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31/05/2012 | FRANCE | N°10/08112

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 31 mai 2012, 10/08112


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 31 Mai 2012

(n° 6 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/08112



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Juin 2010 par le conseil de prud'hommes de Bobigny RG n° 08/02689





APPELANTE

Madame [V] [I]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Dahbia MESBAHI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0706





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INTIMEE

Association HOTEL SOCIAL 93

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Christophe PETIT, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS, toque : PB134





COMPOSITION DE LA COUR :



En...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 31 Mai 2012

(n° 6 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/08112

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Juin 2010 par le conseil de prud'hommes de Bobigny RG n° 08/02689

APPELANTE

Madame [V] [I]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Dahbia MESBAHI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0706

INTIMEE

Association HOTEL SOCIAL 93

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Christophe PETIT, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS, toque : PB134

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Avril 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne DESMURE, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Renaud BLANQUART, Président

Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, Conseillère

Madame Anne DESMURE, Conseillère

Greffier : Monsieur Franck TASSET, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Renaud BLANQUART, Président et par Monsieur Franck TASSET, Greffier , Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [I] a été engagée par l'association Hôtel social 93, à compter du 21 mars 2005, en qualité d'animatrice socio-éducatif au coefficient 381.

A compter du 1er avril 2007, elle a occupé un emploi de conseiller socio-éducatif, au coefficient 408.

Les parties s'accordent à reconnaître qu'au dernier état de la relation contractuelle, la rémunération mensuelle brute de Mme [I] s'élevait à 2 036,61 euros.

La convention collective applicable était celle des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif.

Le 22 février 2008, l'employeur a convoqué Mme [I] à un entretien préalable à une mesure de licenciement économique qui s'est tenu le 5 mars 2008.

Le 17 mars suivant, Mme [I] a accepté la convention de reclassement personnalisée qui lui avait été proposée par l'association.

Le 11 juin 2008, Mme [I] a saisi le Conseil de prud'hommes de Bobigny d'une contestation de son licenciement.

Par jugement du 8 juin 2010, le Conseil de prud'hommes a débouté Mme [I] de ses demandes.

Régulièrement appelante, Mme [I] demande à la Cour d'infirmer ce jugement et, statuant à nouveau, de condamner l'association Hôtel social 93 à lui verser la somme de 3 054,92 euros à titre de complément d'indemnité de licenciement ainsi que celle de 30 549,16 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, ou, subsidiairement la même somme de 30 549,16 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des critères d'ordre de licenciement. Mme [I] réclame en outre 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 de Code de procédure civile.

Intimée, l'association Hôtel social 93 requiert la Cour de confirmer le jugement déféré et, y ajoutant, mettre à la charge de Mme [I] une indemnité de 2 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

A titre subsidiaire, elle sollicite que le montant de l'indemnité allouée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse n'excède pas six mois de salaire, et, s'agissant des dommages-intérêts pour inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements, que l'indemnité allouée soit ramenée à de plus justes proportions.

Pour un complet exposé des faits, de la procédure et des prétentions, la Cour se réfère expressément aux écritures que les parties ont déposées et développées oralement à l'audience du 30 mars 2012.

MOTIFS:

Sur la demande de complément d'indemnité de licenciement:

Considérant que Mme [I] fait grief au premier juge d'avoir, suivant en cela l'argumentation de l'association, calculé l'indemnité conventionnelle de licenciement à elle due sans tenir compte de la clause de reprise d'ancienneté prévue au contrat de travail;

Que, de son côté, pour prétendre à la confirmation du jugement, l'association fait valoir que le contrat de travail ne prévoit pas que la reprise d'ancienneté de 3 ans figurant au contrat sera prise en compte pour le calcul de l'indemnité de licenciement, que, de jurisprudence constante, le point de départ de l'ancienneté pour le calcul de l'indemnité de licenciement est la date de conclusion du contrat de travail rompu, et que si la Cour devait considérer que la reprise d'ancienneté devait être prise en compte, il conviendrait d'analyser l'indemnité de licenciement fixée par une clause contractuelle, comme, présentant la nature d'une clause pénale susceptible de modération et de ramener son montant à la somme de 3 054,92 euros déjà perçue par Mme [I];

Mais considérant que le contrat de travail qui liait les parties prévoyait une reprise d'ancienneté de 3 ans, laquelle, à défaut de restriction expresse, concernait l'ensemble des droits liés à l'ancienneté; que Mme [I] demande, par conséquent, légitimement qu'il soit tenu compte de l'ancienneté convenue avec l'employeur dans son contrat de travail pour évaluer l'indemnité conventionnelle de licenciement; que, contrairement à ce que soutient l'association, cette indemnité n'a pas le caractère d'une clause pénale puisqu'elle n'est pas prévue par le contrat de travail, ce dont il suit qu'elle ne peut être réduite par le juge;

Considérant, par conséquent, que le jugement déféré sera infirmé et la prétention de Mme [I], dont le montant chiffré ne suscite pas de débat entre les parties et est justifié, sera accueillie;

Sur la rupture:

Considérant que l'adhésion de Mme [I] à une convention de reclassement personnalisé ne l'a pas privée de la possibilité de contester le motif économique de la rupture qui est réputée intervenue d'un commun accord; que ce point n'est pas discuté;

Considérant que Mme [I] soutient, en revanche, que son adhésion à une convention de reclassement personnalisé n'a été d'aucune incidence sur l'obligation à laquelle l'employeur était tenu d'énoncer la cause économique et sa conséquence précise sur son emploi ou son contrat de travail, dans la lettre de notification du licenciement par lettre recommandée avec accusé de réception, que l'association n'a pas respecté cette obligation, que le courrier du 8 février 2008, dont se prévaut l'intimée, ne comporte pas l'énonciation des motifs économiques à l'origine de la rupture;

Que pour combattre cette prétention, l'association fait valoir que l'adhésion de la salariée à une convention de reclassement personnalisé l'a dispensée des autres étapes de la procédure de licenciement, qu'elle n'était donc pas tenue de l'envoi d'une lettre de licenciement, qu'il suffit que la cause économique ait préexisté et qu'elle l'ait fait connaître à sa salariée par un document écrit, qu'elle a déféré à cette obligation par l'envoi du courrier du 8 février 2008, que la rupture est dés lors régulière;

Considérant que Mme [I] ne peut être suivie lorsqu'elle soutient que son adhésion à une convention de reclassement personnalisé ne dispensait pas l'employeur de lui notifier par la voie recommandée une lettre de licenciement motivée;

Considérant, néanmoins, que la rupture du contrat de travail résultant de l'acceptation par le salarié d'une convention de reclassement personnalisé doit avoir une cause économique réelle et sérieuse, dont l'appréciation ne peut résulter que des motifs énoncés par l'employeur dans un document écrit et que le juge doit apprécier la cause économique de la rupture au regard des motifs énoncés par l'employeur dans ce document écrit;

Considérant qu'il est, en l'espèce, constant que la lettre adressée le 8 février 2008 par l'association à Mme [I] constitue l'unique écrit par lequel l'employeur a informé sa salariée des motifs du licenciement économique;

Considérant que cette correspondance est ainsi libellée:

'La convention de partenariat Interlogement 93/Hôtel social 93 est en place depuis début novembre pour 3 mois. Le bilan a été dressé à fin janvier et notre partenaire n'a pas souhaité renouveler, jugeant les résultats atteints 'insuffisants, voire insatisfaisants, l'esprit et l'ambiance lourde et suspicieuse'.

Nous nous retournons vers la tutelle (DDASS) pour étudier les suites à donner et envisager le devenir du service.

Nous souhaitons connaître vos intentions, vos souhaits quant à un éventuel reclassement dans l'association (même type d'emploi, même qualification) si la question venait à se poser.'

Considérant que, de son contenu, il résulte que cet écrit ne porte à la connaissance de Mme [I], ni la cause économique de la rupture, ni son incidence sur son emploi ou son contrat de travail; que c'est d'ailleurs expressément 'si la question (d'une cause économique de rupture) venait à se poser' que l'employeur souhaite 'connaître les intentions' de sa salariée; que les pièces versées et les explications des parties établissent au demeurant que c'est en définitive, non pas la fin du partenariat avec Interlogement, mais un déficit comptable et fiscal qui n'a pas été repris par l'autorité de tutelle après cette fin de partenariat, qui a été la cause économique de la rupture, cette situation ayant conduit à la suppression du service ARH dans lequel Mme [I] était affectée;

Considérant qu'il résulte, en conséquence, de ce qui précède que Mme [I] soutient exactement qu'aucun écrit n'a porté à sa connaissance la cause économique de la rupture et que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse; que le jugement sera, donc, infirmé;

Considérant que l'association employait plus de dix salariés lors de la rupture et l'ancienneté de Mme [I] excédait deux ans;

Considérant que, joint au fait que Mme [I] a retrouvé un emploi dix mois après la rupture, la Cour estime que l'entier préjudice subi par Mme [I] du fait de la rupture, dont le préjudice moral, sera réparé par l'allocation de la somme de 12 219,66 euros sur le fondement de l'article 1235-3 du code du travail;

Considérant que l'association sera condamnée à rembourser aux organismes concernés, parties au litige par l'effet de la loi, les indemnités de chômage versées à Mme [I], dans la limite de six mois;

PAR CES MOTIFS:

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau et y ajoutant:

Dit que le licenciement de MME [I] était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne, en conséquence, L'ASSOCIATION HÔTEL SOCIAL 93 à payer à MME [I] la somme de 12 219,66 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne également L'ASSOCIATION HÔTEL SOCIAL 93 à verser à MME [I] 3 054,92 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement,

Ordonne d'office à L'ASSOCIATION HÔTEL SOCIAL 93 de rembourser aux organismes concernés, parties au litige par l'effet de la loi, les indemnités de chômage versées à MME [I], dans la limite de six mois;

Vu l'article 700 du Code de procédure civile:

Condamne L'ASSOCIATION HÔTEL SOCIAL 93 à payer à MME [I] une indemnité de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et rejette sa prétention présentée sur le même fondement juridique,

Condamne L'ASSOCIATION HÔTEL SOCIAL 93 aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 10/08112
Date de la décision : 31/05/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°10/08112 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-31;10.08112 ?
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