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08/11/2012 | FRANCE | N°11/09165

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 4, 08 novembre 2012, 11/09165


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 4



ARRET DU 08 NOVEMBRE 2012



(n° 261 , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/09165



Décision déférée à la Cour : Décision du 01 Mars 2011 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 07/00316





APPELANT

Monsieur [H] [I]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté et assisté de Me Claudi

ne BERNFELD du cabinet BERNFELD ASSOCIES (avocat au barreau de PARIS, toque : R161)





INTIME

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET AUTRES INFRACTIONS

[Adresse 3]

[Adresse...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 4

ARRET DU 08 NOVEMBRE 2012

(n° 261 , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/09165

Décision déférée à la Cour : Décision du 01 Mars 2011 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 07/00316

APPELANT

Monsieur [H] [I]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté et assisté de Me Claudine BERNFELD du cabinet BERNFELD ASSOCIES (avocat au barreau de PARIS, toque : R161)

INTIME

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET AUTRES INFRACTIONS

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté et assisté de Me Alain LABERIBE (avocat au barreau de PARIS, toque : E1217)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 septembre 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Jean BOYER, Président chargé du rapport, en la présence de Line TARDIF, conseillère.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Jean BOYER, président

Line TARDIF, conseillère

Claudette NICOLETTIS, conseillère

Greffier, lors des débats : Sylvie Bénardeau

MINISTERE PUBLIC : auquel le dossier a été communiqué

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean BOYER, président et par Sylvie BENARDEAU, greffière présente lors du prononcé.

Dans un jugement rendu le 1er mars 2011, la commission d'indemnisation des victimes d'infractions du tribunal de grande instance de Bobigny rapporte :

Monsieur [H] [I], né le [Date naissance 2] 1971, de nationalité française, a été victime le 11 mars 2004, à [Localité 6], d'un vol avec violences d'une caméra, alors qu'il exerçait ses fonctions d'ingénieur du son dans le cadre d'un reportage réalisé par une équipe de Canal au siège d'une école coranique, et frappé de coups de poing puis blessé au niveau du visage par la projection d'un morceau de bois.

Par arrêt du 14 novembre 2008 sur appel d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de Melun du 23 janvier 2008, la Cour d'appel de Paris a confirmé la culpabilité de [L] [N] de vol avec violence ayant entraîné une ITT inférieure ou égale à 8jours et de

vol avec violence ayant entraîné une ITT de plus de 8 jours, l'a condamné à la peine de 18 mois d'emprisonnement et a, sur l'action civile, notamment renvoyé la procédure, [N] [L], condamné, [I] [H], partie civile, et la Caisse primaire d'assurance maladie de la [Localité 7] partie intervenante, devant le Tribunal de Grande Instance de Melun aux fins de liquidation des intérêts civils.

Par ordonnance du 7 novembre 2007 le Président de la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions a alloué à Monsieur [H] [I] une provision de 10.000,00 € et ordonné une expertise désignant à cet effet le Docteur [M] [B].

Les conclusions de cet expert, déposées le 15 mai 2009 sont les suivantes :

'Suite aux faits, Monsieur [H] [I] a présenté une fracture des os propres du nez, une fracture complexe du plancher de l'orbite droite avec ecchymose des deux pommettes, des hématomes des paupières supérieure et inférieure droites, une hémorragie

sous-conjonctivale, une hémorragie pré-rétinienne temporale inférieure sans décollement de rétine.

Il a été mis en évidence une atteinte des dents 11 et 21 qui dans un deuxième temps ont été remplacées par des éléments provisoires.

Le blessé a été suivi sur le plan psychologique durant 13 séances durant une année complète.

L'intéressé a également été suivi sur le plan ophtalmologique.

Il a également été suivi sur le plan ORL et hospitalisé à 2 reprises.

En rapport direct et certain avec l'agression du 11 mars 2004, il est retenu par l'expert :

- une incapacité temporaire totale :

du 11 mars 2004 au 6 juin 2004,

du 30 août 2005 au 16 septembre 2005,

du 18 novembre 2005 au 15janvier 2006,

et du 17 mars 2006 au 9 juin 2006.

- une consolidation acquise le 20 mai 2008,

- une incapacité permanente partielle de 20%,

- l'existence d'un préjudice professionnel,

- des souffrances physiques psychiques et morales endurées évaluées à 4,5/7,

- un préjudice esthétique estimé à 1,5/7,

- un préjudice d'agrément concernant les concerts,

- un préjudice sexuel durant une période de 2 ans,

- l'assistance d'une tierce personne :

lors du retour au domicile durant un mois à raison de 4 h par jour, puis durant 3 mois à raison de 10 h par semaine jusqu'à la veille de la reprise du travail du 7 juin 2004,

- le recours à une aide extérieure pour s'occuper des enfants,

- la nécessité de prise en charge des soins dentaires.'

Par ce jugement, la commission d'indemnisation des victimes d'infractions du tribunal de grande instance de Bobigny a alloué une indemnité de 76 099,45 euros à M. [H] [I].

Celui-ci a interjeté appel du jugement.

Il demande que son préjudice soit évalué de la manière suivante :

A) POSTE DE PREJUDICES PATRIMONIAUX

1. Créance de la CPAM : 7.358,11 €

2. Frais médicaux restés à charge sauf mémoire : 2.153,72 €

3. Frais divers : 3.680,00 €

4. Tierce personne temporaire : 125.040,00 €

6. Pertes de gains professionnels actuels (avant

imputation de la créance de la Caisse) : .41 300,00 €

7. Dépenses de santé future sauf mémoire 3.082,70 €

8. Incidence professionnelle (avant imputation de

la créance de la CPAM) 370.929,00 €

Soit la somme totale de, sauf mémoire : 553.543,53 €

B) POSTE DE PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

1. Déficit fonctionnel temporaire : 20.658,00 €

3. Souffrances endurées (4,5/7) : 25.000,00 €

4. Préjudice esthétique temporaire : 3.000,00 €

5. Déficit fonctionnel permanent : 56.000,00 €

6. Préjudice d'agrément permanent : 15.000,00 €

Soit la somme totale de : 119.658,00 €

Dire et juger qu'après déduction, poste par poste, des sommes revenant aux organismes sociaux, il revient sur ces postes de préjudice, à la victime, la somme de 531 128,87 € sauf mémoire.

Fixer les postes de préjudice extra-patrimoniaux à la somme de

119.658,00 €.

Constater qu'il n'y a lieu de déduire aucune somme pour les tiers payeurs sur les postes de préjudice extra-patrimoniaux.

En conséquence,

Allouer à Monsieur [I] une somme totale de 650 786,87  € sauf mémoire.

Allouer à Monsieur [I] une somme de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Dire que le FONDS DE GARANTIE réglera le montant de ces sommes avec intérêts de droit.

Ses conclusions mentionnent qu'elles ont été signifiées le 17 novembre 2011. Elles portent le timbre de la cour au 17 novembre 2011.

Le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions propose :

Préjudices patrimoniaux

- Frais médicaux et pharmaceutiques :.......................... rejet en l'état

- Frais des médecins de recours :......................................... 1 200 €

- Assistance tierce personne temporaire :.............................2 500 €

- Perte de gains professionnels actuels : ................................rejet

- Dépenses de santé futures : .................................................rejet

- Incidence professionnelle : ..............................................15 000 €

A déduire, capital de rente :................................................ - 888,62 €

Solde .................................................................................14 111,38 €

Préjudices extra-patrimoniaux

- Déficit fonctionnel temporaire total : ...............................4 500 €

- Déficit fonctionnel temporaire partiel : ............................6 802 €

- Préjudice sexuel temporaire : ...........................................rejet

- Souffrances endurées :.....................................................10 000 €

- Préjudice esthétique temporaire : .......................................200 €

- Déficit fonctionnel permanent : ......................................35 000 €

A déduire indemnités versées par AXA : ...........................22 489,65 €

A déduire indemnités versées par ACE : ...........................21 342,86 €

Solde: NEANT

- Préjudice d'agrément :.................................................... 3 000 €

Ses conclusions portent le timbre de la cour au 10 janvier 2012.

Parallèlement, la présente cour statuant sur intérêts civils à l'encontre du prévenu l'a condamné à payer 219 504,63 à M. [H] [I].

L'exposé des moyens et prétentions des parties est réalisé sous la forme du visa prévu par l'article 455 du Code de procédure civile.

Par ordonnance rendue le 6 septembre 2012, le conseiller de la mise en état a clôturé l'instruction de l'affaire.

SUR QUOI

Sur les préjudices patrimoniaux

Sur les frais médicaux restés à charge

Le courtier d'assurance Verspieren écrit : nous n'exerçons pas de recours, nos prestations 'frais médicaux' étant versés globalement sans distinction du risque ' maladie ' ou 'accident', (pièce 133)

Ce type de remboursement est donc forfaitaire et il s'agit d'une assurance de personne.

Cependant l'article 706-9 du Code de procédure pénale dans son avant dernier alinéa n'opère pas cette distinction.

Le courrier du courtier indique bien que le versement concerne bien les frais médicaux inclus dans le risque accident ou maladie.

Il faut donc le prendre en compte.

M. [H] [I] ne donne pas d'indication sur la somme qui lui a été versée à ce titre.

La juridiction n'est donc pas en mesure de déterminer le solde éventuel à la charge de M. [H] [I] s'il y en a un.

Cette demande est donc irrecevable.

Cette irrecevabilité affecte aussi les frais dentaires actuels.

Sur les dépenses de santé future

Le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions refuse de prendre en charge les renouvellements à venir au motif que ces dents étaient déjà couronnées ; il fait valoir que si le remplacement est intervenu à cette date en raison des coups reçus, il aurait fallu de toutes les façons renouveler ces équipements.

Le docteur [J] [Y] exprime ses craintes sur la durée de vie de ces céramiques en raison de la fragilisation de la dent par les coups reçus. Cette réserve doit être prise en compte.

Mais il fallait envisager le renouvellement de la couronne même si les coups n'avaient pas été portés.

Si la fragilisation nécessite des renouvellements plus rapides, M. [H] [I] pourra demander une indemnisation complémentaire.

Mais à ce moment, la fragilisation ne justifie pas la capitalisation de cette dépense.

Sur les frais de correction oculaire

Ces frais ne sont mentionnés que pour mémoire ; il ne s'agit pas d'une prétention ; cette demande est irrecevable.

Sur les frais divers

Il s'agit des frais d'assistance à expertise.

Le fonds conteste le coût et la multiplication des notes d'honoraires, au nombre de six.

Le cas de M. [H] [I] était complexe comme le montreront les développements qui suivent notamment pour le préjudice professionnel.

En raison de cette complexité, cette multiplicité n'est pas excessive. L'existence d'un trouble psychiatrique notamment justifie l'intervention d'un spécialiste de cette matière.

Sur la tierce personne temporaire

L'expert conclut :

Monsieur [I] a dû être aidé de façon notable dans les actes de la vie courante de façon notable durant les premiers mois. Il a été aidé à domicile pendant un mois à raison de 4 heures par jour pendant l'alitement, puis durant 3 mois aidé par son épouse à raison de 10 heures par semaine jusqu'à la veille de la reprise du travail du 7 juin 2004.

A noter qu'il ne pouvait pas conduire jusqu'à cette date.

Monsieur [I] a dû recourir à une aide extérieure pour s'occuper de ses enfants. Il a fait appel à une baby-sitter qui venait chaque jour en fin de journée puis, à partir de la fin de l'année 2006 il a demandé les services d'une jeune fille au pair. Ceci nous paraît justifié eu égard aux suites psychologiques de l'agression.'

M. [H] [I] demande :

a) Du 18 mars 2004, date du retour à domicile, au 18 avril 2004

Durant cette période, le besoin en tierce personne s'établit à 4 heures par jour pour l'assistance de Monsieur [I] outre 4 heures par jour pour s'occuper des enfants.

...

Sur la base d'un tarif horaire de 20,00 € de l'heure, qui correspond aux tarifs généralement pratiqués pour ce type de prestations d'aide aux personnes (pièces n° 123 à 130), il doit donc revenir à Monsieur

[I] une indemnité de :

30 jours x 8 heures par jour x 20, 00 € = 4 800,00 €

Soit au total une indemnité au titre de la période considérée de 4 800,00 €

b) Du 19 avril 2004 au 6 juin 2004 soit durant un mois et demi

Au cours de cette période, l'Expert a retenu un besoin en tierce personne de 10 heures par semaine outre le recours à une aide extérieure pour s'occuper des enfants qui a été, comme exposé ci-dessus, de 4 heures par Jour.

Au total, le besoin en tierce personne s'établit donc au titre de la période considérée à :

6 semaines x 10 heures par semaine x 20,00 € = 1 200 €

45 jours x 4 heures par jour x 20,00 € = 3 600 €

Soit au total une indemnité au titre de la période considérée de 4 800,00 €

c) du 7 juin 2004 au 20 mai 2008 soit 11 mois et 13 jours Durant cette période, l'Expert a retenu uniquement le besoin en tierce personne liée à la garde des enfants, qui a été de 4 heures par jour.

Le besoin en tierce personne s'établit donc à :

1 443 jours x 4 heures par jour x 20,00 € = 115 440,00 €

Soit une indemnité totale au titre de la tierce personne temporaire de 125.040,00 €.

L'expert avait commis une erreur de compte sur la seconde période qui compte en réalité 10 semaines.

Le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions propose 2 500 euros.

Il fait valoir que le couple déclarait des frais d'emploi salarié à domicile et de garde d'enfant avant cette période et après, que deux enfants étaient déjà scolarisés, que, en raison de ses déplacements, le père ne pouvait pas s'occuper régulièrement des enfants auparavant et qu'aucun justificatif n'est fourni.

Cependant, l'expert a retenu cette nécessité en raison de l'état de M. [H] [I], notamment son état psychologique qui pouvait en effet nécessiter une aide pour la garde des enfants.

Pour la période antérieure, en raison de son statut, M. [H] [I] pouvait s'occuper plus longtemps des enfants entre ses déplacements.

L'énoncé du rapport d'expertise auquel se réfère M. [H] [I] distingue deux sortes d'interventions, celles dont M. [H] [I] a personnellement bénéficié et celles concernant les enfants.

Les solutions ont été différentes.

Les premières ont été assurées par son épouse. Il n'est pas fait état de technicité particulière ; ces soins doivent être indemnisés sur la base de 15 euros par heure, soit

(15 x 4 x 31) + (15 x 10x 10) = 3 360 euros.

Pour les secondes M. [H] [I] indique qu'il ont été assurés par une baby-sitter puis par une jeune fille au pair. Dans la mesure où ces prestations ont été assurées par ces moyens, il faut s'approcher du coût réel et non du coût horaire d'un intervenant extérieur.

M. [H] [I] ne donne aucun chiffrage des frais réellement engagés.

Le recours à une jeune fille au pair revient à héberger une personne aux mêmes pot et feu moyennant diverses prestations.

Il ne s'agit donc pas d'un payement en monnaie, mais de la prise en charge d'une personne supplémentaire dans le foyer.

On peut donc considérer qu'elle consommait comme un membre supplémentaire de la famille, soit, par référence aux déclarations d'imposition 15 % du revenu global, 8 907,9 en 2006, 7 136,4 en 2007, et 5/12 de 7 136,4 en 2008 faute de production de l'avis d'imposition des revenus 2008, 2 973,5.

Pour la baby-sitter on peut retenir 18 euros par jour ouvrable, soit, de juin 2004 à décembre 2005, 6 750 euros.

La cour retient donc 3 360 + 6 750 + 8 907,9 + 7 136,4 + 2 973,5 = 29 127,80 euros au titre de la tierce personne.

Sur les pertes de gains professionnels actuelles

M. [H] [I] fait valoir que, alors qu'il exerçait une activité d'ingénieur du son, il est relégué aux fonctions d'assistant, beaucoup moins intéressantes et qu'il est obligé de travailler les fins de semaines.

Ce qui concerne l'intérêt et la pénibilité du travail ne relève pas de la perte de gains professionnels.

M. [H] [I] fait valoir qu'il est resté en arrêt de travail total pendant 8 mois et 7 jours.

Il demande en conséquence une indemnité correspondant à cette durée et la calcule au prorata par référence aux gains actualisés années précédentes, soit 2 779 euros x 8 mois et 7 jours.

Le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions s'oppose à cette demande en faisant valoir :

'Les avis d'imposition transmis montrent que l'événement n'a pas eu d'impact sur son niveau moyen de revenus :

- 2002 : 30.972 €

- 2003 : 27.888 €

- 2004 : 31.191 € (date de l'agression 11 mars 2004) qui n'incluent pas les indemnités journalières perçues de 4.723,33 €, ces dernières n'étant pas imposables, s'agissant d'un accident du travail)

- 2005 : 35.672 € qui n'incluent pas les indemnités journalières perçues de 1 577,38 €

- 2006 : 27.936 € qui n'incluent pas les indemnités journalières perçues de 7 867 €.

- 2007 : 14.932 €, toutefois en 2007, il n'était plus en arrêt de travail.

Ainsi, si on considérait que Monsieur [I] avait des revenus moyens annuels, sur la base de la moyenne des deux années précédant l'infraction, d'un montant de (30 972 + 27 888 x 1/2), soit 29 430 € par an, cela signifierait qu'entre 2004 et 2007, soit pendant quatre ans, il aurait dû percevoir des revenus d'un montant annuel de 117.720 € (4 x 29 430 €).

Or, il a déclaré pendant ces mêmes années :

31 191 € + 35 672 € + 27 936 € + 14 932 € = 10 9731 €

et perçu également la somme de 14 167 € au titre des indemnités journalières non imposables.

Monsieur [I] a donc perçu au total 109 731 + 14 167 = 123 898 €, soit un montant supérieur à 117.720 € ....

Il n'est donc aucunement justifié d'une perte de gains actuels, bien au contraire.

En 2005, soit l'année après l'agression, les revenus étaient de 35.672 €, ce qui démontre à l'évidence l'absence d'impact de l'arrêt de travail sur les revenus.'.

Le calcul du Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions fait gagner plus d'argent à M. [H] [I] quand il perçoit des indemnités journalières que quand il est en activité.

Cette particularité peut s'expliquer par le statut d'intermittent du spectacle auquel est soumis M. [H] [I]. En effet, ce statut fait bénéficier ses ressortissants d'indemnités durant les périodes sans emploi à condition qu'ils aient travaillé auparavant un nombre de jours suffisant.

Les indemnités ne sont pas nécessairement aussi élevées que les indemnités journalières versées en cas d'accident du travail, mais aucune explication qui permette de le vérifier n'est donnée.

Toujours est-il que M. [H] [I], en l'état de ses déclarations de revenus, ne justifie pas d'une perte de gains professionnels actuelle.

Cette demande n'est donc pas retenue.

Sur l'incidence professionnelle

Dans son arrêt rendu le 15 mars 2011 sur intérêts civils, la présente cour a relevé :

Monsieur [H] [I] exerçait le métier de chef opérateur-son au moment de son agression. Il est atteint d'une incapacité de 8 % sur le plan auditif caractérisée par des acouphènes et une surdité de perception droite et le médecin sapiteur ORL, le Docteur [W] retient ' un préjudice professionnel important chez cet opérateur du son dont les conditions de travail ont dû être aménagées. Les attestations de réalisateurs et de professionnels de l'audio-visuel produites par l'appelant démontrent que la carrière de chef opérateur son de Monsieur [I], alors âgé de 33 ans, a été interrompue par les violences subies ce qui s'explique largement par le fait que le sens qui a été altéré est celui sur lequel son activité est par définition fondée. Toute altération auditive ne peut qu'avoir des effets négatifs sur la qualité du travail fourni et sur la pénibilité à exercer son métier.

Cette motivation conserve sa pertinence ; la cour la reprend dans l'instance sur recours de la décision de la commission d'indemnisation des victimes d'infractions.

M. [H] [I] fait aussi remarquer que son activité est désormais consacrée à la communication interne des entreprises alors qu'il participait dans le monde entier à des tournages sur des sujets humains, économiques ou sociologiques de grand intérêt et que, simple assistant, il n'exerce plus les mêmes responsabilités.

Il fait valoir une pénibilité accrue du fait de son handicap auditif.

La stabilisation géographique des activités de M. [H] [I] qui est père de trois enfants présente également des avantages, étant observé que, intermittent du spectacle, les modalités de rémunérations ne sont pas nécessairement comparables à celles de salariés de droit commun notamment pour des primes d'éloignement.

La rétrogradation constitue un préjudice, mais les responsabilités qu'il a perdues ne constituaient pas qu'un avantage.

Par ailleurs, si M. [H] [I] a exercé cette profession avec le succès qui ressort notamment des attestations de professionnels, il n'apparaît pas qu'il l'ait exercé particulièrement dans le domaine musical.

Si les sujets traités pouvaient être plus intéressants que ceux qui lui sont désormais dévolus, cet intérêt ne concernait pas ce qui constituait le coeur de son métier, c'est à dire le son.

La demande de M. [H] [I] repose sur l'hypothèse que ces avantages perdus constituent une incidence correspondant à 50 % de montant des revenus.

Cette proportion est excessive. M. [H] [I] n'est pas réduit à l'inactivité. Son travail porte seulement sur des sujets moins intéressants, sur place et il n'a plus les mêmes responsabilités .

Par ailleurs, dans ce type de profession , la progression de carrière et même la continuation de la pratique professionnelle dans des conditions comparables relèvent d'importants aléas.

Dans ces conditions, la cour statuant sur intérêts civils a fait une juste appréciation de ce chef de dommages et, statuant à l'encontre du Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions, elle reprend cette évaluation soit 100 000 euros.

Il faut cependant, conformément à cette décision, déduire la somme de 888,62 euros versée à titre de rente capitalisée par la caisse primaire d'assurance maladie, soit un solde de 99 111,38 euros.

Sur les préjudices extra patrimoniaux

Sur le déficit fonctionnel temporaire

Pour le déficit total, M. [H] [I] demande 6 856 euros sur la base de 850 euros par mois.

Le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions propose 18 euros par jour.

La cour retient 5 000 euros.

Pour le déficit partiel les parties s'accordent pour une somme de 6 802 euros.

Ce poste de préjudice n'apparaît pas expressément dans les conclusions de l'expert mais résulte de l'évolution de l'état de M. [H] [I].

Pour le préjudice sexuel temporaire, M. [H] [I] sollicite 7 000 euros, le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions qu'il n'y a pas lieu à indemnité supplémentaire.

Ce type de préjudice s'inclut nécessairement dans le déficit fonctionnel temporaire mais il peut en constituer un élément ayant sa propre spécificité.

Il ne répond d'ailleurs pas nécessairement à la même logique, le préjudice sexuel ne variant pas selon les mêmes critères que le déficit fonctionnel temporaire global.

Son principe est retenu par l'expert. M. [H] [I] avait 33 ans lors de l'agression.

L'ensemble de ces données permet de retenir un déficit fonctionnel temporaire global de 15 000 euros.

Sur le préjudice esthétique temporaire

Ce préjudice résulte de la tuméfaction du visage pendant quinze jours.

Cette durée limitée permet de retenir une indemnité de 300 euros

Sur le préjudice résultant des souffrances

L'expert retient une cotation de 4,5 sur une échelle de 7.

En considération de cette cotation et de la description donnée par l'expert, notamment des souffrances psychiques, une indemnité de 14 000 euros peut être retenue.

Sur le déficit fonctionnel permanent

Les conséquences de l'agression subie par M. [H] [I] sur les plans ophtalmologiques, ORL, psychologiques et neuro psychologiques permettent de retenir une indemnité de 48 000 euros.

Le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'autres Infractions fait valoir que M. [H] [I] a perçu 22 489,65 euros de la société Axa et 21 342,86 euros de la société ACE au titre de contrats souscrit notamment par l'employeur la société Canal+.

En revanche, l'imputabilité à ce chef de préjudice n'est pas contestée.

M. [H] [I] s'oppose à cette prétention au motif que le caractère forfaitaire du calcul de ces sommes exclut leur caractère indemnitaire.

Mais, là encore, l'article 706-9 du code de procédure pénale impose cette déduction sans opérer la distinction proposée entre caractère indemnitaire et caractère forfaitaire.

Il reste un solde de 4 167,49 euros.

Sur le préjudice d'agrément

M. [H] [I] ne justifie d'aucune activité régulière de rugby.

En revanche, M. [O] [X] atteste de leur habitude de jouer de la musique ensemble, certains enregistrements ayant même paru sous des labels de musique indépendants.

Cette pratique s'inscrit d'ailleurs logiquement dans la trajectoire de vie présentée par M. [H] [I].

Celui-ci n'est pas privé de toute activité musicale, mais la diminution de l'audition qu'il subit ne lui permet pas une pratique de cette nature et d'un niveau allant jusqu'à espérer des parutions sous des labels de musique. Il ne peut donc plus pratiquer la musique avec le même niveau d'exigence et de satisfaction.

Une indemnité de 10 000 euros peut être retenue.

Récapitulatif

Les sommes dues à M. [H] [I] sont donc les suivantes, hormis la créance de la caisse primaire d'assurance maladie, en euros :

Frais divers : ........................................................................3 680,00

Tierce personne temporaire : ............................................29 127,80

Dépenses de santé future sauf mémoire ..............................3 082,70

Incidence professionnelle ................................................ .99 111,38

Déficit fonctionnel temporaire : .........................................15 000

Souffrances endurées : .......................................................14 000

Préjudice esthétique temporaire :........................................... 300

Déficit fonctionnel permanent : ..........................................4 167,49

Préjudice d'agrément permanent : .....................................10 000

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevables les demandes au titre des frais médicaux restés à charge et les frais de correction oculaires,

Fixe comme il suit les indemnités dues à M. [H] [I], en euros

Frais divers..........................................................................3 680,00

Tierce personne temporaire : ............................................29 127,80

Dépenses de santé future sauf mémoire ..............................3 082,70

Incidence professionnelle ................................................ .99 111,38

Déficit fonctionnel temporaire ..........................................15 000

Souffrances endurées ........................................................14 000

Préjudice esthétique temporaire ............................................ 300

Déficit fonctionnel permanent ............................................4 167,49

Préjudice d'agrément permanent .......................................10 000

outre 1500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Laisse les dépens à la charge du Trésor public.

La greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 11/09165
Date de la décision : 08/11/2012

Références :

Cour d'appel de Paris C4, arrêt n°11/09165 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-11-08;11.09165 ?
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