La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/04/2013 | FRANCE | N°11/22284

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 11 avril 2013, 11/22284


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 11 AVRIL 2013



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/22284



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Décembre 2011 - Tribunal de Commerce de PARIS - 16ème chambre - RG n° 2011008429



APPELANTE :



Madame [T] [P]

née le [Date naissance 2] 1955

de nationalité française

ès qualit

és d'Expert-comptable et de Commissaire aux comptes

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]



représentée par : la SCP MONIN - D'AURIAC (Me Patrice MONIN) (avocats au barreau de PARIS, toque :...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 11 AVRIL 2013

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/22284

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Décembre 2011 - Tribunal de Commerce de PARIS - 16ème chambre - RG n° 2011008429

APPELANTE :

Madame [T] [P]

née le [Date naissance 2] 1955

de nationalité française

ès qualités d'Expert-comptable et de Commissaire aux comptes

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par : la SCP MONIN - D'AURIAC (Me Patrice MONIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : J071)

assistée de : Me Luc JEANNIN (avocat au barreau de PARIS, toque : A0347)

INTIME :

Monsieur [M] [D]

né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 5]

de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par : la SCP GALLAND - VIGNES (Me Marie-catherine VIGNES) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0010)

INTIME :

Monsieur [B] [K]

né le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 4] (Liban)

de nationalité française

demeurant [Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par : la SCP GALLAND - VIGNES (Me Marie-Catherine VIGNES) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0010)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Mars 2013, en audience publique, l'avocat ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur François FRANCHI, Président, et Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.

Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François FRANCHI dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président

Monsieur Gérard PICQUE, Conseiller

Madame Evelyne DELBES, Conseillère appelée d'une autre chambre afin de compléter la Cour en application de l'article R.312-3 du Code de l'Organisation Judiciaire

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER,

MINISTERE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRÊT :

- contradictoire,

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur François FRANCHI, Président et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier présent lors du prononcé.

*

Vu les dernières conclusions des parties

*

La cour rappelle que :

1- Madame [P], expert-comptable, après avoir été licenciée de son précédent cabinet d'expertise comptable, a eu recours aux services d'un cabinet d'out placement qui l'a conduit a entreprendre une recherche afin de reprendre et diriger un cabinet d'expertise comptable (pièce n° 1).

Elle est entrée en contact avec la société EXERASME, société d'exercice libéral anonyme simplifiée (Pièce n° 2) dont les actionnaires désiraient créer et développer des activités annexes, comme par exemple la transmission d'entreprises. Le contenu de la collaboration avec Madame [P] devait ainsi comporter l'activité de rencontrer et tisser des relations professionnelles avec les différents clients d'EXERASME, connaître et diriger le personnel afin d'en devenir à terme l'actionnaire et le représentant légal.

2- Le 27 octobre 2003 les parties ont signé un certain nombre d'actes juridiques :

* Un contrat de prêt aux termes duquel Madame [P] apportait à la société EXERASME une somme de 100 000 € sans intérêts (Pièce n° 3).

* Une promesse de cession d'actions entre Madame [P] et Messieurs [M] [D] et [B] [K] aux termes de laquelle ces derniers s'engageaient, sous diverses conditions, à céder à la première la totalité des actions de la société EXERASME leur appartenant, et ce au plus tard le 31 décembre 2010 (Pièce n°4).

Le prix de cession de la totalité des titres était déterminé selon la formule : Chiffre d'Affaires exercice 1/10/2009 au 30/9/2010) x 1 - 700 000 €.

Selon les termes de la Promesse, la cession des titres EXERASME devait intervenir au plus tard le 31 décembre 2010, date à laquelle les bénéfices distribués par la Société EXERASME à ses actionnaires depuis le premier octobre 2003 auraient du atteindre un montant cumulé d'au moins 700.000 €.

Cette cession pouvait également intervenir avant le 31 décembre 2010 dès que la Société EXERASME avait pu verser à ses actionnaires, a compter du 1°' octobre 2003, un montant de dividendes cumulés de 700.000 €.

* Un protocole d'accord entre, d'une part Madame [P] et d'autre part Messieurs [D] et [K] dans le cadre duquel il était tente d'organiser au mieux la coopération entre les parties et plus particulièrement les conditions d'intégration de la demanderesse au sein de la société EXERASME et l'intégration de cette société dans le réseau dit 'PEOPLE ASSOCIATES', société qui devait fournir un certain nombre de prestations en matière de communication, marketing, développement et conseil en informatique (Pièce n 5).

Il était stipule dans ce Protocole que les conventions étaient indépendances les unes des autres.

L'une des conditions substantielles de cet accord était l'engagement de Messieurs [D] et [K], que l'organe compétent d'EXERASME aurait adopte d'ici le 31 mars 2005 au plus tard la décision de confier la direction générale de la société a Madame [P], ce qui permettrait à celle-ci d'être officiellement présentée à la clientèle et de travailler à la pérennisation de celle-ci dans l'optique de la levée d'option prévue par le protocole.

{Pièce n°10 : Protocole d'accord du 27 octobre 2003, Page 6, 1er paragraphe}

* Un contrat de travail à durée indéterminée entre EXERASME et Madame [P] ainsi que son avenant (Pièce n° 6).

3- Après plusieurs années de collaboration, pendant lesquelles Madame [P] n'a pas formulé d'observations particulières, elle a , par courrier en date du 29 mars 2007, indique à la société EXERASME que (Pièce n° 7) elle mettait fin à leur collaboration en dénonçant l'absence de respect de ses engagements par la société EXERASME.

'Messieurs,

J'ai examiné avec attention avec mon conseil votre dernière proposition formulée par Maître [L]. Elle est malheureusement fort éloignée du protocole que nous avions régularisé ensemble le 27 octobre 2003.

Je me dois ale constater aujourd'hui que le seul point du protocole qui ait été exécuté, est le versement par mes soins ale la somme de 100. 000 euros, sans intérêts, au titre du prêt dont nous étions convenus. Aucune des obligations mises à votre charge n'a été exécutée.

Tout particulièrement, l'un des éléments substantiels de notre accord à savoir ma nomination en qualité de Présidente Directrice Générale, qui devait intervenir avant le 31 mars 2005, attend toujours. Or, cette nomination devait permettre de me positionner vis-a-vis de la clientèle ' que vous ne m'avez toujours pas présentée ' dans la perspective ale la cession at intervenir. Bref elle assurait une sécurité dans le cadre de cette cession.

J'ai accepté de patienter quelque temps dans la mesure oit nos accords étaient à terme de 2010 mais je prends conscience à la lecture de vos dernières propositions que le protocole d 'accord de 2003 est bel et bien mort.

Au surplus, pour réaliser une telle opération, il est indispensable que les cédants jouent le jeu. Or, l attitude de [B] à mon égard depuis maintenant plusieurs mois, ses mesquineries constantes et son agressivité, démontrent qu'il n'a aucune intention de faciliter cette cession et que tout au contraire nous nous trouvons dans une situation de mésentente grave conduisant à des difficultés de fonctionnement au sein d'EXERASME, les agissements répétés de [B] révélant sont refus a'e tenir ses engagements.

Dans cette situation, eu égard à l'importance des enjeux, je ne puis me permettre de courir le risque de contracter dans les conditions que vous me proposez. J'ai en conséquence décidé de renoncer à l'acquisition des actions de la société EXERASME, cette renonciation mettant fin au protocole du 27 octobre 2003, et à la promesse de cession du même jour.

Vous voudrez bien en conséquence me faire parvenir par retour la somme de 100 000 euros que j'ai remise à EXERASME au titre du prêt et qui est remboursable à compter de ma renonciation.

Compte tenu des circonstances décrites ci-dessus, qui m'amènent à renoncer au projet, je suis par ailleurs en droit de recevoir l'indemnité de rupture des accords stipulés au protocole. Je vous remercie de m 'en communiquer les éléments de calcul.'

Bien évidemment, la qualité de salariée de Madame [P] au sein de la société EXERASME étant intimement liée à son projet au sein de cette dernière (à savoir le rachat des actions détenues par Messieurs [D] et [K], projet de cession lui-même garanti par le prêt sans intérêts consenti par Madame [P], la société EXERASME a considéré que celle-ci démissionnait de son emploi.

C'est dans ces conditions qu'elle a libelle les bulletins de salaire des mois suivants avec la mention 'préavis'

Les écritures de Mme [P] montrent que ses reproches étaient en fait double :

- le fait qu'elle n'ait pas été nommée Président Directeur Général de la société EXERASME.

- le fait que, contrairement aux termes du protocole, les rémunérations et charges afférentes de Messieurs [D], [K] et Madame [N] ont continué à être prises en charges par la société EXERASME, la trésorerie utilisée pour le paiement de ces charges ne pouvant être utilisée au paiement de dividendes et le retraitement de ces montants à fin septembre 2006 montrant que, sans ces charges, le résultat distribuable de 700K€ aurait été atteint. (Pièce n°16).

Selon les intimés, 'nonobstant une démission, Madame [P] a, par acte introductif d'instance en date du l0 juillet 2007, saisi le Conseil des Prud'Hommes aux fins d'obtenir la condamnation de la société EXERASME a lui régler les sommes suivantes (pièce n° 8) :

1) Remboursement de frais pour les mois d'avril, mai et juin 2007 = 2.018,00 €

2) Cotisation Compagnie des Commissaires aux Comptes = 773,33 €

3) Cotisation CAVEC 2ème trimestre = l.200,00 €

4) Coût de formation = 3.000,00 €

5) Rémunération du temps de formation = 815,68 €

6) Indemnité compensatrice de préavis = l5.000,00 €

7) Indemnité légale de licenciement = 2.350,00 €

8) Indemnité contractuelle de licenciement (provision) = 78.000,00 €

9) Indemnité pour licenciement Sans cause réelle et sérieuse = 72.000,00 €

10) Coût out placement = l4.000,00 €

11) Article 700 = 3.000,00 €

Soit au total une somme de 193 015, 90 €.

Par un arrêt de la Cour d'appel de PARIS en date du 23 novembre 2010, la société EXERASME a été condamnée à payer à Madame [P] (pièce n° 9) les sommes suivantes :

Remboursement de frais 369,70 €

Cotisation Compagnie des Commissaires aux Comptes 322,22 €

Indemnité compensatrice de préavis l5.000,00 €

Congés payés afférents 1.500 €

Indemnité contractuelle de licenciement 10.000 €

Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 39,000 €

Soit la somme globale de 69.264,92 €,

de laquelle il convient de soustraire le montant des charges sociales dont la société EXERASME aura à s'acquitter au titre du préavis et des conges payés afférents.

Madame [P] a procédé aux formalités de signification de cette décision et en a sollicite l'exécution, la société EXERASME ne s'y opposant pas.

Madame [P] a par ailleurs fait délivrer une assignation devant le tribunal de commerce à MM.[D] et [K].

Le protocole d'accord régularisé le 27 octobre 2003 stipulant en son article 6 : "Tout différend de quelque nature que ce soit seront soumis à l'arbitrage du président du conseil régional d'Ile de France de l'Ordre des experts-comptables", les parties, après un premier rendez-vous devant la Commission d'Arbitrage de l'Ordre ont convenu de renoncer à la clause compromissoire visée dans les actes pour donner compétence aux Tribunaux de droit commun.

Le litige ayant trait aux conséquences de la rupture d'une promesse de cession de la totalité des actions d'une société commerciale, le Tribunal de Commerce s'est déclaré compétent par application des dispositions de l'article L 721-3 du Code de Commerce et a statué en déclarant la demande de Madame [T] [P] fondée sur l'indemnité conventionnelle irrecevable et l'a rejetée, a débouté Madame [T] [P] de sa demande fondée sur l'article 1382 du code civil, a débouté Messieurs [M] [D] et [B] [K] de leur demande reconventionnelle, a condamné Madame [T] [P] à payer à Messieurs [M] [D] at [B] [K]. la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, a ordonné l'exécution. provisoire sans constitution de garantie et condamné Madame [T] [P] aux dépens.

Madame [P] a interjeté appel.

*

L'appelante souligne en premier lieu que :

* EXERASME était une société anonyme et que la promesse de cession d'actions du 27 octobre 2003 concernait une société commerciale, les différends entre ses associés relevant de la compétence exclusive du Tribunal de Commerce.

* elle n'a jamais été associée de la SELAS XERASME et n'avait pas signé de promesse pour acquérir les actions d'une SELAS, mais exclusivement celles d'une SA.

* la rupture de la promesse a été matérialisée par la lettre du 29 mars 2007,

* la transformation de la SA en SELAS est intervenu deux jours après, le 31 mars 2007, et a été régularisée au greffe du Tribunal de Commerce de PARIS le 20 avril 2007, sans qu'elle n'en ait été informée.

Elle demande à la Cour de :

- Infirmer le jugement du 2 décembre 2011 en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

- Déclarer Madame [T] [P] recevable et fondée en son action, et y faisant droit,

En conséquence,

- condamner Messieurs [D] et [K], solidairement a lui payer la somme de 690.000 € au titre de l'indemnité conventionnelle de rupture.

Subsidiairement,

vu les dispositions des articles 1382 et suivant du Code civil,

- Condamner Messieurs [D] et [K], solidairement à lui payer la somme de 690.000 € a titre de dommages et intérêts.

En tout état de cause,

- condamner Messieurs [D] et [K], solidairement au paiement d'une somme de 15.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel dans les conditions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Elle indique que :

1- Sur son droit à indemnité :

La contrepartie de son investissement professionnel au bénéfice de la société EXERASME et du prêt de 100.000 euros sans intérêt, il avait été convenu qu'elle serait dédommagée si 'l'opération' ne se réalisait pas du fait de Messieurs [D] et [K] mais que 'curieusement' cette clause indemnitaire qui figurait initialement dans le projet de promesse de cession d'actions, 'ce qui était logique, comme elle aurait d'ailleurs pu figurer dans le protocole d'accord', a finalement été insérée dans le contrat de travail (article 14).

Elle ajoute que l'avenant n° 1 à son contrat de travail (Pièce n°5) prévoyant que : 'En outre, en cas de mésentente grave conduisant à des difficultés de fonctionnement au sein d'EXERASME, ou d'agissements répétés démontrant le refus explicite ou implicite des actionnaires d'EXERASME de tenir leurs engagements, le départ d'[T] [P] serait assimile à un licenciement et elle bénéficierait de l'application de la clause de licenciement prévue dans son contrat de travail», démontre 'à l'évidence que l'indemnité avait vocation à réparer le préjudice subi par elle du fait de la non réalisation des opérations prévues au protocole et tout particulièrement de l'impossibilité d'acquérir le capital social de la société EXERASME.

1/2- sur le dol :

Si par impossible la Cour estimait que l'insertion de l'indemnité conventionnelle dans le contrat de travail prive Madame [P] de la possibilité de la revendiquer dans le cadre du protocole, il y a lieu d'examiner la question sous l'angle quasi délictuel car il est démontré que Messieurs [D] et [K] n'ont pas, sciemment, exécuté les obligations mises à leur charge par le Protocole d'Accord du 27 octobre 2003, cette inexécution étant la cause exclusive de la rupture contractuelle intervenue le 29 mars 2007.

Ils ont ainsi engagé leur responsabilité et lui en doivent réparation 'intégrale'.

1/3- sur l'autorité de chose jugée :

Madame [P] considère qu'il n'y a pas autorité de chose jugée par rapport à la décision prud'homale (arrêt du 23 novembre 2010) dès lors que les fondements de l'action et les parties en cause sont totalement 'distincts'.

2- Sur le montant de la réparation :

Partant de l'idée selon laquelle les accords du 27 octobre 2003 n'ont pas été réalisés par la faute de Messieurs [D] et [K], qu'elle s'était dès lors investie 'en pure perte dans le développement de la société EXERASME' et avait perdu 'l'opportunité de devenir enfin dirigeante d'une structure professionnelle lui permettant un épanouissement professionnel certain', qu'elle était ainsi confrontée à 'l'impossibilité de réaliser ces objectifs à 50 ans passés', elle en déduit un préjudice professionnel qualifié de 'grave du fait de l'impossibilité de retrouver une même opportunité'.

Elle évalue alors l'indemnité contractuelle comme étant égale au cumul de :

- Premier montant :

le niveau cumulé de résultat atteint depuis son entrée dans EXERASME et jusqu'à la date de son départ, sans que cette indemnité contractuelle puisse être inférieure à deux mois de salaire moyen, sur la base d'un temps plein, si le licenciement intervient en 2004, 3 mois s'il intervient en 2005, 4 mois s'il intervient en 2006, 5 mois, s'il intervient en 2007, 6 mois s'il intervient en 2008 ou plus tard - la notion de résultat étant définie comme le résultat net après impôt mais compte non tenu du résultat exceptionnel dont l'origine serait antérieure à son entrée en fonction,

- Second montant :

le différentiel égal au montant des droits ASSEDIC perçus du fait de la mise en place d'un temps partiel et non d'un temps plein.

- et compte tenu de ce qu'il était stipulé dans le protocole du 27 octobre 2003 que les rémunérations de Monsieur [D], Monsieur [K] et Madame [N] seraient à compter de cette date non plus supportées par la société EXERASME mais par la société PEOPLE ASSOCIATES et de ce qu'il convient en revanche de réintégrer dans les comptes EXERASME la redevance qui aurait dû être reversée à PEOPLE ASSOCIATES, soit 6 % du chiffre d'affaires, cela donne au terme de ces retraitements, 700.000 € de résultat cumulé arrêté au 30 septembre 2006, somme ramenée à 690.000 euros pour tenir compte de l'arrêt de la Cour d'Appel du 23 novembre 2010.

*

Les intimés demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions, à l'exception de celle par laquelle il a refusé de faire droit à la demande reconventionnelle des concluants ;

statuant de nouveau,

- condamner Madame [T] [P] à leur payer la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts et en réparation du préjudice né de l'abus de son droit d'ester en justice ;

- débouter Madame [T] [P] de ses demandes, en l'absence de toute faute

commise par eux ;

- débouter Madame [T] [P] de ses demandes, en l'absence de toute

démonstration de la réalité du préjudice dont elle se prévaut ;

En tout état de cause ;

- condamner Madame [T] [P] au paiement de la somme de 15.000 €, au titre ;

des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- La condamner également aux entiers dépens de première instance et d'appel.

1- Sur l'autorité de chose jugée :

Messieurs [D] et [K] considèrent que les demandes de Madame [P] se heurtent à l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour d'appel de Paris dès lors que celle-ci a déjà demandé, devant les juridictions prud'homales, le paiement des sommes auxquelles elle estimait avoir droit, en application des dispositions de l'article 14 du Contrat de travail et de l'avenant n° 1 à ce contrat qui instauraient une indemnité conventionnelle de licenciement.

2- Sur le droit de Madame [P] à une indemnité :

Ils demandent le rejet de sa demande dès lors qu'elle est fondée sur l'article 14 du contrat de travail et qu'elle a été indemnisée à ce titre.

Sa demande est donc irrecevable.

3- Sur l'existence d'un dol :

'Abstraction faite de la possibilité de caractériser l'existence d'un quasi-délit en l'espèce', les intimés considèrent la demande de Madame [P] irrecevable la jurisprudence rappelle que des fautes commises par des tiers au détriment du salarié et a l'occasion de son contrat de travail sont constitutives d'un préjudice qui se confond avec celui qui a été réparé par la procédure consécutive au licenciement et que la salariée ne peut former, à ce titre, aucune demande complémentaire devant une autre juridiction, c'est à dire le principe de l'unicité de l'instance, posé par les dispositions de l'article R.l452-6 du Code du travail.

4- Subsidiairement, sur la rupture du protocole :

MM. [D] et [K] considèrent que Mme [P] est à l'origine de la rupture conventionnelle, renonçant à la promesse de cession d'actions, ce qui mettait un terme aux effets du protocole d'accord du 27 octobre 2003.

Ils ajoutent :

- s'agissant du non transfert de la charge de leurs rémunérations sur la société PEOPLE ASSOCIATES : que la cause s'en trouve dans le fait que cela imposait de constituer cette structure en société d'exercice libéral, comme prévu au protocole, ce qui n'avait pu être le cas à raison de la préexistence de la société EXARASME.

PEOPLE ASSOCIATES avait donc été créé sous forme de société civile, et Madame [P] en était parfaitement d'accord puisqu'elle ne s'y est opposée ni à l'époque de la création de PEOPLE ASSOCIATES ni après et l'avait approuvé en sa qualité d'associée de la société PEOPLE ASSOCIATES, dont elle avait approuvé les comptes en sachant très bien que n'y figuraient pas les rémunérations de Messieurs [D] et [K] et donc qu'elles étaient prises ne compte dans la société EXERASME.

- sur le retard de la nomination de Mme [P] comme PDG d'EXERASME : Que celle-ci n'avait jamais exercé ni cherché à exercer des fonctions de direction au sein de la société et ils affirmaient qu'elle-même avait souhaité différer cette prise de charge supplémentaire.

5- Sur l'existence d'un préjudice :

Ils observent que :

5/1- les seules dispositions contractuelles qui prévoyaient une indemnisation de Madame [P] étaient contenues dans le contrat de travail conclu entre celle-ci et la société EXERASME, contrat de travail dont il a été fait application dans le cadre du contentieux prud'homal.

3/2- la perte d'une opportunité de développement professionnel par un investissement en pure perte dans le développement d'EXERASME n'est pas démontrée d'autant que pendant toute la période où Madame [P] a exercé au sein d'EXERASME, elle a perçu une rémunération non négligeable, puisque fixée à la somme mensuelle de 6.500 €, cette rémunération compensant l'investissement déployé au sein d'EXERASME.

6- Sur leur demande de dommages intérêts pour abus du droit d'ester en justice :

MM. [D] et [K] considèrent que la décision de Madame [P] d'introduire une procédure à leur encontre alors même qu'elle ne pouvait ignorer que la décision de la Cour d'appel de PARIS du 23 novembre 2010 l'avait remplie de l'intégralité de ses droits, la mauvaise foi à soutenir une rupture prononcée à sa seule initiative, alors qu'elle fait l'objet d'une procédure actuellement pendante devant le Tribunal de grande instance de CRETEIL pour avoir détournée des facturations et une part non négligeable de sa clientèle au préjudice de la société EXERASME (pièce n° 10) établissent sa faute.

7- Sur l'article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens :

Les intimés considèrent qu'il serait par ailleurs inéquitable qu'ils supportent la charge des frais irrépétibles qu'ils ont été contraints d'exposer, de sorte qu'il convient de

condamner Madame [P] au paiement de la somme de 15.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de la présente instance.

SUR CE,

1- Sur la compétence :

La cour reprenant les motifs des premiers juges, confirmera la décision prise, cette question n'étant plus débattue ne cause d'appel.

2- Sur la demande d'indemnité formée par Madame [P] :

La cour ne peut que constater que :

- il n'y a pas autorité de chose jugée dès lors que les parties en cause sont différentes, l'action prud'homale étant dirigée contre la société et l'action présente contre MM. [D] et [K], personnes différentes, et la cause diffère puisque dans le premier procès était en jeu les dispositions du contrat de travail et dans la présente instance, l'interprétation des dispositions du protocole du 27 octobre 2003.

- le protocole du 27 octobre 2003 ne prévoit d'indemnité de rupture et qu'il n'y a aucune ambiguïté dans la rédaction de celui-ci puisqu'en son article 5 ledit protocole stipulait que :

'Les dispositions qui suivent feront l'objet d 'un avenant spécifique au contrat de travail qui sera signé entre Madame [T] [P] et la société EXERASME, ainsi que s 'y engagent Messieurs [D] et [K] comme porte-fort.'

- l'indemnité réclamée sur le fondement de l'article 14 du contrat de travail, et elle ne peut en demander deux fois la mise en jeu dès lors qu'elle a usé de son droit devant les juridictions prud'homales.

L'action de Mme [P] n'est ainsi pas irrecevable mais n'est pas fondée.

3- Sur le dol résultant de la rupture du protocole :

La cour considère la demande de Mme [P] basée sur la responsabilité contractuelle et non délictuelle, et recevable mais non fondée dès lors que :

* même si c'est elle qui a pris l'initiative de la rupture, il est clairement établi par la présentation des faits que le protocole n'était pas respecté, notamment sur les deux points ayant motivé la lettre de Mme [P] en date du 29 mars 2007,

* l'appelante a non seulement toléré la situation mais l'a avalisé pendant des années, ne prenant aucune initiative pour obtenir le respect du protocole, ce qui établit son consentement tacite à la situation.

Dès lors, elle n'est pas fondée à demander la réparation d'un préjudice à ce titre.

4- Sur l'abus du droit d'ester en justice :

La cour ne peut que s'interroger de fait que le comportement procédural de Mme [P] qui après avoir provoqué la rupture du protocole choisit d'aller aux prud'hommes et n'obtenant sans doute pas l'indemnisation espérée, ré attaque au commercial sur le même fondement et persiste en appel.

Elle considère que cet acharnement procédural dans une affaire qui aurait du être réglée devant l'instance arbitrale dans le cadre de la clause compromissoire justifie le prononcé d'une amende civile de 3000 € mais pas l'attribution de dommages intérêts aux intimés dès lors que ceux-ci ne font état pas d'autres préjudices que les frais de procédure qui relèvent de l'article 700 du Code de Procédure Civile et des dépens.

5- Sur l'article 700 du Code de Procédure Civile et les dépens :

La cour ne fera droit qu'à la demande des intimés en condamnant Mme [P] à leur verser à chacun la somme de 2000 €.

Et Mme [P] sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement du tribunal de commerce de PARIS en date du 02 décembre 2011 en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande d'indemnité de Mme [T] [P]

Statuant à nouveau :

La déclare recevable.

Confirme le jugement ce qu'il l'a déclarée non fondée et rejetée, déboutée Mme [T] [P] de sa demande de réparation de la rupture du protocole d'accord du 27 octobre 2003,

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté MM. [D] et [K] de leur demande en dommages intérêts pour procédure abusive.

Y ajoutant :

Condamne Madame [T] [P] à :

- payer une amende civile de 3000 €,

- verser à MM. [D] et [K] chacun la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Met les dépens à la charge de Mme [T] [P] lesquels seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

B. REITZER F. FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 11/22284
Date de la décision : 11/04/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°11/22284 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-04-11;11.22284 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award