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14/02/2013 | FRANCE | N°10/10099

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 14 février 2013, 10/10099


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 14 février 2013 après prorogations

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/10099



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Octobre 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 04/16165





APPELANTE

D.C.S EASYWARE venant aux droits de la société OSTRAL IT SERVICES

[Adresse 2]

représentée par Me Philippe AUZAS

, avocat au barreau de PARIS, toque : P478 substitué par Me Sigmund BRIANT, avocat au barreau de PARIS, toque : P 478







INTIME

Monsieur [S] [L]

[Adresse 1]

comparant en ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 14 février 2013 après prorogations

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/10099

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Octobre 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 04/16165

APPELANTE

D.C.S EASYWARE venant aux droits de la société OSTRAL IT SERVICES

[Adresse 2]

représentée par Me Philippe AUZAS, avocat au barreau de PARIS, toque : P478 substitué par Me Sigmund BRIANT, avocat au barreau de PARIS, toque : P 478

INTIME

Monsieur [S] [L]

[Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Sylvie CHATONNET-MONTEIRO, avocat au barreau d'ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Juin 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Evelyne GIL, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier : Mme Flora CAIA, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'appel régulièrement formé par la société OSTRA IT SERVICES SAS contre un jugement du conseil de prud'hommes de PARIS en date du 14 octobre 2010 ayant statué sur le litige qui l'oppose à son ancien employé, [S] [L].

Vu le jugement déféré ayant :

- dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- rappelé que la moyenne des 3 derniers mois de salaire s'élève à 4 907 €,

- condamné la SARL OSTRAL IT SERVICES à payer à [S] [L] les sommes de:

- 14'712 € brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1 471,20 € brut au titre des congés payés afférents,

avec intérêt au taux légal à compter du 17 décembre 2004, avec capitalisation après un an,

- 7 628,46 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 30'000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, toutes causes de préjudices confondues,

- 700 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

avec intérêt au taux légal à compter du jugement et capitalisation après un an,

- ordonné à la SARL OSTRAL IT de remettre à [S] [L] une attestation PÔLE EMPLOI conforme au jugement sans qu'il y ait lieu d'ores et déjà de prononcer une astreinte,

- débouté [S] [L] du surplus de sa demande,

- condamné la SARL OSTRAL IT SERVICES, en application de l'article L. 1235-4 du Code du travail, à rembourser à l'organisme PÔLE EMPLOI concerné les indemnités de chômage versées à [S] [L] dans la limite de six mois,

- condamné cette dernière aux dépens.

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

La société DCS EASYWARE SAS venant aux droits de la société OSTRAL IT SERVICES, appelante, poursuit :

- la réformation du jugement entrepris,

- la constatation de l'existence d'une faute grave justifiant le licenciement de [S] [L],

- la condamnation de ce dernier à lui payer :

- 44'163 € en remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement,

- 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des entiers dépens.

[S] [L], intimé, conclut :

- à la confirmation du jugement déféré à l'exception du quantum de l'indemnité allouée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et du débouté de sa demande de dommages et intérêts,

- en conséquence, à la condamnation de la société OSTRAL IT SERVICES à lui payer les sommes de :

- 39'200 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 5'000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et mensonger,

- 2 500 € au titre en de l'article 700 du Code de procédure civile en sus de la somme allouée en première instance,

avec intérêts de droit à compter de l'exigibilité des condamnations de nature salariale et à compter de la décision pour les autres condamnations et avec anatocisme,

- à la remise de l'attestation destinée au PÔLE EMPLOI et d'un certificat de travail, sous astreinte de 50 € par document et par jour de retard,

- à la condamnation de la société OSTRAL IT SERVICES en tous les dépens y compris les frais d'exécution éventuelle par voie d'huissier.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SARL OSTRAL IT SERVICES aux droits de laquelle se trouve actuellement la société DCS EASYWARE SAS exerçait une activité de services informatiques.

Elle occupait plus de 10 employés et appliquait la convention collective des bureaux d'études techniques des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseils dite Syntec.

Suivant contrat de travail à durée indéterminée signé le 14 mai 1999, elle a engagé [S] [L] en qualité de directeur de projets relevant du statut cadre. En son dernier état, la rémunération brute mensuelle du salarié qui occupait les fonctions de directeur technique s'élevait à 4 700 € à laquelle s'ajoutait une partie variable en rapport avec ses objectifs personnels et les résultats de la société ainsi qu'un avantage en nature constitué par la mise à disposition d'une voiture.

Le 29 octobre 2004, la société OSTRAL IT SERVICES a convoqué [S] [L] à se présenter le 5 novembre 2004 à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement.

Le 9 novembre 2004, elle lui a notifié son licenciement dans les termes suivants :

' Courant juin 2001, vous avez fait la demande d'une carte société pour que l'entreprise assume les frais professionnels que vous générez et notamment, ceux d'essence. Il a alors été mis à votre disposition une $gt;, carte qui vous permettait de payer vos frais professionnels et d'être remboursé avant que ces montants soient prélevés sur votre compte. Cette carte bénéficie d'une garantie de paiement assumée par l'entreprise.

En juin et juillet 2002, vous avez procédé à des achats personnels, avec cette carte réservée à la prise en charge des frais propres à l'entreprise, sans en avertir le service administratif, ni la direction générale.

Ces achats, pour un montant global de 2934,50 € généré en 2 fois, ont été présentés à l'encaissement par la banque de l'entreprise sur votre compte bancaire et rejetés pour manque de provision. Les montants ont alors été prélevés sur le compte bancaire de la société.

Pour rappel, vous vous étiez engagé, lors de la mise à disposition de cette carte, à provisionner votre compte en fonction des prélèvements à venir. De plus, les frais liés à votre fonction dans l'entreprise (essence, parking, frais de véhicule) vous avaient d'ores et déjà été remboursés.

Bien que connaissant les conditions de fonctionnement de cette carte, vous n'avez informé ni le service administratif, ni la direction générale du recours à la garantie entreprise pour défaut de provision de votre part.

En novembre 2003, des faits similaires, pour un montant de 598,80 €, ont été découverts lors d'un pointage des comptes.

Nous vous avons alors informé de ce détournement des procédures de l'entreprise, précisé que la carte mise à votre disposition n'avait pas destination la prise en charge de vos frais personnels et nous vous avions rappelé votre devoir de provisionner votre compte en fonction des montants à déduire. Le montant en question a été soustrait de votre note de frais suivante.

Vous ne nous avez pas signalé alors que des faits identiques pour des montants plus importants s'étaient déjà produits.

En octobre 2004, dans le but de résoudre les lignes comptables non lettrées, un pointage comptable a mis en lumière des prélèvements du montant global de 2934,50 € sur le compte de la société sans justificatif comptable.

La recherche entreprise a permis d'identifier l'origine de ces prélèvements : il s'agit de vos dépenses personnelles prélevées de façon indue sur le compte bancaire de la société.

Ces faits sont constitutifs d'une faute grave : vous avez détourné, il y a deux ans, des fonds de l'entreprise, à l'insu de la direction générale de l'entreprise.

De plus, vous êtes membre du comité de direction et, à ce titre, votre comportement doit avoir valeur d'exemple.

Enfin, la découverte de faits similaires, en novembre 2003, ne vous a pas amené à signaler que des faits similaires s'étaient produits et de ce fait, à ne pas rembourser l'entreprise de ces montants.

Cette conduite met en cause la bonne marche de l'entreprise. Les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien du 5 novembre 2004 n'ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet ; nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute grave.

...................................................................................................................................................

Compte tenu de la gravité de votre faute, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible: le licenciement prend donc effet immédiatement à la date du 15 novembre 2004, sans indemnité de préavis, ni de licenciement. Vous cesserez donc de faire partie de nos effectifs le 16 novembre 2004.'

[S] [L] a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS de la contestation de son licenciement et de ses demandes en paiement des indemnités de rupture, le 15 décembre 2004.

Les parties ont développé à l'audience leurs moyens et présenté leurs demandes, tels que formulés dans leurs conclusions respectives.

SUR CE

- Sur la qualification du licenciement et ses conséquences

Aux termes de sa lettre de licenciement pour faute grave du 9 novembre 2004, la société OSTRAL IT SERVICES reproche à [S] [L] d'avoir, à l'insu de la direction générale, détourné des fonds de l'entreprise, en juin et juillet 2002, puis à nouveau en novembre 2003, en utilisant pour des achats personnels, la carte bancaire de paiement dont l'entreprise le faisait bénéficier afin d'éviter qu'il fît l'avance de ses frais professionnels, étant précisé que la carte bénéficiait d'une garantie de paiement assumée par la société.

Elle lui reproche également de s'être abstenu, en novembre 2003, à l'occasion de la découverte de faits similaires, pour un montant de 598,80 € qui a été déduit de sa note de frais, de signaler la prise en charge par la société, dans les mêmes conditions, en juin et juillet 2002, d'achats personnels totalisant 2 934,50 €, se soustrayant ainsi au remboursement de cette somme.

Le salarié oppose la prescription des faits fautifs, faisant observer que la sanction est intervenue plus de deux années plus tard.

À cet égard, le relevé établi au nom de [S] [L] des opérations effectuées au moyen de la carte bancaire d'entreprise faisant apparaître des achats personnels d'un montant de

2 091 93 € a été reçu par la société OSTRAL IT SERVICES, dès le 24 juillet 2002, et, le

29 octobre 2002, elle était destinataire du relevé de son compte bancaire faisant apparaître le débit correspondant sous la mention 'REGUL CB [L] JACQUES'.

Elle disposait donc, à la date du 29 octobre 2002, de tous les éléments lui permettant de connaître parfaitement les faits reprochés au salarié qu'elle sanctionnera deux années plus tard, expliquant qu'elle les avait découverts à la faveur d'un contrôle comptable entrepris en octobre 2004.

C'est donc à raison que le conseil de prud'hommes a estimé que les faits sanctionnés par le licenciement étaient prescrits. Parmi ces faits figure également leur absence de révélation par le salarié à l'occasion d'un incident similaire survenu en novembre 2003.

La constatation de l'absence de cause réelle et sérieuse justifiant le licenciement de [S] [L] doit être confirmée ainsi que les condamnations de l'employeur au titre du préavis et de l'indemnité conventionnelle de licenciement dont les montants n'ont pas été discutés.

La moyenne des 12 derniers mois de salaire complet ayant précédé le licenciement s'établit à 5 440,74 €. L'appréciation du préjudice du salarié conformément à l'article L. 1235-3 du Code du travail conduit à porter sa réparation à 33'000 €, toutes causes de dommage confondues.

Aucune somme n'est susceptible d'être restituée à la société DCS EASYWARE par [S] [L].

Par ailleurs, l'exécution de l'obligation imposée à l'employeur de remettre à son ancien salarié une attestation destinée au PÔLE EMPLOI et un certificat de travail ne paraît pas, en l'état, nécessiter la fixation d'une astreinte.

- Sur la charge des dépens et les demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

Succombant en son recours, la sociétéDCS EASYWARE venant aux droits de la société OSTRAL IT SERVICES sera condamnée aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées. Il y a lieu, en équité, d'accorder à [S] [L] le remboursement de ses frais non taxables à hauteur de 1000€.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré à l'exception du montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société DCS EASYWARE SAS venant aux droits de la société OSTRAL IT SERVICES à payer à [S] [L] les sommes de :

- 33'000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, toutes causes de préjudice confondues,

- 1 000 € par application en cause d'appel de l'article 700 du Code de procédure civile,

avec intérêts au taux légal à compter du 14 octobre 2010, date du jugement, sur la somme de 30'000 €, à compter du présent arrêt sur le surplus, et avec capitalisation desdits intérêts dans les conditions de l'article 1153 du Code civil ;

Ordonne à la société DCS EASYWARE venant aux droits de la société OSTRAL IT de remettre à [S] [L] un certificat de travail conforme au présent arrêt ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne la société DCS EASYWARE venant aux droits de la société OSTRAL IT SERVICES aux dépens de l'appel qui comprendront les éventuels frais d'exécution par ministère d'huissier de justice.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 10/10099
Date de la décision : 14/02/2013

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°10/10099 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-14;10.10099 ?
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