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11/10/2012 | FRANCE | N°11/02451

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 11 octobre 2012, 11/02451


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 11 Octobre 2012

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/02451



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Octobre 2005 par le conseil de prud'hommes de ETAMPES section RG n° 03/00145 ayant fait l'objet d'un premier appel dont décision en date du 16 octobre 2007 (CA - Paris - 18ème chambre D) dont l'arrêt a été cassé par la Cour de cassation par décision en

date 12 mars 2008 et renvoyé l'affaire devant la chambre 6-5 de la cour d'appel de Paris dont décision du 07 mai 2009, de nouveau cassé par ar...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 11 Octobre 2012

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/02451

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Octobre 2005 par le conseil de prud'hommes de ETAMPES section RG n° 03/00145 ayant fait l'objet d'un premier appel dont décision en date du 16 octobre 2007 (CA - Paris - 18ème chambre D) dont l'arrêt a été cassé par la Cour de cassation par décision en date 12 mars 2008 et renvoyé l'affaire devant la chambre 6-5 de la cour d'appel de Paris dont décision du 07 mai 2009, de nouveau cassé par arrêt de la Cour de cassation du 14 décembre 2010 qui a renvoyé à la présente juridiction.

APPELANT

Monsieur [L] [Z]

[Adresse 7]

comparant en personne, assisté de Me Christian SAID, avocat au barreau d'ESSONNE

INTIMEE

ASSOCIATION POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES ADULTES

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Jean Baptiste REGNIER, avocat au barreau de BETHUNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 Juin 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle DOUILLET, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Flora CAIA, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Mademoiselle Flora CAIA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'appel régulièrement interjeté par Monsieur [L] [Z] à l'encontre d'un jugement prononcé le 21 octobre 2005 par le conseil de prud'hommes d'ETAMPES ayant statué dans le litige qui l'oppose à l'association pour la formation professionnelle des adultes (A.F.P.A.) sur ses demandes relatives au paiement d'heures supplémentaires, de congés payés incidents et d'indemnité pour repos compensateurs non pris.

Vu le jugement déféré qui a débouté Monsieur [L] [Z] de toutes ses demandes.

Vu l'arrêt de cette cour, autrement composée, en date du 12 septembre 2006 qui a dit que le temps de trajet de M. [Z] pour se rendre de son domicile à ses lieux de mission, excédant le temps normal de trajet entre son domicile et son lieu de travail habituel, devait être considéré comme du temps de travail effectif, et, avant dire droit sur les sommes réclamées, a ordonné la réouverture des débats pour que les parties présentent des décomptes précis permettant d'évaluer les sommes dues au salarié.

Vu l'arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, en date du 12 mars 2008 qui a cassé et annulé cette décision en toutes ses dispositions au motif que pour accueillir la demande de Monsieur [L] [Z], l'arrêt a retenu que le salarié avait accompli des temps de trajet excédant en durée le temps normal de déplacement entre son domicile et son lieu de travail habituel, défini comme celui de son centre administratif de rattachement, ce qui constituait un temps de travail effectif, alors qu'elle n'avait pas recherché si le trajet entre le domicile du salarié et les différents lieux où il dispensait ses formations dérogeait au temps normal d'un travailleur se rendant de son domicile à son lieu de travail habituel, l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 16 octobre 2007 statuant après la réouverture des débats ordonnée le 12 septembre 2006 et condamnant l'A.F.P.A. à payer à Monsieur [L] [Z] diverses sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires, de congés payés incidents et d'indemnité pour les repos compensateurs non pris sur cette période ayant fait également l'objet ultérieurement d'une cassation.

Vu l'arrêt de cette cour, autrement composée, en date du 7 mai 2009 qui a confirmé le jugement du 21 octobre 2005.

Vu l'arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, en date du 14 décembre 2010 qui a cassé et annulé cette décision en toutes ses dispositions au motif que l'arrêt a retenu que les déplacements entre le domicile et le lieu de formation sont manifestement inhérents à la fonction de formateur itinérant, ce qui confère aux temps de transport et de voyage un caractère habituel et normal, les lieux de dispense de formation constituant le lieu habituel de travail choisi par les parties et qu'au surplus le salarié bénéficiait de contreparties pour ces temps de trajet, alors qu'il appartenait à la cour d'appel pour la période antérieure à l'entrée en vigueur de l'article L. 3121-4 du code du travail issu de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, de rechercher si le trajet entre le domicile du salarié et les différents lieux où il dispensait ses formations dérogeait au temps normal du trajet d'un travailleur se rendant de son domicile à son lieu de travail habituel.

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

Monsieur [L] [Z], appelant, poursuit l'infirmation du jugement déféré et sollicite la condamnation de l'A.F.P.A. au paiement des sommes suivantes :

- 25 319,59 € à titre de rappel d'heures supplémentaires du mois d'octobre 1998 au 31 décembre 2004, outre les congés payés afférents ; subsidiairement, 5 237,15 € pour la période du 19 octobre 1998 au 31 décembre 1999 et 20 082,44 € pour la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2004, outre les congés payés afférents ; plus subsidiairement, 22 091 € à titre de dommages-intérêts ;

- 2 286,96 € et 4 979,66 € à titre de rappel de repos compensateurs non pris sur les périodes respectives du 19 octobre 1998 au 31 décembre 1999 et du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2004 ;

- 10 000 € à titre de dommages-intérêts pour préjudice matériel et moral ;

- 12 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'A.F.P.A., intimée, conclut à titre principal à la confirmation du jugement, subsidiairement, à la réduction à de plus justes proportions des sommes qui pourraient être allouées au salarié, lesquelles ne sauraient excéder 0,77 € par heure supplémentaire pour l'année 1999 ni 86,11 heures de repos compensateurs pour la période postérieure au 1er janvier 2000 ; plus subsidiairement, à la compensation des heures réclamées par Monsieur [L] [Z] ; en tout état de cause à la condamnation de ce dernier au paiement de la somme de 3 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Sur les heures supplémentaires.

Les parties s'accordent pour considérer que le temps standard pour effectuer un trajet domicile - travail ou retour peut être fixé à 30 minutes. Il y a lieu de retenir ce chiffre qui s'appuie sur les données d'une étude de l'INSEE relative à cette question. Par ailleurs il est constant que le salarié type pris en compte par cette étude accomplit ce trajet matin et soir et cela cinq jours par semaine.

Il n'est pas sérieusement contesté que le temps mis par Monsieur [L] [Z] pour se rendre de son domicile à chacun des lieux, répartis dans la France entière, où il devait dispenser ses enseignements, de même que le trajet retour correspondant, excédait très souvent 30 minutes. Mais il convient également de retenir que, arrivé sur son lieu de mission le plus souvent en début de semaine et y restant le plus souvent jusqu'à la fin de la même semaine, Monsieur [L] [Z] n'avait plus de trajet quotidien à effectuer puisqu'il avait tout loisir une fois sur place de s'installer à proximité immédiate du centre A.F.P.A. local où il était amené à intervenir, sauf à démontrer au cas par cas que cela n'était pas possible.

Pour fixer le temps de trajet hebdomadaire de Monsieur [L] [Z] surpassant celui supporté par un travailleur type, cette part excédentaire ayant seule vocation à représenter un travail effectif, il convient de défalquer non pas simplement 30 minutes au titre du déplacement depuis le domicile au lieu de mission et 30 minutes au titre du déplacement inverse, comme le soutient Monsieur [L] [Z], mais 5 heures par semaine à l'instar du modèle de référence.

Par ailleurs les temps de déplacement domicile - lieu d'enseignement ne peuvent être calculés sur la base des ordres de mission où l'heure d'arrivée indiquée résulte d'une mention unilatérale et incontrôlable de Monsieur [L] [Z], insusceptible d'être utilement opposée à l'A.F.P.A., alors au demeurant que le salarié jouit d'une grande liberté dans l'organisation de ses voyages. Il convient donc de retenir le temps de trajet théorique normal donné par l'un ou l'autre des sites spécialisés en la matière sur internet, sauf la possibilité pour Monsieur [L] [Z] de démontrer pour tel ou tel trajet une durée différente au moyen d'éléments de preuve extrinsèques.

Pour la période antérieure au 1er avril 2000, l'A.F.P.A. soutient à tort que les éventuelles heures excédentaires intervenaient au cours d'une période déjà rémunérée en temps de travail, lequel était alors hebdomadairement fixé à 39 heures. La répartition de ce temps de travail convenu à cette époque entre les parties et les ordres de mission signés par l'A.F.P.A. permettant un départ de l'établissement le vendredi à 12 heures infirment cette thèse, qui ne peut donc être retenue.

C'est à tort également que l'A.F.P.A. soutient que les heures supplémentaires sont compensées par des repos de remplacement, les heures litigieuses n'ayant pas été reconnues sur le champ comme telles par l'employeur et leur rappel ne pouvant donner lieu qu'à une rémunération en deniers.

Enfin l'A.F.P.A. ne peut prétendre à une compensation des heures effectuées par les primes et l'attribution de jours de congé supplémentaires mis en place pour rétribuer l'ensemble des désagréments générés par le statut de formateur itinérant, ces avantages étant sans rapport avec l'indemnisation forfaitaire pour des heures que par définition l'employeur ne considérait pas comme du travail effectif et étant destinés à dédommager les contraintes liées à la mobilité ainsi que l'impossibilité dans laquelle le salarié se trouve d'avoir une vie familiale et sociale normale pendant la durée de ses missions hors de son domicile.

Sur la base des principes ainsi dégagés, il apparaît que les données de fait produites aux débats ne permettent pas en l'état de procéder à un calcul rigoureux des sommes dues à Monsieur [L] [Z] notamment en ce que ce dernier est susceptible d'apporter des éléments correctifs actuellement absents (temps de trajet effectif contraint entre le lieu d'hébergement en mission et le centre A.F.P.A. local, temps de déplacement domicile - lieu de mission s'écartant du temps théorique a priori retenu) et il est nécessaire de recourir à une mesure d'instruction confiée à un technicien sous forme d'une expertise.

Sur l'avance des frais d'expertise, les dépens et les frais non compris dans les dépens.

L'expertise se fera aux frais avancés de Monsieur [L] [Z] qui a en l'état le plus intérêt à une mise en oeuvre rapide et efficace de la mesure.

Les dépens et les frais non compris dans les dépens seront réservés dans l'attente de la décision à intervenir après dépôt du rapport de l'expert.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Constate que pour partie le temps de déplacement de Monsieur [L] [Z] entre son domicile et ses lieux de mission successifs constitue du temps de travail effectif.

Avant dire droit sur la créance de Monsieur [L] [Z] à ce titre,

Ordonne une expertise confiée à Monsieur [R] [P] demeurant [Adresse 4] tél : [XXXXXXXX01] qui aura pour mission de :

- prendre connaissance des pièces du dossier, se faire communiquer tout document utile, entendre tout sachant ;

- déterminer le volume d'heures supplémentaires accomplies par Monsieur [L] [Z] au titre de ses déplacements et donner son avis circonstancié sur le compte à faire entre les parties ;

- plus généralement, procéder à toutes investigations et faire toutes observations propres à faciliter la solution du litige.

Dit que Monsieur [L] [Z] devra faire l'avance au constatant d'une provision de 1.500 € à valoir sur les frais de constatation qui devra lui être versée avant le 20 novembre 2012 ;

Dit que le constatant devra déposer son procès-verbal au greffe du pôle social de la cour d'appel (pôle 6-11) en deux exemplaires et aux parties ou à leur conseil en un exemplaire avant le 19 avril 2013

Renvoie l'affaire à l'audience du Vendredi 31 Mai 2013 à 9 heures (4ème étage- Escalier Z- salle 420) ;

Réserve les dépens et les frais non compris dans les dépens.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 11/02451
Date de la décision : 11/10/2012

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°11/02451 : Expertise


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-10-11;11.02451 ?
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