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27/09/2012 | FRANCE | N°10/18700

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 27 septembre 2012, 10/18700


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2012



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/18700



Décisions déférées à la Cour :

Arrêt du 13 Juillet 2010 - Cour de Cassation de PARIS - RG n° 786 F-D

Arrêt du 19 Mars 2009 - Cour d'Appel de Paris, 15ème Chambre Section B - RG n° 07/04252

Arrêt du 21 Octobre 2004 - Cour d'A

ppel de Lyon, Première chambre civile - RG n° 1999/6900

Jugement du 4 Juin 2003 - Tribunal de Grande Instance de Lyon, 1ère Chambre Section A - RG n° 99/06900





DEMANDEURS A ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2012

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/18700

Décisions déférées à la Cour :

Arrêt du 13 Juillet 2010 - Cour de Cassation de PARIS - RG n° 786 F-D

Arrêt du 19 Mars 2009 - Cour d'Appel de Paris, 15ème Chambre Section B - RG n° 07/04252

Arrêt du 21 Octobre 2004 - Cour d'Appel de Lyon, Première chambre civile - RG n° 1999/6900

Jugement du 4 Juin 2003 - Tribunal de Grande Instance de Lyon, 1ère Chambre Section A - RG n° 99/06900

DEMANDEURS A LA SAISINE

Monsieur [O] [R]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : la SCP DUBOSCQ-PELLERIN (Me Jacques PELLERIN), avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assisté de : Me Guillaume JEANSON, avocat au barreau de PARIS, toque : D1419 substituant Me Geoffroy CANIVET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0010

Madame [L] [R]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : la SCP DUBOSCQ-PELLERIN (Me Jacques PELLERIN), avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Assistée de : Me Guillaume JEANSON, avocat au barreau de PARIS, toque : D1419 substituant Me Geoffroy CANIVET (avocat au barreau de PARIS, toque : D0010)

DÉFENDEUR A LA SAISINE

SA BNP PARIBAS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES (Me Michel GUIZARD), avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Assistée de : Me Bertrand MOREAU de la SELARL B.MOREAU AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0121

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 Juin 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente

Madame Caroline FEVRE, Conseillère

Madame Muriel GONAND, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : M. Sébastien PARESY

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par M. Sébastien PARESY, greffier présent lors du prononcé.

**********

Monsieur [R], commissaire aux comptes, et son épouse ont ouvert plusieurs comptes à la BNP PARIBAS dans une agence de la région lyonnaise, à partir de1982 et Madame [R] a ouvert un plan d'épargne en actions à la fin de l'année 1992.

Monsieur [R] a signé le 18 novembre 1994 une convention d'opérations sur options (Monep) ayant pour support le compte n°408002.

Les époux [R] ont au début de l'année 1995 conclu avec la banque une convention de conseil patrimonial, applicable notamment au PEA.

Le 17 juillet 1997, la BNP PARIBAS a dénoncé la convention de conseil patrimonial et a informé les époux [R] de ce qu'elle procéderait à la clôture des comptes ouverts dans ses livres.

Par acte d'huissier du 27 avril 1999, Monsieur et Madame [R] ont assigné la BNP PARIBAS devant le Tribunal de Grande Instance de LYON.

Par jugement rendu le 4 juin 2003, le tribunal de grande instance de LYON a:

- condamné la BNP PARIBAS à payer à Monsieur et Madame [R]:

- la somme de 5.154,50 euros au titre du remboursement de frais de courtage indûment prélevés,

- la somme de 36.417,02 euros au titre du remboursement de frais de courtage indûment prélevés,

- la somme de 1.000 euros en réparation du préjudice subi pour perte de chance consécutivement à la vente hors mandat les 10 et 15 juillet 1998 des titres DEXIA et AXA UAP,

- la somme de 15.000 euros en réparation du préjudice subi pour perte de chance par suite de la non exécution des ordres de bourse passés entre le 1er juin 1998 et le 31 août 2002,

- la somme de 1.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- fait masse des dépens qui seront supportés à hauteur des 3/5ème par la BNP PARIBAS et 2/5 par Monsieur et Madame [R].

La BNP PARIBAS a fait appel de cette décision et par arrêt du 21 octobre 2004, la Cour d'appel de LYON a:

- réformé partiellement le jugement,

- dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts aux époux [R] en réparation du préjudice subi pour la non exécution d'ordres de bourse passés depuis le 1er juin 1998, ni pour résistance abusive,

- confirmé pour le reste le jugement,

- y ajoutant condamné la BNP PARIBAS à payer sur les sommes de 5.145,50 euros et

36.417,02 euros allouées par les premiers juges, des intérêts au taux légal à compter du 27 avril 1999 et a ordonné la capitalisation des intérêts à compter de la demande,

- laissé à chaque partie la charge de ses dépens d'appel.

Par arrêt du 14 novembre 2006, la Cour de cassation a partiellement cassé l'arrêt aux motifs:

- sur la demande de réparation pour inexécution des ordres de bourse, que les époux [R] agissaient en réparation du préjudice ayant résulté pour eux du refus de la banque d'exécuter lesdits ordres sur le marché traditionnel,

- sur la demande relative à la vente des titres DEXIA et AXA sans ordre valable, que les époux [R] demandaient, outre la réparation de leur perte de chance de réaliser la vente ultérieurement à un prix supérieur, l'indemnisation du préjudice dépourvu de tout caractère aléatoire, lié à la perte des dividendes qu'ils auraient perçus s'il avait été sursis à la transaction litigieuse.

Le 22 février 2007, Monsieur et Madame [R] ont saisi la Cour d'appel de Paris, désignée pour statuer à nouveau.

Par arrêt du 19 mars 2009 la Cour a:

- confirmé en toutes ses dispositions mais par substitution de motifs, le jugement du 4 juin 2003 en ses chefs soumis à l'appréciation de la Cour d'appel de Paris par la Cour de cassation,

-débouté les parties du surplus de leurs prétentions,

-laissé à chaque partie la charge de ses dépens d'appel.

Monsieur et Madame [R] ont formé un pourvoi contre cet arrêt.

Par arrêt du 13 juillet 2010, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt, mais seulement en ce qu'il a limité à 1.000 euros l'indemnité allouée à Monsieur et Madame [R] au titre de l'exécution hors mandant de l'ordre relatif aux titres DEXIA et AXA et à 15.000 euros l'indemnité allouée au titre de l'inexécution par la BNP PARIBAS des ordres de bourse passés à compter du 1er juin 1998.

Le 31 août 2010, Monsieur et Madame [R] ont saisi la Cour d'appel de Paris, désignée pour statuer à nouveau.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 18 juin 2012, les époux [R] demandent à la Cour de:

. Constater que le jugement rendu le 4 juin 2003 par le Tribunal de Grande Instance de Lyon, a été irrévocablement confirmé par l'arrêt de renvoi rectifié du 19 mars 2009, avec substitution des motifs, excepté pour le montant du préjudice subi au titre du refus de BNP PARIBAS d'exécuter les ordres qu'ils ont donnés à compter du 1er juin 1998 et pour celui subi au titre des ventes hors mandat réalisées les 10 et 15 juillet 1998, outre la résistance abusive,

L'infirmer à nouveau mais seulement,

. d'une part en ce qu'il a limité au 19 février 1999, tant l'indemnisation des marges manquées afin d'en porter leur montant à leur cumul global à parfaire dû au jour de la signification de l'arrêt à intervenir que le préjudice né de la résistance exercée par la banque,

. et d'autre part en ce qu'il a refusé, contre l'avis de la Cour de cassation réitéré, la prise en compte des dividendes manqués au titre des ordres caducs.

Et statuant à nouveau sur ces seuls chefs,

A/ Sur l'indemnisation du préjudice des marges manquées résultant du refus d'exécution des ordres de bourse réguliers

A titre premier :

. Constater que, eu égard aux termes de l'arrêt de cassation qui a ordonné le renvoi devant la Cour de céans, le présent débat est à cantonner au seul quantum du montant des marges manquées, ce que ne discute pas BNP Paribas,

. Constater que BNP Paribas ne critique aucunement le quantum de chacune des marges manquées qu'ils réclament, comme il est stipulé dans l'arrêt rectifié du 19 mars 2009,

A titre second :

. Constater que BNP Paribas se trompe délibérément de débat et même de procès, réitérant les mêmes moyens à l'appui de demandes ayant le même objet - son opposition au règlement de marges manquées - dont il a été irrévocablement débouté,

. Constater que BNP Paribas est déloyal et fait preuve d'arrogance dès lors qu'il persiste à ignorer, de façon délibérée, leur argumentaire, les éléments de débats et de preuves qu'ils rapportent y compris l'arrêt du 24 septembre 2010 qui a pourtant force de chose jugée, l'ensemble privant ses prétentions de tout fondement, ce qu'il ne peut ignorer,

. Constater qu'il a été irrévocablement tranché que BNP Paribas a commis une faute en ne passant pas les ordres de bourse réguliers reçus de M. et/ou Mme [R], pour avoir violé l'obligation de faire qui lui incombait, que la banque est redevable des marges manquées sur les opérations boursières inexécutées, au fur et à mesure de leur constatation, tant que les comptes concernés - PEA et compte titres - n'auront pas été clôturés,

. Constater que BNP Paribas a d'ores et déjà été définitivement condamné à leur régler, une somme de 14 745.40 €, outre résistance abusive (pour 254.60 €), au titre des opérations effectuées au 19 février 1999, de fait, antérieurement au 31 décembre 1998,

. Constater que le compte joint n° 408 002/54 comme le compte PEA ouvert au nom de Madame [R] n'ont jamais été clôturés, le PEA, pour avoir été transféré au CREDIT MUTUEL fin 2006, le compte joint pour être toujours ouvert, encore à ce jour, dans les livres de la banque, sachant que la demande de marges manquées perdurera jusqu'au règlement effectif, de celles acquises, outre intérêts,

. Constater que BNP Paribas s'est opposé, de façon constante à toute résolution amiable du différend, déclarant systématiquement vouloir s'en remettre à justice,

. Constater qu'ils ont été déboutés, - BNP Paribas s'y opposant -, de leurs demandes de fixation d'un délai pour arrêter contradictoirement entre les parties le montant des marges manquées, et de nomination d'un expert judiciaire pour les chiffrer,

. Constater que BNP Paribas a pareillement refusé, a priori, la médiation judiciaire pour laquelle les parties avaient été convoquées à leur demande, à une audience du 21 juin 2011, à l'effet notamment de fixer ledit montant,

. Constater que BNP Paribas, en 13 années de procédures, n'a jamais réellement contesté, nonobstant leur étude approfondie par ses services spécialisés facturée 75 000 € fin 2002, les marges manquées appelées, issues de l'inexécution des ordres reçus de Monsieur et/ou Madame [R], sachant que chacun d'eux, séparément, avait pleine capacité juridique pour transmettre tout ordre d'achat et/ou de vente d'actions pour chacun des deux comptes,

'Constater que le caractère probant des décomptes de marges manquées produits - dénoncé faute d'argument de façon généralisée sans précision ni justification, de manière inédite à 10 jours de l'audience au bout de 13 ans de procédure -, résulte nécessairement de l'opposabilité à la banque, jamais contestée, tant de l'ensemble des ordres d'achats et de ventes qu'elle n'a pas passés alors qu'elle avait obligation à le faire(arrêt rectifié de 2009), que des prix encore vérifiables notamment sur tout site boursier en libre accès sur internet,

'Constater que la prescription acquisitive des marges manquées joue en leur faveur à compter
du jour du dixième anniversaire de l'externalisation de chacune des marges, en l'absence de toutecontestation du seul fait de la longueur voulue par la banque de la procédure initiée en avril 1999,

Et donc
A titre premier :

. Dire et juger que BNP Paribas doit leur régler l'intégralité des marges manquées sur les opérations de tous types, réputées finalisées, postérieurement au 1er janvier 1999 et réalisées jusqu'à la date de signification de la décision de justice qui mettra un terme final au contentieux, alors que chacune d'elle aura acquis la prescription acquisitive à la date du dixième anniversaire de son externalisation,

. Dire et juger que BNP Paribas est redevable vis à vis d'eux, de plein droit :

. des intérêts sur les marges manquées à compter de la date de leur externalisation qui est, selon les différents cas, celle des courriers quotidiens, des lettres recommandées hebdomadaires ou des messages électroniques quotidiens, en application de l'article 1153-1 du Code civil,

. de la capitalisation annuelle des-dits intérêts à la date de la demande, en application de l'article 1154 du Code civil.

Par application de son pouvoir discrétionnaire, eu égard à la résistance de la banque, de fixer le taux d'intérêt à appliquer au taux légal majoré de 5 points,

. Dire et juger que BNP Paribas devra leur restituer en nature, à la date de signification de l'arrêt de renvoi, le cas échéant et selon décompte alors fourni par M. [R], les actions relatives aux opérations alors en cours, présentant une marge bénéficiaire, moyennant l'imputation sur les sommes dues par la banque de leur valorisation au prix historique.

A titre second :

. Dire et juger que le refus de toute intervention d'un tiers averti, comme la nécessaire concentration des moyens invoqués à l'appui d'une demande tranchée en justice de façon irrévocable en 2009 pour être investie de la force de chose jugée, privent désormais BNP Paribas de toute possibilité de contester tout ou partie des marges manquées, même non prescrites,

. Débouter BNP Paribas de la totalité de ses demandes, effectivement formulées comme susceptibles d'être induites par les moyens inédits de ses ultimes écritures, à titre principal pour être contraires à l'autorité de la chose jugée ou irrecevables au nom de la nécessaire concentration des moyens même en défense, à titre subsidiaire pour être prescrites, à titre infiniment subsidiaire pour être non fondées et de toute façon inopérantes,

. Condamner BNP Paribas à leur régler la somme de 67 408 660 € au 29 février 2012 à parfaire - dont 7 973 899 € relèvent de la prescrite acquisitive décennale au 14 juin 2012 -, outre intérêts. en application de l'article 1153-1 du Code civil, de juger que chacune des marges manquées composant cette somme portera intérêt au taux légal majoré de 5 points à compter du jour de son extériorisation, date de la naissance du fait générateur du préjudice, et capitalisation des mêmes intérêts par année entière en application de l'article 1154 du Code civil,

' Condamner BNP Paribas à leur restituer en nature, à la date de signification de l'arrêt de renvoi, selon décompte alors fourni par M. [R], les actions relatives aux opérations alors en cours et bénéficiaires moyennant l'imputation de leurs valorisations au prix historique sur les sommes dues par la banque,

B/ Sur l'indemnisation du préjudice des dividendes manqués sur les titres AXA et DEXIA

Constater qu'il a été définitivement tranché que BNP Paribas avait eu recours à des ordres caducs pour céder les titres AXA et DEXIA en juillet 1998,

Constater que si les titres AXA et DEXIA n'avaient pas été indûment cédés par BNP Paribas en juillet 1998 sur base d'ordres caducs, leur conservation jusqu'en août/octobre 2006, date du transfert des portefeuilles de titres au CREDIT MUTUEL, résultait nécessairement de la confiscation des portefeuilles et du refus avéré de BNP Paribas d'exécuter tout ordre de bourse à compter du 5 août 1998,

Constater que la restitution des titres en valeur a été déclarée prescrite bien que l'interruption de la prescription soit intervenue dans le délai légal, en l'absence de tout désistement effectif,

Dire et juger que BNP Paribas est redevable des dividendes versés sur la période 1999/2006, en l'absence de tout aléa,

Condamner BNP PARIBAS à leur régler au titre de leurs titres AXA et DEXIA - devenus 296 titres AXA et 1 060 titres DEXIA - un montant de dividendes manqués de 5 982.58 €. outre intérêts au taux légal majoré à la date de mise en distribution avec capitalisation à la date de la demande,

Condamner la BNP PARIBAS à leur payer la même somme que celle réclamée par BNP Paribas au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Dans ses dernières écritures signifiées le 18 juin 2012, la BNP PARIBAS demande à la Cour:

- de dire que les époux [R] ne justifient pas du préjudice allégué au titre de la perte de dividendes pour les titres DEXIA et AXA et les débouter de leur demande,

- de dire que c'est à bon droit qu'elle a procédé à la clôture du compte joint 408002/54 le 17 juillet 1997 et qu'aucune opération n'y a été enregistrée sauf pour minorer le solde débiteur qui résultait de cette clôture,

- de dire que pour ce qui concerne le PEA, c'est en se comportant de bonne foi et compte tenu du comportement des époux [R], qu'elle a proposé le transfert de ce compte dans une autre banque avec réserve de son droit de gage,

- de dire que Monsieur et Madame [R] ne sont pas fondés à réclamer les conséquences de leur refus d'autant que celles-ci ne sont en rien justifiées pour être purement virtuelles,

- de dire que les prétentions des époux [R] n'ont aucun lien de causalité avec les faits reprochés à la banque,

- de débouter les époux [R],

- de les condamner à payer la somme de 20.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens.

SUR CE

- Sur la passation des ordres de vente les 10 et 15 juillet 1998:

Considérant que la BNP PARIBAS fait valoir que les époux [R] voulaient vendre leurs titres DEXIA et AXA en juin 1998, que ces titres ont été vendus en juillet 1998 et que le préjudice ne peut s'analyser que comme une perte de chance qui ne peut être égale à la chance manquée;

Considérant que la BNP PARIBAS ne conteste pas que l'ordre donné le 20 mai 1998 de vendre des titres DEXIA et AXA à des cours précisés était devenu caduc le 30 juin 1998, alors qu'elle a exécuté l'ordre en juillet 1998;

Considérant que la BNP PARIBAS a ainsi agi de manière fautive et que Monsieur et Madame [R] sont fondés à se prévaloir du préjudice lié à la perte de dividendes qu'ils auraient perçus, s'il avait été sursis à la vente litigieuse;

Considérant que le préjudice résultant de cette perte de dividendes pour Monsieur et Madame [R] doit, en l'absence de critique de la BNP PARIBAS sur le montant sollicité, être évalué à la somme de 5.982,58 euros, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, compte tenu du caractère indemnitaire de la somme allouée;

Considérant qu'il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil;

- Sur les ordres de bourse inexécutés:

Considérant que Monsieur et Madame [R] soutiennent que le compte titres et le compte PEA n'ont jamais été clôturés, que le PEA au nom de Madame [R] a été transféré au CREDIT MUTUEL en octobre 2006 et que la BNP PARIBAS s'est abstenue d'exécuter sur le compte joint et le PEA les ordres de bourse passés à compter du 1er juin 1998, ce qui justifie l'indemnisation des marges manquées qui court depuis le 1er janvier 1999 et jusqu'à ce jour;

Considérant qu'en réponse la BNP PARIBAS prétend que le compte titres a été clôturé par lettre du 17 juillet 1997 et que les époux [R] sont mal fondés à invoquer un préjudice pour des ordres postérieurs non exécutés; qu'elle fait valoir en outre que le PEA a été gagé et que les parties ont convenu dans un premier temps le 11 septembre 1997 qu'aucun acte de disposition ne pourrait être effectué sauf accord de la banque, que les ordres passés ne pouvaient lui être imposés en sa qualité de créancier gagiste et qu'à compter de la purge du droit de gage aucun ordre n'a été passé par Madame [R];

Considérant que par lettre du 17 juillet 1997, la BNP PARIBAS a informé Monsieur et Madame [R] qu'elle procédait à la clôture de leurs comptes et qu'elle les a invités à rembourser le solde débiteur de 1.517.708,41 francs du compte 408002/54;

Considérant que par ordonnance du 4 août 1997, la BNP PARIBAS a été autorisée à pratiquer une saisie conservatoire sur les comptes et valeurs mobilières de Monsieur et Madame [R] pour un montant de 1.528.850,49 francs, montant du solde débiteur du compte 408002/54; que suivant procès-verbal du 5 août 1997, la saisie a été pratiquée sur les comptes 408002/54 et PEA, rendant indisponibles l'ensemble des avoirs détenus sur ces comptes;

Considérant que Monsieur et Madame [R] ayant sollicité la levée des mesures conservatoires, un accord est intervenu le 11 septembre 1997, aux termes duquel Monsieur et Madame [R] s'interdisaient d'effectuer tout acte de disposition sur les titres figurant au compte 408002/54 et, sauf à obtenir l'accord préalable de la banque, d'effectuer tout acte de disposition sur les titres inscrits au compte PEA 730043/51;

Considérant que le 7 janvier 1998, un ordre de bourse sur le PEA a été passé par Monsieur et Madame [R] et que le 8 janvier 1998 la BNP PARIBAS a donné instruction d'effectuer cette opération;

Considérant que par lettre du 11 mai 1998, la BNP PARIBAS a écrit à Monsieur [R] qu'elle avait transmis ses ordres de vente sur les comptes PEA 730043/51 et 408002/54, que s'agissant du compte 408002/54, elle lui a rappelé sa lettre de clôture du 17 juillet 1997 en précisant qu'en cas d'exécution d'ordres de bourse sur ce compte, le crédit viendra apurer partiellement le solde du compte qui présente un solde débiteur de 1.518.001,57 francs;

Considérant que par lettre du 10 juin 1998, adressée à l'avocat de Monsieur et Madame [R], la BNP PARIBAS a indiqué qu'elle souhaitait rappeler à Monsieur [R] que son compte 408002/54 avait fait l'objet d'une clôture juridique au mois de juillet 1997 et que depuis cette date il ne pouvait plus recourir au service du gestionnaire de compte, qu'elle continuerait à accepter les ordres de vente sur ledit compte, le produit de la cession des titres venant en déduction du solde du compte et qu'elle était disposée à accepter le transfert du compte titres dans une banque du choix de Monsieur et Madame [R], sous réserve que soit établi un nantissement à son profit;

Considérant que par fax du 5 août 1998, Monsieur [R] a transmis des ordres d'achat sur le compte 408002/54 et le compte PEA; que par fax du même jour, la BNP PARIBAS a répondu qu'elle ne pouvait accepter les ordres d'achat; qu'elle a confirmé cette position par lettre du 5 août 1998, en rappelant les termes de sa correspondance adressée le 10 juin à l'avocat de Monsieur [R] et en précisant que tous les ordres d'achat et de vente transmis sur le PEA devaient l'être par courrier et non par fax et qu'il en était de même pour les ordres de vente relatif au compte 408002/54, le produit de ceux-ci étant directement affecté en déduction du solde du compte;

Considérant que par lettre du 14 août 1998, la BNP PARIBAS a confirmé à l'avocat de Monsieur et Madame [R] que les conventions la liant aux époux [R] avaient été dénoncées par elle et que de ce fait aucun ordre ne pouvait plus être passé soit sur le compte ordinaire soit sur le PEA et qu'il conviendrait que les époux [R] fassent connaître à la BNP PARIBAS l'établissement auprès duquel les comptes seront transférés étant précisé que ces actifs resteront affectés à la garantie de la créance de la BNP PARIBAS;

Considérant que par fax du 31 août 1998 et des 10, 17, 22 et 24 septembre 1998, Monsieur [R] a passé des ordres d'achat sur les deux comptes; que la BNP PARIBAS a répondu qu'elle ne pouvait accepter ces ordres par des télécopies envoyées les mêmes jours;

Considérant que par sommation interpellative du 29 septembre 1998, la BNP PARIBAS a fait sommation à Monsieur et Madame [R] de ne plus transmettre d'ordres d'achat sur le compte 408002/54 et le compte PEA en rappelant que le 17 juillet 1997 le compte a été clôturé, que par courriers des 10 juin et 14 août 1998 il leur a été rappelé qu'aucun ordre d'achat et de vente ne pouvait plus intervenir et qu'à titre de tolérance elle accepterait des ordres de vente dans la mesure où ces opérations viendraient diminuer le solde débiteur du compte 408002/54;

Considérant que Monsieur [R] a continué à transmettre des ordres d'achat sur les deux comptes, puis également des ordres de vente concernant les précédents ordres d'achat non exécutés;

Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats que le compte 408002/54 a continué à fonctionner après le 17 juillet 1997et qu'il n'a donc pas été clôturé à cette date;

Considérant qu'il est également établi que la BNP PARIBAS a refusé de passer tous les ordres de bourse à compter du mois d'août 1998 et qu'elle en a informé expressément Monsieur et Madame [R];

Considérant que s'agissant du compte 408002/54, et sans qu'il y ait lieu de rechercher la date exacte de la clôture de ce compte, la BNP PARIBAS était fondée à refuser d'exécuter les ordres d'achat passés par Monsieur [R] en raison du solde débiteur de ce compte qui ne permettait pas de régler ces achats;

Considérant qu'en l'absence de faute de la banque, Monsieur et Madame [R] ne peuvent dès lors se prévaloir d'un préjudice résultant de l'inexécution de ces ordres;

Considérant que s'agissant du compte PEA, celui-ci ne pouvait faire l'objet d'une clôture imposée unilatéralement par la banque et que ce compte était toujours ouvert après le 17 juillet 1997;

Considérant qu'aux termes de l'accord intervenu le 11 septembre 1997 entre les parties, ce compte PEA a été gagé au profit de la BNP PARIBAS et qu'aucun acte de disposition ne pouvait être effectué sauf accord de la banque;

Considérant dans ces conditions que la BNP PARIBAS était en droit d'accepter ou de refuser les ordres d'achat passés, en sa qualité de créancier gagiste et en application de l'accord du 11 septembre 1997;

Considérant par ailleurs que malgré la proposition de la BNP PARIBAS dans sa sommation du 29 septembre 1998, Monsieur et Madame [R] n'ont pas procédé au transfert du compte PEA dans une autre banque;

Considérant que la BNP PARIBAS affirme, sans être contredite par Monsieur et Madame [R], que son droit de gage n'a pu être purgé qu'à la suite de la compensation entre sa créance et la créance de dommages et intérêts de Monsieur et Madame [R] résultant de l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon du 1er juillet 2004;

Considérant qu'à compter du 1er juillet 2004, Monsieur et Madame [R] ne justifient d'aucun ordre passé sur le compte PEA de Madame [R];

Considérant en conséquence que Monsieur et Madame [R] ne démontrent pas que la BNP PARIBAS a commis une faute en n'exécutant pas les ordres passés sur le PEA et qu'ils doivent être déboutés de leur demande de dommages et intérêts de ce chef;

Considérant que le jugement doit dès lors être infirmé en ce qu'il a condamné la BNP PARIBAS à payer aux époux [R] la somme de 15.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par suite de la non exécution des ordres de bourse passés;

Considérant que Monsieur et Madame [R] n'établissent pas que le droit de la BNP PARIBAS de se défendre en justice a, en l'espèce, dégénéré en abus; que leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive doit être rejetée;

Considérant que le jugement sera confirmé en ces dispositions relatives à l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens;

Considérant qu'en appel, les parties étant également succombantes, chacune d'elle supportera ses frais irrépétibles et les dépens exposés;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré en ses dispositions relatives:

- au montant des dommages et intérêts alloués pour vente de titres hors mandat,

- à la condamnation de la BNP PARIBAS au paiement de dommages et intérêts pour non-exécution des ordres passés et pour résistance abusive.

Le confirme pour le surplus.

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Condamne la BNP PARIBAS à payer à Monsieur et Madame [R] la somme de 5.982,58 euros à titre de dommages et intérêts pour vente de titres hors mandat, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil.

Déboute Monsieur et Madame [R] de leur demande de dommages et intérêts pour non-exécution des ordres passés.

Déboute Monsieur et Madame [R] de leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Rejette toutes autres prétentions des parties.

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 10/18700
Date de la décision : 27/09/2012

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°10/18700 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-09-27;10.18700 ?
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