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06/12/2012 | FRANCE | N°10/03139

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 06 décembre 2012, 10/03139


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 06 Décembre 2012

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/03139 et 10/3165



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Mars 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 08/02731





APPELANTE ET INTIMEE

Madame [C] [I]

[Adresse 2]

comparante en personne, assistée de Me Aymeric BEAUCHENE, avocat au barreau de V

AL-DE-MARNE, toque : PC 095







INTIMEE ET APPELANTE

SA PRESSETOURS EXPLOITANT SOUS L'ENSEIGNE UNIVERS DES VOYAGES

[Adresse 1]

représentée par Me Grégoire HALPERN, avocat au...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 06 Décembre 2012

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/03139 et 10/3165

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Mars 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 08/02731

APPELANTE ET INTIMEE

Madame [C] [I]

[Adresse 2]

comparante en personne, assistée de Me Aymeric BEAUCHENE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 095

INTIMEE ET APPELANTE

SA PRESSETOURS EXPLOITANT SOUS L'ENSEIGNE UNIVERS DES VOYAGES

[Adresse 1]

représentée par Me Grégoire HALPERN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0593

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Octobre 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Melle Flora CAIA, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les appels régulièrement interjetés par Madame [C] [I] et la S.A. PRESSETOURS à l'encontre d'un jugement prononcé le 19 mars 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS ayant statué dans le litige qui les oppose sur les demandes de la salariée relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

Vu le jugement déféré qui :

' a déclaré le licenciement fondé sur une faute grave ;

' a requalifié les fonctions de Madame [C] [I] en celles de secrétaire unique de rédaction, catégorie cadre, coefficient 133, avec effet au mois de novembre 2001 ;

' a ordonné à la S.A. PRESSETOURS de régulariser à ses frais les cotisations cadre de Madame [C] [I] auprès de la caisse compétente ;

' a condamné la S.A. PRESSETOURS à payer à Madame [C] [I] les sommes suivantes :

- 2 744 € à titre d'indemnité compensatrice de repos hebdomadaire et de travail les jours fériés,

- 2 925,93 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

- les congés payés de 1/10ème afférents à ces sommes,

- 15 706,22 € à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé,

-1 200 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

' a fixé les intérêts et ordonné leur capitalisation ;

' a ordonné la remise sous astreinte d'une attestation POLE EMPLOI, d'un certificat de travail et de bulletins de paie conformes à la décision ;

' a débouté les parties de leurs autres demandes.

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

Madame [C] [I], appelante, poursuit l'infirmation du jugement déféré sur la qualification du licenciement, sa confirmation sur la requalification des fonctions ainsi que la régularisation des cotisations retraite et sollicite la condamnation de la S.A. PRESSETOURS au paiement des sommes suivantes :

- 16 176,70 € à titre de rappel de salaires pour les publi-reportages,

- 32 528,87 € au titre des heures supplémentaires,

- 4 188,29 € au titre des repos compensateurs sur heures supplémentaires,

- 6 311,84 € au titre des repos hebdomadaires et jours fériés,

- 9 448,16 € au titre de l'article 29 de la convention collective des journalistes,

- 1 990,85 € au titre de la mise à pied,

- 5 972,56 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- les congés payés de 1/10ème afférents à ces sommes,

- 23 185,09 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 40 000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

- 17 917,68 € à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé,

- 3 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

avec remise sous astreinte d'une attestation POLE EMPLOI, d'un certificat de travail et de bulletins de paie conformes à la décision.

La S.A. PRESSETOURS, également appelante, requiert le débouté des demandes de Madame [C] [I] et sa condamnation à lui payer la somme de 2 500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

CELA ÉTANT EXPOSÉ

Par contrat à durée indéterminée en date du 11 septembre 2000, Madame [C] [I] a été engagée par la S.A. PRESSETOURS en qualité de rédacteur moyennant une rémunération mensuelle fixée en dernier lieu à la somme de 1 982 €.

Le 19 septembre 2007, la S.A. PRESSETOURS convoquait Madame [C] [I] pour le 1er octobre 2007 à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Cette mesure était prononcée par lettre du 8 octobre 2007 pour faute grave en raison de l'insubordination de la salariée, refusant d'exercer ses fonctions malgré une mise en demeure et au risque de perturber gravement le fonctionnement de l'entreprise.

SUR CE

Les dossiers enregistrés sous les numéros 10/03139 et 10/03165 sont étroitement connexes. Il convient de les joindre et de statuer par une seule décision.

Sur la qualification des fonctions.

Sur ce point, le premier juge a procédé à une analyse circonstanciée et pertinente des éléments d'appréciation produits par les parties. La S.A. PRESSETOURS n'oppose à cette analyse aucun argument ni aucune pièce nouvelle susceptible de modifier l'appréciation formulée en première instance que la cour adopte dès lors en tous points.

En effet la S.A. PRESSETOURS reconnaît que la salariée a effectué depuis 2001des tâches autres que celles d'une rédactrice, soutenant toutefois qu'elles relevaient de la qualification de secrétaire de fabrication et non de secrétaire de rédaction, mais en procédant par simple affirmation que les pièces du dossier ne corroborent pas. Il importe peu par ailleurs que Madame [C] [I] ait pris en charge ce travail de manière volontaire et 'avec plaisir' dans la mesure où l'employeur a accepté sans réserve cette situation dont il tirait d'ailleurs manifestement avantage. Enfin la circonstance qu'un autre salarié effectuait également une relecture des articles à paraître est sans emport dans la mesure où il n'est pas démontré que cette activité diminuait en quoi que ce soit les responsabilités propres de Madame [C] [I] en la matière. En revanche il est constant qu'il n'existait pas au sein de la société de poste spécifique de secrétaire unique de rédaction.

La décision de première instance sera donc confirmée de ce chef, comme sur la régularisation de la situation de la salariée au titre des cotisations cadre, les mesures prises à cet effet par le conseil de prud'hommes étant parfaitement appropriées aux circonstances de l'espèce.

Il convient d'ordonner à la S.A. PRESSETOURS de remettre à Madame [C] [I] un certificat de travail mentionnant sa réelle qualification, le prononcé d'une astreinte ne paraissant pas en l'état utile pour garantir l'exécution de cette obligation.

Sur la qualification du licenciement.

La matérialité des faits reprochés à Madame [C] [I] n'est pas contestée par cette dernière qui a donc refusé, malgré mise en demeure, de remettre à l'employeur le contenu de ses travaux en vue de la parution prochaine du numéro 115 du magazine 'Univers des Voyages', dont il était essentiel qu'il soit disponible avant l'ouverture du salon TOP RESA quelques semaines plus tard.

Pour justifier son comportement, Madame [C] [I] fait valoir que ce que lui était demandé relevait de ses fonctions de secrétaire de rédaction, que l'employeur refusait de reconnaître, et qu'elle était donc en droit de s'en tenir strictement aux fonctions pour lesquelles elle était rémunérée.

Toutefois le fait pour Madame [C] [I] de refuser brusquement d'accomplir une tâche qu'elle assurait depuis plusieurs années, et ainsi rentrée dans le champ contractuel, au prétexte d'un litige né quelques mois auparavant avec l'employeur sur la qualification de ses fonctions et la rémunération afférente, litige qui faisait l'objet de discussions en cours entre les parties, constitue un manquement caractérisé à ses obligations consistant à utiliser un moyen de pression déloyal et à se faire justice à soi-même alors que l'intéressée disposait de voies de droit pour faire triompher ses revendications et pouvait obtenir gain de cause sans mettre en péril le fonctionnement de l'entreprise. C'est donc sans la contradiction que Madame [C] [I] croit pouvoir dénoncer que le premier juge, après avoir requalifié ses fonctions, a constaté l'existence d'une faute grave, décision qui sera confirmée.

Sur les publi-reportages.

Le premier juge a parfaitement analysé tant le caractère publicitaire ou non des reportages invoqués par Madame [C] [I] que les conditions dans lesquelles peuvent être réalisés et rémunérés les publi-reportages au regard des dispositions spécifiques de la convention collective des journalistes sur cette pratique.

Le jugement sera également confirmé de ce chef.

Sur les heures supplémentaires.

En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

En l'espèce, Madame [C] [I] fait valoir qu'elle a effectué de nombreuses heures supplémentaires dans le cadre de ses fonctions puisque, notamment, elle était amenée à observer de très longs temps de trajet, excédant ceux habituellement effectués par le salarié entre son domicile et son lieu de travail, de sorte qu'ils doivent être comptabilisés comme du temps de travail effectif.

Elle produit, outre un décompte, de nombreux justificatifs de déplacement, ce qui étaye utilement sa demande.

La S.A. PRESSETOURS ne conteste pas les déplacements allégués mais fait valoir que les décomptes antérieurs à mars 2007 sont des reconstitutions a posteriori, unilatérales et impropres à établir le volume exact d'heures accomplies puisque le temps passé sur le lieu de mission par un salarié en déplacement professionnel n'est pas nécessairement du temps de travail effectif, les périodes où il jouit d'une entière autonomie devant être déduites ; que Madame [C] [I] a pu bénéficier de journées de repos dont elle ne fait pas état ; qu'elle n'a jamais prétendu, avant de créer le litige, à un quelconque repos compensateur ni à une indemnité compensatrice.

Il s'avère ainsi que la S.A. PRESSETOURS procède par pétition de principe et par de simples affirmations qui ne contredisent pas utilement les éléments d'appréciation fournis par la salariée ; l'existence d'heures supplémentaires doit dès lors être constatée dans son principe.

Pour établir les sommes dues, il est nécessaire de déterminer si les temps de trajet de Madame [C] [I] doivent être pris en compte dans leur totalité dans la mesure où ils dépassent effectivement le temps de trajet d'un salarié standard ou si ce temps de trajet théorique, fixé statistiquement à une heure quotidienne pour l'aller et le retour, cinq fois par semaine, doit être déduit, seul l'excédent pouvant recevoir la qualification de temps de travail effectif.

Les parties n'ayant pas conclu sur ce point, il apparaît nécessaire d'ordonner la réouverture des débats, tous droits et moyens réservés sur la question du décompte des heures supplémentaires et de leur paiement.

Les autres demandes de rappel de rémunération découlent du même principe et il y a donc lieu de surseoir sur le surplus du litige.

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens.

La décision étant partiellement avant dire droit, les dépens et les frais non compris dans les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Ordonne la jonction des procédures 10/03139 et 10/03165.

Confirme le jugement déféré en ses dispositions relatives à la qualification du licenciement, à la requalification des fonctions de Madame [C] [I] en celles de secrétaire unique de rédaction, à la régularisation des cotisations cadre de Madame [C] [I] auprès de la caisse compétente, aux intérêts et à la demande au titre des publi-reportages.

Ordonne à la S.A. PRESSETOURS de remettre à Madame [C] [I] un certificat de travail mentionnant sa réelle qualification.

Avant dire droit sur le surplus du litige, ordonne la réouverture des débats et invite les parties à conclure à nouveau sur la question du décompte des heures supplémentaires, comme il est indiqué dans le corps de la présente décision.

Renvoie l'affaire à l'audience du Jeudi 09 Janvier 2014 à 09h00 (salle 420, escalier R 4ème étage) pour plaider.

Dit que la notification de la présente décision vaudra convocation des parties à cette audience.

Réserve les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 10/03139
Date de la décision : 06/12/2012

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°10/03139 : Réouverture des débats


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-12-06;10.03139 ?
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