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25/04/2013 | FRANCE | N°09/01505

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 25 avril 2013, 09/01505


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 25 Avril 2013

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/01505



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Décembre 2008 par le conseil de prud'hommes de EVRY section Activités Diverses RG n° 07/00882







APPELANTE

Madame [P] [Q]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparante en personne

assistée de Me Max

ime TONDI, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 145







INTIMEE

Association M.V.E. (Mouvement pour les Villages d'Enfants)

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Florence BONA, a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 25 Avril 2013

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/01505

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Décembre 2008 par le conseil de prud'hommes de EVRY section Activités Diverses RG n° 07/00882

APPELANTE

Madame [P] [Q]

[Adresse 2]

[Localité 1]

comparante en personne

assistée de Me Maxime TONDI, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 145

INTIMEE

Association M.V.E. (Mouvement pour les Villages d'Enfants)

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Florence BONA, avocat au barreau de PARIS, toque : D1099

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 31 Janvier 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Marc DAUGE, Président

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

Monsieur Rémy LE DONGE, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Laëtitia CAPARROS, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Marc DAUGE, Président, et par Melle Laëtitia CAPARROS, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [Q] a été engagée par l'Association Mouvement pour les Villages d'Enfants, devenue la Fondation MVE le 11 décembre 2002 en qualité de "candidate aux fonctions de moniteur éducateur" à temps plein dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, classée à l'indice 292 groupe VI, 2ème échelon, pour un salaire mensuel brut de 1396,18 €.

La Fondation qui compte plus de onze salariés est soumise à la Convention collective des Etablissements privés d'hospitalisation, de soins, de cures et de gardes à but non lucratif.

Mme [Q] a fait l'objet le 19 avril 2007 d'une convocation à un entretien préalable à licenciement assortie d'une mise à pied conservatoire, qui faute de lui avoir été adressée à la bonne adresse, s'est finalement tenu le 15 juin 2007 avant d'être licenciée par lettre du 10 juillet 2007 pour faute grave pour:

- avoir adopté une attitude conflictuelle à l'origine d'une altercation avec une adolescente

- avoir adopté un ton provocateur et des propos dénués de distanciation et du professionnalisme requis pour gérer un conflit avec un adolescent

-avoir proféré des insultes particulièrement déplacées

- être revenue à la confrontation en dépit de l'intervention d'un collègue éducateur

- avoir craché devant les pieds de l'adolescente.

Le 24 septembre 2007, M. [Q] saisissait le conseil de prud'hommes d'EVRY aux fins de faire juger que le licenciement intervenu le 10 juillet 2007 était dénué de cause réelle et sérieuse et faire condamner la FONDATION MVE à lui payer

- 40704,72 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 6412,94€ à titre de rappel de salaire pour les dimanches et jours fériés

-14531,12 € à titre de rappel de salaire pour les nuits travaillées

- 2501,45 € au titre des congés payés sur rappel de salaire.

- 678,41 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 3392,06 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 339,20 € correspondant aux congés payés afférents.

- 8000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral

- 5000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

La cour est saisie d'un appel formé par Madame [Q] contre la décision du Conseil de prud'hommes d'EVRY en date du 04 décembre 2008 qui l'a déboutée de toutes ses demandes

Vu les conclusions du 31 janvier 2013 au soutien de ses observations orales au terme desquelles Mme [Q] conclut à la réformation du jugement entrepris et à la condamnation de la Fondation MVE à lui verser :

- 40704,72 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 23774,24 € à titre de rappel de salaire sur la période du mois de décembre 2007 au mois de juillet 2007 pour les dimanches et jours fériés travaillés et pour les nuits travaillées

- 2377,42 € au titre des congés payés sur rappel de salaire.

- 678,41 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 3392,06 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 339,20 € correspondant aux congés payés afférents.

- 8000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral

- 5000 €sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile

Vu les conclusions du 31 janvier 2013 au soutien des observations orales par lesquelles la Fondation MVE conclut à titre principal à la confirmation du jugement déféré, au rejet des prétentions de l'appelante et à titre subsidiaire à la réduction de ses prétentions à un maximum de six mois de salaire ainsi qu'à sa condamnation à verser 1500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile , renvoie aux conclusions déposées et soutenues l'audience ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

Pour infirmation, Mme [Q] réfute les accusations portées à son encontre, constatant qu'elles ne résultent que de propos rapportés comme étant ceux de jeunes dont un est coutumier d'actes de violence à l'égard de l'encadrement, que cette altercation n'a été qu'un prétexte pour justifier son licenciement manifestement abusif.

Pour confirmation, la Fondation MVE qu'en dépit de son expérience, des formations et des échanges auxquels elle participait, Mme [Q] pouvait susciter des rapports conflictuels dans ses rapports avec les adolescents, attitudes à l'origine de rapports dès 2003 et en avril 2007 avant que ne surviennent la violente altercation avec une adolescente, assortie d'agressivité et de grossièreté en contradiction avec les principes d'encadrement de la Fondation ou éducatifs de base.

Il doit être précisé qu'à l'occasion de l'altercation entre l'adolescente et Mme [Q], cette dernière a été victime d'un accident de travail à la suite de coups portés par l'adolescente qui conduiront à sa condamnation par la juridiction des mineurs à une admonestation.

Mme [Q] ayant bénéficié d'un arrêt de travail à raison de cet accident de travail, seule une faute grave était de nature à autoriser son licenciement pendant la suspension de son contrat de travail.

Or, il est apparu au cours des débats à l'audience, qu'en dépit d'une certaine expérience dans l'action éducative, Mme [Q] avait été engagée en 2002, en qualité de candidate aux fonctions de moniteur éducateur, c'est à dire sans qualification spécifique initiale pour assurer des fonctions d'encadrement, a fortiori d'adolescents difficiles, qu'elle demeurera employée sous cette qualification jusqu'à son licenciement en 2007, n'ayant reçu en tout et pour tout, qu'une formation dite " spécifique" intitulée "de l'enfance à l'adolescence : crises et rupture de liens" outre sa participation aux réunions d'analyse des pratiques pilotées par le psychologue du service.

Alors que l'employeur n'hésite pas à rappeler une forme de décalage culturel signalé dès 2003, plaçant sa salariée en difficulté de positionnement dans ses rapports d'autorité avec les adolescents difficiles, force est de constater que la seule formation offerte et la participation aux réunions précitées, même à supposer que leur contenu était accessible à Mme [Q], étaient nécessairement insuffisantes à mettre la salariée en capacité d'affronter un public notoirement difficile.

Dans ces conditions, les faits imputés à Mme [Q] relèvent non de la faute grave mais de l'insuffisance professionnelle et ne peuvent justifier une mesure de licenciement pendant la suspension de travail consécutive à un accident de travail, que dans la mesure où elle résulterait d'une attitude délibérée ou d'une intention de nuire.

En conséquence, le licenciement de Mme [Q] est dénué de caractère réel et sérieux et la décision des premiers juges sera réformée sur ce point.

Au regard de l'âge de la salariée (56 ans) au moment de son licenciement, de sa difficulté à retrouver un emploi, de son ancienneté dans la Fondation (4 ans et 8 mois), de l'importance de la Fondation, la Cour dispose d'éléments suffisants pour évaluer les dommages et intérêts dûs à ce titre à 12216,57 € outre les indemnités de rupture et de préavis auxquelles il convient de faire droit dans les termes du dispositif, infirmant la décision déférée sur ce point.

Sur le préjudice moral

Pour infirmation, Mme [Q] recherche la responsabilité de son employeur au motif qu'alors qu'elle fut victime d'une agression de la part d'une adolescente, elle n'a bénéficié d'aucun soutien de la part de son encadrement qui n'a pris aucune mesure d'assistance à son égard, étant obligée de solliciter de son chef de service qu'il l'accompagne à l'hôpital.

La Cour ne peut que constater que l'employeur articulant ses développements sur le caractère fautif de sa salariée, ne lui oppose aucun argument concernant le préjudice moral dont elle fait état.

Il patent, quelles qu'aient été les limites du comportement de la salariée, que la Fondation employeur s'est manifestement plus attachée à recueillir, notamment par l'intermédiaire du psychologue de l'établissement, les éléments pouvant être retenus contre sa salariée, qu'à lui porter l'assistance qui doit être portée à tout agent en contact avec un public difficile qui subit une agression.

Les faits ayant émaillé la procédure de licenciement, en particulier l'envoi de la première convocation à une adresse erronée, la remise en main propre de la mise à pied non datée et l'interdiction consécutive de communiquer avec ses collègues, n'ont fait qu'accentuer le sentiment de mépris et de rejet vécu par la salariée.

Le préjudice moral distinct qui en résulte, sera justement évalué à la somme de 3 000 €.

Sur les rappels de salaire

Pour infirmation, Mme [Q] soutient qu'elle a été rémunérée pour les dimanches et jours fériés comme pour les nuits travaillées sur la base d'un taux horaire erroné, que l'audit qu'elle a confié à un expert comptable, révèle le manque à gagner dont elle réclame le paiement.

Pour confirmation, la Fondation expose qu'elle n'a fait qu'appliquer la majoration de la valeur du point applicable à ces heures et que le raisonnement de la salariée est fondé à tort sur une majoration du taux horaire.

Il ressort des pièces versées au débat, en particulier des bulletins de salaire de Mme [Q] que l'employeur a strictement majoré la valeur du point conventionnel pour les dimanches et jours fériés, de sorte que les prétentions de l'appelante ne pourront être accueillies.

S'agissant des heures de nuit, dans les fonctions de veille, il apparaît que les heures ont été régulièrement décomptées dans le rapport conventionnel d'une heure pour trois heures passées pour les permanences nocturnes comportant des temps d'inaction.

La décision attaquée sera par conséquent confirmée et Mme [Q] déboutée de ses prétentions.

Sur la capitalisation des intérêts

En application de l'article 1154 du code civil, la capitalisation des intérêts est de droit dès lors qu'elle est régulièrement demandée ; elle ne peut être ordonnée qu'à compter de la demande qui en est faite et ne peut rétroagir avant cette demande ; elle peut être demandée pour les intérêts antérieurs dès lors qu'une année entière s'est déjà écoulée depuis la demande, à venir dès lors qu'une année entière se sera écoulée ; il doit être fait droit à cette demande ;

Sur l'article 700 du Code de procédure civile

L'équité et la situation des parties commande d'allouer 2500 € à Mme [Q] sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Sur le remboursement des indemnités ASSEDICS

En vertu de l'article L 1235-4 du code du travail dont les conditions sont réunies en l'espèce, le remboursement des indemnités de chômage par la Fondation MVE, employeur fautif, est de droit ; que ce remboursement sera ordonné.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,

Déclare recevable l'appel formé par Mme [Q] ,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [P] [Q] de ses demandes de rappel de salaire

Le RÉFORME pour le surplus

Et statuant à nouveau

DÉCLARE le licenciement de Mme [P] [Q] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la Fondation MVE à payer à Mme [P] [Q] avec intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation,

. 12216,57 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

. 3000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral

.3392,06 € à titre d'indemnité compensatrice du délai-congé

. 339,20 € à titre d'incidence sur les congés payés ,

. 678,41 € à titre d'indemnité de licenciement

DIT que les intérêts sur les indemnités de nature salariale porteront intérêt à compter de la réception par la Fondation de sa convocation devant le bureau de conciliation, et à compter du présent arrêt pour les dommages et intérêts

. 2500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE la Fondation MVE de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE Mme [Q] du surplus de ses demandes,

ORDONNE, dans les limites de l'article L 122-14-4 alinéa 2, ancien devenu L 1235-4 du code du travail, le remboursement par la Fondation MVE à l'organisme social concerné des indemnités de chômage payées à Mme [Q]

CONDAMNE la Fondation MVE aux entiers dépens de première instance et d'appel,

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 09/01505
Date de la décision : 25/04/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°09/01505 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-04-25;09.01505 ?
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