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25/09/2012 | FRANCE | N°12/02226

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 25 septembre 2012, 12/02226


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRET DU 25 SEPTEMBRE 2012



(n° 465 , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 12/02226



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 06 Janvier 2012 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 11/079491





APPELANTE



PAS-DE-CALAIS HABITAT EPIC Pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit

siège

[Adresse 3]

[Localité 2]



Rep: la SELARL HJHY en la personne de Me HARDOUIN (avocats au barreau de PARIS, toque : L0056)

assistée de : Me Robert GASTONE de la AARPI GASTONE...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRET DU 25 SEPTEMBRE 2012

(n° 465 , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 12/02226

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 06 Janvier 2012 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 11/079491

APPELANTE

PAS-DE-CALAIS HABITAT EPIC Pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Rep: la SELARL HJHY en la personne de Me HARDOUIN (avocats au barreau de PARIS, toque : L0056)

assistée de : Me Robert GASTONE de la AARPI GASTONE HENRIOT MAHASSEN (avocat au barreau de PARIS, toque : C0049)

INTIMEE

Société DEUTSCHE BANK AG, agissant en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 7]

[Localité 1] ALLEMAGNE

Représentée par : Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD (avocat au barreau de PARIS, toque : C2477)

assistée de : Me Stéphane BENOUVILLE de la Partnership FRESHFIELDS BRUCKHAUS DERINGER LLP (avocat au barreau de PARIS, toque : J007)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Juillet 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Joëlle BOURQUARD, Présidente de chambre

Madame Martine TAILLANDIER-THOMAS, Conseillère

Madame Sylvie MAUNAND, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Melle Véronique COUVET

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Joëlle BOURQUARD, président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.

PAS DE CALAIS HABITAT, EPIC local, est appelant de l'ordonnance de référé rendue le 6 janvier 2012 par le président du tribunal de commerce de Paris qui l'a condamné à payer à la société DEUTSCHE BANK AG, à titre de provision, la somme de 6 338 060 € en principal majorée des intérêts de retard contractuels à compter respectivement du 1er novembre 2011 à due concurrence de 5 768 400 € et du 1er décembre 2011 à due concurrence de 569 660 €, capitalisés en application de l'article 1154 du code civil, outre la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de conclusions déposées le 20 juin 2012, auxquelles il convient de se référer par application des dispositions des articles 455 et 753 du code de procédure civile pour un exposé plus amplement détaillé de son argumentaire dont l'essentiel sera repris à l'occasion de l'examen des moyens et prétentions qui y sont articulés, il demande de l'infirmer en toutes ses dispositions, étant constaté qu'il existe une contestation sérieuse relative à l'existence de l'obligation de paiement dont se prévaut DEUTSCHE BANK, de dire n'y avoir lieu à référé et de débouter la banque de l'ensemble de ses demandes ; à titre subsidiaire, il sollicite qu'il soit dit que c'est à bon droit qu'il a excipé de l'exception d'inexécution par DEUTSCHE BANK AG de ses obligations tirées de l'accord du 15 juin 2010 pour arrêter de payer les coupons dus au titre des contrats de swap du 15 juin 2010 et le débouté des demandes de la banque ; à titre infiniment subsidiaire, il demande de constater qu'il est débiteur malheureux et de bonne foi et de prononcer le report de deux années du paiement du coupon litigieux à compter du mois de novembre 2011 et, en tout état de cause, il réclame la condamnation de DEUTSCHE BANK AG à lui verser une indemnité de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens.

DEUTSCHE BANK AG, par conclusions déposées le 26 juin 2012, auxquelles il convient de se référer par application des dispositions des articles 455 et 753 du code de procédure civile pour un exposé plus amplement détaillé de son argumentaire dont l'essentiel sera repris à l'occasion de l'examen des moyens et prétentions qui y sont articulés, demande de confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions étant constaté que PAS DE CALAIS HABITAT est irrecevable à soulever l'existence d'une contestation sérieuse de son obligation de payer et ainsi à rapporter l'ordonnance du 13 juillet 2011 confirmée par arrêt du 14 février 2012 en l'absence de circonstances nouvelles, que PAS DE CALAIS HABITAT est débiteur à son égard d'une créance de 6 338 060 € en principal majorée des intérêts de retard contractuels à compter respectivement des 1er novembre 2011 à due concurrence de 5 768 400 € et du 1er décembre 2011 à due concurrence de 569 660 €, qu'il n'est ni de bonne foi ni malheureux et ne remplit aucune des conditions d'octroi de délais de grâce et elle sollicite la condamnation de l'appelant à lui verser une indemnité de 30 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens.

SUR CE, LA COUR,

Considérant que la société DEUTSCHE BANK AG soutient que le moyen tiré de l'existence de prétendues contestations sérieuses soulevé par l'appelant est irrecevable comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée au provisoire de l'arrêt du 14 février 2012, qu'aucune circonstance nouvelle ne justifie que l'arrêt soit modifié ou rapporté en application de l'article 488 du code de procédure civile ;

Que l'appelant fait valoir que la question de l'existence de contestations sérieuses relatives à la créance dont se prévaut la banque n'a pas été tranchée dans le cadre du dispositif de l'arrêt du 14 février 2012 et qu'en tout état de cause, la remise du rapport des commissaires aux comptes sur ses comptes annuels le 30 mai 2012 constitue une circonstance nouvelle justifiant recevables ses demandes ;

Et considérant qu'aux termes de l'article 488 du code de procédure civile, l'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée ; qu'elle peut être modifiée ou rapportée en cas de circonstances nouvelles ; que cet article s'applique tant à l'ordonnance rendue par le juge des référés qu'à l'arrêt rendu en pareille matière sur l'appel qui en est interjeté ;

Considérant en l'espèce, que l'appelant n'explicite nullement en quoi le rapport des commissaires aux comptes sur ses comptes annuels remis le 30 mai 2012 (rapport de la société Aequitas - pièce 64 - sur l'exercice clos au 31 décembre 2011), constitue une circonstance nouvelle au sens de l'article précité ;

Et considérant que l'article 1351 du code civil dispose que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; qu'il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité ;

Que la condition d'identité des parties est en l'espèce réunie ;

Considérant que l'arrêt du 14 février 2012 a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé du 13 juillet 2011 qui a débouté PAS DE CALAIS HABITAT de sa demande visant à obtenir la suspension de l'exécution de l'ensemble des transactions conclues entre les parties telles que restructurées le 15 juin 2010 et faisant droit à la demande reconventionnelle de DEUTSCHE BANK AG l'a condamné à payer à la société DEUTSCHE BANK AG, à titre de provision, la somme de 10 076 105, 84 € majorée des intérêts de retard à compter respectivement des 1er février et 3 mai 2011 s'agissant des contrats référencés 3525720L, 3525587L et 3525751L et des 1er mars et 1er juin 2011 s'agissant du contrat référencé 3526609L, capitalisés en application de l'article 1154 du code civil, qu'il est constant que la montant de cette condamnation provisionnelle représentait les échéances d'intérêts prévues au 1er novembre 2010 sur trois contrats et de celle du 1er décembre 2010 au titre d'un quatrième contrat ;

Que l'ordonnance de référé du 6 janvier 2012, déférée à la cour a fait droit à la demande de provision formée par la banque au titre des intérêts de retard au taux stipulé à l'article 9.1 de la convention cadre FBF relatives aux opérations de marché à terme signée entre les parties le 6 novembre 2006 courant à compter du 1er novembre 2011 à due concurrence de 5 768 400 € et du 1er décembre 2011 à due concurrence de 569 660 € ;

Qu'il s'ensuit que la demande en paiement d'une provision a la même cause à savoir obtenir l'exécution de l'obligation en paiement que PAS DE CALAIS HABITAT a contractée aux termes des mêmes conventions et qui a conduit à sa condamnation provisionnelle par l'arrêt du 14 février 2012 ;

Et considérant que l'article 4 du code de procédure civile définit l'objet du litige comme celui déterminé par les prétentions respectives des parties fixées par l'exploit introductif d'instance et par les conclusions en défense précisant qu'il est toutefois susceptible d'être modifié par des demandes incidentes lorsqu'elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant ;

Qu'en l'espèce, dès lors que l'ordonnance déférée a statué sur une demande de provision portant sur intérêts impayés de coupons échus à des dates différentes et de montant différent de ceux pour lesquels l'arrêt confirmatif du 14 février 2012 a alloué une provision à la banque, il n'y a pas identité d'objet entre les deux litiges ; que le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée doit être écarté ;

Et considérant qu'aux termes de l'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la juridiction des référés peut accorder une provision au créancier ; que le montant de la provision susceptible d'être ainsi allouée n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée ;

Que pour démontrer ainsi qu'il lui revient, conformément à l'article 1315 du code civil, le principe et la hauteur de l'obligation dont elle réclame l'exécution, DEUTSCHE BANK AG, fait valoir que PAS DE CALAIS HABITAT est tenu de payer ses échéances d'intérêts trimestriellement selon le calendrier annexé aux conventions de swap, relevant que son débiteur a accepté aux termes du protocole du 15 juin 2010 (article 1er) que toutes autres caractéristiques contractuelles demeurent inchangées, ajoutant qu'il a déjà été condamné à s'exécuter et qu'il a spontanément payé les échéances d'intérêts d'août et septembre 2011, enfin qu'elle a été contrainte de l'assigner de nouveau le 10 avril 2012 ;

Considérant que PAS DE CALAIS HABITAT se prévaut de l'existence de contestations sérieuses estimant que dès lors qu'un doute subsiste sur le sens d'une éventuelle décision au fond, une contestation sérieuse existe et que l'existence d'un litige au fond, en l'espèce l'assignation en annulation et subsidiairement résolution des contrats qu'elle a fait délivrer à DEUTSCHE BANK AG le 31 mai 2012, visant à contester l'obligation en son principe tend nécessairement à caractériser une contestation sérieuse ;

Qu'il se prévaut, pour justifier du sérieux de la contestation, de la nullité des contrats de swap antérieurs au 15 juin 2010 et reproche à la banque d'avoir manqué à ses obligations contractuelles, en commercialisant, des produits spéculatifs à risque illimité en les présentant comme produit de couverture ainsi que le relève le rapport de la CRC du 11 juin 2011, des produits spéculatifs qu'elle savait inadaptés à PDCH, des contrats de swap alors qu'elle savait qu'ils ne répondaient pas aux objectifs d'investissement de PDCH, et que leur souscription n'était pas autorisée par le conseil d'administration de PDCH, n'étaient pas adaptés à sa nature particulière, en n'évaluant pas l'expérience et les connaissances de PDCH et en lui remettant une notice en anglais, étant ajouté qu'il n'avait pas la compétence en tant qu'OPH pour souscrire de tels contrats et que la banque lui a dissimulé les coûts et frais liés à ces contrats et ne l'a pas informé de l'existence de conflits d'intérêts au moment de la mise en place de ces contrats ; qu'il soutient qu'il n'aurait pas contracté sans les man'uvres dolosives de la banque laquelle a persisté intentionnellement dans cette attitude en refusant de lui communiquer les coûts et frais réels liés à ces opérations et estime que ces contrats lui sont inopposables ; qu'il se prévaut de la nullité des contrats postérieurs à l'accord du 15 juin 2010 estimant non valable la novation opérée par cet accord ;

Qu'il fait valoir que l'accord du 15 juin 2010 doit être résolu en raison des manquements contractuels graves de la banque pour non respect par la banque des obligations résultant de cet accord compte tenu de l'absence de propositions de sa part de réduction significatives des taux fixes, de la mauvaise foi de la banque dans l'exécution de cet accord, de la persistance de cette dernière à ne pas communiquer les coûts et frais réels liés à chacun des contrats, de la nullité de ceux-ci et il estime que la responsabilité contractuelle de la banque est engagée ; qu'il soutient à titre subsidiaire que les graves manquements contractuels de la banque justifient qu'il se prévale d'une exception d'inexécution ;

Considérant que DEUTSCHE BANK AG dénie tout caractère sérieux aux contestations soulevées par l'appelant et les estime artificielles, qu'elle relève que PAS DE CALAIS HABITAT a exécuté ses obligations jusqu'en novembre 2010 et attendu le 27 mars 2012 pour se prévaloir dans ses écritures d'appel de l'existence de ces contestations, qu'elle estime qu'il suffit de se reporter aux rapports de la CRC et de la MILOS pour démontrer que PAS DE CALAIS HABITAT avait compétence pour signer ces contrats, qu'il a entendu mener de manière méthodique et massive la gestion libre de sa dette avec différentes banques à tel point qu'en 2009, les contrats de swap représentaient plus de 71 % de celle-ci et que si la crise n'était pas intervenue, il aurait continué à mener cette politique contribuant à sa rentabilité , qu'elle ajoute qu'aucune disposition légale n'interdit à PAS DE CALAIS HABITAT de conclure de tels contrats ;

Qu'elle réfute l'argumentation relative à la méconnaissance de la loi Toubon pour rédaction en anglais du contrat observant en tout état de cause que son non respect n'entraîne pas la nullité du contrat, qu'elle estime indifférente l'éventuelle invalidité des contrats de swap initiaux au regard de l'accord du 15 juin 2010 et ce compte tenu des griefs exprimés dans la lettre du 7 mai précédent démontrant le choix de PAS DE CALAIS HABITAT en pleine connaissance de cause et assisté de son avocat et de ses conseils financiers de signer le protocole d'accord et de conclure de nouvelles transactions ;

Qu'elle se réfère à la force obligatoire des transactions tant qu'elles n'ont pas été judiciairement annulées pour estimer que l'obligation dont elle se prévaut doit recevoir exécution et soutient n'avoir en aucune façon manqué à ses obligations contractuelles, observant que l'obligation de négocier est parvenue à son terme, qu'elle l'a parfaitement remplie ainsi que le démontre le rappel des faits et elle ajoute qu'a supposer qu'un quelconque manquement contractuel puisse lui être imputé, il ne serait pas de nature à justifier le non paiement des échéances d'intérêts exigibles, l'exception d'inexécution n'étant légitime qu'à la condition que l'obligation suspendue par son mécanisme soit la cause de l'obligation violée et qu'il y ait donc interdépendance entre elles, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

Et considérant que DEUTSCHE BANK justifie, aux termes de l'article 1er du protocole du 15 juin 2010 et de ses annexes (pièce 3) librement consenti entre les parties et rédigé en langue française, que PAS DE CALAIS HABITAT est débiteur d'une obligation contractuelle à son égard à hauteur du montant des sommes qu'elle le lui réclame à titre de provision ;

Que la circonstance selon laquelle l'appelant a intenté le 31 mai 2012 une action au fond en annulation et subsidiairement résolution des conventions signées entre les parties ne suffit pas en soi et à priori à caractériser le sérieux de la contestation qu'il élève dès lors que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent recevoir application tant qu'elles n'ont pas été judiciairement annulées ;

Considérant que l'ensemble des man'uvres dolosives imputées à la banque dans la signature des contrats initiaux ne saurait au stade de la description et de la démonstration que PAS DE CALAIS HABITAT en fait devant la présente juridiction d'appel de référé, être apprécié comme présentant un degré de sérieux tel que ces man'uvres puissent s'opposer à l'exécution de son obligation contractuelle, qu'en effet, il sera rappelé que PAS DE CALAIS HABITAT a choisi, après avoir exposé dans une lettre du 7 mai 2010 certains griefs à l'encontre de la banque, de renégocier les contrats de swap initiaux et de signer en toute connaissance de cause le protocole du 15 juin 2010, PAS DE CALAIS HABITAT s'étant, durant les négociations ayant abouti à la signature de cet acte, entouré de ses conseils financiers et fait assister de son avocat, que ce n'est que plusieurs mois après le prononcé de l'ordonnance déférée qui le condamnait pour le seconde fois en paiement d'une provision et en cours de procédure d'appel, qu'il a initié une instance au fond et ce alors même qu'il disposait de l'ensemble des éléments dont il se prévaut depuis plusieurs mois et parfois davantage, qu'il n'a pas estimé utile de faire notamment état devant la juridiction des référés du rapport définitif de la CRC du 11 juin 2011 pour contester son obligation de paiement, qu'il ne revient pas à la présente juridiction d'analyser le contenu de ce document, que sa lecture ne révèle pas que la banque ait manifestement commis des man'uvres dolosives telles qu'à l'évidence, sans ces man'uvres PAS DE CALAIS HABITAT n'aurait pas contracté ;

Qu'en effet, la Chambre Régionale des Comptes du Nord Pas-de-Calais relève dans son rapport (4 et 5/78) que si, « afin de se protéger contre une hausse éventuelle des taux variables, PCH a réalisé dès le début de l'année 2000 des opérations de couverture de taux d'intérêts, au fur et à mesure des renégociations, les contrats souscrits ont perdu leur qualité d'instruments de couverture et sont devenus des produits spéculatifs, présentant des risques élevés en raison des montant notionnels échangés, des options vendues et des indices sous jacents retenus, certaines anticipations de marché s'étant avérées erronées, que jusqu'au milieu de l'année 2008, la prise de risques a été le fait d'un nombre limité de personnes qui ont agi dans un cadre juridique ambigu, le conseil d'administration n'ayant pas suffisamment précisé les conditions et les limites des délégations consenties au directeur général, cette imprécision ayant contribué à affranchir les décisions en la matière de tout encadrement effectif, [que] malgré les montants financiers en jeu, aucun dispositif de contrôle interne n'a été mis en place, [que] la qualité de « professionnel » avancée lors des négociations avec les établissements bancaires, a limité l'obligation d'information de ces derniers à l'égard de leur client ; qu'à coté de cette gestion risquée de la dette, PCH a engagé une gestion tout aussi risquée des ses placements, qu'en 2005, il détenait des placements non autorisés par le code de la construction et de l'habitation (SICAV) ' que si ces irrégularités ont quasiment cessé à compter de 2006, des contrats d'échange de taux d'intérêts ont alors été souscrits qui revêtent un caractère tout aussi critiquable en raison tant du décalage entre la valeur du produit dérivé et celle des actifs financiers sous-jacents, que du risque de perte de valeur en capital, [que] si cette stratégie a été payante durant les premiers exercices, la situation s'est retournée en 2009 et l'Office a essuyé des pertes sur ces contrats pour un montant estimé à 1, 6 millions d'euros » ; que le rapport note également (12/78) [que] « alors que PCH aurait pu se contenter de souscrire des contrats transformant un taux variable en un taux fixe, la volonté de dégager un taux bonifié l'a incité à négocier indirectement des options sur les marchés financiers et à prendre de plus en plus de risques, [que] progressivement des étapes financières sont franchies, consistant à spéculer, sans aucune visibilité, d'abord sur le marché obligataire de la zone euro, ensuite extérieur à la zone euro et plus encore sur les marchés étrangers '[que] dans une dynamique mal contrôlée, PCH accepte des contrats de plus en plus risqués'.qu'enfin les derniers contrats souscrits sont caractérisés par une charge d'intérêts qui dépend des performances d'un indice créé par un établissement bancaire »,

Que la CRC relève d'ailleurs (11/78) que « les griefs à l'encontre des banques invoqués par PCH ne sauraient l'exonérer de sa propre responsabilité, que de même le retournement des marchés financiers n'aurait pas eu un tel effet sur la gestion financière de PCH si celle-ci n'avait pas été caractérisée par la souscription d'options aussi risquées » ajoutant que « le conseil d'administration de PCH ' gagnerait à s'imposer volontairement des modalités de gestion prudente recommandées par ces textes (charte de bonne conduite, textes relatifs aux collectivités et établissements publics précisant les règles de prudence à suivre) ;

Qu'il ne résulte pas davantage de la lecture du rapport de la MILOS et de son annexe 1.17 (pièce 1) que les prétendues man'uvres dolosives de DEUTSCHE BANK AG aient à l'évidence déterminé le consentement de l'appelant, que ce document fait notamment grief à PAS DE CALAIS HABITAT de ne pas s'être conformé à l'article 372-1 à 3 du plan comptable, confirme qu'à partir de 2003, il « s'est engagé, dans une politique systématique d'échange de taux d'intérêt sur sa dette, étendue à partir de 2006 au placements, inusités dans la profession et [en dehors de la mission d'un office public de l'habitat ], relève que cette politique concerne une part massive de sa dette (68 %) et des placements (58 %) », que ce document démontre que dans le cadre de cette gestion active et délibérée de sa dette, PCH s'est par ailleurs adressé à plusieurs établissements bancaires pour la diversifier et la rentabiliser ;

Considérant que PCH ne caractérise pas davantage le sérieux de la contestation qu'il élève en ce qui concerne la résolution des contrats pour non respect par la banque de ses obligations résultant de l'accord du 15 juin 2010, que si ce protocole indique que les parties ont convenu ensemble et de bonne foi de poursuivre les discussions en cours dans le but de trouver un accord amiable à leur différend et permettant notamment de réduire significativement les taux fixes résultant du réaménagement des transactions, il prévoit également une échéance, à savoir le 20 juin 2010 pour la banque et le 2 juillet 2010 pour le conseil d'administration de PCH, que ces échéances sont arrivées à terme, étant par ailleurs établi que DEUTSCHE BANK a formulé les 17 juin et 28 octobre 2010 deux propositions auxquelles PCH n'a pas estimé donner suite ;

Considérant que l'appelant s'est engagé, aux termes des transactions, à payer les échéances d'intérêts à un taux librement consenti avec la banque, qu'il est établi qu'il a d'ailleurs volontairement exécuté son obligation au titre des échéances d'intérêts d'août et septembre 2011, qu'il ne peut utilement, ainsi que le soutient DEUTSCHE BANK, exciper de manquements, au demeurant non caractérisés, de la banque à son obligation de négocier de bonne foi, pour se dispenser de cette obligation contractuelle ;

Considérant que l'appelant se prévaut de sa situation financière et des difficultés qu'il éprouve à s'acquitter de ses engagements contractuels pour obtenir un report de ses échéances pour une durée de deux ans, qu'il estime avoir toujours affirmé sa bonne foi ; que DEUTSCHE BANK AG s'oppose à tout délai aux motifs que PAS DE CALAIS HABITAT n'est pas un débiteur malheureux, qu'il dispose en effet d'un actif de 91 M €, et n'est pas plus un débiteur de bonne foi compte tenu des man'uvres déloyales qu'il a entreprises et entreprend ;

Considérant que l'appelant se fonde essentiellement sur ses comptes pour l'exercice comptable 2011 (pièce 64) pour démontrer ses difficultés financières, qu'il ne résulte toutefois pas de la lecture de ce document que l'exécution de son obligation de s'acquitter des échéances d'intérêts qu'il doit serait de nature à mettre en péril sa situation, qu'en effet, ainsi que le relève l'intimée, ce document démontre que PCH dispose d'un actif disponible très confortable, que la CRC note dans son rapport du 11 juin 2011 (5/78) que ses résultats d'exploitation se situent largement au dessus de la moyenne des OPH et que sa trésorerie représente près de six mois de dépenses de fonctionnement et rappelle, s'agissant de l'importance de son auto financement, qu'un opérateur du logement social comme PCH n'a pas vocation de constituer de tels excédents financiers dont il apparaît au surplus, qu'ils ont été en partie affectés à des placements qui se sont révélés hasardeux, qu'elle ajoute que PCH présente une situation financière confortable et possède des marges de man'uvres financières ainsi qu'une trésorerie sensiblement supérieure à la moyenne des OPH au niveau national, [mais] que le très faible niveau de provisions [alors] constituées met en cause la fiabilité des comptes et les résultats de l'analyse financière ; que la banque démontre par ailleurs (pièces 29 et 43) que PCH tente par tous procédés, y compris déloyaux, de se soustraire à ses obligations et qu'il n'est pas un débiteur de bonne foi ; que dans ces conditions, il ne saurait être fait droit à sa demande de délais de paiement ;

Considérant que l'ordonnance déférée à la cour doit en conséquence être confirmée en toutes ses dispositions ;

Considérant que l'équité commande d'allouer à l'intimée une indemnité complémentaire en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile d'un montant tel que précisé au dispositif de l'arrêt ; que l'appelant doit supporter les entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise,

Condamne PAS DE CALAIS HABITAT, EPIC local, à payer à la société DEUTSCHE BANK AG une indemnité complémentaire en cause d'appel de 25 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre prétention des parties,

Condamne PAS DE CALAIS HABITAT, EPIC local, aux entiers dépens qui seront recouvrés comme il est prescrit à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 12/02226
Date de la décision : 25/09/2012

Références :

Cour d'appel de Paris A3, arrêt n°12/02226 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-09-25;12.02226 ?
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