RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRÊT DU 14 Mai 2013
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/01585
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Janvier 2011 par Conseil de Prud'hommes de MELUN RG n° 09/00307
APPELANTE
Madame [O] [Q]
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Eric TROUVE, avocat au barreau de MELUN
INTIMEE
SA HEPTA
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par Me Edith SOULIS, avocat au barreau de MEAUX substitué par Me Géraldine SAT-DUPARAY, avocat au barreau de MEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bernadette LE GARS, Présidente, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Bernadette LE GARS, Présidente
Monsieur Guy POILÂNE, Conseiller
Madame Caroline PARANT, Conseillère
Greffier : Mademoiselle Claire CHESNEAU, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Marie-Bernadette LE GARS, Présidente et par Mademoiselle Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour est saisie de l'appel interjeté par Mme [O] [Q] du jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes de Longjumeau le 3 janvier 2011 qui, après avoir jugé que sa prise d'acte de rupture de son contrat de travail devait être prononcée aux torts de l'employeur, a condamné celui-ci, la SA HEPTA, à payer à son ancienne salariée les sommes de :
- 1.800 € à titre de dommages intérêts pour le préjudice subi,
- 1.906,78 € au titre de l'indemnité de préavis, et 190,67 € pour les congés payés afférents,
- 700 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
ordonné la remise des documents sociaux conformes en déboutant Mme [O] [Q] du surplus de ses demandes.
°°°
FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Aux termes d'un CDI à temps partiel du 19 août 2003 Mme [O] [Q] a été embauchée par la SA HEPTA en qualité d'employée libre service pour une durée de travail hebdomadaire de 30 h moyennant un salaire de 934,76 € par mois.
Elle a bénéficié de plusieurs arrêts de travail de 2004 à 2006, a été en congé maternité puis en congé parental du 21 avril 2006 à novembre 2007.
Le 2 janvier 2008 un avenant au contrat de travail a fixé la durée hebdomadaire de son travail à 25 h (à la demande de la salariée) moyennant un salaire mensuel de 914,39 €.
Le 31 mai 2008 Mme [O] [Q] s'est plainte de faits de harcèlement caractérisés, selon elle, par un avertissement lui faisant grief d'erreurs de caisse.
Elle a ensuite saisi la médecine du travail pour lui demander de se prononcer sur son aptitude à l'exercice de ses fonctions et le médecin , le 20 août 2008, a conclu à son inaptitude définitive à la reprise de son poste, en excluant toute seconde visite au visa de l'article R. 4624.31 du code du travail relatif au 'danger immédiat'. Le médecin ajoutait que 'l'état de santé de la salariée ne permettait pas de proposer un reclassement dans l'entreprise'.
Du 25 août 2008 au 25 septembre suivant Mme [O] [Q] était en arrêt de maladie.
Le 21 novembre 2008 Mme [O] [Q] demandait à son employeur d'organiser une nouvelle visite médicale s'il estimait ne pas être tenu par les conclusions du médecin du travail.
Le 3 février 2009 Mme [O] [Q] prenait acte de la rupture de son contrat de travail aux motifs que l'employeur n'avait pas déféré à cette demande et n'avait pas, non plus, repris le versement de ses salaires, ce qui, selon la salariée constituait des manquements.
Le 20 février 2009 l'employeur procédait au licenciement de Mme [O] [Q] pour inaptitude.
Le 6 avril 2009 Mme [O] [Q] saisissait le Conseil des Prud'hommes, contexte dans lequel est intervenu le jugement dont appel qui a retenu dans sa motivation que l'employeur n'avait procédé à aucune tentative de reclassement (ce qui n'était pas soulevé par la salariée), ce qui justifiait que la prise d'acte soit analysée en licenciement sans cause réelle et sérieuse .
Mme [O] [Q] poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'il a limité à 1.800 € l'indemnisation de son préjudice . Elle requiert une indemnisation de 11.440,68 € dans ce contexte.
Elle sollicite la confirmation du jugement pour le surplus et réclame 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que son employeur ne l'a pas, fautivement, fait convoquer à une seconde visite de reprise ce qui constitue un manquement à son obligation de sécurité.
Elle ajoute qu'il n'a pas réglé ses salaires après le 23 septembre 2008 et a multiplié envers elle des légèretés coupables et vexantes.
La SA HEPTA conclut à l'infirmation du jugement en demandant de constater que le licenciement est intervenu pour inaptitude.
Il requiert, en conséquence, que Mme [O] [Q] soit déboutée de l'intégralité de ses demandes et condamnée à lui restituer les sommes versées en vertu du jugement.
A titre subsidiaire, la SA HEPTA demande que la réparation du préjudice de Mme [O] [Q] soit arrêtée à 5.720,34 € correspondant à 6 mois de salaire.
Elle réclame 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE,
Considérant que la prise d'acte de rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail ;
Que dans l'hypothèse où la prise d'acte est suivie d'une procédure de licenciement, ce qui est le cas d'espèce, il convient de se prononcer sur celui-ci seulement si les faits dénoncés par le salarié se sont avérés non fondés ;
Considérant que dans sa lettre de prise d'acte, qui ne fixe pas les limites du litige, Mme [O] [Q] reprochait à son employeur de n'avoir pas déféré à sa demande de 2ème visite médicale et de n'avoir pas repris le versement de ses salaires ; que devant la cour elle ajoute que l'employeur a multiplié à son égard des légèretés blâmables et vexantes ;
Mais considérant que l'avis du médecin du travail vise expressément la procédure de danger immédiat et donc l'absence de 2ème visite ; que le grief formé dans ce contexte par Mme [O] [Q] est donc non pertinent ;
Que, par ailleurs, la prise d'acte de rupture mettant immédiatement fin à la relation de travail l'employeur n'était plus tenu à verser des salaires à sa salariée ;
Qu'enfin Mme [O] [Q] ne justifie par aucun élément avoir fait l'objet de faits de harcèlement au travail, un simple avertissement pour des erreurs de caisse, non contestées au demeurant, ne pouvant s'analyser comme tel et étant de surcroît isolé ;
Qu'il s'ensuit que c'est à tort que les premiers juges ont jugé que la rupture du contrat de travail produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, lequel est intervenu régulièrement pour inaptitude totale dans le contexte du 'danger immédiat' expressément visé ;
Considérant que le jugement doit donc être réformé et Mme [O] [Q] déboutée de toutes ses demandes contre son ancien employeur avec les conséquences automatiques de restitution qui s'en suivent ;
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application au profit de l'une ou l'autre partie des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS,
Réforme le jugement dont appel en ce qu'il a jugé que la rupture du contrat de travail par Mme [O] [Q] produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et juge qu'il s'agit d'une démission ;
Juge régulier le licenciement pour inaptitude initié par l'employeur postérieurement avec les conséquences automatiques de restitution qui s'en suivent ;
Dit n'y avoir lieu de faire application au profit de l'une ou l'autre partie des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [O] [Q] aux éventuels dépens.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE