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05/09/2012 | FRANCE | N°11/12567

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 05 septembre 2012, 11/12567


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 5 SEPTEMBRE 2012



(n° 196, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/12567



Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Mai 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 09/073968





APPELANTES



Société FOREZIENNE D'ENTREPRISES ET DE TERRASSEMENTS

prise en la personne de ses représenta

nts légaux en la personne

ayant son siège [Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]



SAS VINCI CONSTRUCTION TERRASSEMENT

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège [Ad...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 5 SEPTEMBRE 2012

(n° 196, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/12567

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Mai 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 09/073968

APPELANTES

Société FOREZIENNE D'ENTREPRISES ET DE TERRASSEMENTS

prise en la personne de ses représentants légaux en la personne

ayant son siège [Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

SAS VINCI CONSTRUCTION TERRASSEMENT

prise en la personne de son représentant légal

ayant son siège [Adresse 3]

[Localité 5]

Représentés par Me Chantal-rodene BODIN CASALIS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0066

assistées de Maître Marie-Laurence DABBENE, avocate au barreau de Paris, toque : E269

INTIMEE

SAS CIMENTS CALCIA

prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège [Adresse 12]

[Adresse 12]

[Localité 4]

Représentée par la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU-JUMEL, avocats au barreau de PARIS, toque : K0111

assistée de Maître Alain FLEURY, plaidant pour la SELARL FLEURY MARES DELVOLVE ROUCHE, avocat au barreau de Paris, toque : P35

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 Mai 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Michel ZAVARO, Président

Madame Marie-José THEVENOT, Conseillère

Madame Dominique BEAUSSIER, Conseillère

qui en ont délibéré

Rapport fait par Madame Dominique BEAUSSIER conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mlle Cécilia GALANT

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-José THEVENOT, Conseillère signant aux lieu et place du Président empêché et par Mademoiselle Cécilia GALANT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

Par contrat du 11 juillet 2005, la SAS CIMENTS CALCIA, qui exploite une usine de production de ciment et pour les besoins de sa fabrication une carrière d'argile, a confié au groupement momentané d'entreprises composé de la SA GTM Construction Terrassement, mandataire du groupement, devenue VINCI Construction et de la SNC FOREZIENNE d'Entreprises et de Terrassement l'ensemble des études et travaux de découverte et de réaménagement de la carrière de [Localité 7] afin de permettre l'exploitation future de cette carrière, ainsi que la réalisation d'un ouvrage consistant en un talus drainé par réseau, pour un montant de 924.802,08 € HT.

La réception des travaux a eu lieu le 15 décembre 2005 avec des réserves qui ont été levées selon constat du 22 décembre 2005.

En raison de la survenue d'inondations, de coulées de boues et de fortes dégradations de la plate-forme et des talus malgré une première intervention en avril 2006, GTM a proposé la mise en place de dispositifs complémentaires pour un montant de 85.330 € HT.

Par ordonnance du 14 mars 2007, Monsieur [M] a été désigné en qualité d'expert ; La mission de l'expert a été étendue par ordonnance du 27 décembre 2007 ; L'expert a déposé son rapport le 2 juin 2009.

Saisi par la SAS CIMENTS CALCIA, le tribunal de commerce de Paris a par jugement du 27 mai 2011, retenant la responsabilité du groupement à hauteur des 3/4, condamné solidairement la SAS VINCI Construction Terrassement anciennement dénommée GTM Terrassement et la société FOREZIENNE d'Entreprises et de Terrassements à payer à la SAS CIMENTS CALCIA les sommes de 201.401,18 € au titre des travaux de réfection, 8.464,90 € à titre de frais divers, 13.626,50 € au titre des pénalités de retard, 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a débouté les parties du surplus de leurs demandes.

La SAS VINCI Construction Terrassement anciennement dénommée GTM Terrassement et la société FOREZIENNE d'Entreprises et de Terrassements ont relevé appel de cette décision et par conclusions du 22 novembre 2011, elles sollicitent son infirmation et demandent à la cour, au titre des travaux à hauteur de 272.534,90 € HT de laisser à la charge de la société CALCIA la somme de 200.000 € correspondant à des travaux que celle-ci aurait dû supporter en tout état de cause, de faire une plus juste appréciation du rôle de chacun sur la somme de 72.534,90 € HT, de laisser à la charge de CALCIA les sommes supplémentaires à l'exception des honoraires de la société ABH à hauteur de 4.500 € HT, de débouter CALCIA de sa demande de pénalités de retard ; Reconventionnellement, elles demandent la condamnation de CALCIA à leur payer 10.800 € HT au titre des frais d'études exposés outre 8.000 € au titre de ses frais irrépétibles.

Par conclusions du 28 février 2012, la SAS CIMENTS CALCIA forme appel incident sur les responsabilités et le quantum et sollicite la condamnation solidaire des sociétés VINCI Construction Terrassement et FOREZIENNE d'Entreprises et de Terrassements à lui payer 395.879 € HT en réparation de l'ensemble de ses frais et préjudices avec intérêts à compter de l'assignation du 9 novembre 2009 et capitalisation, outre 50.00 € au titre de ses frais irrépétibles.

SUR CE,

L'expert [M] a constaté l'existence d'une érosion progressive et irréversible des bords de la plate-forme avec attaque du caniveau ainsi qu'une désorganisation totale de l'enrochement en pied de talus avec une importante perte de fines entraînées dans le caniveau béton transversal et au-delà sur la voie de desserte SITA.

Il a attribué ces désordres à une absence de couverture végétale, au caractère superficiel de la couche constituée de matériaux fins aisément érodables, à l'importance des pentes tant en partie courante qu'en caniveau de raccordement des bassins versants, et aux effets du débit torrentiel sur l'enrochement partiellement bétonné en bas de pente ; Il a conclu que les travaux prévus et mis en oeuvre ne comportaient aucun dispositif de ralentissement de la vitesse d'écoulement de l'eau et ne répondaient pas, sous les conditions climatiques locales, à l'objectif fixé.

En cours d'expertise et pour remédier au désordre, la société CALCIA a passé commande à GTM le 5 juillet 2007 des travaux préconisés par ANTEA pour un montant de 272.534,90 € HT et destinés à réduire les vitesses d'écoulement et d'améliorer la résistance à l'érosion superficielle ; Ces travaux ont été réalisés et réceptionnés le 18 octobre 2008 avec effet rétroactif au 18 octobre 2007 avec des réserves qui ont été levées le 23 octobre 2008 à l'exception de l'engazonnement.

L'expert a chiffré le coût total des travaux et frais nécessaires à la somme de 287.834,90 € HT dont 277.534,90€ HT supportés par CALCIA et qu'il a proposé de partager en deux parts égales entre CALCIA et GTM en raison de la responsabilité respective des parties dans le sinistre.

La société CIMENTS CALCIA fonde ses demandes sur la présomption de responsabilité de plein droit de l'article 1792 du code civil et la responsabilité contractuelle en application de l'article 12 du contrat prévoyant une obligation de résultat avec garantie de 10 ans et de l'article 9-3 faisant peser sur le groupement un devoir de conseil spécifique renforcé lui faisant obligation de l'alerter sur ce qui était de nature, dans les documents contractuels à compromettre la pérennité de l'ouvrage ; Elle fait valoir qu'elle n'a pas de compétence notoire en matière de terrassement et d'écoulement des eaux et conteste la qualité de maître d'oeuvre que lui attribue le groupement.

Le groupement d'entreprises estime que les travaux commandés le 5 juillet 2007 sortent du champ contractuel initial et qu'ils auraient dû de toute façon être pris en charge par la société CALCIA ; Par ailleurs, s'il ne conclut ni à une immixtion du maître de l'ouvrage ni à une prise délibérée de risque de celui-ci, il soutient en revanche que CALCIA a exercé la maîtrise d'oeuvre de l'opération, tant au niveau de la conception en établissant le cahier des clauses techniques particulières (CCTP), les conditions générales d'intervention (CGI) et les plans, qu'au stade de l'exécution dés lors qu'elle s'est abstenue de désigner le maître d'oeuvre prévu au CCTP ; En conséquence, il estime qu'il ne pourrait lui être reproché qu'un manquement mineur à son devoir de conseil.

Les travaux confiés et réalisés par le groupement sont constitutifs d'un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil en ce qu'ils consistent en des travaux confortatifs de génie civil comportant l'incorporation de matériaux dans le sol par mise en place d'un réseau de drainage et de renforcements à différents endroits par des empierrements ou bétonnage ; L'article 2 du contrat précise d'ailleurs qu'il est régi par les articles 1779, 1792 du code civil.

Par ailleurs, il résulte du constat d'huissier du 4 décembre 2006 et du rapport d'expertise que les détériorations consistant en ravinements de talus, érosions et comblement de fossés, affouillement de la zone d'enrochements sont de nature à affecter la pérennité de l'ouvrage et à le rendre impropre à sa destination.

Les prestations contractuellement prévues comprenaient notamment la mise en place d'un réseau définitif de collecte et d'évacuation des eaux de ruissellement ;

Il est exact que la société CALCIA a établi le CCTP ainsi dénommé et les plans d'implantation et de réalisation des ouvrages qui constituent avec l'offre technique de GTM les pièces contractuelles définissant les travaux à réaliser et qui s'imposent au groupement ; Au regard des précisions techniques que le CCTP contient, la société CALCIA ne peut prétendre que ce document avait pour simple objectif d'énoncer ses besoins en raison de contraintes administratives, environnementales et géologiques ; Il en résulte que la société CALCIA a effectivement participé à la conception technique de l'ouvrage.

Néanmoins, le groupement ne saurait en tirer une exonération ni même une atténuation de responsabilité dès lors que d'une part les entreprises étaient au terme de l'article 9.3 du contrat tenues à un devoir spécifique et renforcé de conseil, d'autre part elles se sont engagées sur la base des travaux ainsi définis par les pièces contractuelles précitées et dans le cadre d'une obligation de résultat, à une garantie de l'ensemble des ouvrage 'contre tout mouvement anormal des talus et tout risque de dysfonctionnement du système de drainage pendant une période de 10 ans'.

Par ailleurs, il n'est pas démontré que CALCIA aurait assuré la maîtrise d'oeuvre d'exécution de l'opération.

En conséquence, non seulement les entreprises auraient dû alerter la société CALCIA sur l'insuffisance des prestations prévues relatives au réseau d'écoulement des eaux au regard des conditions climatiques locales et proposer la mise en place d'un dispositif de ralentissement de la vitesse d'écoulement de l'eau, mais encore elles sont tenues de prendre en charge, en raison de la clause de garantie, le coût du préjudice indemnisable qui regroupe tous les travaux nécessaires à la réparation et à la perfection de l'ouvrage.

La société CALCIA réclame en sus du coût des travaux à hauteur de 272.534,90 € HT, le remboursement de divers frais :

- factures ABH pour 8.750 € HT ; Cependant, il sera retenu 4.500 € HT correspondant aux études ABH demandées par l'expert, le lien du surplus avec la résolution du sinistre n'étant pas établi.

- frais d'huissier pour 1.080,62 € HT ; Il sera retenu 306,10 € HT correspondant au coût du constat du 4 décembre 2006 produit au soutien de la demande d'expertise ; La nécessité du constat du 13 février 2008, soit quelques jours après la visite de l'expert sur place, n'est pas démontrée.

- frais de nettoyage de la voie SITA pour 15.639,02 € HT ; Il s'agit de facturations adressées à la société SITA et il n'est pas démontré que CALCIA en ait supporté le coût.

- frais de dépose et de repose de la clôture de la carrière pour 5.212,50 € ; Il résulte des courriers échangés entre les parties les 27 juillet et 8 août 2008 que la dépose de la clôture était nécessaire pour procéder aux travaux réparatoires ; Les frais en résultant ainsi que pour la repose seront pris en compte.

La société CALCIA réclame en outre la somme de 92.662 € à titre de pénalités contractuelles de retard sur les travaux de reprise commandés le 5 juillet 2007.

La commande du 5 juillet 2007 indiquait une date de début des travaux au 16 juillet et une fin au 30 septembre 2007 ; Par ailleurs, l'article 5 des conditions générales prévoyait l'application de pénalités de retard de 1% du montant total de la commande par jour de retard calendaire.

Cependant, par courrier du 17 juillet, GTM répondait ne pas pouvoir valider la date de fin de travaux et indiquait que les travaux de terrassement ne seraient pas terminés avant le 30 septembre et la végétalisation pas avant la fin octobre ; CALCIA n'établit pas avoir réagi à ce courrier.

Les travaux ont été réceptionnés le 18 octobre 2007 ; Il ressort de la liste des réserves que l'ensemencement avait été réalisé les 9 et 10 octobre 2007.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il ne peut être considéré que les parties se sont entendues sur une date contractuelle de fin de travaux et il n'est pas établi que les entreprises n'aient pas respecté les délais auxquelles elles s'étaient engagées ; En conséquence, il n'y a pas lieu d'appliquer de pénalités de retard.

Les deux entreprises seront condamnées solidairement à payer à la société CALCIA la somme de 282.553,50 € HT avec intérêts à compter du jugement pour la somme de 209.207,28 € correspondant aux indemnités allouées par celui-ci, et de la présente décision pour le surplus, et ce en application de l'article 1153-1 du code de procédure civile.

Les deux entreprises seront déboutées de leur demande relative aux frais d'études ANTEA qu'elles ont avancés dés lors que celles-ci ont été faites pour définir les travaux réparatoires d'un sinistre dont elles sont responsables.

L'équité commande d'allouer à la société CALCIA la somme de 20.000 € au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel et de débouter les entreprises de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Réforme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Condamne solidairement la SAS VINCI Construction Terrassement anciennement dénommée GTM Terrassement et la société FOREZIENNE d'Entreprises et de Terrassements à payer à la SAS CIMENTS CALCIA 282.553,50 € HT avec intérêts à compter du 27 mai 2011 pour la somme de 209.207,28 € et de la présente décision pour le surplus, outre capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne solidairement la SAS VINCI Construction Terrassement anciennement dénommée GTM Terrassement et la société FOREZIENNE d'Entreprises et de Terrassements aux dépens de première instance et d'appel en ce inclus les frais d'expertise et à payer à la SAS CIMENTS CALCIA 20.000 € au titre de ses frais irrépétibles,

Dit que les dépens seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Conseiller signant aux lieu et place du Président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 11/12567
Date de la décision : 05/09/2012

Références :

Cour d'appel de Paris G5, arrêt n°11/12567 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-09-05;11.12567 ?
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