Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRET DU 18 AVRIL 2013
(n°185, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/21347
Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Octobre 2011 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/17881
APPELANTE
Madame [V] [Z], sous curatelle, assistée par Madame [F] [T], demeurant [Adresse 5], désignée par jugement rendu par le juge des tutelles de Saint Maur des Fossés en date du 23 novembre 2010
demeurant [Adresse 3] - [Localité 1] [Localité 1]
représentée par Maître Bruno NUT, avocat au barreau de PARIS, toque : C0351
assistée de la SELARLU HADAD TAIEB en la personne de Maître Léa HADAD-TAIEB, avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC 87
INTIMES
Monsieur [Y] [W] [A]
demeurant [Adresse 1]
Monsieur [P] [N] [A]
demeurant [Adresse 4]
représentés par Maître Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334
assistés de Maître Grégory CHERQUI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0400
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 mars 2013, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christine BARBEROT, conseillère.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Chantal SARDA, présidente
Madame Christine BARBEROT, conseillère
Monsieur Fabrice VERT, conseiller
Greffier lors des débats : Madame [C] [B]
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Madame Chantal SARDA, présidente, et par Madame Fatima BA, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Par acte sous seing privé du 4 juin 2009, Mme [V] [Z], née le [Date naissance 1] 1955, a vendu à M. [Y] [A] et M. [P] [A] (les consorts [A]) son appartement et une cave constituant les lots n° 517 et 141 de l'état de division d'un immeuble sis [Adresse 2], au prix de 83 000 €, les acquéreurs ayant renoncé à la condition suspensives de prêt et la vente devant être réitérée par acte authentique au plus tard le 15 septembre 2009. Le 16 juin 2009, Mme [Z] a écrit à son notaire qu'elle n'entendait pas donner suite au 'compromis', le prix étant 'très insuffisant'. Le 23 octobre 2009, les consorts [A] ont assigné Mme [Z] en régularisation de la vente. Par jugement du 23 novembre 2010, le juge des tutelles a placé Mme [Z] sous curatelle simple, Mme [T] étant désignée en qualité de curatrice.
C'est dans ces conditions que, par jugement du 25 octobre 2011, le Tribunal de grande instance de Paris a :
- déclaré parfaite la vente du 4 juin 2009,
- dit que faute par les parties de signer l'acte de vente, le jugement vaudrait vente au profit des consorts [A] aux conditions de l'acte du 4 juin 2009,
- ordonné la publication du jugement au bureau des hypothèques compétent,
- condamné Mme [Z] à payer aux consorts [A] la somme de 4 150 € au titre de la clause pénale contractuelle,
- condamné Mme [Z] à payer aux consorts [A] la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné Mme [Z] aux dépens.
Par dernières conclusions du 13 septembre 2012, Mme [Z], appelante, demande à la Cour de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- et statuant à nouveau, constater que son consentement était altéré à la date de l'acte litigieux du 4 juin 2009, selon l'article 414-1 du Code civil,
- et y ajoutant, constater que cet état de fragilité psychologique était antérieur à la signature de cet acte,
- constater qu'il ne pouvait être ignoré par les consorts [A],
- constater que la signature de cet acte a entraîné pour elle un préjudice financier considérable,
- en conséquence, sur le fondement des articles 414-1 et 464 du Code civil, dire nul le 'compromis' signé le 4 juin 2009 entre les parties,
- en conséquence, ordonner la mainlevée de la publication de l'assignation du 23 octobre 2009 à la conservation des hypothèques,
- dire qu'il n'y a pas lieu au paiement d'une clause pénale au profit des consorts [A],
- de façon générale, les débouter de l'ensemble de leurs demandes aux fins de voir procéder à l'exécution forcée de la vente,
- reconventionnellement, l'accueillir en sa demande,
- les condamner solidairement à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
Par dernières conclusions en date du 27 février 2013, les consorts [A] prient la Cour de :
- vu les articles 1583, 1178, 414-1 et 464 du Code civil,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- débouter Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,
- la condamner à leur payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
SUR CE, LA COUR
Considérant que les moyens développés par Mme [Z] au soutien de son appel ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs exacts que la Cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ;
Considérant qu'à ces justes motifs, il sera ajouté, sur l'existence d'un trouble mental qui aurait affecté l'esprit de Mme [Z] le 4 juin 2009, que Mme [O] [R], psychiatre inscrit sur la liste établie par le procureur de la République en vue de l'ouverture d'une mesure de protection et requis à cette fin par l'intéressée elle-même, a relevé le 12 mars 2010 que : 'On ne peut qu'être étonné de la discordance qui existe entre ses capacités intellectuelles qui lui permettent d'exercer un emploi au secrétariat de la SAGEM, et sa panique devant l'organisation de sa vie lorsque celle-ci doit intégrer des démarches de travaux, de succession, de papiers administratifs dès que ceux-ci sont relativement complexes' ; que ce médecin spécialiste a conclu le 26 mars 2010 à la nécessité d'une mesure de curatelle en raison de l'importance de la névrose d'angoisse affectant Mme [Z] et que c'est au vu de ce certificat que le juge des tutelles a placé cette dernière, sur sa requête, sous curatelle simple par jugement du 23 novembre 2010 ;
Considérant qu'il ne peut être déduit de ce certificat médical que la névrose dont Mme [Z] est affectée aurait obnubilé son esprit lorsqu'elle a signé l'acte de vente du 4 juin 2009 ; qu'au contraire, selon la propre relation des faits de l'appelante, à la suite du décès de sa mère, elle a décidé d'habiter dans l'appartement de la défunte et de vendre son studio en évitant 'de passer par des agences' ; que ces décisions témoignent de ses capacités intellectuelles, soulignées par le docteur [R], qui lui permettent, d'ailleurs, d'exercer son emploi ; que c'est pour parvenir à cette fin que Mme [Z] s'est ouverte de son projet aux commerçants du quartier et a trouvé des acquéreurs par ce truchement, de sorte que l'appelante ne peut sérieusement prétendre que la signature de l'acte de vente à son domicile procéderait d'un abus, étant observé qu'il s'agit d'une vente entre particuliers, les consorts [A] exerçant respectivement la profession de cadre d'entreprise en recherche et développement et de consultant fiscal ;
Considérant que Mme [Z], qui ne fournit aucun preuve médicale de l'altération de ses facultés personnelles antérieure au 4 juin 2009, n'établit pas que son inaptitude à défendre ses intérêts était notoire à cette date, les attestations de ses collègues des 24 et 28 juillet 2009 n'étant pas probantes en raison de leur caractère stéréotypé ; qu'aucun indice ne prouve que les consorts [A] pouvaient avoir connaissance de l'état de faiblesse prétendu de leur cocontractante qui avait pris la décision de vendre sans intermédiaire ; qu'à cet égard, l'attestation du 27 décembre 2010 de Mme [U] [G], épouse [E], cousine de l'intéressée, n'est pas pertinente, le docteur [R] ayant noté que Mme [Z] avait repris contact récemment avec elle afin qu'elle l'aide dans ses difficultés, de sorte qu'elle ne peut utilement témoigner sur la connaissance par les cocontractants de l'état de faiblesse prétendu de Mme [Z] au moment de l'acte ;
Considérant que rien ne permettant d'affirmer que le prix de vente convenu soit très inférieur à la valeur réelle du bien, les attestations des agents immobiliers versées aux débats n'étant pas suffisamment circonstanciées sur l'état du studio, son montant ne révèle à lui seul ni l'insanité d'esprit de la venderesse ni la connaissance de cet état par les acquéreurs ;
Considérant qu'en conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a dit la vente parfaite et ordonné la vente forcée du bien ;
Considérant, sur l'application de la clause pénale, que dans l'acte de vente du 4 juin 2009, les parties ont stipulé au chapitre 'Clause pénale' :'En application de la rubrique 'RÉALISATION' et après levée de toutes les conditions suspensives, il est convenu, au cas où l'une des parties viendrait à refuser de régulariser par acte authentique la présente vente dans le délai imparti, qu'elle pourra y être contrainte par tous les moyens et voies de droit, en supportant les frais de poursuites et de recours à justice et sans préjudice de tous dommages et intérêts. Toutefois, la partie qui n'est pas en défaut pourra, à son choix, prendre acte du refus de son cocontractant et invoquer la résolution du contrat.
Dans l'un et l'autre cas, il est expressément convenu que la partie qui n'est pas en défaut percevra de l'autre partie, à titre d'indemnisation forfaitaire de son préjudice, la somme de quatre mille cent cinquante euros' ;
Considérant que Mme [Z] ayant refusé de réitérer la vente par acte authentique et ayant contraint ses cocontractants à agir en vente forcée, les conditions d'application de la clause pénale sont réunies, de sorte que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné l'appelante à payer aux consorts [A] la somme de 4 150 € à ce titre ;
Considérant que la solution donnée au litige emporte le rejet de la demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile de Mme [Z] ;
Considérant que l'équité commande qu'il soit fait droit à la demande des consorts [A] sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel comme il est dit dans le dispositif du présent arrêt ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Rejette les autres demandes ;
Condamne Mme [V] [Z] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Condamne Mme [V] [Z] à payer à M. [Y] [A] et M. [P] [A] la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.
La GreffièreLa Présidente