RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
ARRÊT DU 17 janvier 2013 après prorogations
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/10201
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juillet 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 08/06296
APPELANT
Me [P] [X]- [G] - Mandataire liquidateur de Madame [D] [M]
[Adresse 4]
non comparant, représenté par Me Georges-Henri LAUDRAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0174 substitué par Me Paquerette CHARDAIN, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉ
Monsieur [L] [J]
[Adresse 2]
comparant en personne, assisté de Me Daniel-yves LACROIX, avocat au barreau de PARIS, toque : D1749
PARTIE INTERVENANTE :
AGS CGEA IDF OUEST
[Adresse 3]
représenté par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 substitué par Me Mathilda DECREAU, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 12 Avril 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président
Madame Evelyne GIL, Conseillère
Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère
qui en ont délibéré
GREFFIER : Mademoiselle Céline MASBOU, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'appel régulièrement formé par [D] [M] exerçant sous l'enseigne Bar Restaurant LE PARIS CLERMONT contre un jugement du conseil de prud'hommes de PARIS en date du 28 juillet 2009 ayant statué sur le litige qui l'oppose à [L] [J].
Vu le jugement déféré ayant :
- fixé le salaire de [L] [J] à 1 320,95 €,
- condamné [D] [M] à lui payer les sommes de :
- 6'692,81 € à titre de rappel de salaires,
- 669,28 € au titre des congés payés afférents,
avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation,
- 7 925,70 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
- 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- ordonné à [D] [M] de remettre à [L] [J] un bulletin de paie et une attestation PÔLE EMPLOI conformes au jugement,
- condamné [D] [M] exerçant sous l'enseigne LE PARIS CLERMONT aux dépens.
Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :
La société civile professionnelle [X] [G] ès qualités de mandataire liquidateur de [D] [M], appelante, poursuit :
- l'infirmation du jugement entrepris,
- le débouté de [L] [J] de l'ensemble de ses demandes,
- sa condamnation à lui payer la somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
[L] [J], intimé, conclut :
- à titre principal, à la fixation de ses créances au passif de [D] [J] aux sommes de :
- 24'401,16 € à titre de rappel de salaires pour la période du 1er janvier au 2 juin 2008,
- 2 440,11 € au titre des congés payés afférents,
- 4 816,02 € en brut, à titre d'indemnité compensatrice de préavis (1 mois),
- 481,60 € au titre des congés payés afférents,
- 19'264,98 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,
- 28'896,12 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
avec intérêt légal,
- à la remise par le mandataire judiciaire de ses bulletins de salaire pour les mois de janvier à juin 2008, de son certificat de travail pour la période du 1er janvier au 2 juin 2008 et d'une attestation destinée au PÔLE EMPLOI, conformes,
- à titre subsidiaire, à la confirmation du jugement déféré,
- en toute hypothèse, à l'opposabilité de ses créances à l'AGS CGEA IDF OUEST.
L'UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA IDF OUEST, intervenante forcée :
- conclut au débouté de [L] [J] de l'ensemble de ses demandes,
- rappelle les limites de sa garantie dans le cadre du plafond 4 tel qu'applicable en 2008.
FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
[D] [M] exploitait en nom propre depuis le 7 décembre 2007, sous l'enseigne
LE PARIS CLERMONT, un café restaurant situé à [Adresse 11] et
[Adresse 1]. Elle a été placée en liquidation judiciaire simplifiée par jugement du tribunal de commerce de PARIS du 16 avril 2010 qui a désigné la SCP [X] [G] en qualité de mandataire liquidateur.
[L] [J] affirme avoir été embauché et avoir travaillé en qualité de responsable de l'établissement LE PARIS CLERMONT du 1er janvier au 2 juin 2008 sans avoir été déclaré aux organismes sociaux et sans avoir reçu d'autre rémunération que la mise à disposition du petit logement situé au-dessus du café restaurant et sa nourriture.
[D] [M] a contesté avoir employé [L] [J] expliquant que des amis lui avaient présenté comme étant en difficulté et lui avaient demandé de l'héberger gratuitement à titre temporaire.
Le 1er juin 2008, elle a déposé plainte auprès des services de police pour vol de documents administratifs relatifs à l'exploitation de son commerce après avoir constaté que [L] [J] avait quitté les lieux.
Ce dernier a saisi le conseil de prud'hommes le 3 juin 2008 de ses demandes en paiement de rappel de salaires, d'indemnité de préavis, de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail et d'indemnité pour travail dissimulé.
Les parties ont développé à l'audience leurs moyens et présenté leurs demandes, tels que formulés dans leurs conclusions respectives.
SUR CE
- Sur la relation contractuelle
Il résulte du procès-verbal d'audition de [D] [M] établi par les services de police le 25 juin 2009 que, sur la demande de [L] [J], en avril 2008, elle lui a proposé de faire un essai en tant que serveur dans son bar restaurant LE PARIS CLERMONT mais qu'au terme de sa semaine d'essai, il n'avait pas donné satisfaction et que le comptable lui avait versé la somme de 1 000 € correspondant à la rémunération d'un mois de travail alors que l'essai n'avait duré qu'une semaine.
Cette déclaration constitue un aveu d'embauche. En l'absence d'un contrat écrit prévoyant expressément une période d'essai, il apparaît que [L] [J] a été employé par contrat de travail à durée indéterminée.
Plusieurs clients ont attesté qu'il les avait servis dans l'établissement LE PARIS CLERMONT mais aucun ne mentionne la période au cours de laquelle ils ont constaté qu'il y travaillait.
Par courrier du 7 juillet 2008, l'URSSAF de [Localité 10] région parisienne a précisé que [L] [J] avait fait l'objet, par l'employeur [D] [M], d'une déclaration préalable à l'embauche le 9 mai 2008 mentionnant le 12 mai 2008 comme étant la date de son embauche.
En l'absence de tout autre élément, il sera donc considéré que l'intimé a été employé dans le commerce exploité par l'appelante du 12 mai au 2 juin 2008.
Sur la demande en paiement de rappel de salaires et de congés payés
(24'401,16 € + 2 440,11 €)
[D] [M] a déclaré sans le justifier que son comptable avait versé à [L] [J]
1 000 € en rémunération de la semaine au cours de laquelle il avait travaillé, cette somme correspondant selon elle à la rémunération d'un mois de travail.
[L] [J] soutient qu'il travaillait 15 heures par jour et 6 jours par semaine dans le café restaurant LE PARIS CLERMONT. Cependant, il ne fournit aucun élément de nature à étayer la demande en paiement des heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées.
Sa réclamation est calculée sur la base du SMIC s'élevant alors à 1 307,88 € pour 35 heures de travail par mois. Il convient donc pour la période considérée, du 12 mai au 2 juin 2008, de fixer sa créance de salaire et de congés payés à respectivement 1 307,88 € et 130,78 € puisque l'employeur a manifesté sa volonté de le faire bénéficier d'une rémunération correspondant à un mois de travail complet.
- Sur la rupture du contrat de travail et ses conséquences
[L] [J] n'a pas démissionné et [D] [M] n'a pas mis fin à son contrat de travail en respectant la procédure de licenciement. Dès lors, la rupture non motivée produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L'intimé est donc fondé à se voir reconnaître une créance au titre de l'indemnité compensatrice de préavis correspondant à un mois de salaire ainsi que l'indemnité de congés payés afférente, soit 1 307,88 € et 130,78 €.
Par ailleurs, au vu des éléments de préjudice versés au dossier, la cour estime devoir fixer à 1 000 € la réparation du dommage causé par la rupture abusive du contrat de travail.
Enfin, l'embauche du salarié ayant fait l'objet d'une déclaration auprès de l'URSSAF, la volonté de [D] [M] de dissimuler le travail de [L] [J] ne paraît pas démontrée, il n'y a donc pas lieu de fixer une indemnité pour travail dissimulé.
Il sera délivré à l'intimé les bulletins de salaire correspondant à sa période de travail du
12 mai au 2 juin 2008, un certificat de travail et une attestation destinée au PÔLE EMPLOI.
Par application des articles L. 641-3 et L. 622-28 du Code de commerce, les créances de [L] [J] porteront intérêts au taux légal jusqu'au 16 avril 2010, date du jugement ayant ouvert la liquidation judiciaire de [D] [M].
La présente fixation de créance doit être déclarée opposable à l'AGS CGEA IDF OUEST dans les limites de sa garantie.
- Sur les dépens et la demande de la SCP [X] [G] ès qualités d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
Les dépens de l'instance seront inscrits en frais privilégiés au passif de la liquidation judiciaire de [D] [M].
Au vu des circonstances de la cause, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais non taxables qu'elles ont exposés chacune pour leur part à l'occasion de la présente procédure prud'homale.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Infirme le jugement déféré ;
Statuant à nouveau,
Fixe la créance de [L] [J] au passif de la liquidation judiciaire de [D] [M], représentée par la SCP [X] [G] ès qualités de mandataire liquidateur, aux sommes de :
- 1 307,88 € à titre de salaire pour la période du 12 mai au 2 juin 2008,
- 130,78 € au titre des congés payés afférents,
- 1 307,88 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 130,78 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
avec intérêts au taux légal à compter du 5 juin 2008, date de convocation de l'employeur devant le conseil de prud'hommes, et jusqu'au 16 avril 2010, date du prononcé de la liquidation judiciaire,
- 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail;
Dit que la SCP [X] [G] en sa qualité de mandataire liquidateur de [D] [M] devra remettre à [L] [J] des bulletins de salaire, un certificat de travail et une attestation destinée au PÔLE EMPLOI conformes au présent arrêt ;
Rejette le surplus des demandes ;
Dit le présent arrêt opposable à l'UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA IDF OUEST dans les limites de sa garantie ;
Dit que les dépens seront inscrits en frais privilégiés au passif de la liquidation judiciaire de [D] [M].
Le Greffier,Le Président,