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24/10/2012 | FRANCE | N°09/09717

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 24 octobre 2012, 09/09717


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 24 Octobre 2012



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/09717



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Juin 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 08/02164





APPELANTE

S.A.S. SMART DIET

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Sophie LARROUIL, avocat au barreau de PARIS, toque : B0448>




INTIMÉE

Madame [N] [L]

Chez Monsieur et Madame [V]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Sébastian VAN TESLAAR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1466





COMPOSITION D...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 24 Octobre 2012

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/09717

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Juin 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 08/02164

APPELANTE

S.A.S. SMART DIET

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Sophie LARROUIL, avocat au barreau de PARIS, toque : B0448

INTIMÉE

Madame [N] [L]

Chez Monsieur et Madame [V]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Sébastian VAN TESLAAR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1466

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Septembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Benoît HOLLEAUX, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Christine ROSTAND, Présidente

Monsieur Benoît HOLLEAUX, Conseiller

Madame Laurence GUIBERT, Vice-Présidente placée

GREFFIER : Monsieur Philippe ZIMERIS, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Christine ROSTAND, Présidente et par Mme Corinne de SAINTE MAREVILLLE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 17 juin 2009 ayant

- condamné la SAS SMART DIET à régler à Mme.[N] [L] les sommes suivantes :

' 3.807,40 euros de rappel de salaires et 380,74 euros d'incidence congés payés (temps plein) ;

' 9.000 euros d'indemnité pour travail dissimulé ;

' 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- débouté Mme [N] [L] de ses autres prétentions.

- rejeté les demandes reconventionnelles de la SAS SMART DIET.

- condamné la SAS SMART DIET aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel de la SAS SMART DIET reçue au greffe de la cour le 16 novembre 2009 ;

Vu l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 6 juin 2012 de réouverture des débats à l'audience du 11 septembre 2012 ;

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 11 septembre 2012 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SAS SMART DIET qui demande à la cour :

. de le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux demandes de rappel d'heures supplémentaires et de dommages-intérêts complémentaires de Mme [N] [L].

. de 'infirmer pour le surplus et statuant à nouveau :

' de constater la validité du passage à temps partiel de Mme [N] [L] et de la débouter de ses demandes de rappel de salaires et d'indemnité pour travail dissimulé ;

' de juger valable la démission de Mme [N] [L] et de la débouter de sa demande indemnitaire pour rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ;

' de rejeter la réclamation de Mme [N] [L] au titre de l'indemnité de fin de contrat «nouvelles embauches» (CNE) ;

' de condamner reconventionnellement Mme [N] [L] à lui payer la somme de 6.000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation de son obligation de loyauté, ainsi que celle de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 11 septembre 2012 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de Mme [N] [L] qui demande à la cour :

. de juger qu'elle travaillait à plein temps et que la rupture de son contrat de travail est imputable à la SAS SMART DIET.

. d'infirmer pour partie le jugement déféré et de condamner la SAS SMART DIET à lui verser les sommes suivantes :

' 3.967,92 euros de rappel de salaires (temps plein) ;

' 3.543,83 euros de rappel d'heures supplémentaires ;

' 733,60 euros de congés payés afférents sur lesdits rappels ;

' 1.239,12 euros d'indemnité (8%) de fin de CNE (demande nouvelle) ;

' 3.500 euros de dommages-intérêts pour rupture du contrat de travail à ses torts et non-transmission d'une attestation ASSEDIC conforme (demande nouvelle) ;

' 11.800 euros d'indemnité pour travail dissimulé ;

. de condamner la SAS SMART DIET aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA COUR :

La SAS SMART DIET, exerçant sous l'enseigne «[Adresse 5]», a recruté Mme [N] [L] dans le cadre d'un contrat «nouvelles embauches» du 1er juin 2007 en qualité d'esthéticienne au coefficient 175 de la convention collective nationale de la Parfumerie ' Esthétique, et moyennant un salaire de 1.500 euros bruts mensuels pour 39 heures hebdomadaires.

Aux termes d'un courrier daté du 20 décembre 2007 adressé à son employeur, Mme [N] [L] a donné sa «démission» avec effet au 18 janvier 2008.

Sur le paiement d'un rappel de salaires correspondant à un temps plein :

Il est un fait que les bulletins de paie produits aux débats sont établis sur la base d'un temps plein (151,67 heures mensuelles) jusqu'en août 2007, puis d'un temps partiel (86, 67 heures mensuelles) à compter de septembre 2007 sans formalisation d'un contrat écrit répondant aux exigences de l'article L.3123-14 quant à la fixation de «la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois» et «les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification».

***

L'absence d'un écrit conforme au texte précité a pour seul effet de faire présumer que la relation contractuelle de travail s'exécute sur la base d'un horaire normal à temps plein, à charge pour l'employeur, qui conteste cette présomption simple, de rapporter la preuve, d'une part, qu'il s'agit d'un emploi à temps partiel et, d'autre part, que le salarié n'est pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler et qu'il n'est pas tenu de se tenir constamment à sa disposition .

***

Contrairement à ce qu'indique la salariée dans ses écritures (page 5), il ne peut s'agir dans ces circonstances d'une «présomption irréfragable».

La SAS SMART DIET, sur laquelle pèse la charge de renverser cette présomption simple d'existence d'une relation de travail salarié à temps plein, se prévaut d'un courrier daté du 29 août 2007 émanant de Mme [N] [L] en ces termes : «Pour des raisons personnelles je souhaiterai travailler à mi-temps soit 20 heures par semaine à partir du mois de septembre» (sa pièce 21).

L'intimée, qui ne conteste ni l'existence de cette même lettre ni le fait de l'avoir signée, se contente d'affirmer qu'elle «a été obtenue par l'effet de surprise et par la contrainte car comme (elle) faisait des heures supplémentaires pour lesquelles elle n'était pas payée, il lui a été dit que le règlement desdites heures interviendrait si elle signait cette lettre» (ses conclusions, page 5).

Par cette correspondance, l'employeur établit que Mme [N] [L] était salariée à temps partiel à compter de septembre 2007 comme mentionné sur ses bulletins de paie, ce que vient encore confirmer l'ex-époux de cette dernière dans une attestation produite aux débats (pièce 9 de la SAS SMART DIET).

En outre, il sera relevé que Mme [N] [L] ne conteste pas le fait que l'employeur ait procédé à deux nouveaux recrutements à la même époque dont une salariée à temps partiel, précisément pour compenser la baisse de son temps d'activité comme sollicité dans le courrier précité, ce qui démontre qu'elle n'était pas placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'était pas tenue de se tenir constamment à sa disposition.

***

Il s'en déduit que Mme [N] [L] est bien passée sur un emploi à temps partiel durant la période postérieure au mois d'août 2007, de sorte qu'elle sera déboutée de sa demande en paiement d'un rappel de salaires à ce titre - de septembre 2007 à janvier 2008 - et le jugement entrepris sera en conséquence infirmé.

Sur le rappel d'«heures supplémentaires»:

Au soutien de sa demande s'analysant en définitive en une demande en paiement d'un rappel d'heures complémentaires liées au régime légal du temps partiel, Mme [N] [L] produit seulement :

'un relevé (sa pièce 46 bis) de ses heures supposées d'arrivée et de départ sur la période de juin 2007 à janvier 2008, relevé n'étant assorti d'aucune explication chiffrée pertinente puisque la cour doit se contenter de quelques indications parcellaires figurant dans ses écritures (pages 10/11), ce que relève l'employeur qui considère à juste titre ce document comme «inexploitable» ;

'des attestations d'une série de clientes (ses pièces 13, 15, 17, 18, 19, 27, 28, 29) vantant ses qualités de masseuse et le témoignage d'une ancienne collègue de travail (pièce 39) qui n'a été en poste dans l'entreprise que durant une période d'essai d'une semaine (du 7 au 13 janvier 2008), ce qui constitue effectivement, selon l'appelante, des éléments inopérants.

***

Faute ainsi par Mme [N] [L] d'étayer sa réclamation par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires réalisés, ce que n'a pas manqué de relever l'employeur, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de ce chef.

Sur le travail dissimulé :

Mme [N] [L] ne pouvant se prévaloir d'une relation de travail salariée à temps plein après août 2007 ni imputer à l'appelante un non paiement d'heures complémentaires sur la période de juin 2007 à janvier 2008, elle sera déboutée de sa demande indemnitaire pour travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié sur le fondement des articles L.8221-5 et L.8223-1 du code du travail, de sorte que le jugement critiqué sera infirmé sur ce point.

Sur l'indemnité de fin de contrat «nouvelles embauches»:

Si Mme [N] [L] sollicite une indemnité de fin de contrat «nouvelles embauches» égale à 8 % du montant total de la rémunération brute lui étant due jusqu'à son départ de l'entreprise, somme qu'elle évalue à 1.293,12 euros, la SAS SMART DIET, pour s'opposer à cette prétention, répond que le dispositif sur le «contrat nouvelles embauches» a été abrogé par la loi du 25 juin 2008 et que les contrats en cours au 26 juin 2008 ont été requalifiés en contrats de travail à durée indéterminée de droit commun.

***

Mais dès lors que le contrat de travail «nouvelles embauches» de la salariée a été rompu à son initiative courant janvier 2008, il ne peut être fait application de l'article 9-II de la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 qui ne prévoit sa requalification en un contrat à durée indéterminée de droit commun qu'à la condition qu'il soit toujours en cours au 26 juin 2008.

L'article 2 §3° de l'ordonnance n° 2005-893 du 2 août 2005 applicable au litige - fin de la relation contractuelle de travail entre les parties avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 - ne prévoit le règlement d'une indemnité dite de fin de contrat égale à 8 % du montant total de la rémunération brute due au salarié depuis la conclusion du contrat « nouvelles embauches» que si l'employeur «est à l'initiative de la rupture, sauf faute grave».

***

Dans la mesure où Mme [N] [L] est à l'initiative de la rupture du contrat de travail l'ayant liée à la SAS SMART DIET - lettre de «démission» du 20 décembre 2007 -, indépendamment de la question relative à son imputabilité, elle ne peut prétendre à cette indemnité de 8 %, de sorte que la cour la déboutera de cette demande nouvelle (1.239,13 euros).

Sur la demande indemnitaire pour rupture imputable à l'employeur et non transmission d'une attestation ASSEDIC conforme :

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de manière claire, libre et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail qui le lie à son employeur.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement susceptible d'annuler sa démission, entend la remettre en cause en raison de manquements qu'il impute à son employeur, doit être retenue la qualification de prise d'acte de la rupture du contrat de travail s'il ressort de circonstances antérieures ou contemporaines qu'au moment où cette même démission a été donnée, elle présentait de fait un caractère équivoque.

Cette démission ainsi requalifiée en prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les manquements avérés de l'employeur sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite de l'exécution du contrat de travail et, dans le cas contraire, d'une démission.

***

L'échange de correspondances courant janvier 2008 entre Mme [N] [L] (sa pièce 9) et la SAS SMART DIET (sa pièce 7) - la salariée reprochant à son employeur divers manquements à ses obligations contractuelles - permet de conclure au caractère équivoque de la démission donnée par l'intimée en décembre 2007, de sorte qu'il convient de la requalifier en prise d'acte de la rupture de son contrat de travail.

Dès lors que, pour les raisons précédemment exposées, aucun des griefs reprochés par Mme [N] [L] à l'appelante n'est caractérisé, il y a lieu de juger infondée sa prise d'acte produisant les effets d'une démission - rupture du contrat de travail lui étant imputable.

Cette imputabilité de la rupture à Mme [N] [L] a donné lieu à l'établissement par la SAS SMART DIET le 18 janvier 2008 d'une attestation ASSEDIC retenant à bon droit (§6 MOTIF DE LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL) la mention suivante : «rupture d'un CNE à l'initiative du salarié (dans les 2 premières années du contrat)».

***

Mme [N] [L] sera en conséquence déboutée de sa demande indemnitaire nouvelle pour «rupture aux torts de l'employeur et non transmission d'une attestation ASSEDIC conforme» (3.500 euros).

Sur la demande indemnitaire de la SAS SMART DIET pour violation par la salariée de son obligation de loyauté :

Au soutien de cette demande, l'appelante reproche à Mme [N] [L] «sa perfidie» pour avoir démarché «à son seul profit» des clientes de l'entreprise (ses écritures, page 17), ce que conteste l'intimée faisant état d'un jugement du tribunal de grande instance de Bobigny du 5 janvier 2010 ayant débouté son ancien employeur de sa demande indemnitaire pour «détournement de clientèle».

Les attestations versées aux débats par la SAS SMART DIET sont les mêmes que celles produites devant le juge civil qui a rejeté sa réclamation indemnitaire pour «détournement de clientèle» contre Mme [N] [L].

***

Dès lors que la présente demande indemnitaire de la SAS SMART DIET est fondée sur la violation par Mme [N] [L] de son obligation de loyauté en sa qualité de salariée, violation alléguée trouvant sa cause dans le grief de «détournement de clientèle» précisément écarté par le juge civil, il convient de confirmer la décision entreprise qui a débouté l'appelante de cette prétention (6.000 euros).

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Aucune circonstance d'équité ne commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et Mme [N] [L] sera condamnée aux entiers dépens tant de première instance qu'en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe.

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ses dispositions sur le rappel de salaires (temps plein) et le travail dissimulé, ainsi que sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Statuant à nouveau de ces chefs,

DÉBOUTE Mme [N] [L] de ses demandes au titre d'un rappel de salaires (temps plein) et du travail dissimulé.

Y ajoutant :

DÉBOUTE Mme [N] [L] de ses demandes indemnitaires au titre du contrat «nouvelles embauches», ainsi que pour rupture imputable à l'employeur et non transmission d'une attestation ASSEDIC conforme ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel.

CONDAMNE Mme [N] [L] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 09/09717
Date de la décision : 24/10/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°09/09717 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-10-24;09.09717 ?
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