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22/11/2012 | FRANCE | N°10/19050

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 22 novembre 2012, 10/19050


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRET DU 22 NOVEMBRE 2012



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/19050



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 septembre 2010 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2010003894





APPELANTE



SA CREDIT DU NORD, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux.

Ayant son siège soc

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[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par la SCP RIBAUT en la personne de Me Vincent RIBAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0051



Assistée de Me Maryvonne EL ASSAAD, ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRET DU 22 NOVEMBRE 2012

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/19050

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 septembre 2010 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2010003894

APPELANTE

SA CREDIT DU NORD, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux.

Ayant son siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par la SCP RIBAUT en la personne de Me Vincent RIBAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0051

Assistée de Me Maryvonne EL ASSAAD, avocat au barreau de PARIS, toque : D 289

INTIMES

Monsieur [O] [V]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Madame [M] [V]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentés et assistés de Me Eric SEBBAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0040

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 octobre 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Patricia POMONTI, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Valérie MICHEL-AMSELLEM, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente

Madame Patricia POMONTI, Conseillère

Madame Valérie MICHEL- AMSELLEM, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY, Greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

La société Crédit du Nord (le Crédit du Nord) a consenti un prêt de 500 000 euros, remboursable en 84 mensualités, à la société No Limit, avec la caution de M. et Mme [V].

Cette société ayant été déclarée en redressement judiciaire par jugement du 2 novembre 2009, le Crédit du Nord a procédé à sa déclaration de créance et a mis, par lettres recommandées, M. et Mme [V], en qualité de cautions solidaires, en demeure de lui verser la somme de 156 064,42 euros (limite de leur engagement). La mise en demeure s'est avérée infructueuse.

Par acte du 30 décembre 2009, le Crédit du Nord a assigné M. et Mme [V] devant le Tribunal de commerce de Paris afin qu'ils soient condamnés solidairement au paiement de la somme de 156 064,42 euros.

Par un jugement en date du 3 septembre 2010, le tribunal de commerce de Paris a :

- déclaré l'action du Crédit du Nord irrecevable,

- condamné le Crédit du Nord à payer à M. [V] et à Mme [V] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus.

Vu l'appel interjeté le 24 septembre 2010 par la société le Crédit du Nord contre cette décision.

Vu les dernières conclusions, signifiées le 31 mai 2012, par lesquelles la société le Crédit du Nord demande à la Cour de :

- recevoir le Crédit du Nord en son appel et le déclarer bien fondé,

- infirmer la décision querellée en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- dire l'action du Crédit du Nord recevable,

Vu l'article 568 du CPC,

- dire qu'il est de bonne justice de donner une solution définitive à la présente affaire,

- condamner solidairement les époux [V] à payer au Crédit du Nord la somme de 156.064,42 euros avec intérêts au taux de 4,5% l'an à compter du 30 novembre 2009, avec application,

- condamner solidairement les époux [V] à payer au Crédit du Nord la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société le Crédit du Nord soutient que le tribunal a fait une application inexacte de l'article 622-28, alinéa 2, du code de commerce et qu'une jurisprudence constante décide que le créancier qui a été autorisé à pratiquer une mesure conservatoire contre une caution personnelle personne physique doit, dans le mois qui suit l'exécution de la mesure, à peine de caducité, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire même si le débiteur principal a fait l'objet d'un redressement judiciaire. Dans ce cas, l'instance engagée est suspendue jusqu'au jugement arrêtant le plan de redressement ou prononçant la liquidation judiciaire du débiteur principal. Elle ajoute qu'il n'y a plus lieu à suspendre l'action contre M. et Mme [V] puisque le redressement judiciaire de la société No Limit a été converti en liquidation judiciaire prononcée par jugement du 20 décembre 2010.

La société le Crédit du Nord affirme qu'au regard de la fiche de renseignements de solvabilité, les époux [V] ont indiqué, à la date du 18 avril 2006, être propriétaires de biens immobiliers, leur permettant de faire face au paiement de la somme de 156 064,42 euros.

La banque fait également valoir que le taux de 4,5% ne peut être contesté puisqu'il figure tant sur l'acte de cession du fonds de commerce que sur l'acte de cautionnement lui-même.

Enfin, la société le Crédit du Nord soutient que la première échéance non régularisée est celle du 11 août 2009 et que dès le 30 novembre 2009 pour M. [V] et le 4 décembre 2009 pour Mme [V], ils ont été destinataires de courriers recommandés avec accusé de réception, les informant de la défaillance de la société No Limit et les mettant en demeure de lui payer la somme de 156 064,42 euros. Elle s'estime donc bien fondée à demander à M. et Mme [V] le paiement de cette somme, outre les intérêts de retard échus à compter de cette mise en demeure avec capitalisation et ce jusqu'à parfait paiement. En tout état de cause, elle s'oppose à l'octroi de délais dont la demande n'est pas justifiée.

Vu les dernières conclusions, signifiées le 3 octobre 2012, par lesquelles M. et Mme [V] demandent à la Cour de :

- confirmer la décision entreprise,

- déclarer irrecevable la demande portée devant le Tribunal de commerce de Paris,

- dire que seul le TGI est compétent,

- débouter le Crédit du Nord de ses demandes,

- le condamner à payer aux époux [V] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [V] soutiennent que la demande du Crédit du Nord est irrecevable du fait de la suspension de l'exécution pendant la période de redressement judiciaire. Ils considèrent que l'action engagée à leur encontre par acte d'huissier du 30 septembre 2009 tendait à leur condamnation et non à un sursis à statuer.

Ils font ensuite valoir que le Crédit du Nord ne rapporte pas la preuve d'un engagement proportionné à leurs revenus. Ils précisent que cet engagement est disproportionné, notamment, au regard du cumul des actes de cautionnement. Ils soutiennent que le Crédit du Nord n'apporte pas la preuve du taux d'intérêt contractuel dont il sollicite l'application. Subsidiairement, ils demandent le constat de la déchéance des intérêts, frais, accessoires et pénalités, en soutenant que le Crédit du Nord ne rapporte pas la preuve de les avoir informés de la défaillance de la société No Limit dans les conditions requises.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la procédure

Considérant que lors de l'audience, M. et Mme [V] ont demandé la révocation de l'ordonnance de clôture afin de pouvoir déposer leurs dernières conclusions répondant à celles de la société le Crédit du Nord signifiées le 31 mai 2012 quelques jours avant la date de l'ordonnance ; que ne souhaitant pas le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure, la société le Crédit du Nord a accepté que soient prises en compte les dernières conclusions des intimés en date du 3 octobre 2012 ; que dès lors, le principe de la contradiction a été respecté.

Sur la recevabilité de l'action du Crédit du Nord

Considérant que M. et Mme [V] soutiennent que l'action diligentée contre eux, après le prononcé de la procédure de redressement judiciaire, est irrecevable en application de l'article L. 621-48, alinéa 2, devenu l'article L. 622-28, alinéa 2, du code de commerce qui précise que « Le jugement d'ouverture suspend jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation judiciaire toute action contre les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sureté personnelle (...) » ; que cependant, il est justifié et non contesté que la société No Limit a été placée en liquidation judiciaire par un jugement du 20 décembre 2010 et que dès lors, la cause de l'irrecevabilité de l'action en paiement diligentée contre M. et Mme [V] a disparu ; que l'action est donc recevable.

Sur le bien fondé de la demande

Considérant que M. et Mme [V] soutiennent que la société le Crédit du Nord ne peut se prévaloir de leur cautionnement qui serait disproportionné au regard de leurs biens et revenus ;

Que cependant, la banque produit la « fiche de renseignements de solvabilité personne physique » par laquelle M. et Mme [V] ont déclaré leurs biens et revenus et indiqué qu'ils étaient propriétaires de deux studios, l'un d'une valeur de 100 000 euros à [Localité 5], l'autre d'une valeur de 150 000 euros à [Localité 6] et que leurs revenus étaient de 16 000 euros par mois ; que la signature figurant sur cette fiche à deux reprises est bien celle de M. [V] telle qu'elle figure aussi sur l'engagement de caution du 21 avril 2006 ; que si la somme de 325 000 euros garantie était supérieure à la valeur de leurs biens, il n'en demeure pas moins que leur patrimoine leur permet, sans ponctionner leurs revenus, de faire face au paiement de la somme de 156 064,42 euros qui leur est demandée en exécution de l'engagement de caution qu'ils ont pris ; qu'enfin M. et Mme [V] ne démontrent pas qu'ils auraient cumulé des cautionnement ainsi qu'ils le font valoir ;

Considérant que M. et Mme [V] soutiennent que l'acte de cautionnement du 21 avril 2006 ne précise pas le montant du taux d'intérêt des sommes qu'ils pourraient devoir dans le cas où leur engagement serait mis en 'uvre ; que cet acte après avoir rappelé que le cautionnement garantit le remboursement du concours de 500 000 euros à consentir par la banque au cautionné, précise que « Ce concours consenti pour une durée de 7 ans, donnera lieu à la perception d'intérêts calculés au taux de 4,5 % l'an et d'une commission OSEO SOFARIS de 0,70 % l'an sur l'encours d'intervention, et d'une indemnité due en cas d'exigibilité anticipée égale à 3 % du capital restant dû à la date d'envoi de la lettre recommandée d'exigibilité anticipée » ; qu'il résulte de cette formulation que les intérêts de 4,5 % sont relatifs au « concours » c'est-à dire au prêt et non aux sommes dues en raison du cautionnement dont le montant inclut le principal, les « intérêts, frais et accessoires » ; que dès lors les sommes dues par M. et Mme [V] porteront intérêt au taux légal ;

Considérant, par ailleurs, que M. et Mme [V] soutiennent que la banque qui ne leur a pas fait connaître le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement ne peut revendiquer le paiement des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle ils ont été informés ;

Mais considérant que la société le Crédit du Nord produit la copie des lettres recommandées envoyées le 30 novembre 2009 pour monsieur [V] et le 4 décembre 2009 pour madame, par lesquelles elle a informé ceux-ci du jugement prononçant le redressement judiciaire de la société No Limit le 2 novembre précédent, ainsi que les mettant en demeure de payer la somme de 156 064,42 euros ; que l'avis de réception de la lettre adressée à M. [V] a été retourné signé, tandis que celui accompagnant la lettre pour Mme [V] a été retourné non signé car non réclamé ; qu'il s'en déduit que M. et Mme [V] solidairement tenus envers la banque dans l'acte de cautionnement ont été régulièrement informés de la date à laquelle les échéances n'ont plus été payées et qu'en tout état de cause la société le Crédit du Nord ne réclame pas d'intérêts qui seraient échus entre la date d'un premier impayé et la date à laquelle les cautions ont été averties ; qu'il convient donc de rejeter leur demande sur ce point ;

Considérant enfin que M. et Mme [V] ont sollicité l'octroi de délais en application de l'article 1244-1 du code civil ; que cependant ils ne justifient pas de l'intérêt que présenterait pour eux un paiement différé porteur d'intérêts, alors que le produit de la vente d'un de leurs biens immobiliers peut leur permettre de s'acquitter plus rapidement de la somme dûe ; qu'il convient de rejeter leur demande ;

Considérant que l'équité commande de ne pas faire droit à la demande du Crédit du Nord fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau

DIT recevable l'action formée par la société Crédit du Nord contre M. et Mme [V];

CONDAMNE M. et Mme [V] à payer à la société Crédit du Nord la somme de 156 064,42 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 décembre 2009

DEBOUTE les parties de leurs plus amples demandes,

CONDAMNE solidairement M. et Mme [V] aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente

E. DAMAREY C. PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 10/19050
Date de la décision : 22/11/2012

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°10/19050 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-11-22;10.19050 ?
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