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06/12/2012 | FRANCE | N°12/05235

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 4, 06 décembre 2012, 12/05235


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 4



ARRET DU 06 DECEMBRE 2012



(n° 303 , 3 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/05235



Décision déférée à la Cour : Décision du 27 Janvier 2012 rendue par la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions près le Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/00465





APPELANTE



Mademoiselle [

C] [B]

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par Me Catherine BRAULT (avocat au barreau de PARIS, toque : G0553)





INTIME



FONDS GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISM...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 4

ARRET DU 06 DECEMBRE 2012

(n° 303 , 3 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/05235

Décision déférée à la Cour : Décision du 27 Janvier 2012 rendue par la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions près le Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/00465

APPELANTE

Mademoiselle [C] [B]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Catherine BRAULT (avocat au barreau de PARIS, toque : G0553)

INTIME

FONDS GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME (FGVAT)

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représenté par Me JOUGLA YGOUF Sarra de la SELARL HJYH Avocats à la cour (avocats au barreau de PARIS, toque : L0056)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 octobre 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Jean BOYER, Président chargé du rapport, en la présence de Line TARDIF, conseillère.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Jean BOYER, président

Line TARDIF, conseillère

Claudette NICOLETTIS, conseillère

Greffier, lors des débats : Sylvie Bénardeau

MINISTERE PUBLIC : auquel le dossier a été communiqué

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean BOYER, président et par Sylvie Moulac, faisant fonction de greffière présente lors du prononcé.

Par jugement rendu le 27 janvier 2012, la commission d'indemnisation des victimes d'infractions du tribunal de grande instance de Paris a déclaré irrecevable la demande de Mlle [C] [B], l'infraction de proxénétisme aggravé sur mineure dont elle se plaignait ne figurant pas dans la liste de l'article 706-3 du Code de procédure pénale.

Mlle [C] [B] a interjeté appel de ce jugement.

Elle affirme avoir été victime d'une infraction visée aux articles 225-4-1 et 225-4-2 du code pénal repris à l'article 706-3 du Code de procédure pénale.

Elle demande 10 000 euros outre 1 000 euros en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale et si besoin une expertise médicale.

Le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions conclut à la confirmation du jugement.

SUR QUOI

L'article 225-4-1 du code pénal dispose :

La traite des êtres humains est le fait, en échange d'une rémunération ou de tout autre avantage ou d'une promesse de rémunération ou d'avantage, de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir, pour la mettre à sa disposition ou à la disposition d'un tiers, même non identifié, afin soit de permettre la commission contre cette personne des infractions de proxénétisme, d'agression ou d'atteintes sexuelles, d'exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d'hébergement contraires à sa dignité, soit de contraindre cette personne à commettre tout crime ou délit.

Ce texte figure dans la liste de l'article 706-3 du Code de procédure pénale.

Le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris rapporte :

'[C] [B] déclarait avoir rencontré une personne appelée [F] [M] (anciennement [D] et qu'elle avait connu sous ce nom) dans une discothèque roumaine en 2003. Il avait quatre frères ainsi qu'une soeur. Elle savait que la famille de cet homme était à la tête d'un réseau de prostituées dans les grandes villes d'Europe. Pourtant, elle l'avait appelé quelques jours plus tard pour le voir, il était venu la chercher, ils avaient passé une semaine ensemble dans un hôtel, et il avait fini par lui proposer de l'envoyer à [Localité 10], pour qu'elle se prostitue, et de partager ses gains. Elle avait accepté car elle n'avait pas d'argent, 1'homme avait alors organisé son voyage et lui avait acheté un billet d'avion. Lors de son premier séjour à [Localité 10], elle avait été accueillie à l'aéroport par [Z] [P], amie de [F] [M], qui l'avait conduite dans un hôtel du [Localité 2]. Elle avait travaillé dès le premier soir, sur les instructions et sous la surveillance de [Z]. Elle avait dû payer la somme de 3000 euros pour être autorisée à travailler [Adresse 7] et donnait tout ce qu'elle gagnait à [Z], qui payait les frais d'hôtel et la nourriture et envoyait le reste de l'argent en Roumanie à [F] [M]. Elle avait travaillé aux côtés de [Z] durant deux mois environ, au cours desquels elle avait gagné 3000 euros. Il était convenu qu'elle devait envoyer tout l'argent à [F] [M] par l'intermédiaire de [Z], il en garderait la moitié pour lui et verserait l'autre moitié à la famille de [C] [B]. S'il n'avait pas tenu cette promesse au départ, prétextant des problèmes d'argent, il avait fini par effectivement verser la moitié de l'argent à la famille. La jeune femme avait appris qu'elle était surveillée, au départ par la soeur, puis par le frère de [F] [M], mais ne les avait jamais rencontrés. Tout se passait par l'intermédiaire de [Z], qui appelait régulièrement en Roumanie pour rendre compte à l'homme des activités de la mineure.

Une étude du listing des transferts d'argent entre [Localité 10] et [Localité 9] (Roumanie) remis à la BPM par le service financier Western Union confirmait les déclarations de [C] [B]. [Z] [P] avait effectué trois virements à destination de [F] [M] entre octobre 2003 et février 2004 d'un montant total de 3950 euros. Six autres transferts étaient opérés à destination de la même personne par [Z] [I] (identifiée ultérieurement comme étant [Z] [P]) d'un montant total de 3890 euros aux mois de janvier et février 2004. Enfin, un virement de 1300 euros avait été fait à destination du même homme par une nommée [O] [R] [N]. [Z] [P] avait également émis la somme de 2000 euros à destination d'un nommé [L] [J]. Enfin, deux transferts d'un montant total de 8615 euros avaient été effectués par [A] [D], vivant en France au profit de [G] [D].'

Il s'agit bien de faits décrits dans l'article 225-4-1 du Code pénal.

La prostitution de Mlle [C] [B] a été constatée par les policiers qui l'avaient interpellée en flagrant délit de racollage le 20 avril 2004.

Elle est née le [Date naissance 1] 1987. Elle était arrivée l'année précédente.

On ne peut pas penser qu'elle ait pu seule et sans organisation, venir se prostituer sur le [Adresse 7].

Son récit est donc crédible.

On peut donc retenir qu'elle a aussi été victime du délit prévu à l'article 225-4-1 du code pénal ; elle est donc recevable à demander l'indemnisation de son préjudice sur le fondement de l'article 706-3 du Code de procédure pénale.

Les rapports psychologiques dressés dans le foyer où elle a été hébergée font apparaître de grandes difficultés qui se sont partiellement résorbés : manque d'appétit, maux de tête et de ventre, difficultés d'endormissement, relations difficiles tant avec les adultes qu'avec les autres jeunes et transgressions.

Il n'est pas sûr que ces difficultés résultent entièrement de l'infraction mais l'infraction a participé à leur réalisation.

En tenant compte des préjudices résultant de l'atteinte à sa dignité et des maux qu'elle a décrits, l'indemnité sollicitée de 10 000 euros peut être retenue.

PAR CES MOTIFS

Réforme le jugement rendu par la commission d'indemnisation des victimes d'infractions du tribunal de grande instance de Paris le 27 janvier 2012,

Fixe à 10 000 euros l'indemnité due à Mlle [C] [B],

Laisse les dépens à la charge du Trésor public et dit que conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procére civile les avocats postulants et avoués pourront recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l'avance.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 12/05235
Date de la décision : 06/12/2012

Références :

Cour d'appel de Paris C4, arrêt n°12/05235 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-12-06;12.05235 ?
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