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04/04/2013 | FRANCE | N°11/05889

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 04 avril 2013, 11/05889


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 04 avril 2013 après prorogation

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/05889

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Juin 2011 par Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 08/14347









APPELANTE

Madame [R] [J]

[Adresse 2]

comparante en personne, assistée de Me Jean-charles MARQUENET, avocat au barreau

de PARIS, toque : G0801







INTIMEE

GIE GROUPE SOLENDI

[Adresse 1]

représentée par Me Laure SERFATI, avocat au barreau de PARIS, toque : C2348











COMPOSITION DE LA COUR :
...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 04 avril 2013 après prorogation

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/05889

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Juin 2011 par Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 08/14347

APPELANTE

Madame [R] [J]

[Adresse 2]

comparante en personne, assistée de Me Jean-charles MARQUENET, avocat au barreau de PARIS, toque : G0801

INTIMEE

GIE GROUPE SOLENDI

[Adresse 1]

représentée par Me Laure SERFATI, avocat au barreau de PARIS, toque : C2348

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Février 2013, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'appel formé par [R] [H] épouse [J] à l'encontre du jugement du conseil de prud'hommes de PARIS en date du 25 juin 2010 ayant statué sur le litige qui l'oppose à son ancien employeur, le groupement d'intérêt économique GROUPE SOLENDI ;

Vu le jugement déféré ayant :

- débouté [R] [H] épouse [J] de ses demandes,

- condamné celle-ci aux entiers dépens ;

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

[R] [H] épouse [J], appelante, poursuit :

- l'infirmation du jugement entrepris,

- la constatation de ce que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en date du

18 novembre 2009 est imputable à l'employeur et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- la condamnation du GIE GROUPE SOLENDI à lui payer les sommes de:

- 13'000 € à titre de dommages et intérêts pour discrimination salariale,

- 27'200 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. 1235-3 du Code du travail,

- 6'782,58 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 678,25 € à titre d'indemnité de congés payés afférents,

- 17'635 € à titre d'indemnité de licenciement en application de l'article 9 de l'accord d'entreprise du 26 juin 2000,

- 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- la remise, sous astreinte de 80 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de nouveaux bulletins de paie correspondant au préavis ainsi qu'une attestation rectifiée destinée au PÔLE EMPLOI,

- la condamnation du GIE GROUPE SOLENDI aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Le GIE GROUPE SOLENDI, intimé, conclut :

- au débouté de [R] [J] de toutes ses demandes,

- à sa condamnation au paiement des sommes de :

- 1 500 € au titre de la procédure abusive,

- 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le groupement d'intérêt économique SOLENDI applique la convention collective nationale des sociétés financières ainsi qu'un accord d'entreprise conclu le 26 juin 2000.

Suivant lettre d'engagement du 30 septembre 1996, le GIE GROUPE AIPAL a engagé [R] [H] en qualité de gestionnaire contentieux au coefficient 225, pour une durée déterminée allant du 30 septembre au 31 décembre 1996, en raison d'un surcroît de travail dû à la reprise en gestion des dossiers contentieux CILMI. Après prolongation de ce contrat jusqu'au 31 août 1997, la relation de travail s'est poursuivie à durée indéterminée, à partir du 1er septembre 1997, la salariée obtenant alors le coefficient 295, puis le 1er janvier 2001, le coefficient 310, le statut ' Assimilé-Cadre ' et une augmentation de sa rémunération de base brute mensuelle qui, en avril 2007, s'élevait à 2 076,57 € augmentée d'une prime d'ancienneté de 186,89 €.

À la suite de la fusion, en juin 2000, d'AIPAL CILMI et de l'UNIPEC, les contrats de travail des salariés ont été transférés au GIE GROUPE SOLENDI.

Le contrat de travail de [R] [H] devenue épouse [J] a été suspendu du 2 mai 2007 au 30 novembre 2009 en raison des circonstances suivantes :

- d'un arrêt maladie, du 2 mai au 26 août 2007,

- d'un congé maternité du 27 août 2007 au 16 février 2008,

- d'un arrêt maladie du 17 février au 11 avril 2008,

- de la prise de congés payés du 12 au 30 avril 2008,

- d'un congé parental du 1er mai au 6 octobre 2008,

- de la prise de congés payés du 7 octobre au 30 novembre 2008,

- d'un arrêt maladie du 1er au 12 décembre 2008,

- de la prise de congés payés du 13 au 18 décembre 2008,

- d'un congé de présence parentale du 19 décembre 2008 au 30 novembre 2009.

Par lettre du 27 juin 2008, l'avocat de la salariée a demandé au GROUPE SOLENDI de lui indiquer le nom de son conseil afin de procéder à la recherche d'un terrain d'entente, attirant son attention sur le fait que sa cliente n'avait bénéficié pendant 10 ans que de deux augmentations de salaire extrêmement modestes et que l'entretien d'évaluation qui s'était tenu en janvier 2007 pour l'année 2006, au cours duquel son départ de l'entreprise avait été évoqué par le représentant de la direction, l'avait particulièrement déstabilisé et risquait de rendre difficiles les conditions de sa reprise de travail à l'issue de son congé parental.

Le 2 décembre 2008, [R] [J] a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS de sa demande en résiliation du contrat de travail ainsi que d'une demande en paiement d'un rappel de salaire fondée sur la discrimination.

Par lettre du 18 novembre 2009, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail, imputant l'entière responsabilité de la rupture à son employeur en raison des propos véhéments, humiliants et vexatoires qui ont été tenus à son encontre lors de l'entretien annuel d'évaluation du 29 janvier 2007 par le directeur du service contentieux qui lui a reproché de ne pas avoir réalisé des objectifs qu'elle estimait irréalisables, ces propos qui incitaient à sa démission l'ayant profondément déstabilisée.

Les parties ont développé à l'audience leurs moyens et présenté leurs demandes, tels que formulés dans leurs conclusions respectives.

SUR CE

- Sur le principe d'égalité de rémunération appliqué aux gestionnaires de contentieux

[R] [J] soutient qu'elle a été victime d'une discrimination salariale en ce sens que sa rémunération de base aurait été inférieure à celle de ses collègues gestionnaires de contentieux chargés d'effectuer des travaux identiques. Elle ne fait valoir aucune raison à cette discrimination, ni aucun des motifs discriminatoires énumérés par l'article L. 1132-1 du Code du travail liés notamment à l'origine, à la personne, à l'apparence, à la situation de famille, aux opinions politiques, aux activités syndicales, aux convictions religieuses, à l'état de santé ou à l'existence d'un handicap. Sa réclamation apparaît donc fondée, non sur la discrimination, mais sur le non-respect à son égard du principe d'égalité de rémunération qui aurait dû être appliqué, sous réserve des restrictions apportées à ce principe, à tous les gestionnaires de contentieux de son service participant à des tâches identiques.

La salariée, titulaire d'une maîtrise de droit, faisait en effet partie au sein du service contentieux du GIE SOLENDI d'un sous-groupe constitué de 5 gestionnaires de contentieux qui étaient chargés de la gestion des prêts au titre du 1% patronal et des avances LOCA PASS.

Elle fait valoir que, sur 10 années, son salaire qui ne comportait pas de rémunération variable n'a fait l'objet que de 2 augmentations individuelles, 89 € par mois en février 2001 et 75 € par mois en janvier 2004, et qu'elle n'a bénéficié que d'une prime collective exceptionnelle de 1 000 € en juin 2006.

Elle affirme que les collègues, pourtant moins anciennes qu'elle, qui avaient les mêmes attributions, percevaient un salaire de base supérieur au sien, mais que le GIE GROUPE SOLENDI à qui une sommation de communiquer les bulletins de salaire de [E] [L], [P] [N], [W] [U] et [A] [X] a été délivrée le 19 juin 2009, a toujours refusé de produire des éléments justifiant l'égalité de traitement entre les gestionnaires de contentieux.

Le GIE GROUPE SOLENDI conteste les éléments de rémunération annoncés par l'appelante et indique qu'en 2006, dernière année complète précédant la suspension de son contrat de travail, elle a perçu, outre la prime de 1 000 € bruts au mois de mai, une prime collective de 650 € bruts au mois de juin et, au mois d'octobre, une prime de fidélité de 2 252,20 € bruts versée tous les 10 ans et ce, alors même que les mauvais résultats qu'elle ne conteste pas n'ont pas permis une augmentation de salaire individuelle. Il soutient qu'une sommation de communiquer ne saurait pallier l'absence de production de tout élément de fait susceptible de caractériser une inégalité de rémunération.

Il appartient en effet au salarié qui invoque une atteinte au principe d'égalité de rémunération de soumettre des éléments de fait susceptibles de caractériser l'inégalité en produisant par exemple, tout document ou tout élément justifiant le salaire moyen perçu par son équipe ou par l'ensemble des gestionnaires de contentieux chargés de tâches identiques.

En l'espèce, l'appelante, invoquant une rupture d'égalité salariale à son détriment, ne fournit aucun renseignement laissant supposer une inégalité de rémunération telle que dénoncée, alors qu'elle produit une attestation d'[P] [N], gestionnaire de contentieux et déléguée syndicale, qui témoigne de la relation que sa collègue [R] [J] lui a faite en sortant de son entretien d'évaluation mais qui ne contient aucune indication sur l'éventail des salaires versés aux gestionnaires de contentieux de son équipe, ni sur sa propre rémunération. Dans ces conditions, la charge de la preuve ne peut reposer exclusivement sur l'employeur et il ne peut être exigé de lui qu'il démontre soit une parfaite égalité de salaire entre les gestionnaires de contentieux, soit des éléments objectifs justifiant des différences entre les rémunérations.

La demande de dommages et intérêts formée par [R] [J] pour discrimination doit en conséquence être rejetée.

- Sur la rupture du contrat de travail et ses conséquences

L'appelante ne sollicite plus la résiliation de son contrat de travail mais demande de faire produire à la prise d'acte de la rupture qu'elle a notifiée à l'employeur le 18 novembre 2009 les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Elle fait valoir qu'elle a été contrainte de prendre acte de cette rupture en raison des manquements graves commis à son endroit par son employeur, manquements qui ont consisté d'une part, en une discrimination salariale du fait de l'inégalité de rémunération dont elle sait qu'elle a été victime, d'autre part, en un harcèlement pour l'inciter à obtenir des résultats et notamment des recouvrements par des méthodes déontologiquement douteuses. Elle explique que ce harcèlement a trouvé son paroxysme lors de l'entretien d'évaluation du 29 janvier 2007 au cours duquel son supérieur hiérarchique lui a tenu des propos vexatoires et humiliants visant à obtenir son départ de l'entreprise et que cet entretien a provoqué un syndrome dépressif réactionnel qui a justifié les arrêts maladie qui ont suivi.

Il a été développé ci-avant qu'aucun élément du dossier ne permettait de retenir en défaveur de [R] [J] une discrimination salariale ou une violation du principe d'égalité des rémunérations des gestionnaires de contentieux.

En ce qui concerne le harcèlement invoqué, aucun n'élément du dossier n'établit qu'elle a reçu des instructions pour enfreindre les règles déontologiques en vue d'obtenir des résultats supérieurs.

Si l'entretien d'évaluation du 29 janvier 2007 conduit par le directeur des services juridique, recouvrement et contentieux, en présence du responsable du service contentieux, a pu se dérouler de façon conflictuelle ainsi que cela ressort des commentaires rédigés à la fin de l'entretien par la collaboratrice évaluée, les propos qui ont été tenus à cette occasion par l'évaluateur ne sauraient constituer des agissements répétés ayant eu pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité de la salariée, d'altérer sa santé physique ou mentale de compromettre son avenir professionnel. Par ailleurs, il n'est pas démontré que ces propos sont à l'origine du syndrome dépressif réactionnel constaté le 7 mars 2007 par son médecin traitant, qui n'a cependant pas donné lieu à un avis du médecin du travail, ni été déclaré à la caisse primaire d'assurance maladie au titre de la maladie professionnelle ou de l'accident du travail.

Pris isolément en dehors de tout contexte de harcèlement moral, les propos rapportés ne sont pas susceptibles de constituer à eux seuls un manquement de l'employeur d'une gravité de nature à ne plus permettre la poursuite de l'exécution du contrat et à justifier sa rupture à ses torts près de trois années plus tard. C'est donc à raison que le conseil de prud'hommes a rejeté l'ensemble des prétentions de [R] [J] dont la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail doit produire les effets d'une démission.

Il n'est pas démontré que la procédure d'appel engagée par cette dernière a causé un préjudice à son ancien employeur, il n'y a donc pas lieu d'accorder au GIE GROUPE SOLENDI les dommages-intérêts qu'il sollicite au titre de la procédure abusive.

- Sur la charge des dépens et les demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

Succombant en son recours, [R] [J] sera condamnée aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées. Il y a lieu, en équité, de laisser au GIE GROUPE SOLENDI la charge de ses frais non taxables.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré ;

Dit n'y avoir lieu à application en cause d'appel de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne [R] [H] épouse [J] aux dépens de l'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 11/05889
Date de la décision : 04/04/2013

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°11/05889 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-04-04;11.05889 ?
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