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15/05/2013 | FRANCE | N°12/05748

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 15 mai 2013, 12/05748


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2



ARRÊT DU 15 MAI 2013



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/05748



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Janvier 2012 -Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE - RG n° 09/01086





APPELANTE



Madame [K] [W]

[Adresse 4]

[Localité 1] FRANCE



représentée par Me Anne LASSALLE,

avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque: 29



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/013132 du 26/03/2012 rectifiée le 09/07/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionne...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRÊT DU 15 MAI 2013

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/05748

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Janvier 2012 -Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE - RG n° 09/01086

APPELANTE

Madame [K] [W]

[Adresse 4]

[Localité 1] FRANCE

représentée par Me Anne LASSALLE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque: 29

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/013132 du 26/03/2012 rectifiée le 09/07/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMÉES

Madame [L] [P] née [Z]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par la SCP Jeanne BAECHLIN, avocats au barreau de PARIS, toque : L0034

assistée de Me Nathalie GUERINEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

SA FILIA MAIF

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par la SELARL DES DEUX PALAIS (Me Patrick BETTAN), avocats au barreau de PARIS, toque : L0078, dépôt de dossier

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Mars 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvie MESLIN, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Fabrice JACOMET, conseiller hors hiérarchie faisant fonction de président

Madame Denise JAFFUEL, conseiller

Madame Sylvie MESLIN, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Monsieur Guillaume LE FORESTIER

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Fabrice JACOMET, conseiller hors hiérarchie faisant fonction de président et par Madame Emilie POMPON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Vu l'appel déclaré le 27 mars 2012 par Mme [K] [W] contre le jugement prononcé le 9 janvier 2012 par le tribunal de grande instance d'AUXERRE dans l'affaire qui l'oppose à Mme [L] [Z] épouse [P], d'une part et à son propre assureur, la société anonyme FILIA MAIF, d'autre part,

Vu le jugement attaqué,

Vu, enregistrées par ordre chronologique,

-le 22 juin 2012, les uniques conclusions de Mme [K] [W], appelante à titre principal,

-le 13 août 2012, les uniques conclusions de Mme [L] [Z] épouse [P], ci-après Mme [L] [P], intimée et appelante sur appel incident,

-le12 novembre 2012, les dernières conclusions de la société anonyme FILIA-MAIF, ci-après la société FILIA-MAIF, intimée,

Vu l'ensemble des pièces du dossier,

SUR CE,

La cour se réfère au jugement entrepris pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions initiales.

Il suffit de rappeler les éléments constants suivants :

1. Données analytiques, factuelles et procédurales, du litige

L'immeuble appartenant à Mme [K] [W] situé au [Adresse 1] s'est partiellement effondré dans la nuit du 13 au 14 juillet 2008 et a entraîné dans sa chute une partie des tuiles et des pierres de rive de pignon de l'immeuble voisin sis [Adresse 2] appartenant à Mme [L] [P].

L'expertise amiable diligentée sous l'égide du Cabinet CUNNINGHAM LINDSEY, a mis en évidence le fait que cet effondrement était consécutif à un manque d'entretien et à un état de ruine de l'immeuble sis [Adresse 1].

Le Cabinet CUNNINGHAM LINDSEY a évalué les dommages subis par Mme [L] [P] à 12 848, 97 euros TTC.

Mme [K] [W] n'ayant pas manifesté l'intention de prendre en charge le coût de reprise des dégradations occasionnées par son immeuble, Mme [L] [P] l'a, par actes extrajudiciaires des 7 et 10 septembre 2009, fait assigner ainsi que son assureur, la société FILIA MAIF, devant le tribunal de grande instance d'AUXERRE, en paiement solidaire de la somme précitée outre les intérêts au taux légal, 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et 1 800 euros au titre de frais irrépétibles, le tout avec le bénéfice de l'exécution provisoire.

Par jugement du 9 janvier 2012, le tribunal de grande instance d'AUXERRE a énoncé sa décision sous la forme du dispositif suivant :

-condamne Mme [W] à payer à Madame [P] la somme de 12 848, 97 euros au titre de la réparation des dommages avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement et capitalisation des intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

-dit que le contrat d'assurance est nul,

-dit en conséquence que la Compagnie FILIA MAIF n'a pas à garantir Madame [W] des condamnations prononcées à son encontre,

-déboute par conséquent Madame [P] de ses demandes dirigées à l'encontre de la compagnie FILIA MAIF,

-rejette les autres demandes,

-ordonne l'exécution provisoire de la présente décision,

-condamne Madame [W] à payer à Madame [P] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamne Mme [W] aux entiers dépens avec autorisation de recouvrement direct au profit de la société civile professionnelle THUAUT-CHAMBAULT-FERRARIS.

Mme [K] [W] a régulièrement déclaré appel de cette décision.

Elle a par actes extrajudiciaires des 19 et 23 juillet 2012 fait signifier cette déclaration d'appel à Mme [L] [P] et à la société FILIA-MAIF.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 20 février 2013 et l'affaire renvoyée à l'audience tenue en formation de juge rapporteur du 5 mars 2013 pour y être plaidée.

A cette audience, les débats ont été ouverts et l'affaire mise en délibéré à la date de ce jour.

Prétentions et Moyens des parties

Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile,

Les conclusions des parties ci-avant visées récapitulent les demandes par l'énoncé des dispositifs suivants :

Mme [L] [P] demande qu'il plaise à la cour de :

-vu l'article 1386 du code civil, et à défaut l'article 1384 alinéa 1er du code civil,

-vu le contrat d 'assurance liant Madame [W] à FILIA MAIF,

-recevoir Madame [L] [P] née [Z] en ses présentes conclusions et l'y déclarer bien fondée,

-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

-condamné Madame [W] à payer à Madame [P] la somme de 12 848, 97 euros au titre de la réparation des dommages avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement et capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

-ordonné l'exécution provisoire,

-condamné Madame [W] à payer à Madame [P] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC,

-condamné Madame [W] aux entiers dépens,

-réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [P] de ses demandes dirigées à l'encontre de la Compagnie FILIA MAIF,

-ce faisant, statuant à nouveau,

-condamner solidairement Madame [W] et son assureur la Compagnie FILIA MAIF à payer à Madame [P] la somme de 12 848, 97 euros au titre de la réparation des dommages subis, avec intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris et capitalisation des intérêts, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

-condamner Madame [W] à payer à Madame [P] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil pour procédure d'appel abusive,

-condamner solidairement Madame [W] et son assureur la Compagnie FILIA MAIF à payer à Madame [P] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC

-condamner solidairement Madame [W] et son assureur la Compagnie FILIA MAIF aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera assuré par la SCP Jeanne BAECHLIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile

Mme [K] [W] prie la cour de :

-vu les dispositions des articles 15 et 16 et 700 du code de procédure civile

-vu les articles 1382 et suivants, 1244-1 du code civil,

-vu les articles L.113-2 et L.113-8 du code des assurances

-infirmer le jugement du tribunal de grande instance d'AUXERRE du 9 janvier 2012,

-constater l'absence de respect du principe du contradictoire

-constater que Madame [W] a effectué des travaux d'entretien de son immeuble et ne s'est pas désintéressé de son bien ni de l'état de ce dernier,

-constater l'absence de preuve du lien de causalité entre les dommages que Madame [P] déclare avoir subis et l'état de l'immeuble de Madame [W],

-constater en tout état de cause l'absence de preuve du lien de causalité entre les travaux engagés par Madame [P] à hauteur de 12 848, 97 euros et les désordres qu'elle impute à l'immeuble de Madame [W]

-en conséquence, rejeter la demande de Madame [P] tendant à voir condamner Madame [W] à lui verser la somme de 12 848, 97 euros avec intérêts au taux légal et capitalisation,

-dire que le contrat liant Madame [W] à la FILIA MAIF n'est pas nul et retenir la garantie de la compagnie d'assurance,

-condamner la société FILIA MAIF à garantir Madame [W] de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,

-à titre subsidiaire,

-accorde les plus larges délais à Madame [W] pour s'acquitter des sommes auxquelles elle pourrait être condamnée,

-dire qu'il n'y a pas lieu à condamnation de Madame [W] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner in solidum Madame [P] et la société FILIA MAIF à verser à Madame [W] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de L'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

La FILIA-MAIF invite la cour à :

-vu l'article 1964 du code civil,

-vu les articles L.113-1, L.113-8, L.113-9 du code des assurances,

-vu les pièces versées aux débats,

-recevoir la FILIA MAIF en ses conclusions, l'en dire bien fondée et en conséquence,

-y faisant droit,

-confirmer dans son intégralité le jugement rendu par le tribunal de grande instance d'AUXERRE le 9 janvier 2012,

-débouter Madame [W] de l'intégralité de ses demandes,

-condamner Madame [W] à verser à la FILIA-MAIF la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

-condamner Madame [W] aux entiers dépens de l'instance.

La cour renvoie à chacune de ces écritures pour un exposé complet des argumentaires de chaque partie dont l'essentiel sera développé lors de l'analyse des prétentions et moyens articulés.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,

Considérations liminaires

1. sur l'objet du litige

Considérant que les parties s'opposent à hauteur d'appel sur le principe de prise en charge des dommages subis par l'immeuble appartenant à Mme [L] [P], consécutivement à la chute de celui appartenant à Mme [K] [W] ;

2. sur l'exception de nullité du jugement entrepris

Considérant que Mme [K] [W], sans arguer expressément de la nullité du jugement attaqué, soutient que la procédure suivie devant le tribunal n'a pas été contradictoire au sens des articles 15 et 16 du code de procédure civile ;

Qu'elle précise ne pas avoir compris à la réception de l'assignation qui lui a été délivrée qu'elle devait obligatoirement constituer avocat et ne pouvait se défendre seule ainsi qu'elle avait pu déjà le faire devant la juridiction administrative ; que pensant être ultérieurement convoquée devant le tribunal et n'ayant eu aucune nouvelle ni aucune information, elle a, de toute bonne foi, pensé que la procédure était abandonnée ; qu'elle n'a au demeurant jamais reçu les pièces et conclusions des parties adverses ; qu'il appartenait à celles-ci et aux premiers juges, de respecter et de faire respecter le principe de la contradiction énoncé aux dispositions susvisées ;

Considérant que Mme [L] [P] et la société FILIA-MAIF objectent que Mme [K] [W] a été régulièrement assignée devant le tribunal ; que n'étant pas placée sous un régime de protection juridique, elle ne saurait utilement arguer d'une mauvaise compréhension des termes de l'assignation ou d'une prétendue malveillance des parties dans la communication des pièces ; que quoi qu'il en soit, elle ne justifie pas avoir effectué une quelconque démarche pour connaître l'état d'avancement de la procédure ou la date de l'audience ;

Vu les articles 15 et 16 du code de procédure civile ;

Considérant que ne contestant pas avoir été régulièrement assignée devant le tribunal de grande instance et avoir ainsi été avisée de l'objet du litige portée devant cette juridiction, Mme [K] [W] qui s'est abstenue de prendre un avocat alors même que son assureur avait pris soin, par lettre du 8 octobre 2009, de lui rappeler la nécessité de le faire pour défendre ses intérêts, ne saurait se prévaloir utilement du non respect du principe de la contradiction et par suite, de la nullité du jugement entrepris ;

Considérant que sur cette constatation et pour ces raisons, l'exception de nullité sera écartée ;

3. sur la structure des motifs de cette décision

Considérant que la structure des motifs de cette décision étant guidée par celle de l'argumentaire des parties et en particulier, de celui développé par Mme [K] [W], le présent arrêt comportera deux points principaux ;

1. sur la responsabilité de Mme [K] [W] dans les dommages allégués

Considérant que l'appelante conteste pouvoir être déclarée responsable des dommages allégués par la partie adverse en soutenant : - n'avoir jamais été avisée par Mme [L] [P] des désordres survenus chez elle consécutivement au sinistre des 13 et 14 juillet 2008 ; - que cette procédure est en réalité guidée par d'autres considérations, à la fois anciennes et de voisinage ; - qu'elle n'a au demeurant jamais été appelée à participer à une expertise concernant le bien de Mme [L] [P] ; - que c'est au mépris des principes de droit relatifs à la causalité applicable en matière de responsabilité civile que la décision attaquée se réfère aux dommages qui auraient été causés par son bien à ses voisins, les époux [B] ; que cet élément n'a au demeurant aucun lien avec le présent litige et ne saurait être pris en considération pour déterminer l'état de son bien ni l'intérêt qu'elle porte à celui-ci ; - qu'elle a régulièrement effectué des travaux pour aménager son immeuble et le réhabiliter en 1998, 2000, 2001 et 2007 ; - que Mme [L] [P] ne démontre pas que les travaux qu'elle a engagés pour 12 848, 97 euros correspondent aux prétendus dégâts qui auraient été occasionnés par son immeuble ; - qu'à supposer que la cour retienne sa responsabilité, elle ne pourrait que constater l'absence de preuve et de lien de causalité entre la facture dont l'intimée demande le remboursement et les dégâts qui auraient été occasionnés par son bien ; - que finalement, ni l'état de ruine de son bien, ni le défaut d'entretien de celui-ci, ni le lien de causalité entre le remboursement de la facture précitée et les dégâts qui auraient été occasionnés par la chute de son immeuble, ne sont sérieusement établis ;

Considérant que Mme [L] [P] objecte : - que Mme [K] [W] prétend avec mauvaise foi ne pas avoir été avisée des opérations d'expertise intervenues alors qu'elle a déclaré le sinistre litigieux et qu'un représentant de son assureur y a participé ; - que ce dernier lui a nécessairement communiqué les termes du rapport d'expertise établi à l'issue de ces opérations ; - que le dommage subi par les époux [B], démontrent la négligence habituelle de l'appelante vis à vis de l'ensemble de son voisinage ; - que Mme [K] [W] affirme également avec une parfaite mauvaise foi avoir veillé à un entretien ininterrompu de l'immeuble lui appartenant alors qu'elle a déclaré plusieurs sinistres, qu'un rapport d'architecte du 12 septembre 2007 faisait déjà état d'un péril imminent et que l'expertise portant sur les dommages litigieux en présence de son assureur, a conclu à l'état de délabrement de son immeuble ; - que le montant de la facture dont elle se prévaut et les postes de réparation qui y sont mentionnés ont été validés par les architectes de leurs assureurs respectifs ; - que dans ces conditions, la responsabilité de Mme [K] [W] ne fait aucun doute ;

Considérant que la société FILIA-MAIF soutient également que Mme [K] [W], au demeurant architecte de profession, n'ignorait pas l'état dégradé de son immeuble compte tenu de l'absence d'entretien de celui-ci depuis plusieurs années à telle enseigne qu'un rapport d'expertise judiciaire du 12 septembre 2007 établi dans le cadre d'une procédure menée devant le tribunal administratif, a conclut à l'existence d'un état de péril imminent ;

Vu l'article 1386 du code civil, ensemble les articles 9 du code de procédure civile et 1315 et 1353 du code civil ;

Considérant qu'il ressort de ces dispositions que le propriétaire d'un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsque celle-ci est arrivée par suite du défaut d'entretien ou par le vice de construction ; qu'il appartient encore à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver, chaque partie devant prouver conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention ; qu'enfin, lorsque la preuve demandée ne peut être rapportée directement, elle est abandonnée aux lumières et à la prudence du juge qui ne doit admettre que des présomptions graves, précises et concordantes et dans les cas seulement où la loi admet les preuves testimoniales ;

Considérant qu'en l'espèce, c'est par une exacte appréciation des faits de la cause et des règles de droit applicables que les premiers juges ont, par des motifs complets que la cour adopte, déclaré Mme [K] [W] responsable des dégâts supportés par Mme [L] [P] d'autant qu'en sa qualité de professionnel du bâtiment elle connaissait les risques inhérents à un état de ruine et les conséquences que cet état était susceptible d'entraîner pour les propriétés voisines ; qu'il peut être utilement rappelé au regard des circonstances précises de la présente espèce que dans son rapport du 12 septembre 2007, l'expert [G] [U] indiquait : « le pignon en séparation des deux bâtiments marque une forte inclinaison et se maintient à ce jour grâce au faîtage calciné en simple appui sur le mur de Droite./ Autant dire qu'il menace de s'effondrer à tout moment avec la plus forte probabilité de déverser vers la voie publique./Celui-ci doit être abattu sans délai. » et que Mme [K] [W] ne justifie d'aucune mesure prise devant ce diagnostic alarmant posé près d'un an avant le sinistre litigieux ;

2. sur la garantie de la société FILIA MAIF et les autres demandes

2.1. en ce qui concerne la garantie de la société FILIA MAIF

Considérant que Mme [K] [W] critique les premiers juges pour lui avoir imputé une réticence intentionnelle entraînant la nullité du contrat d'assurance qu'elle a souscrit alors que la société FILIA MAIF était parfaitement informée de l'état réel de son bien puisqu'elle avait été informée de la survenance d'un autre sinistre quelques mois auparavant et qu'elle avait, compte tenu de cet état, précisément refusé une demande de travaux en suite de la tempête du 26 décembre 1999 ;

Qu'elle précise : - que la FILIA MAIF a ainsi décidé en toute connaissance de cause à la couvrir de sa garantie et à percevoir chaque année les primes correspondantes ; - que par ailleurs, n'ayant jamais été informée par Mme [L] [P] de la survenance de désordres chez elle consécutivement à la chute du pignon de son immeuble elle n'a, en toute bonne foi, pas été en mesure d'effectuer une quelconque déclaration de sinistre ; - qu'aucune réticence ni faute dolosive susceptible de fonder la nullité du contrat d'assurance, ne saurait lui être reprochée ;

Considérant que Mme [L] [P] fait également reproche aux premiers juges d'avoir écarté la garantie de la société FILIA MAIF en observant que cette dernière soutient vainement avoir été victime de man'uvres dolosives de la part de son assurée ;

Qu'elle observe : - que la société FILIA MAIF admet elle-même que son assurée a fait l'objet d'une mesure de radiation au 31 décembre 2008 soit postérieurement au sinistre litigieux ; - qu'il appartenait à cet assureur de s'informer correctement sur l'état du bien assuré et le cas échéant, d'effectuer toutes diligences pour contraindre son assurée à prendre les mesures nécessitées par l'état de son bien ou dénoncer son engagement ; - qu'en l'espèce, la société FILIA MAIF ne saurait se prévaloir de sa propre carence pour dénier sa garantie ; - que quoi qu'il en soit, la preuve de la mauvaise foi incombe à l'assureur qui doit établir la volonté de son assuré de le tromper ; - qu'en l'espèce, cette preuve n'est pas rapportée ;

Considérant que la société FILIA MAIF réplique : - qu'il est manifeste que Mme [K] [W], architecte de profession, ne pouvait ignorer l'état dégradé de son bien compte tenu de l'absence d'entretien depuis de nombreuses années ; - qu'elle a préféré s'abstenir d'entretenir celui-ci et de procéder aux travaux conservatoires ou réparatoires permettant d'éviter tout effondrement ; - qu'elle a encore omis, au mépris de l'article 5.3 du contrat souscrit, de l'aviser des termes du rapport d'expertise de l'expert [G] [U] décrivant un état de péril ; - que cette faute s'analyse en une faute dolosive exclusive de l'application de la garantie responsabilité civile souscrite puisque, par ce défaut d'information, l'assurée a changé l'objet du risque et a diminué l'opinion que son assureur pouvait en avoir ; - que l'expert intervenu en 1999 n'a fait que constater des désordres liés à un défaut d'entretien et auquel il a été remédié et non, les dégâts consécutifs de la tempête du 26 décembre 1999 ; - que quoi qu'il en soit, en s'abstenant de réaliser suite au rapport de M. [G] [U] les travaux conservatoires ou réparateurs exigés par l'état de péril de son bien, Mme [K] [W], qui ne pouvait ignorer le risque important d'effondrement de son bien, étant architecte de profession, a commis une faute dolosive ayant eu pour effet de retirer au contrat d'assurance tout caractère aléatoire ; - que par suite, elle se trouve fondée à refuser sa garantie en application de l'article L.113-1 du code des assurances ;

Vu les articles 1134 du code civil, L.113-2 3° et L.113-8 du code des assurances, ensemble les articles 9 du code de procédure civile et 1315 et 1353 du code civil ;

Considérant qu'il ressort de ces dispositions, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que l'assuré est tenu de déclarer, en cours de contrat, les circonstances nouvelles qui ont pour conséquence, soit d'aggraver les risques, soit d'en créer de nouveaux et rendent de ce fait, inexactes ou caduques, les réponses faites à l'assureur notamment dans le formulaire de déclaration du risque établi lors de la souscription du contrat ; qu'enfin, indépendamment des causes ordinaires de nullité, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre ;

Considérant qu'en l'espèce, s'il est exact que Mme [L] [P] ne justifie pas précisément avoir avisé Mme [K] [W] des conséquences du sinistre litigieux sur son immeuble, la présence avérée et non contestée de l'expert de la MAIF à la réunion d'expertise contradictoire du 20 janvier 2008 faisant suite à ce sinistre établit que cet assureur a bien été informé de cet événement susceptible d'engager sa garantie ;

Qu'il n'en demeure pas moins que Mme [K] [W] n'apparaît pas en mesure de justifier utilement et sérieusement avoir informé son assureur des conclusions de l'expert [G] [U] faisant état en septembre 2007 d'une aggravation du risque, alors même qu'elle prétend avoir fait réaliser les travaux réparatoires exigés par celui-ci courant novembre 2007 ; que la réalisation de ces travaux à cette date n'est par ailleurs nullement établie d'autant que la copie du fax qui aurait été transmis le 27 novembre 2007 à la Mairie d'[Localité 3] pour en justifier est imprécis quant à la nature des travaux réalisés et qu'il porte mention d'une date d'émission postérieure (10 janvier 2013) ;

Considérant qu'il s'infère de ces circonstances que l'assureur justifie de l'existence d'une aggravation du risque antérieurement au sinistre mais que l'assuré ne peut rapporter la preuve de ce qu'il en a informé en temps utile son assureur ;

Que sur ces constatations et pour ces raisons, le jugement entrepris sera pleinement confirmé en ce qu'il a écarté la garantie de la société FILIA MAIF ;

2.2 en ce qui concerne les autres demandes

Considérant que Mme [L] [P] s'estime fondée à obtenir des dommages et intérêts pour procédure d'appel abusive ;

Vu l'article 1382 du code civil ;

Considérant qu'en l'absence de faute intentionnelle ou faute lourde établie, susceptible de faire dégénérer le droit d'appel en abus, la cour ne fera pas droit à cette demande ;

Vu les articles 696 et 699 du code de procédure civile ;

Considérant que Mme [K] [W] qui succombe en son recours sera condamnée aux entiers dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions légales et réglementaires applicables en matière d'aide juridictionnelle ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que l'équité commande de condamner Mme [K] [W] à verser à Mme [L] [P] 1 500 euros à titre de frais irrépétibles d'appel ;

Que les mêmes exigences d'équité n'impose pas de faire droit à la demande de même nature formée par la société FILIA MAIF ;

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y AJOUTANT

CONDAMNE Mme [K] [W] aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions légales et réglementaires applicables en matière d'aide juridictionnelle,

CONDAMNE Mme [K] [W] à payer à Mme [L] [Z] épouse [P] mille cinq cents euros (1 500 euros) à titre de frais irrépétibles d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 12/05748
Date de la décision : 15/05/2013

Références :

Cour d'appel de Paris G2, arrêt n°12/05748 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-15;12.05748 ?
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