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10/04/2013 | FRANCE | N°10/20507

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 10 avril 2013, 10/20507


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 2



ARRÊT DU 10 AVRIL 2013



( n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/20507



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Septembre 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/09204





APPELANT



Syndicat des copropriétaires [Adresse 3], agissant en la personne de son syndic, la société LE TERROIR S

AS

[Adresse 3]

[Localité 3]

Ayant pour avocat postulant Me Alain FISSELIER de la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avocats au barreau de Paris, toque : L0044,

Ayant pour av...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRÊT DU 10 AVRIL 2013

( n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/20507

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Septembre 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/09204

APPELANT

Syndicat des copropriétaires [Adresse 3], agissant en la personne de son syndic, la société LE TERROIR SAS

[Adresse 3]

[Localité 3]

Ayant pour avocat postulant Me Alain FISSELIER de la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avocats au barreau de Paris, toque : L0044,

Ayant pour avocat plaidant Me Jean-Daniel SIMONET, avocat au barreau de Paris, Toque : E803

INTIMÉES

Société LAMY

[Adresse 4]

[Localité 2]

Ayant pour avocat postulant Me Dominique OLIVIER de la AARPI Dominique OLIVIER - Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de Paris, toque : L0069)

Ayant pour avocat plaidant Me Catherine EGRET substituant Me Marcel PORCHER, avocat au barreau de Paris, Toque : G0450

SOCIÉTÉ DE GÉRANCE ET D'ADMINISTRATION IMMOBILIÈRE GERER

[Adresse 1]

[Localité 4]

Ayant pour avocat postulant Me Catherine BELFAYOL BROQUET, avocat au barreau de Paris, toque : C0278

Ayant pour avocat plaidant Me Joëlle BARNIER, avocat au barreau de Paris, Toque : P0154

SAS PARISIORUM,

venant aux droits de URBANIA PARIS MICHEL RICARD.

[Adresse 5]

[Localité 1]

Ayant pour avocat postulant Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de Paris, toque : B0753

Ayant pour avocat plaidant Me Guillaume REGNAULT, avocat au barreau de Paris, Toque : P133

INTERVENANT VOLONTAIRE

SOCIÉTÉ DAUCHEZ COPROPRIÉTÉS venant aux droits de la société GÉRER

[Adresse 2]

Ayant pour avocat postulant Me Catherine BELFAYOL BROQUET, avocat au barreau de Paris (L 64)

Ayant pour avocat plaidant Me BARNIER SZTABOWICZ

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 20 juin 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean DUSSARD, Président

Madame Marie-Paule RAVANEL, Conseillère

Madame Denise JAFFUEL, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Monsieur Dominique FENOGLI

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Denise JAFFUEL Conseillère, le Président étant empêché, et par Madame Marie-Annick MARCINKOWSKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par déclaration du 20 octobre 2010 le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 3] a appelé d'un jugement contradictoire qui :

- le déclare irrecevable en sa demande de condamnation in solidum des sociétés GERER, LAMY et PARISIORUM venant aux droits de la société URBANIA PARIS Michel RICARD au paiement de la somme de 2 136 000 euros (valeur 2007) à titre de dommages et intérêts toutes causes confondues en réparation du préjudice causé par une très mauvaise gestion du service de gardiennage de l'immeuble,

- rejette les demandes formées en application de l'article 700 du CPC,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamne ledit syndicat aux dépens qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du CPC.

Les intimés ont constitué avoué puis avocat.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments, la Cour fait référence expresse au jugement déféré et aux conclusions d'appel dont les dernières ont été signifiées dans l'intérêt :

- du Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 3], le 12 juin 2012,

- de la société DAUCHEZ copropriété venant aux droits de la société GERER, ancien syndic du dit syndicat (premier syndic), de 1975 au 10 avril 1996, le 15 mai 2012,

- de la société LAMY, ancien syndic du dit syndicat (deuxième syndic), du 10 avril 1996 au 21 mai 2001, le 16 mai 2012,

- de la société PARISIORUM venant aux droits de la société URBANIA PARIS Michel RICARD, ancien syndic du dit syndicat (troisième syndic) du 22 mai 2001 au 22 mars 2005, le 12 juin 2012,

CELA ÉTANT EXPOSÉ

LA COUR

I - SUR L'HABILITATION DU SYNDIC (ARTICLE 55 DU DÉCRET DU 17 MARS 1967)

Le syndic du syndicat des copropriétaires :

- tenait de la 7ème résolution de l'assemblée générale du 22 mars 2005 dont le texte est reproduit en page 6 du jugement entrepris, le pouvoir d'agir en responsabilité contre les trois anciens syndics aux fins d'obtenir réparation du préjudice financier subi par le syndicat du fait de l'arrêt rendu par la Cour d'appel de PARIS le 12 octobre 2004 qui l'avait condamné à payer diverses sommes aux anciens gardiens du syndicat à titre de rappels de salaires dus pour la période d'août 1997 à avril 2004, outre des indemnités pour frais irrépétibles,

- en revanche ne tenait pas de cette même décision d'assemblée générale le pouvoir d'agir en paiement de dommages et intérêts supplémentaires pour très mauvaise gestion du service de gardiennage.

C'est donc à tort que les premiers juges ont déclaré la demande irrecevable en toutes les fins qu'elle comportait, sans opérer de distinction entre les deux chefs de demande.

Mais cette nullité de fond des actes de procédures du Syndicat des copropriétaires, qui peut être réparée même pour la première fois en appel dès lors qu'elle est susceptible d'être couverte comme en l'espèce en application de l'article 121 du CPC, ne sera pas prononcée dès lors que sa cause a disparu au moment où le juge statue.

En effet par sa décision reproduite en pages 9 et 10 des conclusions récapitulatives du Syndicat des copropriétaires auxquelles la Cour se réfère expressément, l'assemblée générale des copropriétaires réunie le 2 février 2011 a ratifié, en des termes clairs et précis, toutes les demandes introduites par le syndic au nom du syndicat englobant l'ensemble des préjudices dont il impute la responsabilité aux syndics successifs et dont il poursuit réparation, totalisant sauf à parfaire 2.136.000 euros en valeur 2007.

Cette habilitation, conforme aux exigences de l'article 55 du décret du 17 mars 1967, fournit à l'assemblée toutes les informations souhaitables sur les raisons, l'objet du procès et sur les personnes contre lesquelles il est dirigé.

Dans ses dernières écritures la société DAUCHEZ COPROPRIETES aux droits de la société GERER ne soulève plus la prescription que la société GERER avait invoquée dans ses conclusions du 19 octobre 2011.

La Cour, infirmant le jugement entrepris en ses dispositions contraires, reçoit les Syndicat des copropriétaires en ses demandes.

II - SUR LE RAPPORT DE MONSIEUR [G] [T], EXPERT COMPTABLE, EN DATE DU 6 MAI 2008

Il s'agit, non d'un rapport d'expertise régi par les articles 232 et suivants du Code de Procédure Civile, mais d'une étude technique unilatéralement établie à la demande d'une partie, le Syndicat des copropriétaires, sans convocation des parties auxquelles on l'oppose.

Mais ce document et les courriers postérieurs de son auteur qui le complètent et apportent des réponses à des critiques formulées en cours de procédure sont admissibles en preuve

et partant opposables aux anciens syndics dès lors :

- qu'ils ont été régulièrement produits aux débats, ainsi que toutes les pièces émanant pour la plupart d'entre elles des précédents syndics sur lesquelles Monsieur [T] s'est fondé,

- qu'ainsi ces éléments de preuve techniques ont été soumis à la libre discussion des parties qui étaient parfaitement à même de les contester, au besoin en recourant aux services d'un technicien de leur choix, comme l'a fait la société URBANIA Michel RICARD PARISIORUM qui s'est fait assister de la société GR CONSULTANT.

Enfin il sera précisé, à titre de rappel que les avis et conclusions de Monsieur [T] ne lient pas la Cour.

Celle-ci, trouvant dans cette étude qui n'est ni partiale ni lacunaire, dans les pièces régulièrement produites aux débats et dans les explications fournies dans les conclusions les éléments techniques et de fait lui permettant de statuer au fond, n'ordonnera pas d'expertise judiciaire.

III - SUR LES RESPONSABILITÉS ET PRÉJUDICES

A - SOCIÉTÉ GÉRER

1) Les condamnations prononcées à l'encontre du Syndicat des copropriétaires au profit des couples de gardiens par arrêt rendu le 12 octobre 2004 par la Cour d'appel de PARIS, 18ème chambre D sur appel d'un jugement rendu le 26 juin 2003 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS

Ces condamnations portent sur des rappels de salaires d'août 1997 à avril 2004, donc postérieurs à l'expiration du mandat de syndic de la société GERER en date du 10 avril 1996.

Il s'ensuit que, même s'il est reproché à cet ancien syndic de n'avoir pas respecté la législation du travail des gardiens de l'immeuble, les condamnations prononcées contre le Syndicat des copropriétaires ne sont pas en relation causale démontrée avec ladite faute, à la supposer établie.

La Cour, rejetant comme mal fondées et inopérantes les prétentions du Syndicat des copropriétaires sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation, déboute celui-ci de sa demande de dommages et intérêts chiffrée à 725 000 euros plus intérêts en ce qu'elle est dirigée contre la société GÉRER.

2) Mauvaise gestion du service de gardiennage.

L'immeuble dont s'agit comporte six bâtiments comprenant 484 appartements, des locaux commerciaux et professionnels et un bâtiment sur deux niveaux de sous-sol à usage de parking et de caves.

Les bâtiments D et E de 14 étages comportent chacun trois cages d'escaliers et six ascenseurs, à nettoyer et entretenir.

Le règlement de copropriété a prévu deux loges de gardiens, l'une au rez-de-chaussée du bâtiment B, l'autre au rez-de-chaussée du bâtiment F. Il stipule que le service de l'immeuble est assuré par des concierges.

L'embauche dès la création de la copropriété de deux couples de gardiens au lieu d'un seul gardien par loge, qui était adaptée à l'importance de la copropriété et qui répondait aux souhaits des copropriétaires de l'époque dont le souci d'économie était moins marqué que celui des copropriétaires actuels ne constitue pas en soi une faute de gestion du service de gardiennage.

Les coûts importants du service dont s'agit n'étaient nullement ignorés des copropriétaires informés annuellement de ceux-ci dans le cadre des assemblées générales appelées à approuver les comptes de la copropriété joints aux convocations conformément à l'article 11 du décret du 17 mars 1967.

La société GÉRER a reçu un quitus de sa gestion annuelle jusqu'à l'exercice couvrant la période du 1er ocotbre 1993 au 30 septembre 1994 inclus, l'assemblée générale du 10 avril 1996 désignant un nouveau syndic, le cabinet LAMY, ayant refusé le quitus pour l'exercice du 1er octobre 1994 au 30 septembre 1995.

Ces quitus ont couvert les actes de gestions portés à la connaissance des assemblées au moment où elles se sont prononcées dès lorsque le syndic GÉRER n'avait dissimulé au syndicat aucune information et qu'il ne s'est pas révélé ultérieurement un fait ou une cause jusqu'ici inconnue remettant en question le service du gardiennage. Il est en effet rappelé que le litige prud'hommal ayant abouti à l'arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 12 octobre 2004 porte sur une période postérieure à la gestion de la copropriété dont s'agit par la société GÉRER.

En revanche le refus de quitus prive le syndic GÉRER de la couverture des actes de sa gestion à partir du 1er octobre 1994.

Mais il n'est démontré relativement à cette période aucune faute contractuelle en relation causale directe et certaine avec le préjudice lié à l'organisation du service de gardiennage.

Enfin la société GÉRER dont le mandat de syndic a expiré en avril 1996 n'est pas responsable de l'absence de prise de décision du syndicat de 1996 à 2002, décision qui aurait permis d'éviter le contentieux avec les gardiens et de mettre en place de nouvelles solutions de gardiennage, moins onéreuses, si celles-ci étaient souhaitées par les copropriétaires.

Si ce premier syndic avait fait établir une étude portant sur la réorganisation complète du service du gardiennage - qui ne lui avait pas été demandée - il n'est pas acquis que le syndicat était à l'époque favorable à la suppression d'un des deux couples de gardiens.

La Cour rejette en conséquence la demande de dommages intérêts compensatoires de la mauvaise gestion du service de gardiennage dirigée contre la société DAUCHEZ COPROPRIETAIRES aux droit de la société GÉRER.

B - SOCIÉTÉS LAMY et PARISIORUM

1) Condamnation prononcées par l'arrêt du 12 octobre 2004 et gestion du procès

a) Ces condamnation pour divers rappels de salaires d'août 1997 à avril 2004 portent sur des périodes afférentes à la gestion :

* de la société LAMY :

d'août 1997 au 21 mai 2011

* de la société PARISIORUM, aux droits de la société URBANIA PARIS Michel RICARD :

du 22 mai 2001 à avril 2004.

Les rappels de salaires étant dus aux gardiens en application des contrats de travail et des législation et réglementation en vigueur, la condamnation du Syndicat des copropriétaires, l'employeur, à les payer n'est pas constitutive d'un préjudice subi par la copropriété qui n'a fait qu'exécuter ses obligations pécuniaires à l'égard de ses salariés.

C'est simplement l'exécution d'une obligation que le syndicat avait méconnue, quelles que soient les raisons de cette méconnaissance.

Il n'y a pas lieu à dommages et intérêts à ce titre.

b) Gestion du procès

b-1. Les indemnités transactionnelles de licenciement réglées aux gardiens totalisant 48415 euros ne sont pas en relation causale établie avec les fautes reprochées aux deuxième et troisième syndics du syndicat. Elles trouvent leur cause exclusivement dans la décision unilatérale du Syndicat des copropriétaires de réorganiser le service du gardiennage pour alléger les charges.

La Cour ne les retient pas comme préjudice.

b-2. Les frais et honoraires de procédure extrêmement élevés pour un procès de droit du travail, réclamés à hauteur de 100 746,74 euros, liés au procès gagné par les gardiens trouvent leur origine essentielle dans les fautes successives des deuxième et troisième syndics qui se déduisent de l'arrêt du 12 octobre 2004 de la Cour.

Il est en effet indéniablement démontré que les contrats de travail des quatre gardiens, modifiés par avenant du 30 juillet 1996 ne respectaient pas la législation et/ou la réglementation du travail concernant les concierges qui n'avaient pas perçu pendant près de sept ans certaines rémunérations auxquelles ils avaient droit.

Or la fixation des conditions de travail du (ou des) concierge(s) incombe au syndic au regard de l'article 31 du décret du 17 mars 1967.

Il lui appartient à ce titre de respecter tous les textes applicables aux gardiens de copropriété (législation, réglementation, convention collective) bien que l'employeur soit le syndicat des copropriétaires et non le syndic.

Le non-respect du droit du travail engage la responsabilité contractuelle des syndics à l'égard du syndicat des copropriétaires pour faute de gestion.

En l'espèce ces fautes de gestion indiscutables ont été commises :

- par le Cabinet LAMY jusqu'au 21 mai 2001, date de l'expiration de son mandat,

- puis par la société URBANIA PARIS Michel RICARD du 22 mai 2001 jusqu'à son remplacement par le quatrième syndic, bien que cette société ne soit pas l'auteur des contrats des quatre gardiens.

En effet le syndic ne peut pas se prévaloir de la propre faute de son prédécesseur dans la fixation ou la modification des contrats pour tenter de s'exonérer de sa responsabilité.

En ne s'assurant pas de la conformité au droit du travail des contrats modifiés par son prédécesseur, la société LAMY, et partant en maintenant en vigueur des contrats dont elle aurait dû, en sa qualité de syndic professionnel , se convaincre du caractère illicite ou irrégulier, la société URBANIA PARIS Michel RICARD a, au même titre que son prédécesseur, commis une faute de gestion.

Les quitus dont ont bénéficié ces deux syndics pour plusieurs exercices ne couvrent pas leurs fautes de gestion puisque les copropriétaires n'étaient pas à même de déceler à l'examen des documents joints aux convocations aux assemblées générales annuelles et des procès-verbaux des dites assemblées, que les gardiens ne percevaient en fait que des salaires inférieurs à ceux auxquels ils avaient droit.

Ces fautes de gestion successives mais finalement de même nature ont indissociablement concouru à la réalisation du dommage consistant en la perte d'une chance extrêmement sérieuse d'éviter un procès avec les gardiens, générant la mise à sa charge de coûts élevés au titre :

- d'une part des condamnations accessoires (dépens et frais irrépétibles) au profit des parties gagnantes,

- d'autre part de l'engagement de ses propres frais et honoraires liés à sa représentation en justice.

La Cour dispose des éléments lui permettant d'estimer la chance perdue à 50 000 euros.

Elle rejette les prétentions plus amples ou contraires comme inopérantes et injustifiées sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation.

C) Mauvaise gestion du service de gardiennage.

Aucun des deuxième et troisième syndics n'a réorganisé le service du gardiennage pendant son mandat alors qu'il existait des solutions alternatives moins coûteuses offrant des services comparables comme celui mis en place par le syndic actuel.

Les deux anciens syndics se prévalent inutilement de la couverture de leur gestion par les quitus que plusieurs assemblées générales leur ont accordés.

En effet il sera rappelé que les quitus ne sont libératoires pour les syndics que du chef des actes de gestion connus du syndicat.

Ils sont inapplicables en l'espèce au service du gardiennage dès lors que les copropriétaires

qui les ont accordés à ces syndics ignoraient un fait essentiel, à savoir la non-conformité au droit du travail des contrats conclus avec les quatre gardiens moins payés que ce à quoi ils avaient droit.

Pour conférer un caractère libératoire à ces quitus il aurait fallu que les gardiens perçoivent la totalité des salaires auxquels ils avaient droit, ce qui n'était pas le cas, de sorte que les quitus ont été accordés par les assemblées générales sur des bases erronées.

S'il appartenait aux syndics précités de vérifier immédiatement la conformité des contrats des gardiens au droit du travail (voir supra b) il ne pouvait pas toutefois être exigé d'eux une réorganisation complète du service du gardiennage dès leur prise de fonction car ils avaient besoin de temps et d'un certain recul pour analyser l'organisation mise en place ou maintenue avant leur prise de fonction et proposer ensuite en concertation avec le conseil syndical de nouveaux modes de fonctionnement moins onéreux.

Leur devoir de conseil, qui n'exigeait pas une prise de décision immédiate, leur commandait en revanche de prendre l'initiative d'une étude qualitative et financière des services collectifs les plus coûteux des syndicats, en particulier ceux du gardiennage (quatre personnes), et ce sans attendre que l'assemblée ou le conseil syndical leur en fassent la demande, alors que dans cette copropriété, au fil des ans le souci d'économie des copropriétaires avait pris le pas sur les considérations sécuritaires qui avaient pu justifier sous le mandat du premier syndic l'embauche de quatre gardiens.

Ce délai d'étude et de mise en place d'une nouvelle organisation de ce service ne doit pas excéder deux ans pour un syndic normalement diligent.

* La société LAMY a failli à son devoir de conseil envers le syndicat mandant en ne faisant rien d'utile pour réduire les coûts d'un service devenu trop onéreux.

La circonstance que les copropriétaires savaient qu'il y avait deux couples de gardiens, connaissaient les horaires d'ouverture des loges et des remplacements pendant les fins de semaine et les congés et n'ignoraient pas le montant des charges qui leur était réclamé à ce titre est sans incidence sur l'exercice du devoir de conseil qui pèse sur le syndic professionnel et qui doit conduire celui-ci à rechercher en matière de gestion la solution la plus adéquate et la moins onéreuse.

* La société URBANIA PARIS Michel RICARD qui a maintenu telle quelle l'organisation

du service collectif dont s'agit trop coûteux qu'elle avait trouvée lors de sa prise de fonction n'a rien fait non plus pour réorganiser et réduire le coût de fonctionnement dudit service alors qu'à l'assemblée générale du 21 mai 2001 (qui l'a nommée syndic) cette société, représentée par Monsieur [Q] [J], précisait que la maîtrise des charges constituait l'un des objectifs majeurs de sa mission de syndic, que le groupe VENDOME ROME avait mis en place des possibilités de réduction des charges générales et que tous les contrats, en particulier de maintenance seront réexaminés et éventuellement, renégociés.

De même alors que le procès devant la Cour d'appel rendait pressante une nouvelle organisation du gardiennage de la copropriété pourtant annoncée par note du 15 novembre 2004, le syndic n'a formulé aucune proposition de réorganisation, ni avant ni à l'assemblée du 22 mars 2005.

Le procès en cours entre les gardiens demandeurs de rappels de salaires et le Syndicat des copropriétaires s'y opposant ne justifiait pas l'inertie du syndic.

Les deux syndics dont s'agit ont chacun manqué à leur devoir de conseil en ne proposant pas au cours de leurs mandats respectifs une réorganisation licite au regard du droit du travail et moins onéreuse du service de gardiennage que le Syndicat des copropriétaires était pourtant disposé à accepter comme le confirme son adoption du système mis en place par le syndic actuel depuis l'exercice 2007/2008 avec l'embauche de deux gardiens au lieu de quatre.

Il est résulté de leurs manquements respectifs à leur devoir de conseil des pertes de chance extrêmement sérieuses pour le syndicat d'obtenir la mise en place en temps voulu d'une réorganisation moins coûteuse du gardiennage.

La Cour dispose des éléments pour évaluer chaque chance perdue (une par syndic) à la somme de 40 000 euros.

Ces fautes, bien que de même nature, n'ont pas, à l'inverse de celles ayant abouti à la prise en charge de coûts de procédure, indissociablement concouru à la création du dommage.

IV - Sur les autres demandes

L'équité commande à la Cour d'allouer au Syndicat des copropriétaires la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du CPC représentant une partie de ses frais hors dépens et pesant in solidum sur les deux responsables.

Les dépens de première instance afférents à la mise en cause de la société GÉRER (devenu DAUCHEZ COPROPRIÉTÉS) et ceux d'appel concernant l'intimation de cette société sont laissés à la charge du Syndicat des copropriétaires, partie perdante à l'égard du syndic précité.

Les autres dépens de première instance et d'appel pèsent sur les deux co-responsables.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Reçoit le Syndicat des copropriétaires des copropriétaires du [Adresse 3] en ses demandes,

Reçoit la société DAUCHEZ COPROPRIÉTÉS venant aux droits de la société GÉRER en son intervention volontaire,

Vu notamment les articles 1992 du Code Civil, 18 de la loi du 10 Juillet 1965 et 31 du décret du 17 mars 1997,

Sur les suites de l'arrêt de la Cour d'appel de PARIS, 18ème chambre D du 12 octobre 2004,

Condamne in solidum la société LAMY et la société PARISIORUM aux droits de la société URBANIA PARIS Michel RICARD à payer au Syndicat des copropriétaires de l'immeuble précité la somme de 50 000 euros produisant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Sur la gestion du service de gardiennage,

Condamne la société LAMY à payer audit Syndicat des copropriétaires la somme de 40 000 euros produisant intérêts au taux légal comme ci-dessus,

Condamne la société PARISIORUM à payer au Syndicat des copropriétaires de l'immeuble dont s'agit la somme de 40 000 euros produisant intérêts au taux légal comme ci-dessus.

Vu l'article 700 du CPC,

Condamne in solidum les sociétés LAMY et PARISIORUM à payer 10 000 euros audit Syndicat des copropriétaires,

Rejette les demandes dirigées contre la société DAUCHEZ COPROPRIÉTÉS aux droits de la société GÉRER,

Condamne ledit Syndicat des copropriétaires aux dépens de première instance afférents à la mise en cause de la société GÉRER et aux dépens d'appel relatifs à l'intimation de cette société devenue DAUCHEZ COPROPRIETES,

Condamne in solidum les sociétés LAMY et PARISIORUM aux autres dépens de première instance et d'appel,

Dit que les dépens pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du CPC,

Rejette les demandes autres, plus amples ou contraires.

Fait à Paris le 10 avril 2013

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 10/20507
Date de la décision : 10/04/2013

Références :

Cour d'appel de Paris G2, arrêt n°10/20507 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-04-10;10.20507 ?
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