eda a un Pnl de - 31.8 M€ alors que Nexgen a - 21M€ ;

Dans un courriel du 3 mars 2009, M. [W], vendeur de Corp chargé de l'opération Axa, fait état d'éléments erronés soutenus par Eda et de couverture insuffisante ; M. [G] produit une attestation de M. [Q], autre salarié de Natixis, contestant la validité de l'avis donné par ce courriel ;

Dans un courriel du 27 mai 2008, M. [G] a contrevenu à une opposition du département des risques à une opération 'one-off';

Le communiqué de presse de Natixis du 26 février 2009 fait état de pertes de 2 622 millions d'€ fin 2008 en relation avec la crise financière, la faillite de Lehman Brothers et la dislocation sans précédent des marchés au quatrième trimestre 2008 dont 1 017 millions d'€ pour les dérivés actions ;

Il résulte des pièces versées aux débats que la situation des marchés, fragile depuis le printemps 2008, a été totalement bouleversée au dernier trimestre 2008 par des faillites bancaires, le retournement et la volatilité de toutes les valeurs ainsi que relaté par la société Natixis elle-même dans la presse et qui a atteint tous les organismes bancaires ;

Il est établi par M. [G], selon les nombreux courriels produits sur la fin de 2008, qu'il a exécuté le recentrage des activités sous le contrôle et selon les directives de M. [R], responsable des Marchés de Capitaux, et qu'il l'a tenu informé de l'évolution de l'opération Axa qui a mis en cause une multiplicité d'intervenants et alors que l'audit interne ne révèle pas de rôle déterminant du service Eda dans la perte supportée dans l'opération attribuée à de multiples causes dont l'effondrement de la valeur de l'action Axa pendant le cours des opérations ;

Les défauts de couverture et les dépassements ponctuels de limites de risque sont en relation avec la volatilité des valeurs ;

M. [Q] a attesté de relations normales avec le management du risque;

Le licenciement est donc sans cause réelle et sérieuse ;

Le salaire des six derniers mois, après imputation pour moitié des prime et bonus de 722 647 € perçus en décembre 2008 sur toute l'année 2008, s'élève à 461 511 € ;

Il sera alloué la somme de 850 000 € de dommages-intérêts appropriée à l'ancienneté du salarié, étant observé qu'il avait des intérêts dans de nombreuses sociétés pendant sa période de chômage assisté ;

Sur les bonus

Il a été régulièrement notifié à M. [G] des bonus complémentaires traduisant la volonté de fidéliser le collaborateur dans un contexte de stabilité payable sur les mois de décembre 2009 et décembre 2010 à condition de présence dans l'entreprise au moment du terme hors période de préavis ;

M. [G] réclame le paiement de 872 203 € à ce titre outre congés payés afférents ;

La société Natixis ayant contribué à la défaillance de la condition suspensive par le licenciement non fondé intervenu, M. [G] a subi une perte de chance de percevoir les bonus venant à échéance en décembre 2009 et décembre 2010 en raison de l'aléa de la poursuite de son contrat de travail jusqu'en décembre 2010 s'il n'avait été licencié; Par ailleurs les bonus distribués ont été minorés en application de nouvelles règles et de la crise financière ; il sera alloué dans ces conditions la somme de 400 000 € de dommages-intérêts à ce titre pour l'entier préjudice ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement et statuant à nouveau :

Condamne la société Natixis à payer à M. [G] les sommes de :

850 000 € de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

400 000 € de dommages-intérêts pour perte de bonus

4000 € pour frais irrépétibles.

Condamne la société Natixis à rembourser les organismes intéressés des indemnités de chômage servies dans la limite de 6 mois.

Rejette les autres demandes.

Condamne la société Natixis aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 12/11548
Date de la décision : 28/05/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°12/11548 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-28;12.11548 ?
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