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22/10/2012 | FRANCE | N°11/02709

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 4, 22 octobre 2012, 11/02709


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 4



ARRET DU 22 OCTOBRE 2012



(n° 249 , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/02709



Sur renvoi après cassation (arrêt de la cour de cassation de Paris du 06 janvier 2011 Pourvoi N° D09-71.201) d'un arrêt rendu le 21 septembre 2009 par la cour d'appel de Paris, sur offre non acceptée du 17 décembre 2008 de L'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISAT

ION DES ACCIDENTS MEDICAUX





DEMANDEURS



Monsieur [Z] [L]

Elisant domicile chez Maître [T] [P]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Madame [J] [F] épous...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 4

ARRET DU 22 OCTOBRE 2012

(n° 249 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/02709

Sur renvoi après cassation (arrêt de la cour de cassation de Paris du 06 janvier 2011 Pourvoi N° D09-71.201) d'un arrêt rendu le 21 septembre 2009 par la cour d'appel de Paris, sur offre non acceptée du 17 décembre 2008 de L'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX

DEMANDEURS

Monsieur [Z] [L]

Elisant domicile chez Maître [T] [P]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Madame [J] [F] épouse [L]

Elisant domicile chez Maître [T] [P]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentés par Me Frédéric BIBAL, avocat au barreau de PARIS, J103

DEFENDEUR

ONIAM - OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par la AARPI VATIER & ASSOCIES Association d'Avocats à Respons abilité Professionnelle Individuelle Me Olivier SAUMON, avocats au barreau de PARIS, P0082

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 juin 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant la cour composée de :

- Jean BOYER, Président

- Line TARDIF, Conseillère

- Françoise MARTINI, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Isabelle COULON

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour fixé au 24 septembre 2012, prorogé au 22 octobre 2012, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean BOYER, Président et par Sylvie BENARDEAU, greffière présente lors du prononcé.

Le 6 janvier 2011, la Cour de cassation a statué ainsi sur un arrêt rendu par la présente cour :

'Vu l'article L. 3122-5 du code de la santé publique ;

Attendu que M. [L], hémophile depuis l'enfance et contaminé par le VIH, a été indemnisé par le Fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles entre 1994 et 1998 ; qu'il a épousé en 2000 Mme [F] ; que le diagnostic de contamination a été posé en 2002 sur la personne de celle-ci, ainsi que sur celle de sa fille, [K], née la même année ; que M. et Mme [L] ont sollicité auprès de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) l'indemnisation des préjudices spécifiques de Mme [L] et de sa fille et celle des troubles dans les conditions d'existence formulée au nom de chacun des membres de la famille ; qu'ils ont accepté les offres que l'ONIAM leur a adressées au titre des préjudices spécifiques mais ont contesté celles relatives aux troubles dans les conditions d'existence ; que devant la cour d'appel, I'ONIAM, s'estimant délié de l'offre faite à M. [L], lui a dénié toute indemnisation ;

Attendu que pour accueillir la demande de M. [L], la cour d'appel a retenu qu'aucune disposition de la procédure organisée par le texte susvisé ne permettait à l'ONIAM de retirer une offre faite dans le temps transactionnel de la procédure ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le refus de l'offre, par la victime, la rend caduque, de sorte que l'ONIAM s'en trouve délié, la cour d'appel, à laquelle il appartient alors de statuer tant sur l'existence que sur l'étendue des droits du demandeur, a violé par fausse application le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a alloué à M. [Z] [L] la somme de 9 150 euros et la somme de 7 620 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence du fait de la contamination VIH de Mme [L] et de [K] [L], l'arrêt rendu le 21 septembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;'

L'affaire est revenue devant la présente cour autrement composée.

Le préjudice dont M. [Z] [L] demande réparation était celui résultant pour lui de la contamination de sa femme et de son enfant, étant acquis que c'est lui qui a contaminé son épouse en entretenant avec elle des rapports intimes sans protection.

Il sollicite 12 196 euros pour la contamination de son épouse et 12 000 euros pour la contamination de sa fille.

Il soutient que l'ONIAM ne serait pas autorisé à retirer une offre qu'il avait formulée, un tel retrait n'étant prévu par aucune loi. Il reproche aux analyses contraires de se référer à la notion de transaction formée en droit civil alors que, organisme public, l'ONIAM ne pourrait pas formuler d'offre pour des sommes qu'il n'aurait pas dues.

Il ajoute que le directeur de l'ONIAM est tenu par l'avis conforme de la commission d'indemnisation.

Il analyse ensuite l'article L 1322-1 du code de la santé publique dans lequel il ne voit que la fixation de délais pour présenter l'offre, le principe de la réparation intégrale la présentation de l'offre et cite des auteurs ayant commenté défavorablement l'arrêt de cassation.

Ces auteurs s'inquiètent du risque de pression de l'ONIAM envers les victimes et rapprochent même l'ONIAM du juge qui ne pourrait refuser un préjudice dont il a constaté l'existence.

M. [Z] [L] ajoute que son droit à indemnisation est incontestable et se dit choqué du reproche de faute formulé à son encontre en faisant remarquer la prégnance de ses convictions religieuses, difficilement compatibles avec des rapports sexuels protégés.

Il fait valoir ses angoisses et son soutien auprès de ses proches contaminés.

L'ONIAM conclut au rejet des demandes en rappelant les indemnisations dont ont bénéficié M. [Z] [L], son épouse et sa fille contaminée et à la caducité de l'offre après le refus de son bénéficiaire.

Il fait valoir notamment la jurisprudence administrative permettant de contrôler si la somme proposée est due et que M. [Z] [L] a volontairement abandonné la procédure amiable instaurée par l'article L. 3122-1 du code de la santé publique.

Enfin, il conteste que le préjudice dont il est demandé réparation soit la conséquence directe de la contamination cette contamination résultant des rapports sexuels non protégés qu'a entretenus M. [Z] [L] avec son épouse.

Madame [J] [F] épouse [L] ne formule pas de demande.

SUR QUOI

Sur la possibilité pour l'ONIAM de retirer son offre

L'article L 3122-3 du code de la santé publique ne fait référence à la transaction qu'à propos des conséquences de l'acceptation de l'offre.

Cette référence n'a pas d'incidence sur le présent litige qui concerne l'offre en cas de refus.

Les débats doctrinaux dont il est fait état insistent sur le caractère d'établissement public de l'ONIAM.

Celui-ci reste une partie et tout rapprochement avec le juge est inadéquat.

Par ailleurs, si l'ONIAM est un organisme public, le régime juridique de la réparation revêt une nature hybride illustrée par la compétence des juridictions judiciaires.

Un raisonnement fondé sur les seuls mécanismes du droit public ne rendent pas plus compte de la situation que ceux fondés sur une analyse relevant uniquement du droit privé.

Il faut en revenir aux textes spécifiques.

Les articles L 3122-1 et suivants du code de la santé publique, notamment l'article L 3122-3, ainsi que les articles réglementaires pris en leur application mentionnent une offre et non un engagement.

L'auteur d'une offre n'est pas obligé de la maintenir lorsqu'elle a été refusée.

Le risque invoqué par les auteurs de voir retirer l'offre et donc de devoir se soumettre à l'appréciation de la cour ne permet pas de modifier le contenu de ce terme.

L'appréciation de la légalité de l'offre ne modifie pas non plus ce caractère.

On ne peut donc pas interdire à l'ONIAM de retirer une offre refusée.

M. [Z] [L] doit être débouté de cette demande.

Sur le droit à indemnisation de M. [Z] [L]

Il est constant que si M. [Z] [L] n'avait pas été contaminé par le virus du sida, il n'aurait pas pu, lui-même contaminer son épouse.

La contamination qui constitue la source des obligations de l'ONIAM est donc bien en lien objectif avec le préjudice dont M. [Z] [L] sollicite la réparation.

Mais M. [Z] [L] a lui-même, sciemment, entretenu des relations sexuelles sans protection avec son épouse ; même s'il invoque des traditions religieuses difficilement compatibles avec l'utilisation de protections, ce comportement engage sa responsabilité.

En raison du caractère spécifique du préjudice de contamination, cette responsabilité de M. [Z] [L] ne signifie pas nécessairement que, l'ONIAM soit dégagé de toute obligation à réparation.

La contamination subie par M. [Z] [L], entraînant une interdiction de rapports sexuels sans protection même avec son épouse tout au long de sa vie, sans qu'une intention de nuire soit alléguée, constitue une contrainte telle qu'elle ne permet pas de retenir à sa charge toute la responsabilité de ce préjudice et l'exclusion de tout engagement de l'ONIAM.

L'indemnisation dont il a bénéficié ne concernait pas le préjudice par ricochet résultant de la contamination de sa femme et de sa fille.

Il faut en conséquence retenir un partage de responsabilité laissant à la charge de l'ONIAM un tiers du préjudice.

Le montant des préjudices subis par M. [Z] [L] n'est pas autrement contesté.

En considération des circonstances de l'espèce et de la présente décision, l'équité ne commande pas d'allouer une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Déboute M. [Z] [L] de ses demandes tendant à obliger l'ONIAM à maintenir son offre après son propre refus,

Fixe à 4 065,33 et 4000 euros les sommes dues par l'ONIAM à M. [Z] [L] pour le préjudice qu'il subit du fait de la contamination de son épouse et d'une de ses filles,

Laisse les dépens à la charge de l'ONIAM.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 11/02709
Date de la décision : 22/10/2012

Références :

Cour d'appel de Paris C4, arrêt n°11/02709 : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-10-22;11.02709 ?
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