Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 5
ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2012
(n° , 17 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/00413
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Décembre 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2008002103
APPELANTES
SAS ALAIN AFFLELOU FRANCHISEUR représentée par son Président en exercice Agissant en son nom personnel et comme venant aux droits de la Société [V] [L] S.A
Ayant son siège social
[Adresse 6]
[Localité 9]
SA ALAIN AFFLELOU SUCCURSALES représentée par son Directeur Général et/ou tous représentants légaux
Ayant son siège social
[Adresse 5]
[Localité 9]
Représentées par la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, Me Anne-laure GERIGNY, avocats au barreau de PARIS, toque : K0148
Assistées de Me MINKOWSKI Julia et de Me Hervé TEMIME, avocats au barreau de PARIS, toque :C1537
INTIMÉE
SAS OPTICAL CENTER représentée par son Président en exercice
Ayant son siège social
[Adresse 7]
[Localité 8]
Représentée par la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU-JUMEL, Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU, avocats au barreau de PARIS, toque : K0111
Assistée de Me Michèle BRAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : B 1170
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 juin 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Colette PERRIN, Présidente, chargée d'instruire l'affaire et Madame Patricia POMONTI, Conseillère .
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Colette PERRIN, Présidente
Madame Patricia POMONTI, Conseillère
Madame Irène LUC, Conseillère désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la cour d'appel de Paris en vertu de l'article R 312-3 du code de l'organisation judiciaire pour compléter la chambre.
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Mademoiselle Emmanuelle DAMAREY, Greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE
La société Optical Center, créée en 1991, a pour activité la vente au détail d'équipements d'optique. Elle exploite 78 magasins dans toute la France et est également franchiseur pour des sociétés exploitant des magasins sous enseigne ; elle dispose de 350 points de vente répartis sur tout le territoire national.
Douze autres enseignes se partagent le marché de l'optique et de la franchise dont la plus importante est [V] [L] qui représente 70% du chiffre d'affaires français de la vente d'équipement optique avec 658 points de vente et près de 11% du marché ; celles-ci se sont regroupées dans un syndicat, le syndicat des opticiens sous enseigne (Synope).
Les mutuelles offrent des couvertures importantes pour les frais d'optique en les prenant en partie en charge et en faisant parfois l'avance de ceux-ci à leurs adhérents.
Des abus se sont avérés à l'occasion de cette prise en charge dans la mesure où étaient faussement imputées sur les frais pris en charge les dépenses les plus importantes, pratiques attractives pour les clients qui n'avaient ainsi à régler sur ses deniers personnels qu'un prix largement minoré .
Optical Center estimant d'une part que cette pratique était encouragée par le Synope, a déposé plainte pour entente prohibée, d'autre part qu'elle constituait une concurrence déloyale, a par exploit en date du 3 janvier 2008, assigné les sociétés [V] [L], [V] [L] succursales et [V] [L] franchiseur devant le tribunal de commerce de Paris d'une action en responsabilité pour des faits de concurrence déloyale,
Par jugement rendu le 11 décembre 2009, assorti de l'exécution provisoire sauf en ce qui concerne les mesures de publication, le Tribunal de Commerce de Paris a :
- donné acte à la société [V] [L] de ce qu'elle vient aux droits de la société [V] [L] SA en vertu d'une fusion absorption ayant entraîné sa dissolution sans liquidation et sa radiation du registre du commerce
- constaté que les sociétés [V] [L] avaient commis des fautes de concurrence déloyale au détriment de la société Optical Center
- fait injonction de cesser ces agissements sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée passé le délai de 48 heures à compter de la signification du présent jugement,
- condamné in solidum les sociétés [V] [L] à verser la somme de 1 100 000 euros à la SAS Optical Center en réparation de son préjudice matériel , la somme de 100 000 euros à la SAS Optical Center en réparation de son préjudice commercial , ainsi que la somme de 25 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- ordonné la publication du jugement au choix de la société Optical aux frais in solidum des sociétés [V] [L] Franchiseur et [V] [L] SAS dans les publications professionnelles suivantes : Acuité, Bien Vu et l'Essentiel de l'Optique ainsi que sur la page d'accueil du site Internet [V] [L] pendant 30 jours et se sous astreinte de 1000 euros par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter du jugement
- débouté les défenderesses de toutes leurs demandes.
LA COUR
Vu l'appel interjeté le 7 janvier 2010 par la SAS [V] [L] Franchiseur et la SA [V] [L] Succursales.
Vu les dernières conclusions signifiées le 28 mars 2012 par lesquelles la SAS [V] [L] Franchiseur et la SA [V] [L] Succursales demandent à la Cour:
-de déclarer les sociétés [V] [L] Franchiseur et [V] [L] Succursales recevables en leur appel.
-de confirmer le jugement du Tribunal de Commerce de Paris du 11 décembre 2009 en ce qu'il a donné acte à la société [V] [L] Franchiseur de ce qu'elle vient aux droits de la société [V] [L] SA, en vertu d'une fusion absorption ayant entrainé sa dissolution sans liquidation et sa radiation du registre du commerce.
-d'infirmer dans toutes ses autres dispositions le jugement du Tribunal de Commerce de Paris du 11 décembre 2009.
En conséquence,
-de condamner la société Optical Center à payer à chacune des sociétés [V] [L] Franchiseur venant aux droits de la société [V] [L] SA, [V] [L] franchiseur et [V] [L] Succursales la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive sur le fondement de l'article 32-1 du Code de Procédure Civile et 1382 du Code Civil.
-de condamner la société Optical Center à payer à chacune des sociétés [V] [L] Franchiseur venant aux droits de la société [V] [L] SA, [V] [L] Franchiseur et [V] [L] Succursales la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Les sociétés [V] [L] soutiennent qu'aucune concurrence déloyale de leur part n'est caractérisée, estimant irrecevables les éléments de preuve apportés par la société Optical Center et constitués d'attestations et de constats d'huissiers intervenus à l'occasion d'opérations de testing.
Elles ajoutent que la société Optical Center ne justifie pas d'un préjudice découlant d'une faute commise par les sociétés [V] [L] Franchiseur et [V] [L] Succursales.
Elles font valoir que la société [V] [L] SA était une société Holding qui ne gérait que des participations et dès lors ne peut se voir reprocher des faits de concurrence déloyale et que la société [V] [L] Franchiseur ne peut, elle, se voir reprocher des faits relevant de la seule responsabilité des franchisés qui sont des commerçants indépendants.
Elles estiment en conséquence que le tribunal de commerce n'a justifié des indemnités allouées à la société Optical Center ni dans leur principe ni dans leur quantum et que la procédure engagée par Optical Center à leur encontre est abusive
Vu les dernières conclusions signifiées le 19 mars 2012 par lesquelles la société Optical Center demande à la Cour:
Vu l'article 1382 du Code civil
-de dire et juger mal fondé l'appel des sociétés [V] [L] Franchiseur SAS et [V] [L] Succursales SA.
-de confirmer dans son principe le jugement rendu le 11 décembre 2009 par le Tribunal de Commerce de Paris.
-de les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions
En conséquence,
-de rejeter la fin de non recevoir soulevée par la société [V] [L] Franchiseur SAS venant aux droits de la société [V] [L] SA.
-de constater que les sociétés [V] [L] Franchiseur SAS et [V] [L] Succursales SA ont commis des faits de concurrence déloyale au détriment de la SAS Optical Center:
1)leur faire injonction de cesser ces agissements, sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée après le prononcé de l'arrêt.
2)liquider provisoirement l'astreinte à hauteur de 80.000 euros pour les infractions constatées postérieurement au jugement rendu le 11 décembre 2009 par le Tribunal de Commerce de Paris.
3)au vu du dommage réalisé, condamner in solidum les sociétés [V] [L] Franchiseur SAS et [V] [L] Succursales à verser la somme de 6 millions d'euros à la SAS Optical Center en réparation du préjudice matériel subi.
4)condamner in solidum les sociétés [V] [L] Franchiseur SAS et [V] [L] Succursales SA à verser la somme de 200.000 euros à la SAS Optical Center en réparation du préjudice commercial subi.
5)ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans 3 quotidiens nationaux au choix de la société Optical Center et aux frais solidaires des sociétés [V] [L] Franchiseur SAS et [V] [L] succursales SA, dans les publications professionnelles suivantes:Acuité, Bien Vu et L'Essentiel de l'Optical, toujours aux frais des appelantes, ainsi que sur la page d'accueil du site internet [V] [L] pendant un mois, et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter d'un mois après le prononcé de l'arrêt.
-de débouter les sociétés [V] [L] Franchiseur SAS et [V] [L] Succursales SA de toutes leurs demandes
-de condamner in solidum les sociétés [V] [L] Franchiseur SAS et [V] [L] Succursales SA à verser la somme de 50.000 euros à la SAS Optical Center sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile .
La société Optical Center soutient que la responsabilité in solidum des trois sociétés du groupe [V] Afelou doit être engagée. Tout d'abord la fusion absorption d'[V] [L] SA par [V] [L] franchiseur SAS montre bien que la société [V] [L] SA formait une entité unique avec les deux autres sociétés du groupe [L]. Ensuite, les trois sociétés assignées donnent l'apparence d'une entité unique, dont les relations sont interdépendantes, et la société [V] [L] n'était pas une holding mais une société s'immisçant dans la gestion des autres et l'ensemble des sociétés fonctionnant dans le cadre d'un seul groupe, sous la seule dénomination [V] [L].
La société Optical Center affirme que les faits de concurrence déloyale sont prouvés par elle par différents moyens: attestations de « clients mystères », procès-verbaux d'huissiers, attestations de salariés, déclarations des mutuelles, enquête des médias et enquête préliminaire du parquet de Paris.
Selon la société Optical Center, la concurrence déloyale d'[V] [L] est réelle. En effet la faute est constituée par la violation d'une interdiction légale, prévue par des textes, le fait pour le groupe de laisser perdurer ces pratiques sans agir étant incontestablement constitutif d'une faute .
Elle fait état d'un préjudice matériel et commercial, le préjudice matériel étant constitué par la perte de clientèle, celle-ci étant attirée par les « facilités » qu'offrent les opticiens [V] [L] et cette perte de clientèle s'étant traduite par une perte de chiffre d'affaires mais aussi par une perte de chance de gain, Le préjudice est aussi commercial, en effet le préjudice moral causé par le dommage apporté à la concurrence justifie en soi un droit à réparation.
La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la mise en cause de la SA [V] [L] :
Considérant que la SA [V] [L] soutient qu'elle n'est qu'une holding gérant des participations et qu'elle n'est pas intervenue dans les faits dénoncés par Optical Center ce que cette dernière conteste, faisant valoir que l'apparence donnée par les trois sociétés est celle d'une entité unique, la SA [V] [L] s'immisçant dans la gestion des deux autres;
Qu'une société holding a pour seul objet de gérer des participations alors que l'objet social de la SA [V] [L] qui vise « la création d'un fonds de commerce « et « toutes opérations commerciales, industrielles, financières.. » est beaucoup plus large;
Que celle-ci a longtemps exploité directement des magasins, l'extrait Kbis du 2 mars 2009 montrant qu'en avril 2008 elle exploitait encore un magasin;
Que les trois sociétés, [V] [L] SA, [V] [L] Franchiseur et [V] [L] succursales ont toujours eu des dirigeants et des services communs;
Que les dirigeants de [V] [L] SA ont présenté publiquement cette société comme étant au coeur du dispositif, dirigeant et animant la politique commerciale et stratégique de l'enseigne ;
Que lors de la prise de participation de la société Bridgepoint, le document de présentation à l'autorité des marchés financiers expose que la société [V] [L] « exploite la première franchise de distribution optique d'Europe. Elle disposait au 31 octobre 2005 d'un réseau de 758 points de vente , principalement en France (97) dont environ 25 succursales. Elle prévoit de disposer au 30 avril 2006 (date de clôture de l'exercice en cours ) d'environ 800 points de vente dont 650 en France, 120 en Espagne et 30 dans d'autres pays
La société est particulièrement réputée pour son dynamisme commercial qui s'est traduit par le lancement de nombreux concepts exclusifs à succès (offres Forty, Tchin Tchin, Ephémère, Tercera,etc...) et sa stratégie de communication intensive qui en fait le réseau d'optique le plus connu en France (73% de reconnaissance spontanée).
Tout en poursuivant l'expansion en France de son réseau de franchisés sous l'enseigne [V] [L]....
la société a simultanément lancé les magasins « Plurielles d'[L] »;
Que sont regroupés les résultats de toutes les sociétés sans qu'aucune distinction soit faite entre franchises et succursales ;
Que l'adresse du site internet de la société est www.alainafflelou.com» ;
Qu'à la date du 30 octobre 2008 sur son site internet la société expose que son activité principale est la franchise de distribution d'optique ; que les dirigeants énumérés sont ceux de la société [V] [L] ;
Que la société [V] [L] a saisi le Centre d'arbitrage et de Médiation et a déposé plainte pour utilisation de mauvaise foi du nom de domaine [L] ;
Que ces éléments démontrent l'existence d'une entité unique qui a dirigé, géré les deux sociétés [V] [L] Franchiseur et [V] [L] Succursales;
Que cette identité a été corroborée par l'acte de fusion absorption selon procès verbal du 22 janvier 2009, l'assemblée générale extraordinaire ayant approuvé la fusion absorption de la société [V] [L] par la société [V] [L] Franchiseur avec effet rétroactif au 1er août 2008 et la dissolution de la société [V] [L]; que le 27 janvier 2009 a été signée une déclaration de régularité et de conformité de la procédure de fusion absorption qui a été déposée au greffe du tribunal de commerce de Bobigny;
Que la cour observe que cette fusion absorption est intervenue au cours de la procédure et a pour effet la disparition de la société [V] [L] au profit de la société [V] [L] Franchiseur ;
Que cette fusion, si elle a entraîné la disparition de la société [V] [L] SA, n'a pas pour autant modifié le fonctionnement du groupe dont les dirigeants sont demeurés ceux de la société [V] [L] SA ; que la distinction des deux sociétés restantes est purement fictive du fait de la confusion existant dans leur mode de communication et dans leur gestion sous le seul nom de « [L] »;
Sur les moyens de preuve
Considérant que les sociétés [V] [L] demandent à la Cour d'écarter des débats un certain nombre de preuves qui ne respecteraient pas les obligations de légalité et de loyauté;
Les attestations
Qu'en premier lieu elles visent les preuves obtenues par le moyen du testing estimant que la pratique du testing utilisé par Optical Center constitue un moyen déloyal d'obtention de preuves par le recours à des clients fictifs missionnés pour recueillir les preuves d'une infraction quitte à la provoquer et ce à l'insu de la personne testée ;
Que cette méthode d'investigation qui consiste à envoyer des clients dits « mystère » pour tester les pratiques d'un concurrent n'est pas illégale en soi ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'examiner les attestations incriminées au cas par cas ;
Que les sociétés [V] [L] demandent à la cour d'écarter l'attestation de Mme [G] ;
Que la société Optical Center verse une attestation de Mme [B] [R] [G], en date du 8 octobre 2007 qui atteste qu'il lui a été établi faussement une facture verres cassés;
Qu'il s'avère que Mme [G] est la directrice du service juridique de la société Optical Center ce qui ne figurait pas sur son attestation;
Que l'article 202 du code de procédure civile dispose que « l'attestation....mentionne les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur ainsi que, s'il y a lieu, son lien de parenté ou d'alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d'intérêts avec elle » ;
Que toutefois ces dispositions ne sont pas prescrites à peine de nullité ; que, la teneur de cette attestation est corroborée par la mention « verre cassé » sur la facture dont Mme [G] affirme qu'elle lui a été suggérée par le vendeur ;
Qu'elle a fourni à l'appui de son attestation, une feuille de soins et la facture qui comporte la mention « verre cassé »;
Qu'en conséquence la seule omission de son lien salarial avec la société Optical Center ne constitue pas un élément suffisant pour écarter cette attestation;
Que les sociétés [V] [L] mettent en cause l'attestation de Mme [Y] [EJ] qui relate s'être rendue au magasin [V] [L] situé à [Localité 19] pour l'achat de deux paires de lunettes dont une paire de solaires ; que celle-ci relate les propositions qui lui ont été faites par deux vendeuses successives, la première lui ayant « indiqué qu'elle pourrait faire passer une petite partie du montant de la paire de solaires sur la paire de vue soit 60€ ainsi que le surcoût de la monture de vue (non remboursé par la mutuelle) soit 21 € » ; qu'elle mentionne être sortie du magasin et à son retour avoir eu affaire à une autre vendeuse qui « a alors annoncé qu'elle pouvait modifier les montants de façon à ce qu'il ne reste au maximum que 15€ à ma charge », ajoutant « pour parvenir au même total que sur le devis mais en reportant la quasi intégralité des frais sur les verres blancs qui sont ainsi passés de 99€ à 240€ l'unité »; qu'elle verse la feuille de soins, le devis et la facture à l'appui de son attestation ;
Qu'entendue à l'occasion de la plainte pour entente déposée par Optical Center, Mme [EJ] a expliqué qu'à l'occasion d'un forum de discussion sur internet elle était entrée en relations avec Mme [G] et qu'elle ne s'était pas fait rembourser ses lunettes ni par sa mutuelle ni par la sécurité sociale mais qu'elles lui avaient été remboursées par Optical Center;
Que les sociétés [V] [L] font valoir qu'elle a ainsi bénéficié gratuitement d'une paire de lunettes et qu'elle a fait une attestation inexacte en indiquant ne pas avoir été rémunérée;
Qu'il convient de relever que Mme [EJ] a fait l'objet d'une prescription médicale en date du 25 septembre 2009 et qu'elle s'est rendu dans le magasin [V] [L] situé à [Localité 19] le 29 septembre pour acheter les lunettes prescrites ;
Qu'elle n'a aucun lien ni avec Optical Center ni avec Mme [G] ; que le fait d'être entrée en relations avec cette dernière sur un site internet ne saurait entâcher de partialité son attestation ;
Que si elle a accepté un remboursement par Optical Center en renonçant à celui qui aurait pu lui être alloué par la sécurité sociale ou sa mutuelle, il ne peut en être déduit qu'elle a été rémunérée par Optical Center;
Qu'il n'y a pas lieu d'écarter son attestation d'autant que celle-ci est étayée par des éléments objectifs, à savoir la prescription, deux devis et la facture qui ont été soumis au débat contradictoire ;
Que si les sociétés [V] [L] produisent l'attestation de l'une des vendeuses qui indique avoir établi les devis et qui affirme avoir répondu qu'elle ne pouvait pas modifier les prix, celle-ci relate que sa collègue [N] a poursuivi la vente pendant la pause déjeuner ; que c'est cette dernière qui a donc établi la facture et encaissé le prix ;
Que les pièces produites par Mme [EJ] et les déclarations des deux vendeuses confortent son attestation qu'aucun élément ne conduit la cour à écarter;
Considérant qu'a été produite une attestation de Mme [U], les sociétés [V] [L] faisant valoir qu'il s'agit de la mère de Mme [G] ; que ce seul élément n'est pas suffisant pour écarter son attestation;
Que Mme [U] a fait l'objet d'une prescription médicale en date du 31 juillet 2007 et relate s'être présentée au magasin [V] [L], avoir choisi une monture d'une valeur de 306€, qu'il lui avait été remis un devis comportant ce montant et celui des deux verres, qu'après un temps de réflexion elle était revenue au magasin, exposant les taux de remboursement de sa mutuelle et le fait que les lunettes lui revenaient trop chères et que la vendeuse lui avait proposé spontanément de répartir le prix de la monture et des verres sur la facture en indiquant une autre référence de monture sur la facture d'une valeur de 136€ et en faisant passer le prix des verres à 170€ au lieu de 85€;
Que celle-ci a versé avec son attestation la feuille de soins , le devis et la facture, ces deux dernières pièces étant établies par la vendeuse ;
Que les sociétés [V] [L] exposent que Mme [U] a servi de client à la société Optical Center à plusieurs reprises , à Lille le 30 septembre 2007 dans un magasin [V] [L] et dans d'autres magasins concurrents ;
Considérant que chaque attestation doit être examinée individuellement au regard des éléments qu'elle comporte , aucune disposition n'interdisant à Mme [U] d'attester de faits semblables dans différentes enseignes et dans différentes ville de France ;
Qu'en conséquence, au regard des éléments accompagnant la relation des faits et la corroborant, il n'y a pas lieu d'écarter l'attestation précitée de Mme [U];
Considérant que les sociétés [V] [L] demandent à la cour d'écarter l'attestation de M.[SN], qui atteste s'être rendu le 29 septembre 2007 dans le magasin [V] [L] situé dans le centre commercial de [Localité 26], muni d'une prescription médicale du même jour, qui relate avoir choisi deux montures de marque et avoir demandé un devis, être sorti du magasin pour faire une copie du devis, indiquant à son retour bénéficier d'un remboursement à 100% et que la vendeuse lui a alors proposé de faire passer le prix de la monture sur les verres ; qu'il verse la feuille de soins, le devis et la facture finale;
Que si lors de l'enquête pénale, M.[SN] a expliqué être entré en relations avec Mme [G] sur un site de discussion internet et avoir alors accepté de participer à une opération de testing en jouant le rôle du client mystère et avoir été remboursé de ses frais par Optical Center, ces circonstances ne démontrent pas un lien avec Mme [G], ni l'existence d'une rémunération;
Que par ailleurs il verse des pièces matérielles corroborant ses dires, le devis et la facture dont il résulte que le prix des verres qui était de 277€ sur le devis est passé à 416€ et 414€ sur la facture;
Que lors de l'enquête pénale, la vendeuse a reconnu avoir pratiqué une fausse facturation.
Considérant que M [P], également en tant que client mystère participant à l'opération de testing, s'est présenté le 29 septembre 2007 au magasin [V] [L] du [Localité 2] pour l'achat de deux paires de lunettes, une verres blancs, l'autre verres solaires ; qu'il indiquait qu'après l'établissement d'un devis de 523€, il avait demandé s'il était possible de répartir le prix sur les verres ce qui avait été accepté sans problème ;
Qu'il a indiqué lors de l'enquête pénale que son épouse est une amie de Mme [G] qui leur avait proposé de participer à une opération test avec un achat de lunettes qui lui serait remboursées par Optical Center ;
Que ces éléments ne conduisent pas la cour à écarter cette attestation ;
Qu'il convient de relever que ces opérations de testing ont été réalisées dans les boutiques [V] [L] qui sont ouvertes au public ; que dès lors c'est à mauvais escient que les sociétés [V] [L] invoquent l'article 9 du code civil qui protège la vie privée ;
Que l'insistance du client sur le caractère coûteux de son achat et ses indications sur son taux de couverture par une mutuelle ne constituent pas des actes de pression ou des stratagèmes vis à vis du professionnel qu'est l'opticien; que c'est ce dernier qui maîtrise le prix et qui en l'espèce a, après avoir établi un devis, accepté de facturer différemment l'opération en incluant dans la facture des données inexactes et qui a réparti faussement le prix global de sorte que celui-ci soit pris en charge par les mutuelles, contrairement aux dispositions réglementaires régissant les remboursements dont était susceptible de bénéficier le client auprès des organismes sociaux et des mutuelles ;
Que dès lors les sociétés [V] [L] ne sauraient invoquer leur propre turpitude pour demander à la cour d'écarter des attestations recueillies à l'occasion d'opérations de testing;
Sur les constats d'huissier
Considérant que Optical Center a obtenu des ordonnances des présidents des tribunaux de [Localité 2], Lille , [Localité 16] et [Localité 24] afin de faire désigner des huissiers chargés d'assister et de constater les opérations dénoncées;
Considérant que les société [V] [L] font valoir que Optical Center se prévaut d'un constat effectué en application de l'ordonnance du président du tribunal de commerce de Lille qui comporte la mention « Ne fera état de l'ordonnance et de la mission que cette dernière accomplie » alors que par un arrêt en date du 10 février 2011, la cour de cassation a cassé l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai du 19 mai 2009 ayant refusé la rétractation d'une ordonnance rendue sur requête aux motifs que l'ordonnance a été jugée contraire au principe du contradictoire;
Que la cour n'est pas saisie d'une demande en rétractation de l'ordonnance rendue le 9 octobre 2007 par le tribunal de grande instance de Paris;
Que si le juge des référés de Lille avait rétracté l'ordonnance sur requête, il a débouté la société demanderesse de sa demande d'annulation du procès verbal dressé par l'huissier :
Qu'en toutes hypothèses, les constats ont été établis dans les magasins, donc dans des lieux ouverts au public, à des heures d'ouverture à la clientèle et qu'ils ont été soumis à l'occasion de la présente procédure aux débats; qu'il n'y a pas lieu de les écarter ;
Que le 25 octobre 2007, Maître [E], huissier de justice a constaté les conditions de l'achat effectué par M.[S] d'abord au magasin Grand Optical, [Adresse 3] , puis au magasin Alain Afflelou [Adresse 4], celui-ci indiquant vouloir procéder à l'achat de lunettes correctrices ainsi que des lunettes solaires non correctrices, ;
Qu'il constate que dans les deux cas l'opticien a spontanément proposé une répartition des prix entre verres et monture en fonction des taux de remboursement et que, après indication par M.[S] du taux de remboursement par sa mutuelle, celui-ci a pu procéder à l'achat avec une répartition du prix des lunettes solaires sur le prix des verres correcteurs;
Qu'ainsi sur le devis chacun des verres correcteurs est à 104€ alors que sur la facture acquittée ils sont à 169€ soit 65€ de plus que le coût réel de sorte que la paire de solaire est entièrement à la charge de la mutuelle;
Que Maître [T], huissier de justice à Lille, s'est rendu au magasin [V] [L], 32 rue Nationale et a constaté que le vendeur a répondu au client « on peut basculer et diminuer légèrement le prix de la monture qui reste cependant une Gucci. On peut faire 25€ par verre »;
Que la comparaison du devis et de la facture montre que le prix de la monture a été baissé de 50€ et que le prix des verres est passé de 100 à 145 €;
Considérant en conséquence que c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu comme probants l'ensemble des moyens de preuve précités ;
sur les autre preuves
Considérant que outre ces éléments de preuve critiqués, Optical Center produit des attestations de salariés qui témoignent que les clients auxquels l'arrangement a été refusé se sont abstenus de procéder à l'achat de leur lunetterie et se sont dirigés vers d'autres enseignes ;
Que les mutuelles ont également dénoncé cette pratique ;
Que des enquêtes des médias l'ont également évoquée à plusieurs reprises ; qu'ainsi le quotidien « Le Parisien » s'est livré en juin 2010 à une enquête auprès de 10 opticiens et notamment mentionne [V] [L];
Qu'enfin au cours de l'enquête pénale, les vendeurs interrogés ont fait état d'une pratique généralisée, un salarié indiquant avoir tout particulièrement noté cette pratique lorsqu'il travaillait « au siège social [V] [L] »;
Que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu le caractère probant des preuves apportées par la société Optical Center
Considérant que la société Optical Center a enfin versé des attestations postérieures à l'assignation et au jugement, ayant eu recours à cette fin à la société Qualivox spécialisée dans la technique du testing ;
Qu'elle verse les attestations de Mme [KF] dans l'Isère qui indique « Première visite très explicite car dès le départ, l'opticien, me signale qu'en fonction de mon remboursement, on optimisera le prix des verres, de la monture en fonction de ce qui m'arrangera », de Mme [O] à [Localité 20], de Mme [A] à [Adresse 14], de Mme [H] à [Localité 13] et de Mme [W] à [Localité 25], démontrant la poursuite des pratiques sur l'ensemble du territoire.
Que, Optical Center verse enfin des attestations relatant ces mêmes faits après le prononcé du jugement ;
Que M.[Z] [X] s'est rendu dans trois magasins le 20 août 2010 au magasin [V] [L] de [Localité 21], le 21 août à celui du [Adresse 1] et le 14 septembre 2010 dans celui de [Localité 15] et relate que dans les deux premiers il a pu obtenir pour l'achat de lunettes de soleil une facture mentionnant des lunettes de vue, et dans le troisième l'achat d'une monture Ray Ban d'une valeur de 180€ faussement facturé comme correspondant à un retaillage d'un verre qui n'a jamais été vendu;
Que M.[C] [K] relate des faits identiques le 4 octobre 2010 au magasin [V] [L] de [Adresse 12] à [Localité 2], Mme [D], le 7 septembre 2010 à Lille;
Que le 23 août 2011, Mme [J] s'est présentée au magasin [V] [L] du centre commercial St Loup à [Localité 22] pour l'achat d'une paire de lunettes de vue et d'une paire de solaires sans verres correcteurs donc non remboursée et a obtenu un arrangement financier afin de faire prendre en charge les solaires dans le forfait de sa mutuelle ; que le devis mentionne 125€ pour les lunettes de vue et 49€ alors que la facture ne mentionne plus les solaires et comporte le seul prix de 149€ .
Que le 26 août 2011, Mme [M] s'est rendue au magasin [V] [L] du centre commercial Le Merlan à [Localité 22] pour l'achat de deux paires de lunettes, l'une de vue , l'autre de solaire, un devis lui ayant alors été remis sur lequel les solaires apparaissent pour 90€ ; qu'elle déclare que lors d'un second passage il lui avait été proposé de faire passer les solaires pour des lunettes vue et de passer la monture vue à 1€ soit un total avec les verres de 165€ permettant ainsi de faire correspondre le total avec son forfait mutuel qui était de 160€;
Qu'il résulte de ces éléments que les magasins à l'enseigne [V] [L] se sont livrées de façon continue dans des pratiques de fausse facturation ;
Sur la concurrence déloyale
Considérant qu'il résulte de ces éléments que les pratiques relatées constituent des fautes dans la mesure où elles contreviennent à des interdictions légales ;
Que ces pratiques ne sont pas le fait ponctuel d'un magasin [V] [L] mais caractérisent des pratiques unifiées au sein de l'ensemble du groupe, que les magasins soient des franchises ou des succursales ;
Que de telles pratiques drainant une clientèle importante était source de revenus considérables;
Qu'il s'en est suivi nécessairement un attrait financier pour la clientèle tel qu'elle ne pouvait que délaisser les enseignes refusant de se plier aux mêmes pratiques , de nombreux opticiens Optical Center attestant avoir ainsi perdu des ventes;
Que les sociétés [V] [L] prétendent que des pratiques similaires existaient au sein des magasins Optical Center mais ne mettent en évidence qu'un cas; que Optical Center fait valoir qu'il s'en est suivi une mesure de licenciement ce qui n'est pas contesté; que ce cas ne disculpe pas pour autant les pratiques fautives généralisées au sein des magasins [V] [L] et qui constituent des actes de concurrence déloyale;
Considérant que la société Optical Center expose qu'en cours de procédure la société [V] [L] s'est livrée à une tentative de débauchage massive des managers de ces magasins, en janvier 2008, 9 managers des magasins situés sur différents points du territoire ayant été démarchés par la société de recrutement Pro-RH, qui leur a proposé de rejoindre le groupe [V] [L] avec des salaires supérieurs de 1000€ nets;
Que si [V] [L] produit une attestation de ce cabinet, celui-ci indique ne pas avoir été mandaté pour débaucher « massivement et spécifiquement du personnel salarié d'Optical Center » et reconnaît néanmoins 5 approches, contestant avoir pour sa part proposé une augmentation substantielle de salaire ; qu'il ne nie pas pour autant avoir été mandaté par la société [L];
Que Mme [I] atteste qu'elle a été contactée par ce cabinet sur son lieu de travail et s'être vue proposer « avec insistance » et « au plus vite »un entretien et une proposition immédiate d'augmentation de son salaire de 1000€ ; qu'elle relate que la rencontre a été « particulièrement curieuse » dans la mesure où le cabinet de recrutement s'était montré intéressé par les chiffres du magasin et le nombre d'opticiens dans celui-ci »;
Que Optical Center verse les attestations de deux autres opticiens dont un directeur du magasin à [Localité 22] qui indique qu'il lui a été proposé téléphoniquement un poste de directeur de succursale et qu'il a été interrogé tout particulièrement sur des données propres au magasin où il travaillait;
Qu'il convient de relever qu'il n'est pas justifié d'une quelconque approche de salariés d'une autre enseigne, ni de besoins spécifiques ayant donné lieu à des annonces de recrutement;
Considérant que si aucun des salariés contactés n'a été recruté, il n'en demeure pas moins que les conditions de l'approche de salariés ciblés d'Optical Center s'agissant de responsables de magasins, et l'existence même de propositions de poste et de salaires plus intéressants ont constitué des tentatives de débauchage de nature à désorganiser Optical Center;
Considérant que les sociétés [V] [L] font valoir l'absence de responsabilité de la société [V] [L] Franchiseur du fait de ses franchisés dans la mesure où il s'agit de commerçants indépendants;
Que celle-ci affirme que Optical Center n'apporte pas la preuve qu'elle aurait d'une quelconque manière incité les membres du réseau à commettre des fraudes au détriment des mutuelles;
Considérant que si le contrat de franchise stipule que « le franchiseur ne saurait encourir aucune responsabilité du fait des actes accomplis par le Franchisé , ses employés ou les personnes assurant la gestion effective de son entreprise », il n'en conserve pas moins une responsabilité dans la mise en oeuvre de ses obligations de franchiseur ;
Que le contrat de franchise comporte un article intitulé « communication du savoir faire commercial » et qui mentionne que cette communication se fait par entretiens, réunions, circulaires , courriers, cassettes vidéo et remises de notes d'instruction »;
Que sur ses diligences au titre de son assistance à ses franchisés, la société [V] [L] fait état de deux communications par la voie de son site internet, l'une du 9 septembre 2005 faisant suite à un article de presse paru dans le Journal du Dimanche, l'autre du 29 novembre 2007 mettant en ligne un article du journal Capital et indiquant que les pratiques de surfacturation constituaient des infractions pénales ;
Qu'à l'occasion du premier message , elle fait état du licenciement d'un opticien ayant 10 ans d'ancienneté du fait de ces pratiques ;
Que dans le deuxième message la société [V] [L] indique « Des irrégularités ont été constatées par client mystère ou huissier dans un certain nombre de magasins [V] [L] » ;
Qu'il convient de relever que les sociétés [V] [L] ne produisent aucun autre élément alors même que la pratique était largement répandue sur le territoire national et qu'elle a perduré pendant des années;
Que de telles pratiques étant avérées, dénoncées par les médias et les mutuelles, les sociétés [V] [L] n'ont pour autant pas réagi, et ne justifient ni de la mise en place d'une politique auprès des franchisés, de ses succursales, afin d'y remédier, se contentant de relayer à deux reprises sur son site internet des enquêtes de média en s'en faisant l'écho ;
Sur l'astreinte
Considérant que les premiers juges ont constaté que le franchiseur n'avait pas initié « d'actions d'envergure , d'information et de sanctions auprès de ses franchisés pour faire cesser de telles pratiques » et ont fait injonction aux sociétés [V] [L] Franchiseur et [V] [L] SAS de « cesser ces agissements sous astreinte de 10 000€ par infraction constatée après le prononcé du jugement »;
Que si celles-ci font valoir qu'elles ne pouvaient être tenues qu'à une obligation de moyen au niveau de sa politique d'assistance de ses franchisés et qu'elles ne pouvaient faire cesser les pratiques de ses franchisés, il convient de relever, d'une part qu'à l'occasion de cette obligation d'assistance, le franchiseur dispose de moyens tels que l'envoi de circulaires , la mise au point d'une charte, l'organisation de réunions, d'autre part il lui appartient de mettre en oeuvre les dispositions du contrat de franchise qui prévoient des sanctions en cas d'inexécution de ses obligations par le franchisé avec notamment, selon leur gravité, et dans le cas des manquements les plus graves la possibilité de résilier le contrat;
Que dès lors l'astreinte prononcée par les premiers juges a pour objet de faire cesser des pratiques litigieuses et ce au regard des obligations qui étaient celles des sociétés [V] [L] ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris ;
Que si la société Optical Center a communiqué des attestations démontrant que ces pratiques avaient perduré après le jugement, la cour n'a pas compétence pour procéder à la liquidation de l'astreinte; qu'elle se déclare en conséquence d'office incompétente pour en connaître ;
Sur le préjudice de la société Optical Center
Considérant que la société Optical Center fait état d'un préjudice commercial et matériel, chiffrant ce dernier à 6 millions d'euros ;
Que les pratiques développées au sein des enseignes [L] ont eu pour conséquence de capter une partie de la clientèle au préjudice de l'ensemble des enseignes du marché dont Optical Center ;
Que le chiffre d'affaire développé par les magasins [L] s'est élevé à 581,58 millions d'euros en 2008, le domaine de l'optique représentant 83% soit 403,60 millions d'euros;
Que s'il est constant que la majorité des acheteurs bénéficient d'une mutuelle, il n'en résulte pas pour autant que la totalité de ceux ayant fréquenté les enseignes [V] [L] ont accepté les pratiques proposées et obtenu des arrangements sur le prix tels que ceux avérés, Optical Center ne produisant aucune analyse chiffrée des mutuelles ;
Qu'il est en revanche avéré que les pratiques des magasins [L] constituaient un avantage certain pour le client dans la mesure où il n'avait plus à supporter le coût réel normalement à sa charge ; que celles-ci ont faussé le jeu d'une concurrence loyale entre les différentes enseignes de l'optique présentes sur le marché ; qu'elles ont perduré pendant plusieurs années, y compris après l'assignation et après le jugement du tribunal de commerce;
Que les sociétés [L] relatent que des pratiques analogues existaient au sein de la société Optical Center;
Qu' elle produit à l'appui de cette affirmation une dénonciation anonyme adressée en 2005 au parquet des Hauts de Seine , l'enquête de la BRDA qui conclut à un système généralisé dans toutes les enseignes et évoque le cas d'un franchisé Optical Center en charge de 5 magasins qui a été condamné le 7 décembre 2009 par le tribunal correctionnel de Perpignan pour fraude aux mutuelles et l'aveu du dirigeant de Optical Center qui a dû reconnaître à l'occasion d'un reportage télévisé diffusé le 21 novembre 2010 que ces pratiques pouvaient encore exister dans son réseau ; qu'il n'est pas contesté qu'il a pris une mesure de licenciement de l'opticien concerné;
Que les sociétés [L] versent copie d'un seul jugement du tribunal de grande instance d'Amiens en date du 3 juillet 2007 ayant condamné un franchisé du réseau Optical Center et son épouse médecin pour des faits de faux par établissement de fausses prescriptions médicales;
Que si [L] produit des arrêts mettant notamment en évidence des condamnations prononcées à l'encontre de M.[F], dirigeant d'Optical, ceux-ci d'une part sont pour le plus ancien de la cour d'appel d'Angers du 29 avril 1997, pour le plus récent du 8 mars 2007 et donc antérieurs aux faits dont est saisie la cour, d'autre par les faits visés sont des infractions aux règles en matière de publicité ;
Que s'agissant de la condamnation prononcée le 7 décembre 2009, la cour constate qu'il n'est produit qu'un article de presse au terme duquel il est précisé que si le franchisé a été condamné pour « avoir livré des verres ne correspondant pas à la qualité vendue et pour avoir optimisé les factures », le syndicat Synope mais aussi Optical Center ont eux été accueillis en tant que parties civiles;
Que dès lors il ne peut être déduit des éléments produits par les sociétés [V] [L] et notamment de ces condamnations que la société Optical Center a commis des fautes constitutives de concurrence déloyale par la mise en oeuvre de pratiques identiques, ni qu'elle ait laissé se développer celles-ci au sein de son réseau ;
Qu'en conséquence, elle a subi un préjudice du fait des pratiques généralisées pendant plusieurs années au sein des magasins à l'enseigne [L] ;
Que Optical Center justifie de baisse du chiffre d'affaires pour un certain nombre de magasins et produit des attestations de vendeurs relatant des cas précis où le client , à défaut d'obtenir des arrangements sur le prix, n'a pas procédé à son achat, démontrant ainsi que le coût à débourser par le client était pour lui un facteur de choix de son enseigne et le lien de causalité avec la perte de clientèle subie par les enseignes se refusant à de telles pratiques;
Que les analyses faites tous les ans par les revues spécialisées montrent que la moyenne nette de la marge réalisée par les opticiens est de 10%.;
Que Optical Center indique que sa part de marché était de 3,5% en 2008 et qu'elle est aujourd'hui de 4,5% et, pour évaluer son préjudice, procède à un calcul sur la base d'un arrangement par jour par magasin du groupe sur la base d'un équipement optique d'environ 350€ ce qui représenterait un chiffre d'affaires de 535 500 € par an par magasin , soit sur les 653 magasins de l'enseigne [L], un chiffre d'affaires annuel de 34 968 150€;
Que la pratique perdure depuis des années et au moins 5 ans ce qui induirait une perte pour les autres enseignes de 175 millions d'euros;
Que pour autant, il n'est pas démontré d'une part qu'en l'absence de tels arrangements, les clients se soient reportés sur l'enseigne Optical Center, d'autre part qu'ils auraient poursuivi dans leur choix d'un achat particulièrement dispendieux, dans la mesure où la pratique leur assurait notamment une prise en charge sans bourse déliée de montures de luxe
Que le préjudice d'Optical Center ne peut s'analyser que comme une perte de chance d'accroître sa clientèle et ses bénéfices ;
Considérant que les premiers juges en ont fait une exacte appréciation en le fixant à la somme de 1 100 000€
Considérant que les bénéfices dégagés par les sociétés [V] [L] leur ont permis d'investir notamment dans des campagnes de publicité et de valoriser leur enseigne au détriment des autres .
Que c'est à juste titre que le tribunal de commerce a indemnisé le préjudice moral subi par Optical Center en lui allouant la somme de 100 000€;
Sur la demande de publication
Considérant que les pratiques de fausse facturation qui ont perduré pendant nombre d'années nuisent gravement à la loyauté des relations commerciales ;
Qu'il est important que la clientèle soit informée de ces faits ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qui concerne les mesures de publication ordonnées sauf à dire que l'astreinte dont elles sont assorties sera par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter du présent arrêt.
Sur la demande des sociétés [L] pour procédure abusive
Considérant que les sociétés [L] succombent dans leur appel ; qu'il n'y a donc pas lieu de faire droit à cette demande
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Considérant que la société Optical Center a dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge , qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 700 dans la mesure qui sera précisée au dispositif.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Et , adoptant ceux des Premiers Juges,
CONFIRME le jugement déféré,
SE DECLARE INCOMPETENTE pour liquider l'astreinte prononcée par les premiers juges
REJETTE toutes autres demandes, fins ou conclusions
CONDAMNE in solidum les sociétés [V] [L] Franchiseur et [V] [L] Succursales au paiement de la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE in solidum les sociétés [V] [L] Franchiseur et [V] [L] Succursales aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile;
La GreffièreLa Présidente
E. DAMAREYC. PERRIN