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12/09/2012 | FRANCE | N°10/06483

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 12 septembre 2012, 10/06483


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10





ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2012



(n° 178 , 11 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 10/06483



Décision déférée à la Cour : jugement du 17 décembre 2009 - Tribunal de commerce de PARIS - 19ème chambre - RG n°2007013634





APPELANTE AU PRINCIPAL et APPELANTE EN INTERVENTION FORCEE EN REPRISE D'INSTANCE







S.A. FRANCE TELECOM, agissant en la personne de son président en exercice et de tous représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 5]

[Localité...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 12 SEPTEMBRE 2012

(n° 178 , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/06483

Décision déférée à la Cour : jugement du 17 décembre 2009 - Tribunal de commerce de PARIS - 19ème chambre - RG n°2007013634

APPELANTE AU PRINCIPAL et APPELANTE EN INTERVENTION FORCEE EN REPRISE D'INSTANCE

S.A. FRANCE TELECOM, agissant en la personne de son président en exercice et de tous représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentée par Me Laurence TAZE-BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque L 0068

Assistée de Me Renaud GRIFFET, avocat au barreau de PARIS, toque C 1076

INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE EN INTERVENTION FORCEE EN REPRISE D'INSTANCE

S.A. B3G, venant aux droits de la S.A.S. AZURTEL, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 15]

[Adresse 15]

[Localité 9]

Représentée par la SCP FISSELIER & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque L 0044

Assistée de Me Estelle RIGAL-ALEXANDRE plaidant pour la SELARL LEXCASE SOCIÉTÉ

D' AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque J 026 substituant Me Hubert MORTEMARD DE BOISSE avocat au barreau de LYON

INTIMEE

S.A.R.L. DJ CENTER RECORDS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Sylvie CHARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque L 079

Assistée de Me Pierre LAUTIER avocat, toque B 925

INTERVENANTES FORCEES EN REPRISE D'INSTANCE et comme telles INTIMEES

Maître [N] [M], prise en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société FRONTIER SOFTWARE

[Adresse 1]

[Localité 8]

Maître [P] [B], prise en sa qualité de mandataire judiciaire de la société FRONTIER SOFTWARE

[Adresse 4]

[Localité 8]

Assignées à domicile et n'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 mai 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Fabrice JACOMET, Conseiller, Faisant Fonction de Président, chargé d'instruire l'affaire, lequel a préalablement été entendu en son rapport et Madame Dominique SAINT-SCHROEDER, Conseillère

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Fabrice JACOMET, Conseiller, Faisant Fonction de Président

Monsieur Bernard SCHNEIDER, Conseiller, désigné par ordonnance de Monsieur

le Premier Président de la cour d'appel de Paris en vertu de l'article R312-3 du code de l'organisation judiciaire pour compléter la chambre

Madame Dominique SAINT-SCHROEDER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Véronique GAUCI

ARRÊT :

- par défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Monsieur Fabrice JACOMET, Conseiller, Faisant Fonction de Président, et par Madame Emmanuelle DAMAREY, Greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La cour est saisie de l'appel déclaré le 22 mars 2010 par la société anonyme France Télécom du jugement rendu le 17 décembre 2009 par le tribunal de commerce de Paris.

La société DJ Center Records a une activité de producteur et d'éditeur phonographique.

La société Frontier Software propose toute une gamme de services internet ainsi qu'un service de téléphonie sur internet VoIP, sous le nom de Direct Centrex.

En décembre 2005, DJ Center Records a déménagé de ses locaux du [Localité 2] pour emménager dans des locaux du 14 ème arrondissement. Elle a souhaité passer en VoIP ses nombreuses lignes de téléphone et quitter l'opérateur historique France Télécom, faisant appel à Direct Centrex.

Le 5 décembre 2005, DJ Center Records a ainsi signé en faveur de Direct Centrex un contrat de mandat de portabilité afin que Frontier Software procède à la résiliation des contrats existant auprès de France Télécom puis à la mise en oeuvre subséquente de la portabilité qui permet de changer d'opérateur en conservant ses numéros, selon les dispositions de l'article L 44 du code des postes et des communication électroniques.

Conformément à ce contrat Frontier Software devait procéder à la résiliation auprès de France Télécom des contrats correspondant à 14 numéros.

Les délais annoncés par Frontier Software dans son contrat étaient d'environ 4 semaines à compter de la réception du mandat de portabilité dûment rempli.

Plus de 8 semaines plus tard, DJ Center Records a signé avec une tierce société Azurtel, actuellement dénommée B3G, sur demande de Frontier Center, un nouveau mandat de portabilité.

Il est apparu ultérieurement que les lignes de DJ Center Records avaient été résiliées dans l'intervalle par France Télécom et que la portabilité recherchée avait échoué. DJ Center Records a ainsi été privée de ses numéros d'appels téléphoniques pendant plusieurs mois.

Le 19/02/2007, DJ Center Records a fait assigner Frontier Software Azurtel et France Télécom en réparation du préjudice subi.

Le 17 décembre 2009, aux termes du jugement dont appel, le tribunal de commerce de Paris a :

- condamné in solidum la société Frontier Software, la société anonyme B3G, venant aux droits de la société par actions simplifiée Azurtel et la société France Télécom à payer à la société DJ Center Records Records la somme de 60.000 € à titre de dommages et intérêts,

- condamné in solidum la société Frontier Software, la société anonyme B3G, venant aux droits de la société par actions simplifiée Azurtel et la société France Télécom à payer à la société DJ Center Records Records la somme

de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné in solidum la société Frontier Software, la société anonyme B3G, venant aux droits de la société par actions simplifiée Azurtel et la société France Télécom aux dépens.

Le 5 juillet 2010, le tribunal de commerce d'Evry a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Frontier Software et a nommé Maître [N] [M] en qualité d'administrateur et Maître [P] [B] en qualité de mandataire judiciaire.

Le 2 mai 2011, la société anonyme France Télécom a fait assigner en intervention forcée Maître [M] ès qualités et Maître [B] [P], ès qualités.

Le 12 septembre 2011 la société anonyme France Télécom a fait dénoncer ses conclusions du 5 septembre 2011 à Maître [M] [N], administrateur de la société Frontier Software, à Maître [B] [P], mandataire judiciaire de la société Frontier Software et à la société à responsabilité limitée Frontier Software.

Le 13 décembre 2011, la société B3G a par assignation en reprised'instance dénoncé ses conclusions du 6 juin 2011 à [N] [M] et M° [P] [U] es qualités.

Par ses dernières conclusions signifiées le 5 septembre 2011, la société anonyme France Télécom demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité,

statuant à nouveau,

à titre principal,

- dire qu'elle n'est en rien responsable de l'inexécution ou de la mauvaise exécution de leurs obligations réciproques par les sociétés intimées,

- dire que la résiliation du contrat d'abonnement téléphonique conclu entre elle et la société DJ Center Records a été effectuée à la demande du client,

en toute hypothèse,

- dire que la société DJ Center Records n'est pas recevable à demander sa condamnation sur le fondement d'une faute dans l'exécution du contrat d'abonnement téléphonique en raison du principe du non cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle,

en conséquence,

- dire irrecevables et mal fondées les prétentions de la société DJ Center Records en tant qu'elles sont dirigées contre elle,

à titre subsidiaire,

- dire que la société DJ Center Records ne justifie pas d'un lien de causalité pouvant relier ses éventuels préjudices à un agissement de sa part,

- dire qu'en toute hypothèse, la société DJ Center Records ne justifie pas de ses préjudices tant dans leur existence que dans leur quantum,

en conséquence,

- débouter la société DJ Center Records de l'intégralité de ses prétentions en tant qu'elles sont dirigées contre elle

à titre plus subsidiaire,

- ordonner toute mesure d'expertise qu'il plaira à la cour avec la mission habituelle en la matière,

- condamner la société DJ Center Records à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les intimés aux dépens de première instance et d'appel.

Par ses dernières conclusions signifiées le 3 février 2012, la société à responsabilité limitée DJ Center Records Records demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses branches (sauf s'agissant du préjudice matériel subi par elle) et en particulier sur le fait que la société France Télécom est responsable juridiquement du fait de l'avoir privée de téléphone pendant une durée de près de quatre mois,

en conséquence,

- débouter France Télécom de toutes ses demandes,

statuant à nouveau sur le préjudice matériel qu'elle a subi,

- dire que le lien de causalité entre l'absence de communications téléphoniques et la perte de chiffre d'affaires pendant la période de quatre mois concernée est établi,

- condamner en conséquence de manière conjointe et solidaire la société France Télécom et la société B3G (venant aux droits de la société Azurtel ) à la dédommager du préjudice matériel subi par elle à hauteur de cent cinq mille euros (105.000 €),

- condamner la société France Télécom à lui payer la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'appelante aux dépens.

Par ses conclusions signifiées le 6 juin 2011, la société anonyme B3G, venant aux droits de la société Azurtel, demande à la cour de :

- dire qu'elle n'est pas fautive dans l'exécution du mandat de portabilité,

en conséquence, à titre principal, infirmer le jugement en ce qu'il a retenu sa responsabilité,

à titre subsidiaire, infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à indemniser DJ Center Records des préjudices allégués,

- débouter la société DJ Center Records de ses demandes d'indemnisation de préjudice en ce qu'elle ne démontre pas le quantum de ses préjudices ni le lien de causalité avec la prétendue faute de sa part,

- condamner la société DJ Center Records à lui verser la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société DJ Center Records aux entiers dépens.

SUR CE

Considérant que la société anonyme France Télécom, appelante, visant les articles 1147 et 1382 du code civil, soutient que:

- elle n'est pas responsable de l'échec de la mise en oeuvre de la portabilité sortante de sa cliente,

- elle n'était pas partie aux contrats conclus entre la société DJ Center Records et la société Frontier Software d'une part et entre la société DJ Center Records et la société B3G d'autre part, elle n'a pas reçu les mandats de portabilité ; par application des dispositions des articles L44 et D-18 du code des postes et des communications électroniques, seul le nouvel opérateur a compétence pour lui adresser les demandes de portabilité de ses mandants, qui sont reçues contre un accusé de réception ; or ni la société Frontier Software ni la société B13G n'ont accompli leur mandat ; elle n'a reçu aucun mandat en provenance des opérateurs B3G et Frontier Software ; aucune des pièces communiquées ne peut être interprétée comme valant mandat de portabilité sortante,

- elle n'a pas résilié de son propre chef les lignes téléphoniques ; cette résiliation a été faite à la demande du client et n'est donc pas fautive ; la résiliation résulte de la demande directe de DJ Center Records auprès d'elle ; c'est le client qui a demandé la résiliation de ses numéros dont la tête de ligne, en dehors de son numéro de fax dont il demandait l'analogisation, étant informé que la fermeture de la tête de ligne numéris entraînait celle des autres numéros ; le client en outre n'a pas réagi à réception de la facture de clôture du c1ontrat d'abonnement téléphonique du 13 janvier 2006 or s'il n'avait pas souhaité la clôture effective du groupement de lignes, dont le n° de tête apparaissait clairement sur la facture, il aurait dû en demander immédiatement la réouverture,

- elle est donc étrangère aux contrats dont DJ Center Records demandait l'exécution et la réparation de l'inexécution, elle doit donc être mise hors de cause ; de plus en raison du principe de non cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, la société DJ Center Records ne peut se fonder sur le fait qu'elle aurait résilié le contrat d'abonnement téléphonique pour demander sa condamnation, DJ Center Records n'est pas recevable à demander sa condamnation sur le fondement d'une faute dans l'exécution de son contrat d'abonnement téléphonique ;

- DJ Center Records n'établit pas de lien de cause à effet entre ces fautes invoquées et une baisse de son chiffre d'affaires entraînant un préjudice matériel,

- DJ Center Records ne justifie pas davantage avoir subi un préjudice moral puisqu'elle n'est pas responsable de l'échec de la mise en oeuvre de la portabilité, aucun lien de causalité avec les dommages invoqués, dont le quantum n'est pas établi, n'existe à son encontre ; en outre la ligne a été rétablie dés le 4 avril 2006 et avant cette date les anciennes lignes de DJ Center Records étaient toujours actives ;

Considérant que la société à responsabilité limitée DJ Center Records Records, visant les articles 1147 et 1382 du code civil, réplique que :

- France Télécom a tout fait pour ne pas lui permettre de partir à la concurrence ; la responsabilité délictuelle de France Télécom, responsable du préjudice qu'elle a subi, doit être retenue ; France Télécom en clôturant les lignes, sans pour autant permettre la portabilité, a commis une faute la privant de téléphone pendant plusieurs mois,

- elle-même n'a jamais demandé à France Télécom cette clôture mais elle a informé France Télécom qu'elle allait recevoir de Direct Center un mandat de portabilité s'accompagnant d'une résiliation de la ligne,

- les pièces produites attestent que France Télécom a bien reçu dés décembre 2006, un mandat de portabilité et a clôturé la ligne en conséquence mais sans permettre pour autant à la portabilité de s'effectuer ; France Télécom a donc agi en violation des dispositions des l'article D 406-18 du code des postes et des communication électroniques qui prévoit que la portabilité doit être faite dans les 10 jours à réception par l'opérateur receveur de la demande de portabilité et par ailleurs que la demande de transfert d'une ligne n'implique en rien la résiliation de l'ensemble des lignes de l'abonné,

- sans téléphone, elle n'a pas eu d'autres options que d'accepter la solution de transfert de lignes très coûteuse que lui a proposée France Télécom et qui lui est revenue à la somme de 468 € (facture bimensuelle) x 24 = 11.232 €,

- la responsabilité contractuelle de B3G est engagée, elle partage la faute de Frontier Software dont elle est sous-traitante dans l'exécution du contrat de portabilité ; un second mandat a bien été signé par elle et envoyé à Azurtel mi janvier pour être transmis à France Télécom,

- une chute de son chiffre d'affaires est la conséquence directe de l'absence de téléphonie pendant plus de quatre mois (1er janvier au 31 avril 2006) du fait des défaillances de France Télécom et B3G ; dans un milieu comme celui de l'industrie musicale qui est le sien, la communication est primordiale, ne plus pouvoir être joint par téléphone limite énormément les rapports professionnels et provoque un effet catastrophique en termes d'image et de bonne conduite des affaires ; elle a en conséquence perdu 100.000 € de chiffre d'affaires sur la période en cause du fait de cette absence de téléphone ;

Considérant que la société anonyme B3G, venant aux droits de la société Azurtel, visant les articles 1134, 1147et 1382 du code civil, réplique que :

- elle reste une entité juridique autonome qui conserve sa propre personnalité morale, distincte de la société Completel, après un changement de contrôle, sans transmission de patrimoine ;

- le mandat conclu avec DJ Center Records est nul elle doit donc être mise hors de cause,

- ce n'est que le 15 février 2006 qu'elle a été mandatée aux fins de mettre en oeuvre la portabilité des numéros de DJ Center Records soit postérieurement à la demande de résiliation or suite à cette résiliation il lui était impossible de procéder à la portabilité des numéros de DJ Center Records,

- la société DJ Center Records savait qu'elle ne pouvait assurer ce mandat de portabilité après la résiliation des lignes ; la société DJ Center Records a donc agi au mépris des règles de bonne foi, de loyauté dans l'exécution des contrats et de coopération entre les partenaires, édictées par les articles 1134 du code civil et L134-4 du code de commerce ; la société DJ Center Records ne pouvait donc engager sa responsabilité sans se prévaloir de sa propre turpitude,

- DJ Center Records n'a pas qualité à agir contre elle sur le fondement contractuel, ne l'ayant pas mise en situation de pouvoir exécuter ses obligations,

- le contrat signé le 15 février 2006 est nul en l'absence de toute cause (articles 1108 et 1131 du code civil) puisqu'après la résiliation des lignes téléphoniques, la portabilité sollicitée ne pouvait aboutir,

- elle n'est pas sous-traitante de la société Frontier Software dans l'exécution du mandat de portabilité ; aucune preuve n'est rapportée d'un quelconque contrat de sous-traitance général ou de la transmission à son profit du mandat signé en 2005 par DJ Center Records auprès de Direct Centrex ; sa responsabilité sur le fondement d'un contrat de sous-traitance inexistant avec Frontier Software ne peut donc pas être engagée,

- c'est en raison d'une cause qui lui est étrangère, à savoir la résiliation des lignes téléphoniques de la société DJ Center Records, qu'elle n'a pas pu exécuter les obligations qui lui incombaient en vertu du contrat conclu le 15 février 2006 ; dés lors sa responsabilité ne peut être recherchée (article 1147 du code civil),

- elle était tenue d'une simple obligation de moyens consistant à effectuer toutes les démarches nécessaires auprès de France Télécom pour obtenir de cette dernière la possibilité de mettre en oeuvre la portablité des numéros de DJ Center Records ; DJ Center Records ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe aux termes de l'article 1137 du code civil, qu'elle ait commis une faute dans l'exercice de sa prestation subordonnée à la coopération de France Télécom,

- DJ Center Records n'a du reste subi aucun préjudice ; rien n'établit le lien de cause à effet entre les fautes supposées et la baisse du chiffre d'affaires invoquée par DJ Center Records qui en outre était parfaitement joignable par ses clients par d'autres moyens,

- l'existence même d'un préjudice moral et le quantum de sa réparation demandée par DJ Center Records ne sont pas démontrés ;une personne morale ne subit pas d'atteinte dans ses sentiments et rien n'établit une perte de chance née d'une prétendue détérioration de l'image et de la notoriété de DJ Center Records ;

Considérant qu'à la suite du déménagement de ses services dans de nouveaux locaux, la société DJ Center Records qui exploitait 14 lignes téléphoniques de la société FT a souhaité changer d'opérateur pour s'adresser au centre DIRECT CENTREX qui est le centre par lequel la société FRONTIER SERVICE propose un service de téléphonie sur internet VoIP, que ce centre proposait un service de portabilité qui permet de changer d'opérateur de boucle locale sans changer de numéros, cette portabilité étant effective environ quatre semaines à partir de la réception du mandat de portabilité dûment rempli, que le 5 décembre 2005 la société DJ Center Records a régularisé auprès de DIRECT CENTREX une demande de résiliation avec mandat de portabilité des numéros géographiques en renonçant à cinq d'entre eux soit les numéros 01 56 31 37 89 à 94 ;

Que selon ce mandat, DJ Center Records déclarait de bonne foi :

- demander la résiliation des contrats référencés et la mise en oeuvre de la portabilité,

- choisir l'opérateur Direct Centrex au lieu et place de son opérateur précédent et avoir pleine connaissance des conséquences de la résiliation de ses précédents contrats avec son précédent opérateur, à savoir la rupture du lien contractuel avec celui- ci et le fait que la fourniture des accès téléphoniques reste à la charge de Direct Centrex,

- avoir donné mandat à Direct Centrex pour effectuer en son nom et pour son compte toutes les démarches nécessaires auprès de son ancien opérateur de la boucle locale afin de procéder à la résiliation de ses accès téléphoniqes auprès de son opérateur précédent et de mettre en oeuvre la portabilité des numéros susvisés,

- être informé que dans l'hypothèse où la portabilité n'est pas mise en oeuvre, il demeure client de son opérateur précédent et demeure donc redevable de l'ensemble de ses obligations envers son opérateur précédent au titre des liens contractuels avec celui-ci,

- s'engager à adresser à Direct Centrex toute demande ou réclamation concernant l'exécution du précédent mandat ;

- que, selon message du 7 décembre 2005 dont copie à Direct Centrex, DJ Center Records demandait à France Télécom de rendre actif le portage du 01 56 21 37 88 sur la ligne de l'ancien occupant pour le 30 décembre 2005 et l'informait de la transmission prochaine par Direct Centrex de sa demande de résiliation avec portabilité des autres numéros à rendre effectif à cette même date, que dans les jours qui suivaient Direct Centrex informait DJ Center de ses diligences pour procéder à ces résiliations en faisant état d'un projet de lettre à adresser à France Télécom, que dans les semaines ultérieures Direct CENTREX s'inquiétait de l'absence de réponse de France Télécom en prétendant que cette dernière société multipliait les demandes de rectifications dans le but de prolonger la procédure tandis que le 10 février 2006 DJ Center Records informait Direct Centrex de la réception d'une facture de clôture du 10 janvier 2006 de France Télécom du numéro de tête de ligne sans portabilité en sorte que deux mois après la résiliation elle était privée sur toutes ses lignes te tout appel entrant ce qui ne pouvait qu affecter défavorablement son activité,

- que le 15 02 2006, DJ Center Records a conclu un nouveau mandat de résiliation avec portabilité portant sur les mêmes lignes et dans les mêmes termes avec un autre opérateur AZURTEL aux droits duquel se trouve B3G,

- que le 24 février 2006 France Télécom informait DJ Center Records de l'absence de réception d'une quelconque demande de portabilité sortante, sur la ligne 01 56 21 37 88 étant maintenue à l'ancienne adresse de DJ Center Records,

- que le 4 avril 2006 à la demande de DJ Center Records France Télécom a recrée les lignes avec reprise,

- que DJ Center Records justifiait d'une baisse de son chiffre d'affaires au premier semestre 2006, en prétendant la suppression de toute ligne entre le 1 er janvier 2006 et le 30 avril 2006 ce que conteste France Télécom au vu du rétablissement des lignes le 4 avril 2006 et de courriers des 23 janvier et 10 février 2006 de DJ Center Records attestant le fonctionnement à ces dates des lignes objet des résiliations avec portabilité ;

Considérant qu'il n'est pas contredit que conformément aux dispositions réglementaires du code des télécommunications, pour les mandats dont s'agit et les imprimés type de France Télécom, la procédure de portabilité est la suivante : la demande de conservation du numéro est adressée par l'abonné à l'opérateur receveur, en l'espèce Direct Centrex puis B3G et vaut demande de résiliation du contrat de l'abonné auprès de l'opérateur donneur, en l'espèce France Télécom; dans ce cadre l'abonné donne mandat à l'opérateur receveur pour effectuer les opérations de portage de son numéro et résilier le contrat auprès de l'opérateur donneur, l'abonné fournissant à l'opérateur receveur les informations nécessaires à sa demande ; la demande de résiliation avec portabilité est adressée directement par l'opérateur receveur à l'opérateur donneur, en l'espèce au guichet unique de l'entité de gestion des opérateurs ( EGO ) de France Télécom qui fournit un accusé de réception  ;

Considérant que Direct Centrex ne prouve par aucune pièce avoir, de fait, transmis les demandes de résiliation avec portabilité selon la procédure ci dessus décrite ce qui ne saurait résulter ni des mels échangés par ce dernier avec l'abonné, alors que France Télécom conteste avoir reçu une telle demande, que spécialement DJ Center Records ne produit ps les accusés de réception dont Direct Centrex est normalement en possession ;

Considérant qu'il résulte des documents de gestion de France Télécom que son interlocuteur était le représentant de DJ Center Records, que l'on ne saurait déduire de la facture de clôture de la tête de ligne adressée directement à DJ Center Records une demande de résiliation avec portabilité adressée par l'opérateur de receveur ;

Considérant que ne s'évince d'aucun autre document une demande de résiliation avec portabilité adressée par Direct Centrex à France Télécom selon la procédure précédemment décrite ; que par voie de conséquence, il ne peut être reproché à France Télécom un manquement à son obligation de conseil, lequel ne peut se rattacher à la seule lettre du 7 décembre 2005 par laquelle DJ Center Records annonçait une prochaine transmission par Direct Centrex d'une demande de résiliation avec portabilité dont DJ Center Records n'a pas établi la transmission effective ;

Considérant que devant le tribunal a retenu la responsabilité de la société Frontier qui exploite Direct Centrex et condamné cette dernière à payer la somme de 60 000€,que devant la cour la société DJ Center Records si elle demande la confirmation du jugement en toutes ses branches sauf sur le préjudice, n'a articulé aucun motif au soutien de la responsabilité de cette dernière, qu'elle n'a pas attrait en la cause les organes de la procédure collective, ni notifié les dernières conclusions qu'elle a prises, qu'elle ne justifie par les pièces communiquées d'aucune production de créance à cette procédure collective ou de demande de relevé de forclusion, qu'en cet état, la demande de DJ Center Records dirigée contre la société Frontier est irrecevable ;

Considérant que sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la nullité ou validité éventuelle du mandat donné à B3 G, DJ Center Records ne peut qu'être déboutée de toutes ses demandes dirigées contre cette dernière dès lors qu'à la date de ce mandat les lignes avaient déjà été résiliées sans portabilité par France Télécom ;

Considérant que la socité DJ Center Records est condamnée à payer à France Télécom,  la société Frontier et à la société B3G une somme de 3000 € chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement étant réformé sur l'application de cet article ;

Considérant que la société DJ Center Records est condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel, le jugement étant réformé en ses dispositions relatives aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement ;

Statuant à nouveau,

Dit irrecevables les demandes formées devant la cour par SARL DJ Center Records contre la société Frontier Software ;

Déboute la SARL DJ Center Records de toutes ses demandes ;

Condamne la SARL DJ Center Records à payer à la S.A France Télécom, la Société Frontier Software et à la SA B3G, chacune, une somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL DJ Center Records aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 10/06483
Date de la décision : 12/09/2012

Références :

Cour d'appel de Paris J1, arrêt n°10/06483 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-09-12;10.06483 ?
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