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15/04/2013 | FRANCE | N°12/15464

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 15 avril 2013, 12/15464


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

RÉPARATION DES DÉTENTIONS PROVISOIRES

DÉCISION DU 15 Avril 2013

(no , 4 pages)

Node répertoire général : 12/15464

Décision contradictoire en premier ressort ;

Nous, Marguerite-Marie MARION, Conseillère, à la cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Noëlle KLEIN, Greffière, lors des débats et du prononcé avons rendu la décision suivante :

Statuant sur la requête déposée le 16 Aoû

t 2012 par M. Yacine Y..., demeurant 4 Résidence Saint Etienne - 77131 TOUQUIN ;

Vu les pièces jointes à cette requête ;

Vu les con...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

RÉPARATION DES DÉTENTIONS PROVISOIRES

DÉCISION DU 15 Avril 2013

(no , 4 pages)

Node répertoire général : 12/15464

Décision contradictoire en premier ressort ;

Nous, Marguerite-Marie MARION, Conseillère, à la cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Noëlle KLEIN, Greffière, lors des débats et du prononcé avons rendu la décision suivante :

Statuant sur la requête déposée le 16 Août 2012 par M. Yacine Y..., demeurant 4 Résidence Saint Etienne - 77131 TOUQUIN ;

Vu les pièces jointes à cette requête ;

Vu les conclusions de l'agent judiciaire de l'Etat, notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;

Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;

Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l'audience fixée au 18 mars 2013 ;

Vu la présence de M. Yacine Y... ;

Entendus M. Yacine Y... , Me Rajae IZEM substituant Me Adel FARES, avocats au barreau de PARIS assistant M. Yacine Y..., Me Marie-Agnès PERRUCHE substituant Me Fabienne DELECROIX, avocats représentant l'agent judiciaire de l'Etat, ainsi que Madame Lydia GÖRGEN avocat général, les débats ayant eu lieu en audience publique, le requérant ayant eu la parole en dernier ;

Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R.26 à R40-7 du code de procédure pénale ;

* * *

Considérant que, Monsieur Yacine Y... (Monsieur Y...) mis en examen le 30 août 2007par un Juge d'instruction de Bobigny des chefs complicité d'escroquerie, faux, aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d'étrangers a été placé sous contrôle judiciaire le même jour ;

Que, renvoyé devant le Tribunal correctionnel de Bobigny du chef de ces infractions par ordonnance du 19 juin 2009, il a fait l'objet d'un jugement contradictoire à signifier le condamnant à une peine d'un an d'emprisonnement avec mandat d'arrêt mis à exécution le 29 août 2011 ;

Qu'il a obtenu sa mise en liberté par arrêt du 24 octobre 2011 et a bénéficié d'une relaxe prononcée par arrêt du 28 février 2012 infirmant le jugement précité, arrêt qui n'a fait l'objet d'aucun recours ;

Qu'il a ainsi été incarcéré pendant 1 mois et 16 jours ;

Considérant que par requête déposée le 16 août 2012 développée oralement à l'audience, Monsieur Y... sollicite :

- 20 000 € au titre de son préjudice moral,

- 4 460 € au titre de son préjudice matériel,

- 5 980 € au titre des frais d'avocat nécessaires à sa défense en détention,

Ainsi qu'une somme de 2 500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile pour la présente procédure ;

Que l'Agent Judiciaire de l'Etat, développant oralement ses écritures à l'audience conclut :

- à la recevabilité de la requête,

- à l'octroi de la somme de 3 000 € au titre du préjudice moral et celle de 5 382 € au titre des frais d'avocat,

- au rejet de la demande formée au titre de la perte de salaires,

- à ce que soit ramenée à de plus justes proportions la somme sollicitée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Que le Ministère Public, développant oralement ses écritures à l'audience, conclut à la :

- recevabilité de la requête et à son admission en son principe,

- réparation du préjudice moral proportionné à la durée de la détention,

- réparation du préjudice matériel au titre d'une éventuelle perte de chance et sous réserve de justificatifs,

- réparation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Sur la recevabilité

Considérant, au regard des dispositions des articles 149-1 et 149-2 du Code de procédure pénale et 38 du Décret no 91-1266 du 19 décembre 1991, que la requête déposée dans les délais et modalités de la loi est recevable en la forme ;

Considérant que l'article 149 du même code pose le principe d'une réparation intégrale du préjudice matériel et moral résultant d'une détention subie au cours d'une procédure terminée par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ;

Que cependant, la réparation est exclue soit lorsque cette ordonnance de non-lieu (ou ce jugement de relaxe ou cet arrêt d'acquittement) a pour seul fondement, soit la reconnaissance de l'irresponsabilité du prévenu à raison d'un trouble psychiatrique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes au sens de l'article 122-1 du Code pénal, ou une amnistie postérieure à la mise en détention provisoire, ou la prescription de l'action publique intervenue après la libération de la personne, soit lorsque celle-ci était dans le même temps détenue pour autre cause, soit lorsqu'elle a fait l'objet d'une détention provisoire pour s'être librement et volontairement accusée ou laisser accuser à tort en vue de faire échapper l'auteur des faits aux poursuites ;

Qu'aucune de ces situations n'étant réalisée en l'espèce, la requête de Monsieur Y... est donc fondée en son principe ;

***

Considérant, à titre liminaire, qu'il y a lieu de rappeler que la détention provisoire ne peut en aucun cas être qualifiée d'injustifiée et encore moins d'arbitraire ;

Qu'en effet, d'une part, les articles 137 et suivants du Code de procédure pénale définissent les conditions dans lesquelles une détention provisoire peut être ordonnée donc justifiée ;

Que d'autre part, la détention arbitraire est le fait, selon l'article 725 du même Code, d'être reçu ou retenu par un agent de l'administration pénitentiaire en l'absence d'un arrêt ou d'un jugement de condamnation, d'un mandat de dépôt ou d'arrêt, d'un mandat d'amener suivi d'incarcération provisoire ou d'un ordre d'arrestation établi conformément à la loi et sans qu'ait été donné l'acte d'écrou prévu à l'article 724 ;

Qu'il est constant que tel n'est pas le cas de l'espèce ;

Considérant, par ailleurs, qu'en vertu de l'article 149 précité, seuls peuvent être réparés les préjudices de la personne détenue qui sont directement liés à la privation de liberté, à l'exclusion de ceux qui sont la conséquence des poursuites pénales elles-mêmes, des mesures d'instruction autres que la détention provisoire tel le contrôle judiciaire, du retentissement public de l'affaire ou qui ont été causés à des proches ou à des tiers ;

Sur le préjudice moral

Considérant que l'indemnisation du préjudice moral de la personne détenue doit être appréciée à l'aune de la durée de la détention, en l'espèce 1 mois et 16 jours, et en fonction, notamment, de sa personnalité, de son mode de vie, de son comportement au cours de l'instruction, de ses antécédents judiciaires et des périodes de détention effectuées en exécution de condamnations antérieures ;

Considérant que Monsieur Y..., né le 12 juin 1981, était âgé de 30 ans lors de sa mise en détention ; qu'il vivait en concubinage depuis 6 ans avec une femme ayant 2 enfants d'un premier mariage, 1 enfant alors âgé de 5 ans étant issu de leur vie commune ;

Que son casier judiciaire porte trace d'une condamnation à une peine de 2 ans d'emprisonnement dont un an avec sursis prononcée par la Cour d'appel de Paris le 3 mars 2010 pour des faits de participation ou association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de 10 ans, commis de courant 2007 au 8 janvier 2008 et que cette peine a été exécutée du 9 au 11 avril 2008 puis sous le bénéfice de la libération conditionnelle qui est venue à expiration le 21 décembre 2010 ;

Qu'il sera relevé que, placé sous contrôle judiciaire lors de sa mise en examen, il a choisi de ne pas se présenter devant le Tribunal correctionnel au moment du jugement par lequel a été délivré le mandat d‘arrêt en exécution duquel il a été incarcéré durant un mois et 16 jours ;

Qu'eu égard à la durée de sa détention ainsi qu'aux éléments susvisés, il y a lieu de lui allouer la somme de 3 000 € ;

Sur le préjudice matériel

Considérant que Monsieur Y..., sollicite la somme de 4 480 € au titre de deux mois de salaires non perçus du fait de son incarcération ;

Considérant qu'il exerce la profession de machiniste receveur à la RATP depuis le 3 mars 2004 en contrat à durée indéterminée pour un salaire mensuel moyen non pas de 2 240 € mais de 1 750 € au regard des bulletins de salaires versés (décembre 2010, janvier, avril et mai 2011) ; que cependant, il confirme à l'audience avoir choisi de prendre un congé sans solde afin d'organiser sa fuite et éviter un licenciement et verse une attestation de son employeur précisant que ce congé a été pris du 5 juillet au 31 octobre 2011 étant rappelé que le mandat d'arrêt a été mis à exécution le 29 août 2011 et qu'il a été mis en liberté le 24 octobre 2011 ;

Qu'il y a donc lieu de rejeter sa demande ;

Considérant, s'agissant des honoraires d'avocat, que seule la part des frais dont il est prouvé qu'ils sont en rapport direct avec la détention peuvent donner lieu à réparation étant précisé qu'aucune disposition n'exige que le requérant justifie s'être acquitté du paiement de la totalité des honoraires pour prétendre à l'indemnisation de ce chef de préjudice matériel ;

Qu'en l'espèce, il ressort de la facture produite que les honoraires en rapport direct avec cette détention provisoire peuvent être évalués à la somme de 5 382 € TTC ;

Sur l'article 700

Considérant que l'article 700 du Code de procédure civile est applicable aux demandes d'indemnisation à raison d'une détention provisoire, qu'il sera alloué de ce chef la somme de 1 000 € ;

PAR CES MOTIFS,

DÉCLARONS Monsieur Yacine Y... recevable en sa requête,

ALLOUONS à Monsieur Yacine Y... :

- une indemnité de 3 000 € au titre de son préjudice moral,

- une indemnité de 5 382 € au titre des frais d'avocat,

- la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

REJETONS le surplus des prétentions de Monsieur Yacine Y....

Décision rendue le 15 avril 2013 par mise à disposition au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGUÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 12/15464
Date de la décision : 15/04/2013
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2013-04-15;12.15464 ?
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