RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRÊT DU 27 JUIN 2012
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/06043
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Décembre 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section RG n° 08/00735
APPELANTE
S.A BANQUE NEUFLIZE OBC venant aux droits de la SA NEUFLIZE OBC ENTREPRISES
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Nicole TIBERI, avocat au barreau de PARIS, toque : A 369
INTIMEES
Madame [U] [P]
[Adresse 3]
[Localité 6]
représentée par Me Michel HENRY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0099
SA BANQUE NEUFLIZE OBC
[Adresse 2]
[Localité 4]
Monsieur [V] [X] ès qualités de liquidateur amiable de la SOCIÉTÉ D'EPARGNE DES EMPLOYES DE LA BANQUE NEUFLIZE
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Nicole TIBERI, avocat au barreau de PARIS, toque : A 369
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 06 Mars 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Elisabeth PANTHOU-RENARD, Présidente
Madame Michèle MARTINEZ, Conseillère
Monsieur Guy POILÂNE, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Melle Claire CHESNEAU, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Madame Elisabeth PANTHOU-RENARD, Présidente et par Mademoiselle Claire CHESNEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA COUR,
Statuant sur l'appel formé le 30 juin 2009 par la BANQUE NEUFLIZE OBC ENTREPRISES du jugement rendu le 18 décembre 2008 par le juge départiteur du conseil de prud'hommes de PARIS - section encadrement - et à elle notifiée le 8 juin 2009 qui l'a condamnée, avec exécution provisoire, à payer à Madame [P] la somme de 9 000 euros à titre de dommages et intérêts compensatoires de l'exclusion du bénéfice des versement de la société d'Epargne des Employés de la Banque NEUFLIZE ainsi que celle de 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions d'appel du 6 mars 2012 au soutien de ses observations orales à l'audience de de la BANQUE NEUFLIZE OBC venant aux droits de la société NEUFLIZE OBC ENTREPRISES et d'appel incident de Monsieur [X] ès qualités de liquidateur amiable de la société d'Epargne des Employés de la banque NEUFLIZE, qui demandent à la cour de déclarer recevables leur appel, de débouter l'intimée de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions d'appel incident du 6 mars 2012 au soutien de ses observations orales à l'audience de Madame [P] qui demande à la cour de déclarer irrecevable l'appel incident de Monsieur [X] et infirmant partiellement le jugement déféré, de condamner la BANQUE NEUFLIZE OBC à lui payer la somme de 13 283 euros à titre de dommages et intérêts compensatoires de l'exclusion du bénéfice des versements de la Société d'Epargne des Employés de la Banque NEUFLIZE OBC, ainsi que celle de 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Sur l'appel incident de Madame [P]
Attendu que dans la présente instance l'appel de la Société NEUFLIZE OBC ENTREPRISES a été notifié dans le délai d'un mois ; que cet appel est recevable et partant de même l'appel incident, ce dont sont convenues les parties à l'audience ;
Sur l'appel incident de Monsieur [X]
Attendu que la Société d'Epargne des Employés de la Banque NEUFLIZE a fait l'objet d'une liquidation clôturée le 20 juin 2006 puis a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 1er août 2006 ;
Que par suite l'appel incident de Monsieur [X], déchargé de son mandat de liquidateur de la Société d'Epargne des Employés de la Banque NEUFLIZE le 20 juin 2006 au nom d'une société n'ayant plus la personnalité juridique est irrecevable pour défaut de capacité à agir ;
Que les moyens des appelants au titre d'un intérêt à agir sont par voie de conséquence inopérants ;
Sur la créance indemnitaire de l'intimée
Attendu que le 15 novembre 1952 était créée la Société d'Epargne des Employés de la Banque NEUFLIZE SCHLUMBERGER MALLET - NSM par cette banque et son comité d'entreprise, avec pour objet la création et le fonctionnement de comptes d'épargne au profit intégral des membres fondateurs et participants de la société constituée ;
Que les salariés de la banque devaient être membres participants de cette dernière à condition d'y avoir adhéré et de bénéficier au 31 décembre de chaque année d'une ancienneté d'une année ;
Que la qualité de membre de la Société d'Epargne ouvrait droit à la perception annuelle de dividendes jusqu'au départ des effectifs de la banque pour une cause autre que la mise à la retraite ou l'incapacité ;
Qu'en 1999 après plusieurs autres fusions, la banque NSM et la banque DEMECHY fusionnaient pour devenir la banque de NEUFLIZE SCHLUMBERGER MALLET DEMECHY - NSMD - ;
Que par courrier du 6 novembre 2003 la banque NSMD informait certains de ses salariés, dont l'intimée et que dans le cadre de la création de la banque NSM Entreprises par apport partiel d'actifs à un nouvel établissement bancaire de la branche d'activité «entreprises» actuellement gérée par le département NSM Entreprises de la banque NSMD, les contrats de travail des interéssés avec la Banque NSMD se poursuivraient avec la banque NSM Entreprises à compter du 22 novembre », conformément aux dispositions de l'article L122-12 du code du travail ;
Que ce courrier précisait que ce transfert porterait sur toutes les clauses du contrat des salariés concernés constituant les éléments de leur statut individuel et notamment, leur classification et leur rémunération ainsi que leur ancienneté, mais que «le statut collectif de la Banque NSM Entreprises leur serait applicable au lieu et place de celui de la banque NSM» ; que par une note les salariés ainsi transférés à la filiale NSM Entreprises étaient informés concernant «les dividendes de la Société d'Epargne de la Banque NSM» qu'ils bénéficieraient d'un mode de compensation sous la forme d'une prime annuelle brute de 708,60 euros, soit mensuellement 59,05 euros», étant précisé que cette prime serait «acquise définitivement même en cas de retour éventuel au sein de la Banque NSMD» ;
Qu'à la suite de la distribution le 23 décembre 2005 par le Société d'Epargne aux salariés de la Société NSMD de plus values générées par le remboursement d'un emprunt obligataire consenti par la Banque à la première, à hauteur de 4 535 euros à chaque salarié d'une part, et du versement le 21 juin 2006 à ces mêmes salariés de la somme de 8 748,19 euros chacun au titre de la distribution du solde positif provenant de la liquidation de la Société d'Epargne suite à délibération de son assemblée générale du 25 avril 2006 d'autre part, l'intimée avec ses collègues transférés réclamait en octobre 2007 à la société NSMD devenue le 1er août 2006 la BANQUE NEUFLIZE OBC et à la société NSM Entreprises devenue la BANQUE NEUFLIZE OBC ENTREPRISES le paiement des mêmes sommes que celles versées aux salariés restés au service de la première sous déduction le cas échéant de la prime unilatéralement octroyée, au motif que «le bénéfice de la Société d'Epargne était un élément de sa relation de travail qui ne pouvait être modifié à l'occasion du transfert de celle-ci au sein de la nouvelle entité» ;
Que la BANQUE NEUFLIZE OBC ayant réfuté cette position, les salariés transférés dont l'intimée saisissaient le 18 janvier 2008, aux fins d'obtenir la condamnation de la société NEUFLIZE OBC ENTREPRISES au paiement à chacun d'eux de la somme de 13 283 euros à titre de dommages et intérêts compensatoires de l'exclusion du bénéfice des versements de la Société d'Epargne des Employés de la Banque NEUFLIZE, le conseil de prud'hommes de PARIS, lequel prononçait le jugement dont appel ;
Que le 19 octobre 2009, la BANQUE NEUFLIZE OBC et la BANQUE NEUFLIZE OBC ENTREPRISES fusionnaient sous le nom de la première ;
Attendu sur le moyen d'appel tiré du contrat de société liant les membres de la Société d'Epargne et du contrat d'adhésion des salariés par la société BANQUE NEUFLIZE OBC, intimée du fait de la fusion précitée, qu'il n'est pas contesté que Madame [P] a adhéré à la société d'Epargne avant la notification de son transfert à la société NSM Entreprises ;
Qu'elle était donc statutairement membre participant de cette Société d'Epargne ;
Que l'intéressée n'a jamais retiré son adhésion ;
Qu'elle n'a pas signé d'avenant pour sortir de la Société d'Epargne ;
Que la modification le 22 juin 2004, après son transfert, des statuts de la Société d'Epargne, modification selon laquelle la qualité de membre participant concerne les personnes recevant directement de la banque NSMD un salaire en contrepartie d'un travail permanent effectué exclusivement au profit de cette banque ou de ses filiales dans lesquelles elles seraient détachées par la banque ne lui est pas opposable, dès lors que les salariés transférés n'ont pas été appelés à délibérer sur cette modification ;
Que le caractère contractuel tiré de l'adhésion de la salariée a perduré du fait de l'absence de dénonciation par l'intéressée de son adhésion ;
Que pour autant, contrairement à ce que soutient la société appelante, le caractère contractuel du lien entre la Société d'Epargne et le salarié adhérent n'exclut pas le caractère collectif du droit d'adhésion reconnu à l'ensemble du personnel de la banque qui a constitué cette société au bénéfice de ce dernier ;
Que ce caractère a été avancé expressément par la Banque elle-même en octobre 2007 dans ses courriers de réfutation aux demandes de chacun des salariés transférés, en ces termes :
«contrairement à ce que vous indiquez dans votre courrier, le transfert de votre contrat de travail n'entraînait pas le transfert des droits collectifs, cet état de fait vous ayant d'ailleurs été à cette occasion précisé dans le cadre de votre courrier de transfert puisqu'il y a été clairement précisé que vous bénéficiez à compter du 22 novembre 2003 du statut collectif applicable au sein de la NSME votre nouvel employeur.»
Que le droit d'adhérer à la Société d'Epargne créée par l'employeur constitue en conséquence une norme d'entreprise ;
Attendu sur le moyen d'appel tiré de l'article L 1224-1 du code du travail (ancien al.2 de l'article L. 122-12) au motif de l'absence de transfert de cette norme à caractère collectif, qu'il s'évince en l'espèce des éléments de fait que le transfert de l'activité «entreprises» de la Banque NSMD à la Banque NSM Entreprises décidé en novembre 2003 ne satisfait pas aux conditions d'un transfert de droit des contrats de travail résultant de cet article comme de la directive européenne du 12 mars 2001 ;
Qu'aucun élément des dossiers et des débats ne démontre le transfert d'une entité économique autonome ayant conservé son identité et poursuivi son activité avec des moyens propres ;
Que l'appelante n'oppose en effet que l'existence de deux entités juridiques distinctes alors que l'intimée fait valoir, pièces à l'appui, le fait qu'ont été constitués «des groupes mixtes réunis physiquement» pour la clientèle des particuliers dite «privée» comme pour la clientèle des entreprises, que les salariés affectés aux deux activités travaillaient sous la direction de la même hiérarchie, avec l'appui des mêmes services, selon une même organisation, avec les mêmes objectifs «groupe», avec une même évolution des objectifs collectifs de l'entreprise regroupant les deux activités, que les deux sociétés BANQUE NEUFLIZE OBC et BANQUE NEUFLIZE OBC ENTREPRISES ont fusionné à effet du 1er octobre 2009 sans donner lieu à aucune réorganisation ;
Qu'il s'évince de ces éléments que si la rémunération de la salariée était versée par la société filiale créée en 2003, l'intéressée est resté sous la subordination commune des deux sociétés mère et filiale pour poursuivre une même activité ;
Qu'en conséquence, le moyen d'appel selon lequel par l'effet de la création d'une filiale à laquelle l'intimée aurait été de droit transférée, celle-ci aurait perdu la qualité de membre participant de la Société d'Epargne, nonobstant l'absence de retrait de son adhésion à cette dernière, n'est pas fondé;
Attendu sur le moyen d'appel tiré de l'absence de préjudice, que la BANQUE NEUFLIZE OBC fait valoir que l'intimée a attendu plus de quatre ans pour réclamer une indemnisation alors qu'en 2004 elle ne percevait plus de versements de la Société d'Epargne du fait de sa radiation des effectifs de la BANQUE NEUFLIZE OBC et de la liquidation de la Société d'Epargne, que l'intéressée a déjà perçu en dédommagement un montant de 708,60 euros par an pendant toute la durée de son activité dans l'entreprise, que les sommes perçues dépassent déjà le montant de la répartition du remboursement de l'emprunt obligatoire par la Société d'Epargne, que cette indemnité intégrée dans le salaire entre dans l'assiette de calcul de la pension retraite de l'intéressée et de toute autre indemnité calculée par référence au salaire ;
Que cependant la radiation d'office de la salariée, sans avenant contractuel, de la Société d'Epargne lui a occasionné un préjudice excédant la compensation invoquée, dont il n'est pas démontré de surcroît qu'elle couvre l'ensemble des dividendes distribués aux salariés transférés ;
Que le préjudice subi par l'intimée est certain dès lors que celle-ci a été privée du remboursement de l'emprunt obligatoire émis par la banque et de la répartition de l'actif de liquidation de la Société d'Epargne ;
Qu'il est distinct de celui venant compenser la radiation injustifiée opérée et son montant justifié ;
Attendu en conséquence de l'ensemble des motifs qui précèdent que l'appel n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
Déclare recevable l'appel du 30 juin 2009 par la société BANQUE NEUFLIZE OBC ENTREPRISES aux droits de laquelle vient la société BANQUE NEUFLIZE OBC ainsi que l'appel incident de Madame [P],
Déclare irrecevable l'appel incident de Monsieur [V] [X] ès qualités de liquidateur amiable de la Société d'Epargne des Salariés de la Banque de NEUFLIZE,
Infirme le jugement déféré et condamne la société BANQUE NEUFLIZE OBC à payer, avec intérêts de droit, à Madame [P] la somme de 13 283 euros à titre de dommages et intérêts venant en compensation de l'exclusion du bénéfice des versements de la Société d'Epargne des Employés de la banque NEUFLIZE,
Condamne la société BANQUE NEUFLIZE OBC aux dépens,
Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile, la condamne à payer à Madame [P] la somme de 600 euros au titre de ses frais de première instance et en cause d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE