Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 7
ARRÊT DU 09 OCTOBRE 2012
(n°126 , 11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 2011/20289
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 avril 2011
rendu par le Tribunal d'Instance de LAGNY SUR MARNE - RG n° 1110000898
APPELANTE :
- La société KNAUF PLATRES, SCS,
prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est : [Adresse 4]
assistée de :
- la SCP FISSELIER & Associée ,
avocats associés au barreau de PARIS,
toque : L0044
- Maître Elisé DAUTREPPE
avocate au barreau de HAUTS-DE-SEINE
FIDAL
[Adresse 3]
et
INTIMÉE :
- La DIRECTION RÉGIONALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS DE
PARIS-EST
représentée par son Directeur Régional
ayant ses bureaux : [Adresse 2]
assistée de Maître Jean DI FRANCESCO,
avocat au barreau de PARIS,
toque : P0137
SCP URBINO-SOULIER , CHARLEMAGNE ET ASSOCIES
[Adresse 1]
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 juin 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Christian REMENIERAS, Président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
- M. Christian REMENIERAS, président
- Mme Pascale BEAUDONNET, conseillère
- Mme Sylvie MESLIN, conseillère
GREFFIER, lors des débats : M. Benoît TRUET-CALLU
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Christian REMENIERAS, président et par M. Benoît TRUET-CALLU, greffier.
* * * * * * * *
Vu l'appel déclaré par lettre recommandée du 3 novembre 2011 par la société KNAUF PLATRES du jugement du tribunal d'instance de Lagny sur Marne du 4 avril 2011 qui l'a déboutée de toutes ses demandes dirigées contre l'administration des douanes ;
Vu les uniques conclusions de la société KNAUF PLATRES, appelante, déposées le 30 janvier 2012 ;
Vu les uniques écritures de la direction régionale des douanes et droits indirects de Paris Est, représentée par son directeur régional, intimée, déposées le 20 mars 2012 ;
Sur ce,
La société KNAUF PLATRES, qui a pour activité la fabrication de plaques de plâtre pour l'industrie du bâtiment à partir de l'extraction de gypse, achète à cette fin du gaz naturel à Gaz de France (GDF).
À la suite de l'entrée en vigueur, le 1er avril 2008, du régime d'exonération de la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN) pour le gaz utilisé dans un procédé de fabrication de produits minéraux non métalliques, la société KNAUF PLATRES a, par courrier du 3 novembre 2008, sollicité auprès de l'administration des douanes le remboursement de cette taxe supportée du 1er avril 2008 au 31 octobre 2008.
L'administration des douanes a fait droit à cette demande et a accordé à la société KNAUF PLATRES un remboursement de taxe pour un montant total de 215 995 euros en application de l'article 266 quinquiès du code des douanes.
En revanche, l'administration des douanes n'a apporté aucune réponse au second courrier du 17 juin 2009 aux termes duquel KNAUF PLATRES avait sollicité, cette fois-ci, le remboursement de la TICGN supportée rentre le 1er janvier 2004 et le 31 mars 2008 pour un montant total de 1 430 597 euros déterminé sur la base des factures de GDF.
C'est dans ces conditions, qu'au regard de cette décision implicite de rejet, KNAUF PLATRES a, le 22 mars 2010, assigné l'administration des douanes devant le tribunal d'instance de Lagny sur Marne, afin :
- d'ordonner l'annulation de la décision de rejet implicite de la direction régionale des douane et droits indirects de Paris Est du 23 novembre 2009 ;
- d'ordonner le remboursement par cette direction de la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel ( TICGN) sur ses achats de gaz naturel au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 mars 2008 inclus pour un montant de 1 430 597 euros.
Sur les demandes de KNAUF PLATRES et sur la prescription
Considérant que le code des douanes dispose :
- en son article 266 quinquies, modifié par la loi n°2007-1824 du 25 décembre 2007 - art. 23 intitulé « Transposition de la directive 2003/96/ CE restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité » :
«1. Le gaz naturel repris aux codes NC 2711-11 et 2711-21 de la nomenclature douanière, destiné à être utilisé comme combustible, est soumis à une taxe intérieure de consommation.
2. Le fait générateur de la taxe intervient lors de la livraison de ce produit par un fournisseur à un utilisateur final et la taxe est exigible au moment de la facturation, y compris des acomptes, ou au moment des encaissements si ceux-ci interviennent avant le fait générateur ou la facturation. Le fait générateur intervient et la taxe est également exigible au moment de l'importation, lorsque le gaz naturel est directement importé par l'utilisateur final pour ses besoins propres.
Dans les autres cas, le fait générateur et l'exigibilité de la taxe interviennent lors de la consommation de gaz naturel effectuée sur le territoire douanier de la France par un utilisateur final.
3. La taxe est due :
a) Par le fournisseur de gaz naturel.
Est considérée comme fournisseur de gaz naturel toute personne titulaire de l'autorisation prévue au I de l'article 5 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie ;
b) A l'importation, par la personne désignée comme destinataire réel des produits sur la déclaration en douane d'importation ;
c) Par l'utilisateur final mentionné au dernier alinéa du 2.
4. a. Le gaz naturel n'est pas soumis à la taxe intérieure de consommation prévue au 1 lorsqu'il est utilisé :
1° Autrement que comme combustible, sous réserve des dispositions de l'article 265 ;
2° A un double usage au sens du 2° du I de l'article 265 C ;
3° Dans un procédé de fabrication de produits minéraux non métalliques mentionné au 3° du I de l'article 265 C.» ;
- en son article 265 C , créé par la loi n°2007-1824 du 25 décembre 2007 - art. 62 :
«I.- Les produits énergétiques mentionnés à l'article 265 ne sont pas soumis aux taxes intérieures de consommation :
1° Lorsqu'il s'agit de produits repris aux codes NC 4401 et 4402 de la nomenclature douanière;
2° Lorsqu'ils font l'objet d'un double usage, c'est-à-dire lorsqu'ils sont utilisés à la fois comme combustible et pour des usages autres que carburant ou combustible.
Sont notamment considérés comme produits à double usage les combustibles utilisés dans des procédés métallurgiques ou de réduction chimique. Le bénéfice de la présente mesure est limité aux seules quantités de produits énergétiques utilisés pour ce double usage ;
3° Lorsqu'ils sont utilisés dans un procédé de fabrication de produits minéraux non métalliques, classé dans la nomenclature statistique des activités économiques dans la Communauté européenne [ NACE] , telle qu'elle résulte du règlement (CEE) n° 3037 / 90 du 9 octobre 1990 du Conseil, sous la rubrique DI 26 » ;
Que l'activité de fabrication de plâtre en cause en l'espèce est expressément reprise dans la rubrique 23.5 de la nouvelle classification NACE : « (...) - fabrication de ciment, chaux et plâtre » ;
Considérant, par ailleurs, que la directive 2003/96/CE du conseil du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité, qui devait être transposée dans le droit interne des Etats membres au plus tard le 31 décembre 2003, dispose :
- dans son considérant 2 :
«L'absence de dispositions communautaires soumettant à une taxation minimale l'électricité et les produits énergétiques autres que les huiles minérales peut être préjudiciable au bon fonctionnement du marché intérieur.»;
- dans son considérant 22 :
«Les produits énergétiques doivent principalement être soumis à un cadre réglementaire communautaire lorsqu'ils sont utilisés comme carburant ou comme combustible. À cet égard, il est inhérent à la nature et à la logique de la fiscalité d'exclure du champ d'application de ce cadre les produits énergétiques à double usage ou utilisés autrement que comme combustibles ou carburants, ainsi que les procédés minéralogiques. L'électricité utilisée de la même manière doit bénéficier d'un traitement analogue.» ;
- dans son article premier :
«Les États membres taxent les produits énergétiques et l'électricité
conformément à la présente directive.» ;
- dans son article 2 § 4 :
« La présente directive ne s'applique pas :
a) (...)
b) aux utilisations ci-après des produits énergétiques et de l'électricité :
- produits énergétiques destinés à des usages autres que ceux de carburant ou de combustible,
- produits énergétiques à double usage.
Un produit énergétique est à double usage lorsqu'il est destiné à être utilisé à la fois comme combustible et pour des usages autres que ceux de carburant ou de combustible. L'utilisation de produits énergétiques pour la réduction chimique et l'électrolyse ainsi que dans les procédés métallurgiques est considérée comme un double usage,
- (...)
- (...)
- procédés minéralogiques.
Par «procédés minéralogiques», on entend les procédés classés dans la nomenclature NACE sous le code DI 26 «Fabrication d'autres produits minéraux non métalliques» figurant dans le règlement (CEE) no 3037/90 du Conseil du 9 octobre 1990 relatif à la nomenclature statistique
des activités économiques dans la Communauté européenne
(2).Toutefois, les dispositions de l'article 20 s'appliquent à ces produits énergétiques.» ;
- en son article 14 :
« 1. Outre les dispositions générales de la directive 92/12/CEE concernant les utilisations exonérées de produits imposables, et sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent les produits suivants de la taxation, selon les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et claire de ces exonérations et d'empêcher la fraude, l'évasion ou les abus:
a) les produits énergétiques et l'électricité utilisés pour produire de l'électricité et l'électricité utilisée pour maintenir la capacité de produire de l'électricité. Toutefois, les États membres peuvent taxer ces produits pour des raisons ayant trait à la protection de l'environnement et sans avoir à respecter les niveaux minima de taxation prévus par la présente directive.
Dans ce cas, la taxation de ces produits n'entre pas en ligne de compte dans le niveau minimum de taxation de l'électricité visé à l'article 10;
b) les produits énergétiques fournis en vue d'une utilisation comme carburant ou combustible pour la navigation aérienne autre que l'aviation de tourisme privée. (...)
c) les produits énergétiques fournis en vue d'une utilisation, comme carburant ou combustible pour la navigation dans des eaux communautaires (y compris la pêche), autre qu'à bord de bateaux de plaisance privés, et l'électricité produite à bord des bateaux. (...)
2. (...) » ;
- en son article 15 :
«1. Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres peuvent appliquer sous contrôle fiscal des exonérations totales ou partielles ou des réductions du niveau de taxation:
a) aux produits imposables utilisés sous contrôle fiscal dans le cadre de projets pilotes visant au développement technologique de produits moins polluants, ou en ce qui concerne les combustibles ou carburants provenant de ressources renouvelables;
b) à l'électricité:
' d'origine solaire, éolienne, houlomotrice, marémotrice
ou géothermique,
' d'origine hydraulique produite dans des installations
hydroélectriques,
' produite à partir de la biomasse ou de produits issus de
la biomasse,
' produite à partir de méthane dégagé par des mines de
charbon abandonnées,
' produite au moyen de piles à combustible;
c) aux produits énergétiques et à l'électricité utilisés pour la production combinée de chaleur et d'énergie;
d) à l'électricité issue de la production combinée de chaleur et d'énergie, à condition que les générateurs combinés soient respectueux de l'environnement. Les États membres peuvent appliquer des définitions nationales de la notion de production provenant de la production combinée «respectueuse de l'environnement» (ou à haut rendement) jusqu'à ce que le Conseil, statuant à l'unanimité sur la base d'un rapport et d'une proposition de la Commission, adopte une définition commune;
e) aux produits énergétiques et à l'électricité utilisés pour le transport de personnes et de marchandises par train, métro, tram et trolleybus;
f) aux produits énergétiques fournis en vue d'une utilisation, comme carburant ou combustible pour la navigation sur des voies navigables intérieures (y compris la pêche), autre que la navigation de plaisance privée, et l'électricité produite à bord des bateaux;
g) au gaz naturel dans les États membres où la part du gaz naturel dans la consommation finale d'énergie était inférieure à 15 % en 2000. (...)
h) à l'électricité, au gaz naturel, au charbon et aux combustibles solides consommés par les ménages et/ou par les organisations reconnues comme caritatives par l'État membre concerné. Dans le cas de ces organisations caritatives, les États membres peuvent limiter l'exonération ou la réduction à une utilisation à des fins d'activités non professionnelles.
En cas de consommation mixte, la taxation s'applique proportionnellement à chaque type d'utilisation. Si l'utilisation est négligeable, elle peut être considérée comme nulle;
i) au gaz naturel et au GPL utilisés comme carburants;
j) aux carburants utilisés dans le domaine de la fabrication, du développement, des essais et de l'entretien d'aéronefs ou de navires;
k) aux carburants utilisés pour les activités de dragage dans les voies navigables et dans les ports;
l) aux produits relevant du code NC 2705, lorsqu'ils sont utilisés comme combustible. (...)» ;
Considérant, enfin, que concernant la prescription des droits particuliers de l'administration et des redevables, le code des douanes dispose :
- en son article 352, modifié par la loi n°2009-526 du 12 mai 2009 - art. 60:
«1. Aucune personne n'est recevable à former, contre l'administration des douanes, des demandes en restitution de droits et de marchandises et paiements de loyers, trois ans après l'époque que les réclamateurs donnent aux paiements des droits, dépôts des marchandises et échéances des loyers, à l'exclusion des demandes formulées en application des articles 236 à 239 du code des douanes communautaire.
La réclamation mentionnée à l'alinéa précédent doit être présentée au directeur régional des douanes du lieu de paiement ou du lieu où se situent les marchandises. Le directeur régional des douanes statue sur cette demande dans un délai de quatre mois à compter de sa réception.
L'action contre la décision de l'administration, prise à la suite de cette réclamation, doit être introduite devant le tribunal désigné à l'article 358 du présent code, dans les trois mois à compter de la notification de la décision de l'administration ou, à défaut de réponse, à l'expiration du délai de quatre mois prévu à l'alinéa précédent.
2.L'action contre une décision de l'administration, prise à la suite d'une demande de remise ou de remboursement fondée sur les articles 236 à 239 du code des douanes communautaire, doit être présentée devant le tribunal désigné à l'article 358 du présent code dans les trois mois à compter de la notification de la décision de l'administration ou, à défaut de réponse, à l'expiration du délai de quatre mois prévu par le décret n° 2001-908 du 3 octobre 2001 pris pour l'application du deuxième alinéa du 2 de l'article 6 du règlement (CEE) n° 2913 / 92 du Conseil du 12 octobre 1992 établissant le code des douanes communautaire ou du délai supplémentaire fixé par l'administration conformément au 2 de l'article 6 du même règlement. Le délai de trois mois est suspendu en cas de saisine de la commission de conciliation et d'expertise douanière dans les conditions prévues à l'article 450 du présent code.» ;
- en son article 352 ter, créé par Loi - art. 37 JORF 31 décembre 1991 et modifié par Loi - art. 44 (V) JORF décembre 2002 :
«Lorsque le défaut de validité d'un texte fondant la perception d'une taxe recouvrée par les agents de la direction générale des douanes et des droits indirects a été révélé par une décision juridictionnelle, l'action en restitution mentionnée à l'article 352 ne peut porter, sans préjudice des dispositions de l'article 352 bis, que sur la période postérieure au 1er janvier de la troisième année précédant celle au cours de laquelle cette décision est intervenue.» ;
Considérant qu'au soutien de son recours, la société KNAUF PLATRES fait valoir qu'elle est fondée à solliciter, en application de l'article 352 et de l'article 352 ter du code des douanes national (CDN), le remboursement de la TICGN acquittée entre le 1er janvier 2004 et le 31 mars 2008 ; qu'elle se prévaut de l'arrêt de la CJCE du 29 mars 2007 qui a condamné la France en raison du défaut de transposition de la directive précitée qui devait être transposée dans le droit interne des Etats membres au plus tard le 31 décembre 2003 ; qu'elle souligne qu'alors que la France a tiré les conséquences de cet arrêt en faisant insérer dans la loi n° 2007- 1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificatives pour 2007, un article 23 intitulé «Transposition de la directive 2003/96/ CE du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergiques tique et de l'électricité» qui a modifié le code des douanes afin de mettre la législation française en conformité avec les dispositions de cette directive, le nouveau régime instaurant la non taxation des produits énergétiques employés dans un procédé minéralogique n'est entré en vigueur en France qu'au 1er avril 2008 pour le gaz naturel, soit plus de quatre ans après le délai prescrit ; que l'appelante reproche ainsi à l'administration des douanes d'avoir continué à percevoir indûment la taxe litigieuse entre 2004 et 2008 alors que le régime français de taxation du gaz naturel tel que prévu par l'article 266 quinquiès du code des douanes n'était pas conforme au droit communautaire ; que la société KNAUF PLATRES précise que l'arrêt de la CJCE qui a révélé l'incompatibilité du droit français avec l'intégralité des dispositions de la directive considérée constitue bien une «décision juridictionnelle» visée par l'article 352 ter du code des douanes révélant le défaut de validité d'un texte fondant la perception d'une taxe recouvrée par les agents des douanes et que, dans ces conditions, les normes nationales déclarées incompatibles par l'arrêt en manquement ne peuvent plus être appliquées par les juridictions nationales ;
Que l'appelante souligne aussi que, contrairement à ce qu'a décidé le tribunal, l'article 2 § 4 b) de la directive précitée n'exclut pas de son champ d'application les produits énergétiques utilisés dans les procédés minéralogiques et que, comme le révèlent les travaux préparatoires de la loi de finances rectificative du 25 décembre 2007 qui a opéré la transposition de cette directive, les produits énergétiques utilisés dans ces procédés ne sont pas exclus du champ d'application de la directive, mais du champ de taxation de la TIC ;
Que l'appelante critique également la référence faite par le tribunal, approuvant sur ce point l'argumentation des douanes, à un arrêt de la CJCE du 5 juillet 2007 - Fendt Italiana c/ Angenzia Dogane - concernant le régime de taxation des huiles lubrifiantes alors, d'une part, que les problèmes posés dans le cadre de l'affaire examinée par la CJCE ne sont pas identiques à ceux de la présente espèce et, d'autre part, qu'à la différence de la France, l'Italie avait transposé la directive dès 2004 et pouvait s'en prévaloir ;
Considérant, enfin, qu'à titre subsidiaire, KNAUF PLATRES fait valoir, concernant la base légale de son action en restitution de la taxe acquittée entre juin 2006 et mars 2008, que dans le cas où la cour ne ferait pas droit à sa demande tendant à obtenir le remboursement de la taxe acquittée entre le 1er janvier 2004 et le 31 mars 2008 sur le fondement des dispositions combinées des articles 352 et 352 ter du code des douanes, il conviendrait, dès lors que cette directive dispensant de taxation les produits énergétiques, dont le gaz naturel, utilisés dans les procédés minéralogiques n'a pas été transposée en droit national dans les délais requis, de lui accorder ce remboursement en application de l'article 352 du code des douanes et en vertu du principe d'application directe de la directive 2003/96/CE dont les dispositions, inconditionnelles, sont suffisamment claires et précises pour être invoquées par un justiciable à l'encontre de l'Etat ;
Considérant que la direction régionale des douanes et droits indirects de Paris Est demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société KNAUF PLATRES de toutes ses demandes, tout en priant la cour de dire que la demande remboursement de l'appelante portant sur les droits acquittés avant le 17 juin 2006 est prescrite en application de l'article 352 du code des douanes ;
Considérant qu'il est constant que l'administration des douanes a fait droit à la demande de remboursement de l'appelante au titre de la taxe supportée sur ses achats de gaz naturel entre le 1er avril 2008 et le 31 octobre 2008 en raison de l'exonération de plein droit de la TICGN instituée depuis le 1er avril 2008 en application des dispositions des articles 266 quinquies 4-3° et 265 C du code des douanes dans leur rédaction résultant de la loi de finances rectificative pour 2007 en date du 25 décembre 2007 ; qu'en effet, jusqu'au 31 mars 2008, le gaz naturel repris à la position 2711.21.00 du tarif douanier était soumis à une taxe intérieure de consommation lors de sa livraison à l'utilisateur final ;
Considérant que l'action tendant à la restitution de la TICGN acquittée entre le 1er janvier 2004 et le 31 mars 2008 qui a été introduite par la société KNAUF PLATRES repose principalement sur l'arrêt de la CJCE du 29 mars 2007 (affaire C-388 /06 Commission /France) qui, estimant fondé un recours en manquement d'Etat introduit par la Commission contre la France, énonce :
« (...) En ne prenant pas, dans le délai prescrit, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2003/96/CE du Conseil, du 27 octobre 2003, restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.» ;
Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, même s'il emporte l'obligation pour la France de prendre les mesures qui s'imposent pour mettre sa législation en conformité, cet arrêt ne se prononce pas pour autant sur le défaut de validité de la taxation du gaz naturel utilisé à double usage tel que résultant d'une disposition du droit national ; que, par surcroît, le champ d'application des dispositions de l'article 352 ter du CDN sur lesquelles la société KNAUF PLATRES déclare fonder son action en restitution est limité aux décisions juridictionnelles révélant le défaut de validité d'un texte support de la perception et, qu'en tout cas, ce texte ne précise pas que les arrêts de la CJCE devenue CJUE se prononçant sur une action en manquement sont considérés comme des décisions juridictionnelles pour l'application de l'article 352 ter du CDN ;
Considérant, dès lors, que l'action de la société KNAUF PLATRES ne peut se fonder sur l'arrêt de manquement de la CJCE du 29 mars 2007 et qu'elle ne peut que procéder des droits que, conformément à une jurisprudence communautaire constante, cette société tient éventuellement de la directive considérée du fait du défaut de transposition de ce texte par la France dans les délais requis ; qu'à cet égard, il n'est ni contesté ni contestable que les conditions fixées par la jurisprudence communautaire pour permettre à la société KNAUF PLATRES d'invoquer les dispositions de cette directive sont réunies en l'espèce, dès lors que les dispositions en cause sont inconditionnelles et suffisamment précises ;
Considérant, cependant, que l'administration des douanes est en droit de soutenir que, même découlant de la directive, la demande de remboursement de la société KNAUF PLATRES au titre de la TICGN acquittée avant le 17 juin 2006 qui a été formée le 17 juin 2009, soit plus de trois ans après l'époque qu'elle donne au paiements des droits, est de toute façon prescrite en application de l'article 352 du code des douanes ;
Considérant, sur la période non prescrite à compter du 18 juin 2006 que, contrairement à ce qui est soutenu et ainsi que l'a décidé le tribunal, il suffit de constater qu'il résulte des termes mêmes, clairs et précis, de l'article 2 § 4 b de la directive 2003/ 96/ CE du Conseil du 27 octobre 2003 qui a été rappelé que les produits énergétiques utilisés dans un procédé minéralogique sont exclus du champ d'application de la directive et cela en conformité avec le considérant 22 de ce texte qui rappelle qu'il est « inhérent à la nature et à la logique de la fiscalité d'exclure du champ d'application de ce cadre les produits énergétiques à double usage ou utilisés autrement que comme combustibles ou carburants ainsi que les procédés minéralogiques » ;
Considérant qu'au delà des termes de l'article 2 § 4 b) de la directive, l'administration des douanes est également en droit de soutenir que ce texte ne pourrait être interprété comme plaçant les produits énergétiques en cause hors champ de taxation, dès lors, d'une part, que l'article 14 de la directive prévoit une énumération limitative de diverses hypothèses d'exonérations obligatoires concernant différents produits, qui ne concernent pas la taxation des produits énergétiques utilisés dans un procédé minéralogique et, d'autre part, que les articles 15 et 16 de la directive, qui énumèrent des exonérations facultatives, ne visent pas non plus ce type de produits ;
Considérant, au surplus, que le fait que la directive ne s'applique pas aux produits énergétiques utilisés dans un procédé minéralogique, car exclus de l'harmonisation prévue par la directive, n'entraîne pas pour autant l'absence de taxation sur ces produits qui, ainsi exclus du cadre de taxation communautaire, peuvent, dès lors, ainsi que le rappelle la jurisprudence communautaire (CJCE arrêt du 5 juillet 2007 Fendt Italiana C/ Angenzia Dogane C-145 /06 et 146/06) être taxés en vertu d'une législation nationale ;
Considérant qu'il convient de rappeler que, dans son arrêt du 5 juillet 2007 Fendt Italiana C/ Angenzia Dogane C-145 /06 et 146/06 3, la CJCE, devenue CJUE, interrogée dans le cadre d'un renvoi préjudiciel sur le point de savoir « si la directive 2003/96 s'oppose à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit la perception d'une taxe sur la consommation frappant les huiles lubrifiantes lorsqu'elles sont destinées, mises en vente ou employées à des usages autres que ceux de carburant ou de combustible », a dit pour droit:
«La directive 2003/96/CE du Conseil, du 27 octobre 2003, restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité, telle que modifiée par la directive 2004/75/CE du Conseil, du 29 avril 2004, doit être interprétée en ce sens qu'elle ne s'oppose pas à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit la perception d'une taxe frappant les huiles lubrifiantes lorsqu'elles sont destinées, mises en vente ou employées à des usages autres que ceux de carburant ou de combustible.» ;
Que la décision de la cour repose sur les motifs suivants :
« 31 (...)il y a lieu de comprendre la question posée en ce sens que la juridiction de renvoi demande en substance si la directive 2003/96 s'oppose à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit la perception d'une taxe sur la consommation frappant les huiles lubrifiantes lorsqu'elles sont destinées, mises en vente ou employées à des usages autres que ceux de carburant ou de combustible.
32. À cet égard, il y a lieu de relever que, selon l'article 1 er de la directive 2003/96, les États membres ont l'obligation de taxer les produits énergétiques conformément à cette directive, celle-ci visant à imposer, ainsi qu'il ressort de ses deuxième et troisième considérants, des niveaux minimaux de taxation au niveau communautaire pour la plupart des produits énergétiques.
33. En vertu de l'article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive 2003/96, lu en combinaison avec le paragraphe 5 du même article, les produits relevant de la position 2710 de la NC, à savoir, notamment, les huiles lubrifiantes, constituent des produits énergétiques au sens de cette directive.
34. Toutefois, il résulte des termes mêmes de l'article 2, paragraphe 4, sous b), premier tiret, de ladite directive que celle-ci «ne s'applique pas» aux produits énergétiques destinés à des usages autres que ceux de carburant ou de combustible.
35. Selon le vingt-deuxième considérant de la directive 2003/96, les produits énergétiques doivent en effet principalement être soumis à un cadre réglementaire communautaire lorsqu'ils sont utilisés comme carburant ou comme combustible et il est donc inhérent à la nature ainsi qu'à la logique de la fiscalité d'exclure du champ d'application de ce cadre les produits énergétiques utilisés autrement que comme carburant ou comme combustible.(...)
43. En effet, même si les huiles lubrifiantes utilisées autrement que comme combustible ou comme carburant relèvent de la définition de la notion de «produits énergétiques» au sens de l'article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive 2003/96, elles sont explicitement exclues du champ d'application de cette directive par le paragraphe 4, sous b), premier tiret, dudit article et, partant, elles ne relèvent pas du régime de l'accise harmonisée.
44. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que lesdites huiles lubrifiantes, qui ne sont pas soumises à l'accise harmonisée, constituent des produits autres que ceux visés à l'article 3, paragraphe 1, premier tiret, de la directive 92/12 (voir, en ce sens, arrêts précités Braathens, points 24 et 25, ainsi que Commission/Italie, points 31 et 33), de sorte que, conformément au paragraphe 3, premier alinéa, de cet article, les États membres conservent la faculté d'introduire ou de maintenir des impositions frappant ces produits, à la condition que celles-ci ne donnent pas lieu dans les échanges entre États membres à des formalités liées au passage d'une frontière.
45. Eu égard à ce qui précède, il convient de répondre à la question posée que la directive 2003/96 doit être interprétée en ce sens qu'elle ne s'oppose pas à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit la perception d'une taxe à la consommation frappant les huiles lubrifiantes lorsqu'elles sont destinées, mises en vente ou employées à des usages autres que ceux de carburant ou de combustible.(...)» ;
Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, la Cour, à qui la question était posée de savoir « si la directive 2003/96 s'oppose à une législation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit la perception d'une taxe sur la consommation frappant les huiles lubrifiantes lorsqu'elles sont destinées, mises en vente ou employées à des usages autres que ceux de carburant ou de combustible » a statué au regard de données juridiques identiques et également de données factuelles similaires ou à tout le moins comparables, dès lors qu'il s'agissait d'huiles lubrifiantes destinées à des usages autres que ceux de carburant ou de combustibles, peu important la transposition de cette directive par l'Italie dès lors que la CJCE était saisie d'un renvoi préjudiciel ; qu'en effet :
- le gaz naturel (NC2711), comme les huiles lubrifiantes (position NC2710), constituent en vertu de l'article 2 paragraphe 1 sous b) lu en combinaison avec le paragraphe 5 du même article des produits énergétiques au sens de la directive 2003/96 (point 33 de l'arrêt) ;
- la Cour (points 34 et 35)a examiné la portée de l'article 2 § 4 sous b ) qui concerne, certes, les produits énergétiques destinés à des usages autres que ceux de carburant ou de combustible, mais également les produits énergétiques à double usage et les produits énergétiques utilisés dans les procédés minéralogiques ;
- la Cour tire des dispositions de l'article 2 § 4 sous b) la conclusion que la directive ne s'applique pas aux produits énergétiques visés par cet article et donc aux produits énergétiques utilisés dans les procédés métallurgiques (point 34), étant observé que la Cour fait par ailleurs référence ( point 35) au considérant 22 de la directive, rappelé ci-dessus, qui détaille les produits énergétiques auxquels ne s'applique pas la directive, soit les produits énergétiques à double usage ou utilisés autrement que comme combustibles ou carburants ainsi que les produits énergétiques utilisés dans les procédés minéralogiques ;
Considérant que l'administration des douanes est ainsi en droit de soutenir que, dans cet arrêt, la CJCE a dit :
- que même si l'huile lubrifiante - le gaz naturel en l'espèce- utilisée autrement que comme carburant ou combustible ou dans un procédé minéralogique relève de la définition de « produit énergétique» au sens de l'article 2 § 1 sous b) de la directive 2003/96, elle est bien - comme le gaz naturel en l'espèce - explicitement exclue du champ d'application de cette directive par son article 2 § 4 sous b) et, de ce fait, ne relève pas de l'accise harmonisée ;
- que ces produits utilisés dans les conditions visées à l'article 2 § 4 sous b) n'étant pas soumis à l'accise harmonisée constituent des produits autres que ceux visés à l'article 3 § 1 de la directive 92/12 relative au régime général des produits soumis à accises et que les Etats membres peuvent maintenir les impositions frappant ces produits - huile lubrifiante soit au cas d'espèce le gaz naturel utilisés dans un procédé minéralogique - conformément à l'article 3 § 3 de la directive 92/ 12 CEE ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à juste titre que le premier juge a débouté KNAUF PLATRES de sa demande de remboursement de taxe formée le 17 juin 2009; que, dans ces conditions, le jugement déféré doit être confirmé, sauf à préciser que la demande de remboursement de KNAUF PLATRES formée au titre de la TICGN acquittée avant le 17 juin 2006 est prescrite ;
PAR CES MOTIFS, substitués en tant que de besoin à ceux des premiers juges,
Confirme le jugement déféré,
Déboute la société KNAUF PLATRES de toutes ses demandes,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute la direction régionale des douanes et droits indirects de Paris Est, représentée par son directeur régional, de sa demande d'indemnité au titre de ses frais irrépétibles d'appel,
Dit n'y avoir lieu à dépens
LE GREFFIER,
Benoît TRUET-CALLU
LE PRÉSIDENT,
Christian REMENIERAS