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15/01/2013 | FRANCE | N°10/03104

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 15 janvier 2013, 10/03104


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 15 Janvier 2013

(n° 2 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/03104-CR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Mars 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG n° 08/02994





APPELANT

Monsieur [M] [F]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par M. Michel ROUSSON (Délégué syndical ouvrier dûme

nt mandaté)





INTIMÉES

SA STORENGY

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Jean-Sébastien CAPISANO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0107



CAISSE NATIONALE DES INDUSTR...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 15 Janvier 2013

(n° 2 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/03104-CR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Mars 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG n° 08/02994

APPELANT

Monsieur [M] [F]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par M. Michel ROUSSON (Délégué syndical ouvrier dûment mandaté)

INTIMÉES

SA STORENGY

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Jean-Sébastien CAPISANO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0107

CAISSE NATIONALE DES INDUSTRIES ELECTRIQUES ET GAZIERES

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Novembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Claudine ROYER, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Claudine ROYER, Conseillère

Madame Laurence GUIBERT, Vice-Présidente placée par ordonnance de Monsieur le Premier Président en date du 3 septembre 2012

Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Claudine ROYER Conseillère ayant participé au délibéré et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par jugement de départage du 15 mars 2010 auquel la Cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de PARIS a :

- ordonné la mise en inactivité de Monsieur [M] [F] en application de l'article 3 annexe 3 du statut du personnel des IEG,

- dit et jugé le jugement opposable à la CNIEG en vue de la liquidation de la pension de retraite de Monsieur [F] à jouissance immédiate,

- rejeté toutes autres demandes plus amples et contraires ,

- condamné la SA STORENGY venant aux droits de GDF SUEZ aux dépens.

Monsieur [M] [F] a relevé appel de ce jugement par déclaration parvenue au greffe de la cour le 12 avril 2010.

Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les conclusions de Monsieur [F] et de la SA STORENGY régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 20 novembre 2012, conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments ;

Vu le défaut de comparution à l'audience du 10 novembre 2012 de la Caisse Nationale Nationale de Industries Électriques et Gazières (CNIEG),

Vu la lettre du Président du Conseil d'administration de la Caisse Nationale Nationale de Industries Électriques et Gazières (CNIEG) du 15 décembre 2009 remise à l'audience du 20 novembre 2012 ;

* * *

Il résulte des pièces et des écritures des parties les faits constants suivants :

Le 1er janvier 1982, Monsieur [M] [F] a été embauché comme Opérateur GIP par la SA STORENGY, filiale de la société GDF SUEZ.

En mars 2008, Monsieur [F] a demandé à son employeur le bénéfice d'une mise en inactivité avec jouissance de ses droits à pension, ouverte aux agents ayant au moins 15 ans d'ancienneté et ayant eu trois enfants, possibilité de mise en retraite anticipée prévue par l'article 3 annexe III du statut national du personnel des industries électriques et gazières.

Le 14 mars 2008 le salarié a saisi en référé et au fond le conseil de prud'hommes de PARIS de cette même demande en appelant en cause la Caisse Nationale des Industries Électriques et Gazières (CNIEG) caisse autonome gérant le service retraite du personnel des industries électriques et gazières.

Par ordonnance de référé du 10 mars 2009, la formation de référé s'est déclarée incompétente pour connaître de cette demande que le salarié a poursuivie au fond, en réclamant, outre sa mise en inactivité, diverses sommes :

- 45000 € au titre d'un harcèlement de gestion

- 52960 € sur le fondement de l'article 1149 du code civil

- 29780 € au titre de périodes de travail obligatoires,

- 100000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral

- 3000 € au titre de man'uvres dilatoires.

C'est dans ces circonstances qu'a été rendue la décision déférée à l'issue d'une procédure de départage.

* * *

MOTIFS

Sur la mise en inactivité

Il y a lieu de confirmer la mise en inactivité ordonnée par le juge départiteur en application de l'article 3 annexe III du statut du personnel des industries électriques et gazières, cette question ne faisant pas partie de l'appel interjeté par Monsieur [F], limité uniquement aux « indemnités refusées ».

Sur la demande relative aux paramètres de calcul de la pension de retraite et sur la demande de remise d'un relevé de compte de retraite

Monsieur [F] soutient que les droits ouverts à pension selon l'article 3 de l'annexe 3 du statut des industries électriques et gazières (IEG) avec bonification d'une année par enfant et le calcul sur le dernier salaire, relèvent de la précédente réglementation ; que sa mise en inactivité a été demandée avant la réforme du régime spécial des IEG avant le changement de l'annexe 3 au 1er juillet 2008 ; que les paramètres de calcul de pension sont ceux existants lors des droits acquis à pension, peu important la date de départ en retraite.

Il demande donc que la société STORENGY soit condamnée à lui transmettre le relevé de compte retraite permettant de cristalliser le droit ouvert à pension à l'identique des salariés féminins, afin que la CNIEG applique lors de la liquidation, bonifications pour enfants, et prise en compte du dernier salaire pour le calcul de la pension, éléments qu'il considère comme des droits acquis et garantis, et non pas ceux de la date de liquidation.

Il convient d'observer que depuis la loi 2004-803 du 9 août 2004 ayant réorganisé la gestion des pensions des agents d'EDF et GAZ DE FRANCE, la Caisse Nationale des Industries Électriques et Gazières (CNIEG) assure de manière autonome la gestion des régimes vieillesse retraite du personnel des industries électriques et gazières ; que l'appréciation des paramètres de calcul de la pension de retraite et notamment des bonifications pour enfants, du salaire pris en compte pour le calcul de la pension, des droits acquis et garantis, relèvent clairement de la compétence de la CNIEG et en cas de contestation, du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale (TASS) ; que la juridiction prud'homale n'est donc pas compétente pour statuer sur ces questions.

La demande de transmission par la SA STORENGY d'un relevé de compte retraite nécessaire à la liquidation de sa retraite concernant directement l'appréciation des paramètres de calcul de la pension de retraite (question ne relevant pas de la compétence de la juridiction prud'homale), Monsieur [F] ne pourra qu'être débouté de sa demande.

Sur la conformité du décret du 27 juin 2008 par rapport au droit communautaire

Monsieur [F] demande à la Cour de juger que le décret du 27 juin 2008, qui a notamment modifié l'article 3 de l'annexe III du statut des industries électriques et gazières, est contraire au droit communautaire et qu'il n'y a pas lieu de faire application des textes qui en découlent.

Rappelant la jurisprudence européenne depuis les années 1990 et la jurisprudence nationale depuis 2002 sur le caractère discriminatoire et le trouble manifestement illicite en cas différence de rémunération liées au sexe ainsi que les directives 98/49 /CE et 2003/41/CE sur la sauvegarde des droits acquis à pension professionnelle et sur l'obligation d'information, Monsieur [F] soutient que le décret du 27 juin 2008 est contraire au droit communautaire en ne rétablissant pas la stricte égalité entre hommes et femmes, mais aussi en ne conservant pas aux anciens salariés leur structure de rémunération.

La SA STORENGY relève avec pertinence l'irrecevabilité de la demande du salarié pour défaut d'intérêt à agir, celui-ci ne demandant en effet nullement l'application du décret du 27 juin 2008, mais au contraire l'application du régime antérieur à ce décret, sa demande de mise en inactivité reposant en effet sur les dispositions de l'ancien article 3 annexe III du statut des industries électriques et gazières, qui lui ont été appliquées. Il n'a donc aucun intérêt à voir statuer sur la conformité de ce décret avec le droit communautaire, étant par ailleurs observé qu'il n'entre pas dans la compétence du juge judiciaire de se prononcer sur la légalité d'un texte d'ordre réglementaire qui relève de la compétence du juge administratif.

La demande sera donc déclarée irrecevable.

Sur la demande de paiement des pensions depuis la demande de mise en inactivité

Monsieur [F] qui s'estime discriminé à l'occasion de sa demande de mise en inactivité, prétend avoir droit à la réparation de son préjudice du fait de cette discrimination. Il demande sur le fondement des articles 1149 et 1372 du code civile une somme de 52960 euros correspondant aux pensions qu'il aurait dû percevoir depuis sa demande de mise en inactivité.

Selon les pièces produites Monsieur [F] a sollicité sa mise en inactivité en 2008, et celle-ci n'a été ordonnée que par la décision de départage du 15 mars 2010. Cependant jusqu'à ce que cette mise en inactivité soit prononcée, le salarié a continué à percevoir sa rémunération, laquelle ne peut se cumuler avec une pension de retraite dont l'employeur en tout état de cause ne peut être débiteur, seule la CNIEG étant habilitée à liquider et verser les pensions de retraite.

Il y a donc lieu de débouter le salarié de ce chef de demande.

Sur la demande de cumul emploi / retraite

Monsieur [F] demande que la société STORENGY soit condamnée à lui payer, au titre du cumul emploi retraite une indemnité de 59500 €, somme correspondant à la perte de chance qu'il avait de travailler pour la société FLODIM à raison de 850 heures par an à 35 € de l'heure, pendant 2 ans.

Le salarié prétend que si sa mise en inactivité avait été satisfaite dès sa demande, il aurait pu cumuler sa pension de retraite avec un autre emploi.

Il ne résulte pas des pièces produites que le délai écoulé entre la demande de mise en inactivité et la date à laquelle cette mise en inactivité a été prononcée par la juridiction prud'homale soit dû à la faute exclusive de l'employeur. Il convient en effet d'observer que le salarié a saisi dès mars 2008 le conseil de prud'hommes sans attendre la réponse de son employeur sur sa demande de mise inactivité ; que le salarié ne démontre nullement que le délai mis par la juridiction prud'homale pour statuer sur cette demande soit le résultat de man'uvres dilatoires de la part de l'employeur.

Le salarié ne prouve pas davantage qu'il remplissait les conditions lui permettant de bénéficier du dispositif « cumul emploi retraite », et qu'il avait par ailleurs effectué des démarches en vue d'exercer une nouvelle activité professionnelle en obtenant notamment une promesse d'embauche depuis sa demande de mise en inactivité.

Le salarié ne démontrant la perte de chance qu'il invoque, sa demande d'indemnisation sera rejetée.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive de l'employeur

Monsieur [F] sollicite la condamnation de la société STORENGY au paiement d'une somme de 15000 € pour résistance abusive et man'uvres dilatoires à l'obligation de signer la demande de liquidation.

La résistance abusive et les man'uvres dilatoires alléguées ne reposant sur aucun élément, cette demande sera rejetée.

Sur le préjudice moral et le harcèlement de gestion

Monsieur [F] réclame une somme de 2000 € pour le préjudice moral subi par sa famille qui a dû selon lui surmonter les difficultés liées à la précarité de sa situation.

Ce préjudice n'étant établi par aucun justificatif, cette demande sera rejetée.

S'agissant du harcèlement de gestion, pour lequel le salarié demande le paiement d'une indemnisation de 45000 € , elle est fondée selon lui sur la discrimination persistante de l'employeur à ne pas appliquer la jurisprudence européenne et nationale.

Par plus que pour la demande précédente, le salarié n'apporte d'élément de fait de nature à laisser supposer que l'employeur s'est rendu coupable d'un harcèlement de gestion en man'uvrant pour laisser subsister une discrimination entre hommes et femmes dans l'instruction des demandes de mises en inactivité anticipée.

Il résulte au contraire des pièces produites, comme l'a relevé le juge départiteur, que la question était très controversée et a fait l'objet de nombreux contentieux et de décisions contradictoires ; que par ailleurs l'employeur ne voulait pas se voir reprocher une faute dans la mise en inactivité non suivie d'une prise en charge de la liquidation des droits à pension par la CNIEG ; que ce n'est en effet qu'à compter de décembre 2009 que la CNIEG a décidé d'étendre les dispositions d'un jugement du TASS de Nantes du 18 septembre 2009 à l'ensemble des personnes ayant obtenu leur mise en inactivité devant les tribunaux au titre des dispositions antérieures au 1er juillet 2008 et ayant assigné avant le 1er juillet 2008 la CNIEG en vue d'obtenir la liquidation de leurs droits.

Compte tenu de ces éléments il y a lieu de rejeter la demande de dommages et intérêts pour harcèlement de gestion.

Sur la demande d'indemnisation pour non transmission de l'attestation pôle Emploi

Monsieur [F] soutient que la mise en retraite anticipée s'apparente à un licenciement économique et que les agents privés involontairement d'emploi doivent être en possession d'une attestation ASSEDIC que l'employeur doit leur remettre en application de l'article R 1234-9 du code du travail. Il sollicite une somme de 5000 € pour le préjudice subi.

Il résulte pourtant des éléments su dossier que le salarié n'a pas été involontairement privé d'emploi, la mise en inactivité résultant de sa propre demande. Le salarié par ailleurs ne justifie pas de recherche d'emploi et de démarches en vue de s'inscrire à Pôle Emploi. Il ne prouve pas davantage que compte tenu du caractère spécifique de sa mise en inactivité anticipée, il était éligible à une indemnisation au titre de l'assurance chômage ou à une prime pour la création d'une entreprise.

Il y a donc lieu dans ces circonstances de rejeter la demande d'indemnisation sollicitée.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Au nom de l'équité, chaque partie conservera la charge de ses propres frais irrépétibles. Les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées.

Monsieur [M] [F] qui succombe supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Déboute Monsieur [F] de l'ensemble de ses demandes,

Déboute la SA STORENGY de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déclare le jugement opposable à la Caisse Nationale des Industries Électriques et Gazières (CNIEG),

Condamne Monsieur [M] [F] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, P/ LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 10/03104
Date de la décision : 15/01/2013

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°10/03104 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-01-15;10.03104 ?
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