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09/01/2013 | FRANCE | N°11/11465

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 09 janvier 2013, 11/11465


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 4



ARRET DU 09 JANVIER 2013



(n° 4 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/11465



Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Mars 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS - 10ème Chambre -RG n° 2010045718





APPELANTE



Société TRADE MARK SRL, société de droit italien, agissant poursuites et diligence

s de son représentant légal

Ayant son siège social

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avocats au barreau de PARIS, toque L...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRET DU 09 JANVIER 2013

(n° 4 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/11465

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Mars 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS - 10ème Chambre -RG n° 2010045718

APPELANTE

Société TRADE MARK SRL, société de droit italien, agissant poursuites et diligences de son représentant légal

Ayant son siège social

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avocats au barreau de PARIS, toque L0044

Assistée de Me Laure MAROLLEAU plaidant pour la société AARPI SOULIER substituant Me Jean-Luc SOULIER avocat au barreau de PARIS, toque R 154

INTIMEE

SARL TOP NEG INTERNATIONAL, Ayant son siège social [Adresse 4], en liquidation judiciaire, représentée par la SELAFA MJA, en la personne de Me [T] [R], liquidateur dont l'étude est

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Rémi PAMART, avocat au barreau de PARIS, toque C1917

Assistée de Me Daniel RICHARD, avocat au barreau de PARIS, toque D169

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Novembre 2012, en audience publique, après qu'il ait été fait rapport par Madame LUC, Conseiller, conformément aux dispositions de l'article 785 du Code de procédure civile devant la Cour composée de :

Monsieur ROCHE, Président

Monsieur VERT, Conseiller

Madame LUC, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Véronique GAUCI

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur VERT, Conseiller ayant délibéré, le Président étant empêché, et par Madame Véronique GAUCI, greffier, auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire

****

Vu le jugement en date du 11 mars 2011 par lequel le Tribunal de commerce de PARIS a rejeté la demande de jonction des deux instances dont il était saisi, et, sur l'instance 2010045750, a condamné la société TOP NEG INTERNATIONAL, sous le régime de l'exécution provisoire, à payer à la société TRADE MARK la somme de 355 789,56 euros, correspondant à des factures impayées, outre intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2010, ainsi que celle de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, et sur l'instance 2010045718, a, sous le régime de l'exécution provisoire, condamné la société TRADE MARK à payer à la société TOP NEG INTERNATIONAL la somme de 154 000 euros au titre de la rupture brutale et abusive des relations commerciales (marge nette sur dix mois) ainsi que celle de 6 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et, enfin, a écarté les demandes reconventionnelles de la société TRADE MARK en concurrence déloyale et pour perte de clientèle ;

Vu l'appel interjeté le 20 juin 2011 par la société TRADE MARK, limité à l'instance 2010045718, et ses conclusions enregistrées le 27 juillet 2012, tendant à faire infirmer ce jugement en ce qu'il a jugé brutale la rupture des relations commerciales et en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles, condamner la société TOP NEG INTERNATIONAL à lui payer les sommes de 500 000 euros pour perte de clientèle, 400 000 euros au titre de son préjudice matériel pour concurrence déloyale et parasitaire, 50 000 euros au titre de son préjudice économique, outre celle de 100 000 euros pour préjudice moral, ainsi que celle de 20 000 euros pour frais irrépétibles, donner injonction à la société TOP NEG INTERNATIONAL de cesser la distribution des produits «'MA GELATERIA'» sous astreinte de 500 euros par jour de retard et débouter la société TOP NEG de sa demande de réformation de l'instance 2010045750 ;

Vu les conclusions de la société TOP NEG INTERNATIONAL, représentée par Maître [R], ès qualités de liquidateur de cette société, enregistrées le 12 octobre 2012 au greffe de la Cour et tendant à faire infirmer le jugement entrepris et condamner la société TRADE MARK à lui payer les sommes de 120 000 euros pour ses dépenses marketing 2008-2009, 100 000 euros et 645 000 euros au titre de la marge brute perdue qu'elle aurait réalisée respectivement sur LECLERC ILE DE FRANCE et SYSTEME U CORA MATCH et INTERMARCHE en 2010, 135 000 euros au titre du manque à gagner sur les ventes de coupes glacées de mars et avril 2010, 50 000 euros pour préjudice d'image, et enfin celle de 20 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et ordonner que la société TRADE MARK cesse ces agissements déloyaux sous astreinte de 10 000 euros par infraction constatée ;

SUR CE

Considérant qu'il résulte de l'instruction les faits suivants :

La société TRADE MARK est une société de droit italien spécialisée dans la fabrication et la vente de crèmes glacées conditionnées dans des coupes en verre.

La société TOP NEG INTERNATIONAL (ci-après TOP NEG) distribue, auprès des grandes enseignes nationales, des produits alimentaires importés, en particulier d'Italie.

En 2004, ces deux sociétés ont conclu un accord, non matérialisé par écrit, confiant à la société TOP NEG la distribution en France des produits TRADE MARK, sous la marque «'LA GELATERIA DI PIAZZA NAVONA'».

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 mars 2010, la société TRADE MARK, apprenant le déréférencement de ses produits chez CORA, INTERMARCHE et SYSTEME U et prétendant que la société TOP NEG se livrait à la promotion de sa propre marque, BUONO & BELLO, a annoncé à son partenaire la fin de leurs relations sans préavis et la reprise en direct de la vente de ses produits.

La société TOP NEG a annoncé à son partenaire, par son avocat, qu'elle ne lui paierait pas les factures échues, d'un montant de 355 798,56 euros et l'a assigné en référé afin que soit évalué son préjudice et que lui soit allouée une provision (instance 201045718).

La société TRADE MARK a, en retour, assigné TOP NEG en paiement de factures, par acte du 11 mai 2010 (instance 201045750), pour un montant global de 355 798,56 euros.

Par deux ordonnances du 17 juin 2010, le président du Tribunal de commerce a renvoyé les parties devant le juge du fond.

Le Tribunal de commerce a rejeté la demande de jonction des deux instances, jugé brutale la rupture intervenue et condamné la société TRADE MARK à payer à son distributeur dix mois de marge nette. Il a condamné la société TOP NEG à régler les factures impayées à la société TRADE MARK et a débouté les deux parties de leurs demandes respectives en concurrence déloyale.

Le 2 février 2012, la société TRADE MARK a déclaré sa créance au passif de la société TOP NEG, auprès de Maître [R], liquidateur.

Sur la rupture des relations commerciales :

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L 442-6-I-5° du Code de commerce qu''«'Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. (...) » ;

Considérant que l'existence de relations commerciales établies entre les parties et l'absence de préavis ne sont pas contestées ; qu'en revanche, la société TRADE MARK prétend que la société TOP NEG a commis une faute qui la priverait du bénéfice de cet article, celui-ci prévoyant que ses dispositions «'ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure'» ;

Mais considérant qu'il n'est pas démontré que les trois déréférencements reprochés à la société TOP NEG lui soient imputables ; que le retard de quatre mois mis par cette société pour annoncer à la société TRADE MARK le déréférencement par SYSTEME U n'est pas, en soi, fautif ; que l'attestation de Madame [F] du 3 août, versée aux débats, ne rapporte pas davantage la preuve de fautes imputables à la société TOP NEG, car elle avoue ignorer «'les raisons exactes pour lesquelles les produits TRADE MARK ont été déréférencés de chez SYSTEME U'», ayant quitté son poste de responsable des achats surgelés chez SYSTEME U à cette époque ; que preuve n'est donc pas rapportée de l'inexécution, par la société TOP NEG, de ses obligations contractuelles ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré brutale la rupture intervenue ;

Considérant que le préjudice qui découle d'une rupture brutale de relations commerciales établies est constitué de la perte subie ou du gain dont la victime a été privée  ; que l'indemnité qui tend à réparer ce type de préjudice correspond à la perte de marge brute sur le chiffre d'affaires qui aurait dû être perçue si un préavis conforme aux usages du commerce avait été consenti ; que, compte tenu de la durée des relations commerciales, de près de six ans, et de l'importance du courant d'affaires entre les deux parties, un préavis de six mois aurait du être octroyé au distributeur évincé ; que la marge brute annuelle moyenne réalisée sur les trois dernières années par la société TOP NEG est égale à 541 404 euros (392 657 +651 742 + 579 815/ 3), soit 45 117 euros par mois ; que la société TRADE MARK sera donc condamnée à verser la somme de 270 702 euros (6 X 45 117) à la société TOP NEG ; que le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point ;

Sur les autres demandes de la société TOP NEG :

Considérant que la société TOP NEG sera déboutée de ses demandes tendant au paiement de sommes représentant la perte de marge brute qu'elle aurait du réaliser dans ses relations avec LECLERC, SYSTEME U, CORA et INTERMARCHE, en 2010, et sur les ventes de coupes glacées en mars et avril 2010, seule la brutalité de la rupture étant en l'espèce indemnisée, et par l'allocation de la somme de 270 702 euros ; qu'aucune indemnité ne saurait lui être davantage allouée pour les frais publicitaires engagés, ceux-ci n'ayant pas été commandés par la société TRADE MARK et relevant de sa propre stratégie commerciale ; qu'aucune atteinte à son image ou à sa considération ni aucune pratique de concurrence déloyale par détournement de clientèle ou dénigrement ne sont établies par la société TOP NEG à l'encontre de la société TRADE MARK, cette société ayant pu licitement reprendre la distribution de ses produits en direct et contacter les anciens clients de la société TOP NEG, dès lors que ces pratiques ont été dépourvues de toute man'uvre déloyale ; que celle-ci sera également déboutée, par voie de conséquence, de sa demande d'injonction à l'encontre de la société TRADE MARK ; que le jugement entrepris sera confirmé sur ces points ;

Sur la contestation du paiement des factures par la société TOP NEG dans son appel incident :

Considérant que le Tribunal de commerce a, dans le même jugement, statué séparément sur deux instances inscrites au RG sous les numéros 2010045718 et 2010045750, ayant refusé de prononcer la jonction des deux instances ; que dans sa déclaration d'appel du 20 juin 2011, la société TRADE MARK a visé le numéro de RG 2010045718, correspondant à l'instance où elle a été condamnée au paiement de la somme de 154 000 euros au titre de la rupture brutale des relations commerciales ; que la société TOP NEG a formé, dans cette procédure, un appel incident, en demandant l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions, non seulement dans l'instance 2010045718, mais aussi dans l'autre instance n° 2010045750 dans laquelle elle avait été condamnée à payer à la société TRADE MARK la somme de 355 798,56 euros en paiement de factures ; que la société TRADE MARK conteste la recevabilité de l'appel incident sur cette dernière instance n° 2010045750 ;

Mais considérant que le jugement contenant plusieurs chefs et n'étant pas divisible, la circonstance que l'appel de la société TRADE MARK ait été limité à l'un des chefs de jugement ne saurait priver la société intimée de la faculté de former appel incident sur les autre chefs de demandes, nonobstant leur enregistrement sous un autre numéro de RG ; que l'appel incident de la société TOP NEG est donc recevable ;

Mais considérant que la société intimée ne verse aux débats aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation des Premiers Juges, qui, aux termes d'une motivation que la Cour fait sienne, ont condamné la société TOP NEG au paiement desdites factures ;

Sur les demandes de la société TRADE MARK :

Sur le dénigrement :

Considérant que, faute d'avancer la moindre preuve de pratiques de dénigrement de la part de la société TOP NEG et d'un lien de causalité entre ces pratiques et le déréférencement de la société TRADE MARK par les grandes enseignes, celle-ci sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel pour perte de clientèle ou pour atteinte à sa réputation ; que le jugement dont appel sera confirmé sur ce point ;

Sur la demande en concurrence déloyale :

Considérant qu'aucune faute constitutive de concurrence déloyale ou de parasitisme ne peut être imputée à TOP NEG, sa marque LA GELARIA ne pouvant induire aucune confusion avec les produits TRADE MARK et la prise de contact de la société TOP NEG avec des fournisseurs concurrents de TRADE MARK étant parfaitement licite, aucune déloyauté ou man'uvre dolosive ne lui étant imputable et aucune obligation de non-concurrence n'ayant par ailleurs été conclue entre les parties ; qu'il convient donc de rejeter l'ensemble des demandes de la société TRADE MARK pour préjudices économique, matériel et moral causés par la prétendue concurrence déloyale, ainsi que la demande d'injonction de cesser la commercialisation des produits MA GELATERIA formulée par la société TRADE MARK ; que le jugement entrepris sera également confirmé sur ce point ;

PAR CES MOTIFS

-DÉCLARE recevable l'appel incident formé par la société TOP NEG INTERNATIONAL contre l'instance enregistrée sous le n° 2010045750,

-CONFIRME le jugement, sauf en ce qu'il a condamné la société TRADE MARK à payer la somme de 154 000 euros à la société TOP NEG INTERNATIONAL à titre de dommages-intérêts,

-L'INFIRME sur ce point,

et, statuant à nouveau,

-CONDAMNE la société TRADE MARK à payer à Maître [R], ès qualités de liquidateur de la société TOP NEG INTERNATIONAL, la somme de 225 585 euros pour rupture brutale des relations commerciales établies,

-DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

-y ajoutant,

-CONDAMNE la société TRADE MARK aux dépens de l'instance d'appel qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

-CONDAMNE la société TRADE MARK à payer à Maître [R], ès qualités de liquidateur de la société TOP NEG INTERNATIONAL, la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER P/ Le Président Empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 11/11465
Date de la décision : 09/01/2013

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°11/11465 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-01-09;11.11465 ?
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