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28/06/2012 | FRANCE | N°11/09878

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 28 juin 2012, 11/09878


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRÊT DU 28 Juin 2012



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/09878



Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 20 Septembre 2011 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 11/01804





APPELANTE

Madame [N] [M]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Jérôme BORZAKIAN, avocat au barreau de P

ARIS, toque : G0242





INTIMEE

SAS CREMONINI RESTAURATION

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Nathalie MAIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0802 substituée par Me Clo...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRÊT DU 28 Juin 2012

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/09878

Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 20 Septembre 2011 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° 11/01804

APPELANTE

Madame [N] [M]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Jérôme BORZAKIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : G0242

INTIMEE

SAS CREMONINI RESTAURATION

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Nathalie MAIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0802 substituée par Me Clotilde LANTHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L007

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 mai 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Irène LEBÉ, Président

Madame Catherine BÉZIO, Conseiller

Madame Martine CANTAT, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Irène LEBÉ, Président

- signé par Madame Irène LEBÉ, Président et par Madame FOULON, Greffier présent lors du prononcé.

**********

Statuant sur l'appel formé par Madame [N] [M] à l'encontre d'une ordonnance de départage rendue le 20 septembre 2011 par le conseil de prud'hommes de Paris, en sa formation de référé, qui a dit n'y avoir lieu à référé dans l'affaire qui l'oppose à la SAS CREMONINI RESTAURATION, a débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné Madame [N] [M] aux dépens';

Vu les dernières écritures et observations orales à la barre, en date du 10 mai 2012, de Madame [N] [M] qui demande à la Cour de':

-constater la nullité du licenciement,

-condamner la SAS CREMONINI RESTAURATION à la réintégrer dans le poste de commerciale de bord sénior, sous astreinte de 1.500 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision,

-condamner la SAS CREMONINI RESTAURATION au paiement des sommes suivantes':

-2.000 euros à titre de provision en réparation du préjudice moral,

-22.401,36 euros à titre de provisions sur salaires jusqu'au jour de la décision à intervenir,

-2.240,13 euros au titre des congés payés y afférents

-à titre subsidiaire, en cas de non-réintégration, 22.401,36 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-3.000 euros à Madame [N] [M] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-ordonner la délivrance des bulletins de paye d'avril 2011 à avril 2012,'sous astreinte de 500 euros par jour de retard et par document';

Vu les dernières écritures et observations orales à la barre, en date du 10 mai 2012, de la SAS CREMONINI RESTAURATION qui demande à la Cour de':

-confirmer l'ordonnance,

-débouter Madame [N] [M] de l'ensemble de ses demandes,

-condamner Madame [N] [M] au paiement de la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

SUR CE, LA COUR

FAITS ET PROCÉDURE

Considérant que Madame [N] [M] a été engagée par la société RAIL RESTAURATION, à compter du 1er juillet 2003, en qualité de commerciale junior, par un contrat à durée indéterminée';

Que son a ensuite été transféré à la SAS CREMONINI RESTAURATION';

Considérant que Madame [N] [M] a, le 18 mars 2011, été convoquée à un entretien préalable et fait l'objet d'une mise à pied conservatoire';

Qu'elle a, le 31 mars 2011, été licenciée pour faute grave, au motif qu'elle avait commis des agissements fautifs répétés à bord de plusieurs trains, entre janvier et mars 2011 ;

Qu'elle a saisi, le 1er avril 2011, la commission de discipline prévue dans l'accord collectif de la Nouvelle restauration ferroviaire, pour contester son licenciement prononcé le 31 mars précédent';

Considérant que cette commission, par une décision du 27 avril 2011, a prononcé une mise à pied de 6 jours';

Que la SAS CREMONINI RESTAURATION a, le 29 avril 2011, fait, à Madame [N] [M], une proposition d'affectation dans un autre poste à laquelle celle-ci n'a pas répondu';

Que la SAS CREMONINI RESTAURATION a alors, par courrier du 10 mai 2011, maintenu la mesure de licenciement'pour faute grave ;

Considérant que Madame [N] [M] a saisi, le 26 mai 2011, le conseil de prud'hommes de Paris en référé, pour contester son licenciement et obtenir sa réintégration;

Que le conseil de prud'hommes a dit n'y avoir lieu à référé';

Que Madame [N] [M] a interjeté appel de la décision rendue';

MOTIVATION DE LA DÉCISION

Sur la procédure disciplinaire

Considérant que la convention collective Nouvelle restauration ferroviaire, du 4 septembre 1984, prévoit, en son article 19, qu'en cas de licenciement l'agent peut, sur sa demande, être entendu par la commission de discipline,'dont la mission est de formuler son avis écrit au chef d'entreprise sur le dossier de l'agent fautif et sur le niveau de la sanction qu'il paraît mériter'; que cet article précise qu'en possession de cet avis le chef d'entreprise décide de la sanction à prononcer et la notifie par écrit à l'agent fautif';

Que les bulletins de paye délivrés à Madame [N] [M] confirment que la convention collective applicable est celle de la Nouvelle restauration ferroviaire';

Considérant, par ailleurs, que l'accord collectif de la'Nouvelle restauration ferroviaire, en date du 21 décembre 2000, prévoit, en sa partie 5.5.1 intitulée Harmonisation du cadre social, que la «'Direction ne peut pas contester l'avis émis par la commission de discipline'», mais que, cependant, elle «'se réserve le droit de modifier le niveau de gravité du licenciement'»';

Que l'accord de fin de conflit, signé entre la Direction de la SAS CREMONINI RESTAURATION et les syndicats FO, SUD RAIL, CGT et CFDT, le 3 juin 2009, mentionne que «'la direction confirme que l'accord NRF 2000 sera appliqué à tous les salariés de l'activité TGV'» et qu'un «'accord d'entreprise spécifique à l'activité TGV reprendra cet engagement et sera soumis à signature'»';

Considérant, qu'ainsi, les dispositions de la convention collective Nouvelle restauration ferroviaire, du 4 septembre 1984, et celles de l'accord collectif de la Nouvelle restauration ferroviaire du 21 décembre 2000, sont, à l'évidence, applicables dans le cadre de la procédure disciplinaire diligentée à l'encontre de Madame [N] [M] » ;

Considérant que si la convention collective Nouvelle restauration ferroviaire, de 1984, prévoit que la mission de la commission de discipline est de formuler un avis écrit au chef d'entreprise et que celui-ci décide de la sanction à prononcer, l'accord collectif de la Nouvelle restauration ferroviaire,'de 2000, ne mentionne plus que l'employeur peut décider de la sanction à prononcer, mais prévoit, au contraire, que celui-ci ne peut pas contester l'avis émis par la commission de discipline et ne peut que modifier le niveau de gravité du licenciement';

Que l'accord collectif de la Nouvelle restauration ferroviaire,'de 2000, a donc réduit le pouvoir disciplinaire de l'employeur, en l'obligeant à respecter l'avis de la commission de discipline dans l'hypothèse où celle-ci se prononce pour une sanction autre que le licenciement, ce que ne prévoit pas la convention collective Nouvelle restauration ferroviaire, de 1984';

Que lorsque plusieurs dispositions conventionnelles sont applicables à un salarié il convient de lui appliquer celles qui lui sont les plus favorables';

Qu'en l'espèce, les dispositions conventionnelles les plus favorables'qui devaient s'appliquer à Madame [N] [M] étaient celles de l'accord collectif de la Nouvelle restauration ferroviaire'du 21 décembre 2000 ;

Considérant que la commission de discipline qui s'est réunie le 27 avril 2011 a, par une décision du même jour, prononcé une mise à pied de 6 jours';

Que cette décision est ainsi motivée':

«'Qu'en définitive seuls deux manquements dénoncés se trouvent indubitablement établis et ne sont au demeurant pas contestés, à savoir la consommation d'un pavé fromager et la retard de remise de recettes''

Que ces explications [celles de la salariée] n'aboutissent néanmoins pas à retirer aux faits reprochés leur caractère de gravité'

Que compte tenu de leur gravité il convient de sanctionner ces manquements en prononçant six jours de mise à pied »';

Que le dispositif de la décision est ainsi rédigé':

«'La commission de discipline, prononce à l'égard de Madame [N] [M] la sanction disciplinaire de six jours de mise à pied'»';

Considérant que la SAS CREMONINI RESTAURATION a, cependant, par courrier du 10 mai 2011, informé Madame [N] [M] qu'elle maintenait son licenciement pour faute grave, après lui avoir fait une proposition d'affectation dans un autre poste à laquelle celle-ci n'a pas répondu';

Qu'en application des dispositions conventionnelles précitées, de 2000, la SAS CREMONINI RESTAURATION ne pouvait remettre en cause la décision du 27 avril 2011 de la commission de discipline qui a «'prononcé'», non un licenciement, mais une mise à pied'de 6 jours';

Que le refus par la SAS CREMONINI RESTAURATION d'appliquer ces dispositions conventionnelles et de remplacer la sanction disciplinaire qu'elle avait prise le 31 mars 2011 par une mise à pied'de 6 jours prive le licenciement prononcé de cause réelle et sérieuse et constitue, incontestablement, un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser, conformément à l'article R.1455-6 du code du travail qui prévoit que la formation de référé peut prescrire les mesures qui s'imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite';

Considérant qu'aucun texte légal ne prévoit que le licenciement prononcé sans respect de la procédure disciplinaire devant être suivie peut faire l'objet d'une annulation';

Qu'il y a lieu, en conséquence, de débouter Madame [N] [M] de ses demandes tendant à voir déclarer nul son licenciement et à obtenir sa réintégration dans son poste de commerciale, ainsi que le paiement des salaires et des congés payés afférents à la période allant de la date du licenciement jusqu'au prononcé du présent arrêt ;

Considérant, par contre, que Madame [N] [M], qui a été licenciée sans cause réelle et sérieuse, alors qu'elle avait une ancienneté de 7 ans et 9 mois, peut solliciter, à titre provisionnel, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail, ainsi qu'à un rappel de salaire et de congés payés afférents à la période de la mise à pied conservatoire';

Considérant que, compte tenu de sa rémunération et de son ancienneté, il y a lieu de condamner la SAS CREMONINI RESTAURATION à lui verser la somme provisionnelle de 22.400 euros à valoir sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant, par ailleurs, que Madame [N] [M] a été licenciée le 31 mars 2011 après avoir fait l'objet, depuis le 18 mars 2011, d'une mise à pied conservatoire d'une durée de 12 jours';

Que le bulletin de paye du mois d'avril 2011 fait apparaître que, pour les 12 jours de mise à pied, l'employeur a déduit une somme de 582,79 euros';

Que, compte tenu des 6 jours de mise à pied disciplinaire par lesquels l'employeur aurait dû sanctionner Madame [N] [M], il y a lieu de condamner la SAS CREMONINI RESTAURATION à lui verser les sommes provisionnelles de 291,40 euros à titre de rappel de salaire pour 6 jours de mise à pied conservatoire'et de 29,14 euros au titre des congés payés y afférents ;

Considérant qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance sur ces différents points ;

Sur les dommages et intérêts pour préjudice moral

Considérant que Madame [N] [M] demande également des dommages et intérêts pour préjudice moral';

Que cette seconde demande de dommages et intérêts, qui a également pour objet d'indemniser le préjudice résultant du licenciement, ne relève pas de la compétence du juge de référés';

Qu'il y a lieu de débouter Madame [N] [M] de sa demande'et de confirmer l'ordonnance sur ce point ;

Sur la remise des bulletins de paye conformes

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de condamner la SAS CREMONINI RESTAURATION à remettre à Madame [N] [M] un bulletin de paye conforme à la présente décision, mais sans astreinte, laquelle n'apparaît pas justifiée';

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Considérant qu'il y a lieu de condamner la SAS CREMONINI RESTAURATION, qui succombe en ses prétentions, au paiement à Madame [N] [M] de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

Considérant qu'il y a également lieu de condamner la SAS CREMONINI RESTAURATION aux dépens de première instance et d'appel';

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance, sauf en ce qu'elle a débouté Madame [N] [M] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,

Statuant à nouveau pour le surplus,

Condamne la SAS CREMONINI RESTAURATION au paiement à Madame [N] [M] des sommes provisionnelles suivantes':

-22.400 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-291,40 à titre de rappel de salaire pour 6 jours de mise à pied conservatoire,

-29,14 euros au titre des congés payés y afférents,

Ordonne à la SAS CREMONINI RESTAURATION de remettre à'Madame [N] [M] un bulletin de paye conforme à la présente décision, sans astreinte,

Condamne la SAS CREMONINI RESTAURATION au paiement à Madame [N] [M] de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes les autres demandes,

Condamne la SAS CREMONINI RESTAURATION aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 11/09878
Date de la décision : 28/06/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°11/09878 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-06-28;11.09878 ?
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