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11/10/2012 | FRANCE | N°08/09175

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 11 octobre 2012, 08/09175


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2012



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/09175



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Avril 2008 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2005F00901





APPELANT



Monsieur [V] [D]

Demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par la SCP FISSELIE

R - CHILOUX - BOULAY en la personne de Me Alain FISSELIER, avocats au barreau de PARIS, toque : L0044



Assisté de Me Bernard-Henri DUMORTIER, avocat au barreau de LILLE







INTIMÉE



SARL JSF C...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2012

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/09175

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Avril 2008 -Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2005F00901

APPELANT

Monsieur [V] [D]

Demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY en la personne de Me Alain FISSELIER, avocats au barreau de PARIS, toque : L0044

Assisté de Me Bernard-Henri DUMORTIER, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE

SARL JSF COM

Ayant son siège social

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Assistée de Me Philippe GUILLOTIN, avocat au barreau de SAINT BRIEUC, toque : 22, plaidant pour la SCP GUILLOTIN POILVET AUFFRET

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 juillet 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Colette PERRIN, Présidente et Madame Patricia POMONTI, Conseillère chargée d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente

Madame Patricia POMONTI, Conseillère

Madame Irène LUC, Conseillère désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la cour d'appel de Paris en vertu de l'article R 312-3 du code de l'organisation judiciaire pour compléter la chambre.

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY, Greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

Par conventions du 26 avril 2001 et du 19 juin 2003, la société JSF.com a concédé à M. [V] [D] l'exploitation exclusive sur le département Nord du produit dénommé Ticket.com et consistant à commercialiser des espaces publicitaires au verso des rouleaux de tickets de caisse remis gratuitement aux grandes et moyennes surfaces de distribution du territoire concédé.

À compter du mois de mars 2004, des différends ont opposé les deux parties. La société JSF.com, non réglée de factures d'approvisionnement et de redevances, se prévaut de la résiliation de plein droit du contrat de franchise et réclame les sommes qu'elle estime lui être dues.

Par acte d'huissier du 30 août 2005, la société JSF.com a assigné M. [D] en demandant au tribunal de commerce de constater la résiliation de plein droit aux torts exclusifs de M. [D] du contrat du 19 juin 2003 et de condamner M. [D] à lui payer diverses sommes (factures, redevances, dommages et intérêts).

Par jugement du 24 avril 2008, assorti d'exécution provisoire, sous réserve qu'en cas d'appel il soit fourni par le bénéficiaire une caution bancaire égale au montant de la condamnation prononcée à son profit, le tribunal de commerce de Créteil a :

- constaté la résiliation du contrat de franchise signé le 19 juin 2003 à compter du 25 juin 2004, aux torts exclusifs de M. [V] [D]

- condamné M. [V] [D] à payer à la société JSF.com:

- la somme de 3.485, 23 € au titre des redevances des mois d'avril à juin 2004

- la somme de 6.024, 25 € au titre de la facture d'approvisionnement pour la campagne de mai 2004

- la somme de 24.000 € à titre de dommages et intérêts représentant les redevances dues jusqu'au terme de ce contrat,

-débouté M. [V] [D] de l'ensemble de ses demandes, y compris sa demande de dommages et intérêts,

-débouté la société JSF.com de sa demande d'application de la clause de non-concurrence,

-condamné M. [V] [D] à payer à la société JSF.com la somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a débouté M. [D] de sa demande formé de ce chef.

Vu l'appel interjeté le 9 mai 2008 par M. [V] [D].

Vu les dernières conclusions signifiées le 25 mai 2012 par lesquelles M. [V] [D] demande à la Cour, au visa des articles L. 330-3 et R. 330-1 du code de commerce, des articles 1108, 1109, 1110 et 1116 du code civil, des articles 1131 et suivants du code civil, des articles 1134 et 1184 du code civil, de :

Au principal :

prononcer la nullité du contrat de concession du 26 avril 2001 et du contrat de franchise du 19 juin 2003, sur le fondement du dol, et subsidiairement de l'erreur, et sur le fondement de l'absence de cause,

débouter la société JSF.com de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Statuant reconventionnellement, la condamner au paiement des sommes suivantes:

- 16.327, 39 € à titre de restitution du droit d'entrée, avec intérêts judiciaires au taux légal à compter du 26 avril 2001, date du contrat initial, et capitalisation des intérêts année par année,

- 14.400€ à titre de remboursement des redevances de franchise, avec intérêts judiciaires au taux légal du 31 mars 2004, date du dernier versement de redevance, et capitalisation des intérêts année par année,

- 180.000€ à titre de dommages et intérêts compensant la perte subie et le manque à gagner des années 2001, 2002, 2003 et 2004, avec intérêts judiciaires au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

Subsidiairement :

- prononcer la résiliation du contrat de franchise à la date du 31 mars 2004,

- débouter la société JSF.com de toutes ses demandes, fins et conclusions.

statuant reconventionnellement, la condamner au paiement des sommes suivantes: 180.000€ de dommages et intérêts pour le préjudice subi, avec intérêts judiciaires au taux égal de l'arrêt à intervenir.

En toute hypothèse :

- condamner la société JSF.com à restituer les sommes reçues au titre de l'exécution provisoire du jugement du Tribunal de commerce de Créteil.

- condamner la société JSF.com au paiement de la somme de 6.000€ d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [D] soutient que le contrat de concession du 26 avril 2001 et le contrat de franchise doivent être envisagés comme un tout en ce qui concerne la validité de leur formation et qu'ils doivent être annulés car la société JSF.com a manqué à l'obligation d'information précontractuelle prévue aux articles L. 330-3 R. 330-1 du code de commerce en envoyant à M. [D] de façon tardive un dossier d'informations incomplet.

M. [D] soutient qu'un dol, ou à tout le moins une erreur, résidant dans la fausseté des informations transmises par la société JSF.com existe à son encontre.

Il argue aussi d'une absence de cause car la société JSF.com n'a pas transmis le savoir-faire et n'a pas assuré les prestations d'assistance technique et commerciale attendues d'un franchiseur.

M. [D] soutient que les demandes de la société JSF.com qui reposent sur le contrat sont mal fondées puisque la nullité opère de manière rétroactive.

M. [D] demande reconventionnellement la restitution des sommes qu'il a versées et des dommages et intérêts du fait de la nullité du contrat imputable à la faute de la société JSF.com.

À titre subsidiaire, M. [D] invoque la résiliation du contrat de franchise aux torts et griefs de la société JSF.com sur le fondement de l'article 1184 du code civil car elle a manqué à des obligations contractuelles essentielles.

Vu les dernière conclusions signifiées le 12 avril 2012 par lesquelles la SARL JSF.com demande à la Cour de :

- dire et juger M. [D] irrecevable et en tout cas mal fondé en son appel,

- débouter M. [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Créteil en date du 24 avril 2008, sauf en ce qu'il a :

- limité à 24.000€ la somme allouée à titre de dommages et intérêts représentant les redevances dues jusqu'au terme du contrat.

- débouté la société JSF.com de sa demande tendant à voir condamner M. [D] avec un réseau concurrent de celui de JSF.com.

Statuant à nouveau :

- condamner M. [D] à payer à la société JSF.com la somme de 48.000€ à titre de dommages et intérêts représentant les redevances dues jusqu'au terme du contrat,

- condamner M. [D], sous astreinte définitive de 1.000€ par jour courant à compter de l'expiration d'un délai de 8 jours suivant la signification du jugement à intervenir, à cesser directement ou indirectement, notamment par le biais de la société Dekacom, toute collaboration et participation sous quelque forme que ce soit avec le réseau de franchise Ticketpromo ou tous autres réseaux équivalents,

- condamner M. [D] au paiement d'une peine de 15.000€ pour chaque nouvelle infraction constatée,

- réparant ainsi l'omission matérielle du jugement du Tribunal de commerce du 24 avril 2008, condamner M. [D] à payer à la société JSF.com la somme de 15.000€ au titre de la violation de l'obligation de confidentialité,

- condamner M. [D] à payer à JSF.com la somme de 6.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société JSF.com relève que M. [D] n'a pas établi le caractère mensonger du prévisionnel remis par elle alors qu'il revient à celui qui l'invoque de démontrer que les manquements allégués ont vicié son consentement et provoqué un préjudice.

La société JSF.com fait observer qu'un savoir-faire présentant les caractères requis a bien été transmis à M. [D] puisque celui-ci propose de le céder aux candidats qui souhaiteraient intégrer son propre réseau Ticket Promo et qu'elle a bien fourni une assistance technique, commerciale et de formation à M. [D] par le biais de réunions.

La société JSF.com conteste la demande de M. [D] en résolution du contrat au motif qu'elle n'a pas retiré son exclusivité territoriale à M. [D] et que les moyens qu'il invoque se heurtent à l'autorité de la chose jugée d'un arrêt de la Cour d'appel de Douai.

La société JSF.com soutient que la résiliation du contrat de franchise du 19 juin 2003 à compter du 25 juin 2004 aux torts exclusifs de M. [D] se justifie par le non règlement et la violation délibérée de l'obligation de confidentialité.

La société JSF.com requiert le paiement des redevances des mois d'avril à juin 2004 et d'une facture d'approvisionnement. Elle sollicite également des dommages intérêts au titre des redevances à courir jusqu'au terme du contrat stipulé à durée déterminée, dont elle a été privée, et au titre de la violation de l'obligation de confidentialité.

Enfin, elle considère que la condamnation de M. [D] à cesser par le biais de la société Dekacom tout collaboration avec le réseau de franchise Ticket Promo ou toute autre réseau équivalent satisfait au respect des stipulations de l'article 12 du contrat.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

-Sur la nullité du contrat de franchise :

Monsieur [D] affirme que le contrat de concession du 26 avril 2001 et le contrat de franchise du 19 juin 2003 doivent être envisagés comme un tout pour l'appréciation de la validité de leur formation et qu'ils doivent être annulés car la société JSF.com a manqué à l'obligation d'information pré-contractuelle (DIP) prévue aux articles L.330-3 et R.330-1 du code de commerce en lui envoyant tardivement un dossier incomplet.

Il ajoute qu'il a été victime d'un dol ou, à tout le moins, d'une erreur compte tenu de la fausseté des informations transmises et, qu'en outre, le contrat est dépourvu de cause en l'absence de transmission d'un véritable savoir-faire et d'une assistance technique et commerciale par le franchiseur.

Monsieur [D] soutient à juste titre que l'obligation d'information pré-contractuelle prévue par la loi dite [Y] du 31 décembre 1989 s'applique non seulement au contrat de franchise du 19 juin 2003 mais également au contrat de concession du 26 avril 2001, lequel contenait la mise à disposition d'une marque, à savoir 'Ticket.com', moyennant un engagement d'exclusivité et s'analyse donc également en un contrat de franchise.

Il n'est pas contesté que la société JSF.com a transmis à Monsieur [D] un document intitulé 'dossier d'information' (pièce n° 44 de M. [D]) dont ce dernier estime cependant qu'il ne répond pas à la définition du DIP et dont il soutient qu'il ne lui aurait été adressé que la veille de la signature du contrat de concession du 26 avril 2001.

Cependant, ce document a nécessairement été adressé avant la signature du contrat de concession du 26 avril 2001 puisqu'il comporte notamment en annexe le projet dudit contrat et, si le délai de transmission ne lui paraissait pas suffisant, il appartenait à Monsieur [D] d'en retarder la signature, ce qu'il n'a pas fait.

Ce projet contient précisément l'adresse du siège de l'entreprise et la nature de ses activités avec l'indication de sa forme juridique et de l'identité du chef d'entreprise, le montant du capital ainsi que l'indication du numéro d'inscription au RCS de Créteil et toutes les indications relatives au contrat figurant au 6° de l'article R 330-2 du code de commerce.

Le document pré-contractuel comprend également tous les renseignements nécessaires relatifs à la marque 'ticket.com', à la domiciliation bancaire de l'entreprise, à la situation de l'entreprise, à ses comptes annuels pour les deux derniers exercices, à l'état du marché et au réseau d'exploitants qu'il comporte.

Il contient donc bien les informations suffisantes pour permettre au franchisé de s'engager en connaissance de cause, de sorte que la société JSF.com a incontestablement rempli l'obligation de moyens qui pèse sur elle au titre de l'information pré-contractuelle.

Au demeurant, pour obtenir la nullité tant du contrat de concession du 26 avril 2001 que du contrat de franchise du 19 juin 2003, il appartient à Monsieur [D] de démontrer que son consentement a été vicié et qu'il en résulte un préjudice pour lui, ce qu'il ne fait pas.

Il se contente de faire état d'un 'prévisionnel d'exploitation première année' et d'une 'simulation de revenu mensuel et coûts de production' contenus dans le document d'information qui auraient été irréalistes.

Cependant, la société JSF.com réplique, sans être contredite sur ce point, que Monsieur [D] n'a pas exploité réellement le secteur géographique dont l'exclusivité lui était concédée, s'abstenant même de réaliser la moindre campagne à compter du mois de janvier 2002.

Or si les résultats de Monsieur ont été nuls, voire légèrement déficitaires en 2001 et 2002, force est de constater qu'à partir du moment où il a réellement démarré son activité les chiffres d'affaires mensuels ont été en concordance avec le prévisionnel.

Monsieur [D] ne saurait sérieusement se prévaloir de l'analyse effectuée à sa demande par un expert comptable le 5 juillet 2011, soit près de dix années après la signature du premier contrat alors qu'elle prend en compte les exercices 2001 et 2002, ces deux exercices n'étant pas significatifs.

Par ailleurs, le fait que Monsieur [M], gérant de la société JSF.com, ait lancé son activité Ticket.com alors qu'il était concessionnaire du réseau Publi Ticket qui exploitait le même concept ne constitue pas un mensonge préjudiciable au réseau Ticket.com susceptible de caractériser un dol, dès lors qu'il a existé un partenariat entre ces deux entreprises et que le réseau Ticket.com a bénéficié de l'expérience acquise par son gérant dans le réseau Publi Ticket et que la concurrence entre les deux réseaux n'est pas démontrée.

De même, l'existence d'une erreur commise par Monsieur [D] n'est pas établie alors que, nonobstant la connaissance parfaite qu'il avait de la situation dont il se plaint, il n'a pas hésité à signer un deuxième contrat le 19 juin 2003, avec les mêmes caractéristiques que le précédent.

En outre, le nombre d'annonceurs indiqué de 7 par magasin n'est pas sensiblement éloigné du nombre d'annonceurs s'établissant à environ 5,5 par magasin en 2003.

Enfin, la Cour d'appel de Douai s'est déjà prononcée sur la longueur unitaire des rouleaux, dans un arrêt du 6 mai 2008, en relevant qu'il n'était pas démontré que la société JSF.com se soit contractuellement engagée à fournir à Monsieur [D] des rouleaux de tickets de caisse imprimés d'une longueur de 60 mètres, au lieu des 54 mètres relevés par le constat de la SCP Glorieux et Manchez. Au demeurant, c'est le nombre de passage en caisse de chaque annonceur qui importe pour le franchisé, ce qui est fonction de la longueur du ticket moyen d'un client (20 cm en supermarché et 20 cm en hypermarché) et non de la longueur totale du rouleau.

Monsieur [D] soutient encore que le contrat de franchise est dépourvu de cause faute de transmission par la société JSF.com d'un véritable savoir-faire et d'une assistance technique ou commerciale.

Le franchiseur a la charge de la preuve de la communication du savoir-faire au franchisé mais il appartient à ce dernier de prouver que le concept du franchiseur ne revêt pas les cinq caractéristiques cumulatives nécessaires à la reconnaissance d'un savoir-faire dans un contrat de franchisage, soit l'existence de connaissances techniques, conférant un avantage économique, transmissible, secret, non breveté et identifié.

Ce savoir-faire a bien été transmis par l'envoi à Monsieur [D] d'un 'dossier commercialisation', d'un 'dossier communication' et d'un 'dossier GMS', ces documents constituant la 'Bible' du réseau.

Monsieur [D], qui ne conteste pas avoir reçu ces documents, se contente d'indiquer que rien n'établirait qu'ils lui aient été transmis en temps opportun sans préciser pour autant à quelle date ils lui auraient été transmis et sans rapporter la preuve de les avoir jamais réclamés, ce qui démontre qu'ils lui ont bien été transmis en temps et en heure.

Il ne saurait se prévaloir de ce que les pièces produites aux débats portent une date de 2004, alors qu'il s'agit de pièces évolutives, mises à jour chaque année, et que la société JSF.com a transmis un exemplaire desdites pièces daté de 2004.

En outre, le savoir-faire litigieux existe bien et a bien été transmis à Monsieur [D] puisqu'il se propose de le céder aux candidats qui souhaiteraient intégrer son propre réseau de franchise Ticket Promo.

C'est ainsi qu'il indique dans un article de l'Officiel de la Franchise de janvier 2006 : 'Avant j'étais chez Ticket.com'.... 'J'ai lancé Ticket Promo car je souhaite maintenant voler de mes propres ailes. En outre mon expérience précédente m'a permis d'engranger un véritable savoir-faire'.

Compte tenu de ces éléments, Monsieur [D] est mal fondé à prétendre ne pas avoir bénéficié de l'assistance technique ou commerciale dont il avait besoin pour acquérir le savoir-faire en cause.

La société JSF.com démontre qu'il a bénéficié, postérieurement à la formation initiale prévue au contrat, de réunions de formation, notamment le 31 janvier 2002 et le 13 décembre 2002.

Si Monsieur [D] n'a pas pu assister à certaines réunions, c'est uniquement de son fait et il ne produit aucun courrier de sa part réclamant un soutien technique ou commercial qu'il n'aurait pas obtenu.

Il faut ajouter qu'il devait être satisfait tant du savoir-faire que de l'assistance technique ou commerciale fournis puisqu'il n'a pas hésité à signer le contrat de franchise du 19 juin 2003 dans la suite du contrat de concession du 26 avril 2001, alors au surplus qu'il était assisté de son avocat qui a pu lui donner tous les conseils utiles avant de s'engager une deuxième fois.

En réalité, il n'a soulevé les moyens liés à l'inexécution par le franchiseur des obligations des contrats de concession et de franchise que pour échapper aux demandes de paiement formées à son encontre par la société JSF.com, ce que les premiers juges ont justement stigmatisé.

Monsieur [D] doit donc être débouté de sa demande de nullité du contrat de concession du 26 avril 2001 et du contrat de franchise du 19 juin 2003 ainsi que des demandes qui en découlent.

-Sur la résolution ou la résiliation du contrat de franchise :

A titre subsidiaire, Monsieur [D] demande la résolution du contrat de franchise pour manquement de la société JSF.com à ses engagements contractuels.

Il a déjà été répondu aux griefs relatifs au défaut de transmission du savoir-faire et de l'assistance technique ou commerciale.

Monsieur [D] ne peut sérieusement soutenir que la société JSF.com lui aurait retiré son exclusivité territoriale alors c'est en conformité avec les stipulations du contrat et de façon tout à fait temporaire que ce retrait a été opéré dans le cadre de l'accord national avec le Groupe Géant casino, le franchisé ayant lui-même exploité le magasin Casino de Roubaix dès le mois de juin 2003.

S'agissant des retards de livraison, la Cour d'appel de Douai, dans son arrêt du 6 mai 2008 a déjà écarté ce moyen, observant qu'il ne résultait d'aucun usage ou d'aucune prévision contractuelle une livraison au plus tard le 25 du mois de la campagne publicitaire et que si les supermarchés Match n'avaient pas été livrés au titre de la campagne de mai 2004, c'est en raison du non-paiement des échéances au 30 avril 2004. De même, la Cour d'appel de Douai, a rejeté toute l'argumentation de Monsieur [D] relative à la livraison des rouleaux et à la facturation de frais qui étaient prévus au contrat.

Au demeurant, rien n'obligeait Monsieur [D], au titre du contrat de 2003, à s'approvisionner en rouleaux auprès de la société JSF.com et, au titre de la période antérieure, il n'aurait certainement pas signé une nouvelle convention en juin 2003 si de réelles difficultés avaient existé.

Le fait qu'un certain nombre de franchisés aient pu quitter le réseau ou déposer leur bilan est sans incidence sur la situation de Monsieur [D] qui ne démontre aucune carence du franchiseur dans l'exécution du contrat, justifiant sa résolution.

C'est au contraire lui qui s'est délibérément affranchi de l'exécution du contrat en s'abstenant de régler tant les approvisionnements dont il avait bénéficié que les redevances dues, en démarchant des secteurs non concédés en violation de la clause de non concurrence et en n'hésitant pas à développer un réseau de franchise concurrent, violant également l'obligation de confidentialité sur la non-transmission à des tiers du savoir-faire acquis auprès de la société JSF.com au titre du contrat de franchise.

C'est donc à bon droit et par des motifs que la Cour adopte que le jugement dont appel a prononcé la résiliation de plein droit du contrat de franchise du 19 mars 2003 aux torts exclusifs de Monsieur [D], par l'effet de la clause de résiliation de plein droit stipulée à l'article 9 du contrat, un mois après la mise en demeure du 19 mai 2004, reçue par lui le 25 mai 2004, d'avoir à se conformer à ses obligations contractuelles.

C'est également à juste titre qu'il a condamné Monsieur [D] à payer à la société JSF.com les sommes de 3.485,23 € au titre des redevances des mois d'avril à juin 2004 et de 6.024,25 € au titre de la facture d'approvisionnement pour la campagne de mai 2004 ainsi que celle de 15.000 € pour violation de l'obligation de confidentialité en application de la clause 9-2 du contrat. S'agissant de cette dernière condamnation elle a cependant été omise dans le dispositif de la décision attaquée, de sorte qu'il convient de réparer cette omission purement matérielle.

Il doit par contre être réformé sur les dommages et intérêts alloués à la société JSF.com au titre des redevances restant à courir jusqu'au terme du contrat stipulé à durée déterminée.

Il est en effet justifié par la société JSF.com d'une indemnité mensuelle moyenne de 1.000 € HT au titre des trois derniers chiffres d'affaires mensuels (avril à juin 2004), de sorte que pour les 48 mois restant à courir (juillet 2004 à juin 2008) il est légitime de lui allouer la somme de 48.000 €.

Il est constant que Monsieur [D] n'a pas respecté la clause de non-concurrence prévue à l'article 12-3 du contrat interdisant au franchisé de concurrencer directement ou indirectement le réseau de franchisés de la société JSF.com pendant la durée du contrat pour la France entière et jusqu'à un an après la fin du contrat, puisqu'il a développé un réseau de franchise concurrent, Ticket Promo.

Le jugement entrepris a justement relevé que cette clause de non concurrence protège un savoir-faire qui n'est plus vraiment un monopole, d'autres réseaux s'étant créés depuis lors, et que Monsieur [D] a déjà été sanctionné pour ces faits.

Il convient d'ajouter que l'application de la clause de non-concurrence s'est terminée en juin 2009, soit un an après l'échéance du contrat, de sorte que la société JSF.com n'est plus fondée à demander la condamnation sous astreinte de Monsieur [D] à cesser toute collaboration avec quelque réseau de franchise que ce soit.

L'équité commande d'allouer à la société JSF.com une indemnité de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu'il a limité à 24.000 € la somme allouée à titre de dommages et intérêts représentant les redevances dues à la société JSF.com jusqu'au terme du contrat,

Statuant à nouveau sur ce point,

CONDAMNE Monsieur [V] [D] à payer à la société JSF.com la somme de 48.000 € à titre de dommages et intérêts représentant les redevances dues jusqu'au terme du contrat,

CONDAMNE Monsieur [V] [D] à payer à la société JSF.com la somme de 15.000 € au titre de la violation de l'obligation de confidentialité, réparant ainsi l'omission matérielle figurant dans le dispositif du jugement du tribunal de commerce de Créteil du 24 avril 2008,

DEBOUTE les parties de leurs plus amples demandes,

CONDAMNE Monsieur [V] [D] à payer à la société JSF.com la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur [V] [D] aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

La GreffièreLa Présidente

E. DAMAREYC. PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 08/09175
Date de la décision : 11/10/2012

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°08/09175 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-10-11;08.09175 ?
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