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30/10/2012 | FRANCE | N°10/11218

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 30 octobre 2012, 10/11218


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 30 Octobre 2012

(n° 10 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/11218



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Novembre 2010 par le conseil de prud'hommes de MEAUX section industrie RG n° 09/00075





APPELANTE

SA FRANÇAISE DE COFFRES FORTS CARADONNA (SFCC)

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Christophe RAMO

GNINO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0380 substitué par Me Nadia MELLOULT, avocat au barreau de PARIS, toque : P380







INTIME

Monsieur [R] [G] [Z]

[Adresse 2]

[Localit...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 30 Octobre 2012

(n° 10 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/11218

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Novembre 2010 par le conseil de prud'hommes de MEAUX section industrie RG n° 09/00075

APPELANTE

SA FRANÇAISE DE COFFRES FORTS CARADONNA (SFCC)

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Christophe RAMOGNINO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0380 substitué par Me Nadia MELLOULT, avocat au barreau de PARIS, toque : P380

INTIME

Monsieur [R] [G] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Arnaud OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : A0476

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Septembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Catherine COSSON, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, président

Madame Marie-Aleth TRAPET, conseiller

Madame Catherine COSSON, conseiller

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

- signé par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente et par Monsieur Polycarpe GARCIA, greffier présent lors du prononcé.

Monsieur [R] [G] [Z] a été embauché le 11 mars 1985 en qualité de poseur CP2 par la société Seine et Marnaise de Clôtures et de Sécurité, ci-après SMCS, ayant pour activité l'achat, la vente et la pose d'éléments préfabriqués de clôture de toute nature et la vente et l'installation d'alarmes de système d'automatismes.

Par lettre du 5 octobre 2007, Monsieur [G] [Z] a été convoqué à l'entretien préalable au licenciement. Par courrier du 31 octobre 2007, il a été licencié pour motif économique.

Par jugement du 19 novembre 2010, le conseil de Prud'hommes de Meaux, présidé par le juge départiteur, a :

- condamné la société Française de Coffres Forts Caradonna, SFCC, à payer à Monsieur [G] [Z] :

- 2.295,66 € à titre de reliquat d'indemnité de licenciement avec intérêts au taux légal à compter du jour de la demande,

- 18.558 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

ces sommes avec intérêts au taux légal au jour du jugement,

- ordonné à la société Française de Coffres Forts Caradonna de rembourser aux organismes concernés l'équivalent d'un mois d'allocations chômage versées à Monsieur [G] [Z],

- débouté la société Française de Coffres Forts Caradonna de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux dépens en ce compris les frais éventuels d'exécution par voie d'huissier de justice.

Par lettre du 14 décembre 2010, la société Française de Coffres Forts Caradonna a interjeté appel.

Elle demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et a alloué à l'intimé 18.558 € à titre d'indemnité. Elle conclut à la confirmation de la décision en ce qui concerne le reliquat d'indemnité conventionnelle de licenciement qu'elle reconnaît devoir. Elle sollicite la condamnation de Monsieur [G] [Z] aux dépens et à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [G] [Z] demande la confirmation du jugement entrepris sauf en ce qui concerne le quantum des dommages et intérêts pour absence de cause réelle et sérieuse qu'il évalue à 56.486,20 €. Il réclame la condamnation de l'appelante aux dépens et à lui payer 3.000 € au titre de ses frais irrépétibles et qu'il lui soit ordonné d'afficher la décision sur la porte d'entrée de ses locaux pendant 1 mois sous astreinte de 100 € par jour de retard.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier, reprises et complétées lors de l'audience des débats.

SUR QUOI, LA COUR

Considérant que le 8 septembre 2007, Monsieur [G] [Z] a envoyé à la SMCS la lettre suivante :

Je m'étonne que vous sollicitiez ma signature avec véhémence à propos du transfert que vous avez décidé de mon contrat de travail au sein de la société SFCC : en effet c'est l'article L 122-12 du code du travail qui doit s'appliquer avec reprise de mon ancienneté, de mon salaire, ma qualification, mes horaires et de tous mes droits.

Or les 8 heures de travaux de clôture par jour que vous réclamez aujourd'hui sont impossibles : les temps de trajets et de déplacement du matériel sont aussi du temps de travail, car il faut d'abord nous rendre au siège.

Je vous confirme que je reste disponible pour travailler dans les conditions contractuelles que nous avions convenu et que vos menaces ne changeront rien à mon refus d'un avenant inutile ou désavantageux.

Dans l'attente d'une poursuite normale de mon contrat ' ;

Considérant que par lettre du 10 septembre 2007, au motif de sérieuses difficultés économiques, la société SMCS a informé Monsieur [G] [Z] que des mesures drastiques allaient être prises pouvant aller jusqu'à la suppression de son poste et que dans le cadre de son obligation de reclassement, elle lui proposait la reprise de son contrat de travail par sa société mère, la société Française de Coffres Forts Caradonna, ci-après SFCC, au poste de poseur CP2 ; qu'elle indiquait que les fonctions, rémunération et avantages individuels en ce compris l'ancienneté seraient maintenus, précisant cependant vous serez amené toutefois à effectuer des travaux de clôture de 8 heures sur place ;

Considérant que cette offre, maintenue par courrier du 22 octobre 2007, a été refusée par Monsieur [G] [Z] qui a été licencié pour motifs économiques le 31 octobre 2007 dans les termes suivants :

Nous avons le regret de vous licencier pour les motifs économiques suivants.

Vous occupez, au sein de la société SMCS, le poste de poseur depuis le 11/03/1985.

Depuis de nombreux mois, la société SMCS rencontre de sérieuses difficultés économiques.

C'est ainsi qu'en 2006, la société SMCS a subi une perte de l'ordre de 284.882 €.

Une telle situation qui compromet gravement la pérennité de l'entreprise nous contraint à prendre des mesures drastiques et notamment à supprimer votre poste.

Nous avons, dans le cadre de notre obligation de reclassement, tenté par tous les moyens de rechercher un poste susceptible de vous convenir.

C'est ainsi que nous avons été en mesure de vous proposer le poste de poseur au sein de la société SFCC, société mère de la société SMCS.

Ce poste, qui garantissait tous vos avantages individuels, vous a été proposé par lettre du 10 septembre 2007.

Lors de l'entretien préalable du 17 octobre 2007, nous avons maintenu notre proposition.

Par lettre du 22 octobre, nous vous avons laissé un délai supplémentaire pour vous positionner.

Pour seule réponse, vous nous avez adressé une lettre en date du 23 octobre aux termes de laquelle vous nous réclamez vos indemnités ! ;

Considérant que le 28 décembre 2007, la société SFCC, associée unique de la société SMCS, a décidé la dissolution anticipée sans liquidation de cette dernière, cette dissolution opérant transmission universelle de son patrimoine à la SFCC ;

Considérant que Monsieur [G] [Z] soutient que son licenciement a été opéré pour faire échec au transfert légal de son contrat de travail en application de l'article L.1224-1 du code du travail qui aurait dû s'opérer du fait de l'absorption de la SMCS par la SFCC ; qu'il prétend que la SMCS entendait procéder en fraude de l'article précité à une modification de son contrat de travail quant à la durée du travail ;

Considérant que l'appelante fait valoir que les difficultés économiques de la SMCS ont commencé en 2006 et ont conduit la société mère, la SFCC, à abandonner deux créances de l'ordre de 300.000 et 400.000 € afin que les résultats de sa filiale redeviennent positifs; que c'est dans ces conditions que la SMCS a envisagé de cesser toute activité, de supprimer la totalité de son effectif et de mettre en 'uvre des procédures de licenciement économique; qu'elle a proposé à tous ses salariés la reprise de leur contrat de travail par la SFCC ce qui compte tenu du changement d'employeur nécessitait l'accord des salariés ; qu'en revanche la référence à 8 heures de pose de clôture ne pouvait à elle seule être qualifiée de modification du contrat et ne démontrait pas une fraude aux dispositions d'ordre public de l'article L 1224-1 du code du travail ; que la dissolution avec transmission universelle du patrimoine de la SMCS à la SFCC était une décision de pure gestion ;

Considérant que l'article L 1224-1 du code du travail dispose que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ;

Considérant que ce texte ne fait pas obstacle à ce que des licenciements pour raisons économiques interviennent antérieurement à la modification de la situation juridique de l'employeur à la condition que ces licenciements n'interviennent pas en fraude des droits du salarié ;

Considérant qu'en l'espèce, Monsieur [G] [Z] est fondé à soutenir une fraude à ses droits ayant eu pour objet de l'empêcher de se prévaloir des dispositions de l'article L 1224-1 précité ;

Considérant en effet, ainsi que relevé par le premier juge, qu'il existe une concomitance dans le temps des opérations de licenciement au sein de la SMCS d'une part et de dissolution avec transmission du patrimoine de la SMCS à la SFCC d'autre part ; que tous les salariés, à l'exception des deux l'ayant refusé, soit 8 sur dix, ont été repris par la SFCC, le 4 septembre 2007 ou le 1er janvier 2008 ; que le fait de proposer à Monsieur [G] [Z] la poursuite de son activité de poseur au sein de la SFCC dont l'activité (ferronnerie, chaudronnerie, serrurerie et fabrication de gros et petits ouvrages de fer) était totalement différente de celle de la SMCS, impliquait le maintien des activités de cette dernière après la dissolution ; que la SFCC n'apporte à la cour aucun élément permettant une appréciation différente notamment quant à la reprise des moyens nécessaires à l'exploitation, alors que les deux sociétés, qui avaient le même dirigeant, travaillaient dans le même lieu ;

Considérant que la SFCC soutient à tort que les termes vous serez amené toutefois à effectuer des travaux de clôture de 8 heures sur place figurant dans la proposition de reclassement, constituent une mention banale et non une modification du contrat de travail; qu'elle n'a en effet jamais répondu à Monsieur [G] [Z] qui dès le 8 septembre 2007 appelait son attention sur l'augmentation significative de sa durée du travail qui en serait la conséquence, refusait dans ces conditions la signature d'un avenant et réclamait la poursuite de son contrat de travail aux conditions initiales ; qu'elle ne fournit pas davantage d'explications à la cour sur le sens qu'elle donne à ce membre de phrase ;

Considérant qu'il s'ensuit qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Considérant en application de l'article L 1235-3 du code du travail qu'à la date du licenciement Monsieur [G] [Z] percevait une rémunération mensuelle moyenne brute de 2.905,07 €, calculée sur les trois derniers mois, était âgé de 55 ans et bénéficiait d'une ancienneté de 22 ans ; qu'il n'a pas retrouvé d'emploi et a été placé en invalidité, sa pension en avril 2012 s'élevant à la somme de 1.260,13 € ; qu'il y a lieu de lui allouer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 45.000,00 €, le jugement étant infirmé sur le quantum ;

Considérant que la SFCC reconnaît devoir le reliquat d'indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'il n'y a pas lieu à affichage de la décision ; que le surplus du jugement entrepris est confirmé ;

Considérant que la SFCC est condamnée aux dépens de l'instance d'appel et à payer à Monsieur [G] [Z] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que sa demande présentée du même chef est rejetée ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau,

Condamne la société Française de Coffres Forts Caradonna, dite SFCC, à payer à Monsieur [R] [G] [Z] la somme de 45.000,00 (quarante cinq mille) euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, cette somme avec intérêts au taux légal à compter de ce jour,

Y ajoutant,

Rejette la demande présentée par la société Française de Coffres Forts Caradonna, dite SFCC, au titre de ses frais irrépétibles,

Condamne la société Française de Coffres Forts Caradonna, dite SFCC, aux dépens de l'instance d'appel et à payer à Monsieur [R] [G] [Z] la somme de 3.000,00 (trois mille) euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 10/11218
Date de la décision : 30/10/2012

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°10/11218 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-10-30;10.11218 ?
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