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04/04/2013 | FRANCE | N°12/10086

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 04 avril 2013, 12/10086


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRÊT DU 04 Avril 2013



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/10086

S 12/10088



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Septembre 2012 par Conseil de Prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° F11/2340





DEMANDERESSE AU CONTREDIT (12/10086)

DEFENDERESSE AU CONTREDIT (12/10088)

SAS SECTOR CONSULTING

[Adresse 1] r>
[Localité 2]

représentée par Me Martine BENNAHIM, avocat au barreau de PARIS, toque : E0866





DEFENDERESSE AU CONTREDIT (12/10086)

DEMANDERESSE AU CONTREDIT (12/10088)

SA ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRÊT DU 04 Avril 2013

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/10086

S 12/10088

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Septembre 2012 par Conseil de Prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° F11/2340

DEMANDERESSE AU CONTREDIT (12/10086)

DEFENDERESSE AU CONTREDIT (12/10088)

SAS SECTOR CONSULTING

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Martine BENNAHIM, avocat au barreau de PARIS, toque : E0866

DEFENDERESSE AU CONTREDIT (12/10086)

DEMANDERESSE AU CONTREDIT (12/10088)

SA SECTOR

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Martine BENNAHIM, avocat au barreau de PARIS, toque : E0866

DEFENDEUR AUX CONTREDITS

Monsieur [X] [Y]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Jean-pierre CUSSAC, avocat au barreau de PARIS, toque : B0117

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 février 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine BEZIO, Conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Irène LEBÉ, Président

Madame Catherine BEZIO, Conseiller

Madame Martine CANTAT, Conseiller

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Irène LEBÉ, Président

- signé par Madame Irène LEBÉ, Président et par Madame FOULON, Greffier présent lors du prononcé.

***********

Statuant sur les contredits formés par la société SECTOR CONSULTING et par la société SECTOR à la suite du jugement en date du18 septembre 2012, par lequel le conseil de prud'hommes de Paris, en sa formation de départage, s'est déclaré compétent pour statuer sur les demandes formées par M.[X] [Y] à l'égard de ces deux sociétés';

Vu les conclusions remises et soutenues à l'audience du 20 février 2013 par les deux sociétés demanderesses au contredit, tendant à voir juger que le conseil de prud'hommes n'est pas compétent et renvoyer, en conséquence, l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris', avec condamnation de M.[Y] à payer à chacune des sociétés, la somme de 4000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile';

Vu les écritures développées à la barre par M.[Y] qui prie la cour de rejeter les contredits et d'évoquer, afin de statuer au fond sur ses prétentions';

SUR CE LA COUR

Considérant que les sociétés SECTOR et SECTOR CONSULTING ont été, toutes deux, attraites devant le conseil de prud'hommes par M.[Y]'; que le jugement objet de leur contredit respectif, leur est commun'; qu'il convient, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de statuer, par une même décision sur ces deux recours'et, donc, d'ordonner la jonction des deux instances correspondantes';

Considérant qu'il résulte des pièces et conclusions que la société SECTOR CONSULTING a conclu le 10 septembre 2004 un contrat qualifié de «'contrat de prestations de service'» dans lequel M.[Y] était chargé d'une mission tendant à assurer le développement commercial de la société -dans les domaines des banques, assurances, mutelles, sociétés financières- et de générer pour la société un chiffre d'affaires et une marge opérationnelle';

que ce contrat prévoyait une rémunération pour M.[Y] composée, à la fois, d'un fixe et d'une commission, fonction du chiffre d'affaires de la société, comportait une clause d'exclusivité et précisait que «'le fait (pour M.[Y] ) de ne pas avoir atteint (ses) objectifs (...) constituera(it) un motif réel et sérieux de rupture de contrat, à l'initiative de la société'»';

que M.[Y] a régulièrement adressé à la société SECTOR CONSULTING des factures d'honoraires qui lui ont été réglées par celle-ci ainsi que par la société SECTOR, appartenant au même groupe que la société SECTOR CONSULTING ';

qu'à compter de 2009, M.[Y] n'a plus été honoré du montant de toutes ses factures'; qu''il a écrit les 20 janvier et 2 février 2011 aux deux sociétés pour se plaindre de leur défaillance, réclamer la somme qu'il estimait lui être due et demander l'exécution de son contrat, constituant, en réalité, un contrat de travail, selon lui';

qu'il a saisi le conseil de prud'hommes le 3 février suivant, afin de voir requalifier en contrat de travail son contrat de prestations de service, signé le 10 septembre 2004'et voir condamner les sociétés SECTOR CONSULTING et SECTOR à lui payer le montants des salaires dont elles lui étaient redevables';

que, par lettres recommandées en date, respectivement, du 28 janvier et du 4 février 2011, les sociétés SECTOR CONSULTING et SECTOR ont informé M.[Y] qu'elles mettaient fin, selon la première, au «'contrat de prestations de service daté du 10 septembre 2004'» et, d'après la seconde, à leurs «'relations commerciales'»';

que, devant le conseil de prud'hommes -où M.[Y] sollicitait, à titre additionnel, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, compte tenu de l'évolution des événements- les sociétés défenderesses ont soutenu l'incompétence de la juridiction prud'homale, en l'absence de contrat de travail';

que, par le jugement actuellement frappé de contredit, le conseil de prud'hommes a jugé que les parties étaient bien liées par un contrat de travail et a rejeté en conséquence le moyen d'incompétence opposé par les sociétés';

Considérant qu'il n'est pas contesté que c'est à M.[Y] qu'il incombe d'apporter la preuve qu'il était -comme il le prétend- lié à la société SECTOR CONSULTING et à la société SECTOR, par un contrat de travail'; qu'en effet, les parties ayant signé un contrat de prestation de services, la requalification de ce contrat, en contrat de travail, suppose que M.[Y] démontre le caractère erroné de cette qualification initiale'; qu'en outre, étant immatriculé comme travailleur indépendant, à l'époque de la signature du contrat litigieux, M.[Y] tombe sous le coup de la présomption de non salariat, édictée par l'article L 8221-6 du code du travail, qu'il lui revient de renverser';

Considérant que pour administrer la preuve dont il a ainsi la charge, M.[Y] fait valoir

-qu'il figurait dans l'organigramme du groupe SECTOR et bénéficiait des moyens de travail que lui procurait la société SECTOR CONSULTING (bureau, carte de visite professionnelle, véhicule automobile)

-qu'il «'rapportait'» à la Directrice administrative et financière de la société SECTOR' et se trouvait placé sous l'autorité du président de la société SECTOR CONSULTING

-que les termes employés par le contrat de «'prestations de service'» renvoient à des expressions voire des notions («'motif réel et sérieux de rupture'», fixation d'objectifs,) habituelles du contrat de travail

-qu'il était placé, pour l'exécution de ses missions, sous le contrôle du vice-président de la société SECTOR CONSEIL (ou CONSULTING) et s'avérait tenu par une clause d'exclusivité

-qu'il exerçait, de fait, les fonctions de «'directeur de département - ou de «'business unit'»- effectuant des propositions dans le domaine des ressources humaines comme financières et possédant, d'ailleurs, le titre de vice-président dont il faisait usage, tant à l'intérieur de l'entreprise, qu'à l'égard des tiers';

Considérant que M.[Y] en conclut qu'un lien de subordination existait bien entre lui et les sociétés SECTOR CONSULTING ou SECTOR, et qu'au regard des liens qui l'unissaient à celles-ci, il est fondé à exciper de l'existence de ce contrat à l'égard de chacune d'elles';

Mais considérant que si l'intégration d'un travailleur dans un service organisé peut constituer un indice, permettant de qualifier, de contrat de travail, la relation unissant ce salarié à l'entreprise pour laquelle celui-ci travaille, encore faut-il que l'employeur détermine, lui-même, et lui seul, les conditions de travail de l'intéressé';

Or considérant qu'en l'espèce, si M.[Y] affirme avoir été tenu dans un tel lien de subordination, force est de constater que les pièces produites aux débats n'établissent nullement qu'il était placé, quant à l'organisation de son travail, dans une situation de dépendance quelconque'-étant rappelé que les dispositions du contrat sont, à cet égard, dépourvues de caractère probant puisque, seule, la subordination effective de celui qui prétend être salarié, peut conduire à conclure à l'existence d'un contrat de travail ;

qu'il importe peu, dès lors, que le contrat ait précisé que certaines des missions de M.[Y] (en matière d'organisation commerciale) s'effectueraient «'sous contrôle du vice président'»'-d'autant que, d'une part, la plupart des missions de M.[Y], d'après ce même contrat, s'accomplissaient, elles, «'avec le vice président'», termes exclusifs de tout rapport hiérarchique, et d'autre part, le prestataire de service est nécessairement assujetti à la demande et à la critique de son client';

Et considérant que, contrairement à l'appréciation qu'en ont faite les premiers juges, les pièces versées aux débats -si elles attestent d'une incontestable implication de M.[Y] dans l'activité et le fonctionnement de la société SECTOR CONSULTING- ne contiennent aucune instruction donnée à M.[Y], par le président de la société SECTOR CONSULTING, M.J.F.[T], ni quiconque d'autre'; qu'elles établissent seulement, et tout au plus, que ce dernier préparait des projets concernant le travail ou la rémunération des salariés de la société, dont il décidait avec M.[T], avant de les mettre en 'uvre, notamment en animant ,lui-même, des équipes de travail', en particulier lors de réunions, convoquées à son initiative';

que la cour cherche en vain les rapports d'activité qu'aurait pu adresser M.[Y] à M.[T] -étant précisé que les rapports d'activité visés par les premiers juges étaient ceux faits au personnel de la société SECTOR CONSULTING'; qu'aucune preuve n'est ainsi apportée du contrôle effectif, prétendument exercé sur M.[Y] et du caractère subordonné des fonctions de celui-ci';

que, de même, les circonstances de temps et de lieu relatives à l'exécution de ses missions par M.[Y] demeurent inconnues';

qu'en définitive, si l' intégration dans l'entreprise de M.[Y] est susceptible de recevoir une qualification, autre que celle de prestations de service, la requalification juridique appropriée ne peut conduire à la notion juridique de contrat de travail' - précisément, compte tenu de l'extrême latitude dont M.[Y] apparaît avoir bénéficié, au sein de l'entreprise, en raison tant, de l'étendue, que des modalités d'exercice de ses pouvoirs au sein de l'entreprise'';

Considérant que faute pour M.[Y] de renverser la présomption de non-salariat, prévue à l'article L 8221-6 du code du travail, la cour ne peut donc que constater l'incompétence du conseil de prud'hommes pour connaître des demandes de M.[Y] et renvoyer la cause et les parties devant le tribunal de commerce de Paris';

Considérant que l'équité commande de laisser à la charge de la société SECTOR CONSULTING et de la société SECTOR, leurs frais irrépétibles';

PAR CES MOTIFS

Ordonne la jonction des instances enregistrées sous les numéros de rôle 12/10086 et

12 /10088';

Accueille les contredits';

Dit que le contrat de prestations de services liant les parties n'est pas un contrat de travail';

Dit, en conséquence, que le conseil de prud'hommes de Paris est incompétent et renvoie la cause et les parties devant le tribunal de commerce de Paris, pour statuer sur les demandes de M.[Y]';

Dit que le greffier de cette chambre transmettra au tribunal de commerce de Paris le dossier de l'affaire avec une copie du présent arrêt';

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur des demanderesses aux contredits';

Met les frais des contredits à la charge de M.[Y] .

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 12/10086
Date de la décision : 04/04/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°12/10086 : Se dessaisit ou est dessaisi au profit d'une autre juridiction


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-04-04;12.10086 ?
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