COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
RÉPARATION DES DÉTENTIONS PROVISOIRES
DÉCISION DU 5 NOVEMBRE 2012
(no 251, 3 pages)
Node répertoire général : 11/ 13852
Décision contradictoire en premier ressort ;
Nous, Dominique GUEGUEN, Conseillère, à la cour d'appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Noëlle KLEIN, Greffière, lors des débats et du prononcé avons rendu la décision suivante :
Statuant sur la requête déposée le 22 juillet 2011 par M. Malik X..., demeurant chez Mle Charlotte Z...,... EN YVELINES ;
Vu les pièces jointes à cette requête ;
Vu les conclusions de l'agent judiciaire de l'Etat, notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;
Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;
Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l'audience fixée au 1er octobre 2012 ;
Vu l'absence de M. Malik X...,
Entendus Me Yves LEVANO avocat au barreau de PARIS représentant M. Malik X..., Me Anne-Sophie LEFEVRE avocat au barreau de PARIS (SCP NORMAND et Associés) représentant Monsieur l'agent judiciaire de l'Etat, ainsi que Monsieur Pierre-Yves RADIGUET, avocat général, les débats ayant eu lieu en audience publique, le conseil du requérant ayant eu la parole en dernier ;
Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R. 26 à R40-7 du code de procédure pénale ;
* * *
Considérant que M. Malik X... a été poursuivi par procès verbal de comparution immédiate en date du 12 janvier 2011 pour infraction à la législation sur les stupéfiants, et ce en état de récidive légale, entrée et séjour irrégulier sur le territoire national ; qu'il a été placé sous mandat de dépôt le 12 janvier 2011, condamné par jugement du tribunal correctionnel de Paris en date du 26 janvier 2011 à la peine de 4 ans d'emprisonnement, que par arrêt du 25 mai 2011, la cour d'appel de PARIS a annulé la procédure d'enquête et ordonné la remise en liberté immédiate du requérant, présenté comme étant X se disant X... Malik, alias A... Boy, né le 5 août 1985, connu également sous d'autres alias tels que B... Soubass, E... Kemal, C... Dom, né le 15 août 1985, ledit arrêt n'ayant fait l'objet d'aucun recours ;
Qu'il a ainsi été incarcéré pendant 4 mois et 14 jours, soit du 12 janvier 2011 au 25 mai 2011 ;
Considérant que par requête déposée le 22 juillet 2011, développée oralement à l'audience, M. X... Malik sollicite :- une somme de 20 000 € au titre de son préjudice moral,
Que l'agent judiciaire de l'Etat, développant oralement ses écritures à l'audience, conclut :- à titre principal, à l'irrecevabilité de la requête,- à titre subsidiaire, à l'octroi de la somme de 4 000 € au titre du préjudice moral, Que le Ministère Public, développant oralement ses écritures à l'audience, conclut, sous réserve de la justification de la qualité à agir du requérant, à défaut de laquelle la demande sera déclarée irrecevable :- à la recevabilité de la requête et à son admission dans le principe,- à la réparation du préjudice moral proportionné à la durée de la détention.
Sur la recevabilité :
Considérant qu'au regard des dispositions des articles 149-1 et 149-2 du code de procédure pénale et 38 du Décret No 91-1266 du 19 décembre 1991, la requête de M. X... Malik déposée dans les délais et modalités de la loi est recevable en la forme ;
Considérant que M. X... Malik est connu sous divers alias, les poursuites ayant été engagées tant devant le tribunal correctionnel que la cour d'appel à l'encontre de X se disant Malik X..., alias Boy A... alias Kemal E..., alias Soubass B..., alias Dom C... ; qu'il doit en conséquence fournir tous les éléments notamment d'état civil permettant son identification afin de justifier de sa qualité à agir, d'autant qu'aucune preuve de cette nature n'a été apportée pendant le cours de l'information pénale, le seul document d'état civil étant l'acte de naissance établi au nom de Halley Khalifa F... X..., fils de M. Malick X..., alors que le requérant a toujours indiqué, notamment en introduction de sa requête, se nommer Malik X... ;
Que s'agissant de sa qualité à agir, M. X... Malik pour justifier de son identité, produit la copie du rapport d'identification dactyloscopique en date du 10 janvier 2011 établissant l'identité de M. X... Malik né le 6 septembre 1979 à Dakar (Sénégal) celle de son passeport biométrique sénégalais, la copie de l'acte de naissance susvisé de son fils Halley qui contient des informations concordantes avec celles de son passeport biométrique ainsi qu'avec celles figurant sur la carte individuelle d'admission à l'aide médicale de l'Etat, le certificat destiné à l'Assedic délivré par le directeur de la maison d'arrêt de Fresnes le 25 mai 2011, le certificat de présence et le billet de sortie attestant que c'est bien la même personne qui a été incarcérée du 13 janvier 2011 au 25 avril 2011 ; que la simple discordance entre l'orthographe du prénom Malick et Malik, apparaissant à deux reprises, sur l'acte de naissance de son fils et sur le passeport sénégalais n'est pas significative, peut résulter d'une simple erreur matérielle ; que l'identité du requérant est donc suffisamment établie pour justifier de sa capacité à agir ;
Sur le préjudice moral :
Considérant que l'indemnisation du préjudice moral de la personne détenue doit être apprécié à l'aune de la durée de la détention, en l'espèce 134 jours et en fonction, notamment, de sa personnalité, de son mode de vie, de son comportement au cours de l'instruction, de ses antécédents judiciaires et des périodes de détention effectuées en exécution de condamnations antérieures ;
Considérant que M. X... Malik, âgé de 34 ans lors de sa mise en détention, de nationalité sénégalaise, a séjourné en France jusqu'en 2005, puis en Italie jusqu'en 2008 et enfin au Portugal ; qu'il a eu trois enfants au Sénégal, issus de mères différentes, puis d'une concubine en France, Mme Z... Charlotte, un fils Halley, né le 12 décembre 2010 à MEULAN (Yvelines) ; qu'il ne s'agissait pas d'une première incarcération d'où une atténuation du choc carcéral, puisque sous ses autres identités de A... et C..., le requérant a été condamné à deux reprises en juillet 2002 et septembre 2004 à des peines d'emprisonnement ferme ;
Considérant que M. X... Malik, qui invoque des conditions particulièrement difficiles de détention, ne produit aucun élément à l'appui de ses déclarations ; qu'il invoque le fait qu'il n'a pu être présent auprès de son enfant, né de sa relation avec Mme Z... Charlotte, alors âgé seulement d'un mois, lors de son placement en détention provisoire ; qu'il était sans emploi et ressources déclarées avant son placement en détention provisoire de sorte qu'il ne pouvait pas subvenir aux besoins de sa famille, qu'il a effectivement subi un préjudice moral du fait de cette incarcération, cependant atténué par ses antécédents judiciaires ;
Qu'eu égard à la durée de sa détention ainsi qu'aux éléments susvisés, il convient en conséquence de lui accorder la somme de 4 000 € en réparation de son préjudice moral ;
PAR CES MOTIFS :
Déclarons M. X... Malik recevable en sa requête,
Allouons à M. X... Malik une indemnité de 4 000 € au titre de son préjudice moral,
Rejetons le surplus des prétentions de M. X... Malik.
Décision rendue le 5 novembre 2012 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.